• Aucun résultat trouvé

Etablissement et prestations de services

L Libre circulation des capitaux et des paiements

2. Etablissement et prestations de services

7 7. Après la délimitation faite entre les paiements transfrontières et la libre circulation des capitaux, le rôle des autres libertés de circulation doit également être examiné. La fourniture d'un service de paiement transfrontière par une institution financière au sein de l'Union peut relever comme d'autres services bancaires de la libre prestation de services protégée par les art. 59 ss du traité CE, de même que ladite institution financière peut se prévaloir des règles primaires sur la liberté d'établissement (art. 52 ss du traité CE) lorsqu'elle s'installe de manière permanente dans un autre Etat que le sien pour prester de tels servicesl97.

a. Le rôle de l'intérêt général en relation avec la deuxième directive bancaire

7 8. Dans le cadre de l'achèvement du marché intérieur, il restait encore à régler les modalités de la liberté d'établissement des établissements de crédit dans la Communauté et celle de leur liberté de prester des services dans les différents Etats membres. En adoptant en 1989 la deuxième directive de coordination bancaire 89/646/CEE198, qui faisait suite à une première directive de coordination de 1977199 et qui a été complétée par d'autres textes satellites indispensables200, le Conseil a permis de réaliser un marché unique des services

197 198

199 200

Commission [UE], intérêt général (Communication interprétative), p. 9 s.

Deuxième directive du Conseil du 15 décembre 1989 visant à la coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et son exercice, et modifiant la directive 77/780/CEE, in:

JOCE L 386 du 30.12.1989, p. l ss.

Première directive du Conseil du 12 décembre 1977 visant à la coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et son exercice, in: JOCE L 322 du 17.12.1977, p. 30 ss.

Qu'il s'agisse notamment pour les établissements de crédit de la directive concernant les fonds propres, de la directive relative à un ratio de solvabilité, des directives sur les comptes annuels et consolidés, de la directive relative à la surveillance sur une base consolidée, de la directive relative à la surveillance et au contrôle des grands risques, de la directive sur l'adéquation des fonds propres, de la directive relative aux systèmes de garantie des dépôts, de la directive dite ''post BCCJ" sur le renforcement de la surveillance prudentielle, directives dont certaines ont en outre été modifiées à plusieurs reprises, sans parler des directives dans le domaine de la bourse, des services d'investissement, des placements en valeurs mobilières, du crédit à la consommation ou encore du blanchiment des capitaux, ni bien sOr des systèmes de paiement, dont il sera question en détail plus loin. Pour les références complètes les plus récentes, le lecteur pourra se reporter à la dernière édition du Répertoire de la législation communautaire en vigueur et d'autres actes des institutions communautaires; GRUSON Michael I FEURING Wolfgang, A European Union Banking Law: The Second Banking and Related Directives, in: CRANSTON R.

(éd.), The Single Market and the Law of Banking, 2ème éd., Londres 1995, p. 25 ss;

MAITLAND-W ALKER Julian, EC Banking Directives, Londres - New York - Hong Kong

bancaires pour le 1er janvier 1993 en éliminant des obstacles importants au droit d'établissement garanti par l'art. 52 du traité CE et à la libre prestation des services garantie par l'art. 59, obstacles qui résultaient de la coexistence de réglementations nationales disparates.

7 9. Cette démarche s'inscrivait dans le cadre de la" nouvelle approche" de la reconnaissance mutuelle20l, développée dans le livre blanc de la Commission de 1985 sur la base de l'arrêt Cassis de Dijon202, arrêt qui fut rendu dans le domaine de la libre circulation des biens, mais dont les principes sont également applicables aux services et en particulier aux services financiers203. Selon cette nouvelle approche, le Conseil ne devrait procéder qu'à l'harmonisation des règles essentielles et reconnaître pour le surplus l'équivalence des législations nationales204.

