• Aucun résultat trouvé

228. Le droit à l'information, aujourd'hui reconnu comme un "droit fondamentaf' du consommateur, est une composante essentielle de la politique communautaire de protection des consommateurs653, Ce droit est consacré à l'art. 129 A du traité CE, indirectement depuis la révision de Maastricht et même en toutes lettres depuis la révision d'Amsterdam654. Pour la Commission européenne, "La, politique de la consommation doit chercher à garantir un 11iveau maximum d'i11/ormation et de tra11spare11ce11655. Cependant, c'est essentiellement dans le domaine des biens de consommation que des exigences d'information spécifiques ont été développées656, Les interventions communautaires dans le domaine des services sont assez récentes et peu nombreuses657,

En 1990, la Commission soulignait que la majeure partie de la législation communautaire n'avait pas permis d'assurer une transparence suffisante, 653

654 655 656 657

Pour les origines de ce droit, voir notamment les para. 3 lit. d et 34 ss de l'annexe à la résolution du Conseil de 1975 concernant un programme préliminaire de la CEE pour une politique de protection et d'infonnation des consommateurs, ainsi que les para. 2 et 40 ss de l'annexe du deuxième programme (cf. in bibliographie). On peut également lire dans la Résolution 543 (1973) relative à une Charte de protection du consommateur de l'Assemblée consultative du Conseil de l'Europe que les consommateurs ont droit à une information suffisante, pour pennettre de faire un choix rationnel entre produits et services concurrents (C.i.).

Cf. supra no 96.

Commission [UE], Plan d'action (1990-1992). p. 12, qui prône une véritable "politique de transparence".

KRA.MER, no 194.

Voir par exemple la directive du Conseil du 22 décembre 1986 relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des Etats membres en matière de crédit à la consommation; la directive du Conseil du 13 juin 1990 concernant les voyages, vacances et circuits à forfait; la directive 94/47/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 1994 concernant la protection des acquéreurs pour certains aspects des contrats portant sur l'acquisition d'un droit d'utilisation à temps partiel de biens immobiliers ("time-sharing"); la directive 9717/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 1997 concernant la protection des consommateurs en matière de contrats à distance. Le Conseil avait pourtant affirmé, dans sa résolution de 1981 concernant un deuxième programme de la CEE pour une politique de protection et d'information des consommateurs, que le développement important des services exigeait

"un renforcement de la protection des consommateurs dans ce domaine, notamment en ce qui concerne la qualité des services rendus et la transparence de leurs prix" (para. 34 de l'annexe).

notamment dans le domaine des services financiers bancaires658. Dans sa résolution de 1992 concernant les priorités futures pour le développement de la politique de protection des consommateurs, le Conseil a invité la Commission à proposer, dans les meilleurs délais, des mesures permettant aux consommateurs d'avoir confiance dans le marché unique, notamment par une "meilleure transparence" et une "meilleure i11formatio11"659, Malgré cela, la Commission a dfi constater dans son deuxième plan d'action triennal 93-95, puis dans sa communication sur les priorités 96-98, qu'il restait encore beaucoup à faire pour améliorer l'information des consommateurs660. De même, la Commission s'est à nouveau arrêtée sur les insuffisances de cette information dans son livre vert de mai 1996 sur les services financiers661, mais les seules mesures qu'elle propose dans l'immédiat - dans sa communication "post" livre vert de juin 1997 -est l'adoption de codes de conduite par les différentes parties intéressées (associations professionnelles et représentants des consommateurs)662,

229. Force est de constater qu'en l'absence d'un texte général sur l'information des consommateurs en matière de services et plus particulièrement de services financiers, les interventions n'ont été pour l'heure que très sectorielles663. Pour les paiements face-à-face (transfrontières ou non), la Commission européenne a posé quelques exigences générales dans ses recommandations 87/598 et 88/590, sans parler des développements exposés dans des communications ou autres documents de réflexion communautaires664 ni des codes de conduite des professionnels. Les paiements électroniques sont toutefois soumis à des règles (toujours non contraignantes) plus détaillées depuis l'adoption de la recommandation 97/489 le 30 juillet 1997. Quant aux paiements transfrontières à distance par virements, ils ont fait eux l'objet de règles de plus 658

659

660 661 662 663

664

Commission [UE], Plan d'action (1990-1992), p. 12, 14, 24. L"'action transparence"

proposée a dès lors visé à "garantir un maximum de transparence, particulièrement pour le secteur des banques et des assurances, en arrêtant une législation communautaire, si nécessaire, propre à guider le consommateur dans ses choix" et d"'assurer la transparence dans les transferts et paiements internationaux". Voir également: RTCHEW, p. 4 s.