8 0. La deuxième directive bancaire, aujourd'hui complètement transposée dans tous les Etats membres de la Communauté205, prévoit qu'un établissement de crédit qui répond, dans son pays d'origine, aux conditions d'agrément (capital initial minimum, informations à fournir sur les principaux actionnaires, etc.) et aux conditions d'exercice (fonds propres minimum, garantie d'une gestion saine et prudente au travers du contrôle des actionnaires importants, limite à l'acquisition de participations non financières, etc.) pourra exercer les activités bénéficiant de la reconnaissance mutuelle dans tous les autres Etats de la Communauté, soit en y établissant des succursales, soit par la voie de la libre prestation de service, sans devoir obtenir une nouvelle autorisation. Ce texte est donc destiné à réaliser "l'harmonisation essentielle, nécessaire et suffisante pour parvenir à une reconnaissance mutuelle des agréments et des systèmes de contrôle prudentiel, qui permette l'octroi d'un agrément unique valable dans toute la Communauté et l'application du principe du contrôle par l'Etat membre

201

202 203

204

205

1994 (avec mises à jour périodiques); nBL 1996, News Section, N-18 à N-20; SOUSI-ROUBI, Droit bancaire, p. 403 ss; ARORA/FAVRE-BULLE, p. 206 ss.

DASSESSE/ISAACS/PENN, p. 23 ss.

Arrêt du 20.2.1979, affaire 120/78, Rewe-Zentral AG c. Bundesmonopolverwaltung für Branntwein, in: Rec. 1979, p. 649 ss.

BOURGOIGNIE, services financiers, p. 5; HERTIG, Droit bancaire, p. 430; KRÂMER, p. 153; STAUDER, Droit de la consollllllation, p. 183. Voir toutefois les critiques de BIANCARELLI, banquier, p. 22, qui cite notamment le professeur VASSEUR pour qui 111111

contrat n'est pas une bouteille de cassis et la philosophie, l'esprit de l'arri!t «Cassis de Dijon», ne sont pas transposables en matière de services". En jurisprudence, on considère pourtant généralement que la Cour de justice a appliqué les principes de l'arrêt Cassis de Dijon au domaine des services financiers depuis son leading case du 4.12.1986, affaire 205/84, CollllllÎssion c. RFA, in: Rec. 1986, p. 3755 ss.

CollllllÎssion [UE], Livre blanc, notamment para. 13 et 102; CLAR OTT!, services financiers, p. 16 s., et services bancaires, p. 33 s.; SOUSI-ROUBI, Droit bancaire, no 180 ss; ALLIX, Developments, p. 129.

Cf. DUCOULOMBIER Eric, La transposition de la deuxième Directive Bancaire dans les Etats membres, in: Revue de la Banque 1994, p. 421-423.

d'origine112D6. Cette directive est importante pour la question des paiements transfrontaliers puisqu'en annexe, dans la liste des activités qui bénéficient de la reconnaissance mutuelle, on trouve les "Opérations de paiement" ainsi que

!'"Emission et gestion de moyens de paiement (cartes de crédit, chèques de voyages, lettres de crédit)11207.

81. Le principal moyen pour l'Etat d'accueil d'éviter que, sur la base du principe de la reconnaissance mutuelle, l'établissement de crédit exerce ses activités sur son territoire de la même manière - soit selon les mêmes techniques financières - qu'il les exerce dans l'Etat membre d'origine est d'invoquer des dispositions légales nationales d'intérêt généra!208. Cette notion a suscité beaucoup de controverses209. Pourtant, elle n'est pas nouvelle: la Cour de justice s'est déjà penchée sur la question de l'intérêt général à maintes reprises en droit primaire dans le contexte de l'art. 59210 et elle a défini dans quels domaines des "raisons impérieuses d'intérêt général" pouvaient être invoquées211. Ces développements jurisprudentiels ont même conduit la Commission a publier en 1993 une communication interprétative concernant la libre circulation transfrontière des services, communication dans laquelle sont bien mis en évidence d'un côté le principe de base d'interdiction de restrictions à la libre circulation des services et d'un autre côté les dérogations permises et leurs limites dans le contexte de la notion d'intérêt généra!212.

206 207 208

209

210 211 212

Considérant 4.

CRANSTON, Payment, p. 252; FÈVRE, p. 17; WERNICKE, p. 138.

Considérants 15 et 16, art. 19 para. 4, art. 21 para. 5 et 11 (USHER, p. 10; ROSSINI, p. 582; KATZ, General Good, p. 166 s.). Par ailleurs, l'Etat d'accueil reste chargé de la surveillance de la liquidité des succursales des établissements de crédit, en collaboration avec l'autorité compétente de l'Etat membre d'origine. Il conserve également l'entière responsabilité des mesures résultant de la mise en oeuvre de sa politique monétaire (art. 14 para. 2).

Voir notamment les commentaires de ALLIX, Developments, p. 130 s.; BIANCARELLI, banquier, p. 22; CLAROTTI, marché commun, p. 462 s.; CRANSTON, Payment, p. 253;

DASSESSE/ISAACS/ PENN, p. 41 ss et no 13.7; HERTIG, Droit bancaire, p. 432 s.;

KATZ, Directive, p. 249 ss, et General Good, p. 166 ss; MlTCHELL, Banker's, p. 22;

NIELSEN, p. 237 ss; ROSSINI, p. 582 ss; SCHNEIDERITROBERG, p. 169; SOUSl-ROUBI, contrats, p. 158, Droit bancaire, no 282 ss, et Convention, p. 188 s.; STAUDER, libéralisation, p. 125 ss; VAN GER VEN, p. 43 ss; VAN AKEN, p. 83 ss; VASSEUR, aspects juridiques, p. 121 s., et problèmes juridiques, p. 55; WERNICKE, p. 125 ss;

WOLF, p. 1945. Pour une excellente analyse des différentes notions proches de l'intérêt général dégagées par la Cour de justice de Luxembourg et sur les délimitations à faire pour éviter toute confusion entre "raison impérieuse d'intérêt général", "dispositions légales d'intérêt général", "dispositions impératives", "lois de police", "ordre public", cf.

BIANCARELLI, intérêt général, p. 1091 ss.

Voir la présentation détaillée de PARDON, contrats, p. 6 ss; Commentaire MEGRET, p. 67 ss. Cf. aussi SOUSI-ROUBI, Droit bancaire, no 93 ss; KATZ, Directive, p. 264 ss.

On peut trouver un résumé assez complet de la jurisprudence de la Cour dans l'arrêt

"Mediawet" du 25.7.1991, affaire C-353/89, Commission c. Pays-Bas, in: Rec. 1991, p. I-4069 ss, attendu no 18.

Commission [UE], services, p. 4 ss.

La Cour a jugé, d'abord dans plusieurs arrêts phares du 4 décembre 1986 en matière d'assurance213, puis à d'autres occasions, en particulier dans les arrêts sur les guides touristiques214, que la protection des consommateurs figurait parmi les raisons impérieuses liées à l'intérêt général pouvant justifier des obstacles à la libre prestation de services. Plus récemment, la Cour a même reconnu d'intérêt général une loi nationale applicable aux prestataires de services du même Etat, qui offraient leurs services dans d'autres Etats, reconnaissant ainsi que ce ne sont pas seulement des règles du pays d'accueil, mais également des règles du pays d'origine qui peuvent valablement limiter la liberté de prestation de services dans certains cas215, En outre, alors qu'elle n'avait appliqué pendant longtemps la notion d'intérêt général qu'à la libre prestation de services216, la Cour a également étendu ce principe aux art. 48 et 52 du traité 213 Cour a également rendu d'autres décisions le même jour, en matière de coassurance, qui reprennent l'argumentation de l'arrêt précité en posant "qu'il existe, dans le secteur de l'assurance en général, des raisons impérieuses tenant à la protection des consommateurs en tant que preneurs d'assurances et assurés qui peuvent justifier des restrictions à la libre prestation des services" (affaire 220183, Commission c. France, in: Rec. 1986, aussi l'arrêt du 16.12.1993, l'affaire des "loteries", C-275192, Her Majesty's Customs and Excise c. Gerhart Schindler et Jorg Schindler, in: Rec. 1994, p. I-1039 ss, ou encore l'arrêt du 13.5.1997, affaire C-233/94, République fédérale d'Allemagne c. Parlement européen et Conseil de l'Union européenne, in: Rec. 1997, p. I-2405 ss (demande d'annulation de la directive 94/19/CE relative aux systèmes de garantie des dépôts). Dans l'optique des services financiers, la Cour a même précisé dans son arrêt du 9.7.1997, affaire Société civile immobilière Parodi c. Banque H. Albert de Bary et Cie, in: Rec.

1997, p. I-3899 ss, que "le secteur bancaire constitue zm domaine particulièrement sensible du point de vue de la protection des consommateurs" (attendu no 22). La protection des consommateurs comme exigence impérative d'intérêt général relève bien d'une ''jurisprudence constante": arrêt du 9.7.1997, affaire C-34/95, C-35195 et C-36/95, Konsumentombudsmannen (KO) c. De Agostini (Svenska) FOrlag AB et TV-Shop i Sverige AB, in: Rec. 1997, p. I-3843 ss, attendu no 53.

Arrêt du 10.5.1995, affaire C-384/93, Alpine Investments BV c. Minister van Financiën, in: Rec. 1995, p. I-1141 ss. Plus que la protection des consommateurs, c'est le maintien de la bonne réputation du secteur financier national qui a été retenu par la Cour de Luxembourg dans cette affaire dite du "cold calling". Cf. DASSESSE Marc, Les services financiers: Banques et assurances (Examen de jurisprudence, 1.8.1993-1.10.1995), in:

Journal des Tribunaux - Droit européen 1996, p. 15 ss; REDC 1995, p. 102 ss (GOYENS Monique).

Voir encore par exemple les arrêts du 25.7.1991: Commission c. Pays-Bas ("Mediawet", réf. sz1pranote 211), attendu no 17 ss, et affaire C-76/90, Manfred Siiger c. Dennemeyer

& Co. Ltd, in: Rec. 1991, p. I-4221 ss, attendu no 15. Plus récemment: arrêt du 12.12.1996, affaire C-3195, Reisebüro Broede c. Gerd Sandker, in: Rec. 1996, p. I-6511 ss, attendu no 28; arrêt du 5.6.1997, affaire C-398/95, Syndesmos ton en Eltadi

CE217, ce qui signifie que la réserve de l'intérêt général pourra aussi être invoquée à l'égard de la liberté d'établissement de toute institution financière proposant des moyens de paiement. Pourrait par exemple relever de l'intérêt général, dans l'optique des paiements transfrontières, des législations nationales limitant certaines pratiques commerciales ou imposant des obligations d'information, dans des domaines non harmonisés du droit communautaire de la consommation218.

8 2. Ainsi, si l'on suit la jurisprudence constante de la Cour de Justice219, les institutions financières qui proposent des moyens de paiement aux consommateurs, qu'elles soient des établissements de crédit soumis à la deuxième directive ou tout simplement des sujets de droit bénéficiant des libertés fondamentales garanties par le traité220, devraient respecter les réglementations nationales des Etats d'accueil qui répondent aux conditions dégagées par la jurisprudence en matière d'intérêt général. Ces conditions sont concrètement les sui vantes221.

217

218 219

220

221

Touristikon kai Taxidiotikon Grafeion c. Ypourgos Ergasias, in: Rec. 1997, p. 1-3091 ss, attendu no 21.

Arrêt du 20.5.1992, affaire C-106/91, Claus Ramrath c. Ministre de la Justice, in: Rec.

1992, p. 1-3351 ss, attendu no 29 s.; arrêt du 31.3.1993, affaire C-19/92, Dieter Kraus c.

Land Baden-Württemberg, in: Rec. 1993, p. 1-1663 ss, attendu no 32; arrêt du 30.11.1995, affaire C-55/94, Reinbard Gebhard c. Consiglio dell'Ordine degli Avvocati e Procuratori di Milano, in: Rec. 1995, p. 1-4165 ss, attendu no 37, 39.

CRANSTON, Payment, p. 253. Cf. infra no 259.

Sous réserve d'une nouvelle interprétation que pourrait douner la Cour de justice de la notion d'intérêt général, en particulier dans le contexte de la deuxième directive bancaire.

Toutefois, pour SOUS!-ROUBI, Convention, p. 189, "Les commentateurs ne prévoielll pas de modification de cette jurisprudence lorsqu'il s'agira pour la Cour d'interpréter la notion d'intérêt général justifiant les restrictions pouvant être apportées à la libre circulation des services bancaires résultant de la deuxième directive". Ce d'autant plus que la notion d'intérêt général dans la deuxième directive bancaire fait désormais l'objet d'une communication interprétative de la Commission conforme à la jurisprudence de la Cour (cf. infra no 87).

Comparer les considérants 15 et 16 de la directive, où l'on fait une distinction, s'agissant des dispositions légales d'intérêt général, entre la situation des établissements non agréés ou dont les activités ne figurent pas sur la liste de la deuxième directive et la situation des établissements agréés dont les activités bénéficient de la recounaissance mutuelle, distinction qui n'est que formelle puisque le résultat quant à l'application du principe de l'intérêt général devrait être en réalité le même pour les deux situations. Cf. aussi Comité consultatif [France], cartes, p. 28 s.

Cf. V AN GERVEN, p. 43 s.; ROSSINI, p. 584; CLAROTTI, marché commun, p. 463;

REICH, services financiers, p. 72 s. et 78. Pour B!ANCARELLI, intérêt général, p. 1095, si le législateur communautaire, en utilisant le concept de "raison d'intérêt général", a entendu viser expressément la jurisprudence de la Cour de justice, cela comprend aussi bien la notion d'intérêt général traitée dans les arrêts mentiounés supra que la notion d'ordre public qui s'applique en cas de réglementation nationale discriminatoire (cf. art. 56 du traité et la jurisprudence citée dans l'article de BIANCARELLI).

Premièrement, il faut que l'intérêt à sauvegarder ne le soit pas déjà dans l'Etat d'origine (problème du double emploi), puisque par le biais de la reconnaissance mutuelle, l'institution financière devrait de toute façon appliquer la disposition analogue existante dans son pays d'origine sous le contrôle de ses autorités nationales ("home country contrai"). Ce qui veut dire en corollaire que la matière visée ne doit pas avoir été l'objet d'une harmonisation au niveau communautaire. Deuxièmement, les mesures invoquées doivent être objectivement nécessaires, pertinentes, il ne doit pas exister d'alternative moins restrictive. Troisièmement, ces mesures ne doivent pas être disproportionnées par rapport à l'intérêt à protéger. Quatrièmement, la réglementation nationale ne doit pas constituer une discrimination à l'endroit de l'institution financière étrangère. Enfin, il faut évidemment que l'intérêt protégé soit bien d'intérêt général, c'est-à-dire qu'il entre dans les différentes catégories développées par la Cour de Luxembourg dans sa jurisprudence, par exemple la protection des consommateurs222.

8 3 . Dans le domaine spécifique du trafic des paiements, on ne connaît pas encore d'exemples jurisprudentiels traitant de la compatibilité sous l'angle du droit communautaire de telle ou telle législation nationale. Ceci est en grande partie explicable de par le fait que la plupart des Etats européens n'ont tout simplement pas adopté de règles particulières et restrictives dans ce domaine223.

En l'absence de réglementations nationales en matière de systèmes de paiement, ce sont donc essentiellement des législations plus générales, par exemple sur les pratiques commerciales ou l'information, qui pourraient être sujettes à l'examen de l'intérêt général si elles limitaient dans l'Etat d'accueil les prestations de services ou l'établissement.

Il arrive quand même que des dispositions éparses liées au trafic des paiements soient invoquées par des Etats d'accueil. Ainsi, en France par exemple, où d'aucuns considèrent que nombre de lois nationales sont d'intérêt général et ont donc vocation à s'appliquer sans limite, le Comité des établissements de crédit a très vite notifié aux autorités communautaires que les 222

223

Pour les conditions posées par la Cour de justice en matière d'intérêt général, dans le contexte de la protection des consommateurs, voir l'attendu no 27 de l'arrêt

"assurance/coassurance" du 4.12.1986, Commission c. RF A (réf. supra note 203), ainsi que les attendus no 14 (Commission c. France), no 17 (Commission c. Italie), no 18 (Commission c. Grèce) des arrêts "Guides touristiques" du 26.2.1991 (réf. supra note 214). Au-delà de la protection des consommateurs, on peut citer également, parmi d'autres intérêts, les règles professionnelles destinées à protéger le destinataire de services, la protection des travailleurs, le maintien de la bonne réputation du secteur financier national, la prévention de la fraude. Pour une liste complète de ces intérêts, cf.

Commission [UE], intérêt général (Communication interprétative), p. 15. Voir aussi ROSSINI, p. 585 ss et le "test" d'eurocompatibilité qu'elle pratique pour quatre exemples de lois nationales sous l'angle de l'intérêt général.

Pour la loi danoise sur les cartes de paiement (dans sa version initiale de 1984), cf.

toutefois FA V RE-BULLE, paiement, p. 231.

institutions financières s'établissant ou prestant des services en France devaient respecter les dispositions nationales qui s'appliquent spécifiquement à certaines catégories d'opérations de banque, et parmi celles-ci le décret-loi du 30 octobre 1935 modifié unifiant le droit en matière de chèques et relatif aux cartes de paiement ainsi que ses textes d'application224, Ce sont peut-être de tels cas qui conduiront à des plaintes et finalement à une prise de position de la Cour européenne de justice. Quoi qu'il en soit, il ne fait guère de doute que de véritables législations nationales de protection des consommateurs devraient être admises sous l'angle de l'intérêt généraJ225 226.

8 4. Paradoxalement, si la notion d'intérêt général devrait être là pour profiter aux consommateurs en les protégeant, il semblerait également qu'elle puisse avoir des effets négatifs quant à l'offre des services. La Commission relève en effet dans son livre vert sur les services financiers et les consommateurs de 1996 que: "Les restrictions légales liées à des considérations d'intérêt général dissuadent les entreprises de proposer leurs produits hors de leurs frontières nationales et, en limitant le choix, peuvent donc porter préjudice aux intérêts du consommateur11227, A notre connaissance, de tels problèmes ne se rencontrent toutefois pas pour l'heure dans le domaine du trafic des paiements.

8 5. Les règles nationales d'intérêt général devraient en principe ressortir au droit public économique (conditions d'accès à une profession et conditions d'exercice de celle-ci - pour autant qu'il ne s'agisse pas d'établissements de crédit, pour lesquels la deuxième directive bancaire a déjà harmonisé ce domaine -, dispositions de police économique relatives aux pratiques du 224 Circulaire non publiée du 23.3.1993. Cf. aussi SOUSI-ROUBI, Convention, p. 187 et ses

références in note 11.

225

226

227

Selon KATZ, General Good, p. 168: "ln sum, these references in the Directive Io the general good, alongside the Court's rulings on the general good, suggest that a significant number of national consumer protectio11 measures could be super-imposed 011 the si11gle passport which the Second Directive intends to give Io bra11chi11g by Member State ba11ks". Voir aussi REICH, Evolution, p. 13, qui cite le cas de l'assurance et estime à juste titre que le caractère ''particulièrement sensible" d'un tel ''phénomène de masse" et donc la justification d'un contrôle administratif pour assurer la protection des

Selon KATZ, General Good, p. 168: "ln sum, these references in the Directive Io the general good, alongside the Court's rulings on the general good, suggest that a significant number of national consumer protectio11 measures could be super-imposed 011 the si11gle passport which the Second Directive intends to give Io bra11chi11g by Member State ba11ks". Voir aussi REICH, Evolution, p. 13, qui cite le cas de l'assurance et estime à juste titre que le caractère ''particulièrement sensible" d'un tel ''phénomène de masse" et donc la justification d'un contrôle administratif pour assurer la protection des