Dans l'annexe à la résolution, on trouve encore les exigences suivantes: "Amélioration de la transparence des prix des services, notamment en ce qui concerne ( ... ) les services financiers" (pt. 2); "Amélioration de la qualité et de la transparence des systèmes de paiement" (pt. 6).

Commission [UE], plan d'action (1993-1995), p. 18 ss, et Priorités, p. 5. Voir également l'avis du Comité économique et social [UE], Marché unique, p. 63 ss.

Commission [UE], services financiers, p. 5 et 10 s. SABALOT, p. 311.

Commission [UE], confiance, p. 5 s. Ce n'est que si la mise en oeuvre des accords et l'amélioration de l'information ne sont pas suffisantes (d'ici le milieu de l'année 1999) que la Commission envisagera de nouvelles actions, notamment législatives.

Cf. STAUDER, Droit de la consommation, p. 196 s., 208 s. Rappelons qu'un texte général comme la directive du Conseil du 10.9.1984 relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des Etats membres en matière de publicité trompeuse n'exige pas une information positive du consommateur (STAUDER, libéralisation, p. 130).

Par exemple: Commission [UE], atout, para. 18.2.

en plus précises et complètes à la suite des carences importantes mises en évidence par différentes études, tout d'abord dans la recommandation 90/109, puis surtout dans la directive 97/5 sur les virements transfrontaliers, là encore sans parler de tous les documents de travail de la Commission665 ou des règles déontologiques des banques.

Ce sont donc ces textes que nous nous proposons de présenter ici, soit ce qui constitue en tant que droit harmonisé ce que les émetteurs doivent respecter en matière d'information dès lors qu'ils offrent des services de paiement au sein de l'Union européenne. Nous ne parlerons pas d'autres réglementations trop en marge de la problématique des paiements transfrontières, qu'elles soient verticales comme la directive sur le crédit à la consommation, ou horizontales comme la directive en matière de publicité trompeuse. En revanche, il convient de s'arrêter brièvement, avant d'aborder le droit spécifique des paiements transfrontières, sur une législation horizontale jouant un rôle en matière de transparence: la directive sur les clauses abusives.

1 La directive 93/13/CEE concernant les clauses abusives

230. Le Conseil a adopté le 5 avril 1993 une directive 93/13/CEE concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs666. Avant tout, ce texte tend à combattre les clauses contractuelles inéquitables dans leur contenu et ses caractéristiques seront donc présentées plus longuement dans le chapitre consacré aux problèmes contractuels entre les institutions financières et leurs clients667. Cela étant, la directive 93/13/CEE a également une importance en matière d'information sur le contenu du contrat qu'il ne faut pas perdre de vue.

231. Conformément au considérant no 20 de la directive, le Conseil a tout d'abord prévu que "le consommateur doit avoir effectivement l'occasion de prendre connaissance de toutes les clauses". Pourrait ainsi être déclarée abusive à teneur de l'annexe de la directive, une disposition contractuelle qui constaterait de manière irréfragable l'adhésion du consommateur à des clauses dont il n'a pas eu, effectivement, l'occasion de prendre connaissance avant la conclusion du contrat668. En outre, lorsque des clauses écrites sont proposées au 665

666 667 668

Voir notamment le rapport du PSULG, para. 26 ss, sur la transparence et l'information des utilisateurs; Commission [UE], paiements transfrontaliers, no 18 ss et 63 ss.

Références in bibliographie.

Infra no 341 ss.

1. i). A noter que la proposition modifiée de directive du 5.3.1992 contenait une disposition expresse (art. 5 para. 2) sur ce droit du consommateur de prendre connaissance des clauses avant la conclusion du contrat et les conséquences de sa violation (clauses

consommateur, elles "doivellt toujours être rédigées de façon claire et compréhensible"669 conformément à l'art. 5. Cette dernière exigence a d'ailleurs une valeur importante dans la directive puisque s'il est admis que l'appréciation du caractère abusif des clauses ne porte ni sur la définition de l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation entre le prix et la rémunération d'une part et les services ou les biens à fournir en contrepartie d'autre part, cette restriction ne vaut que "pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible11670.

232. Les conséquences d'une éventuelle violation de ces obligations de transparence (soit si les clauses ne sont pas rédigées de façon claire et compréhensible) ne sont pas indiquées dans la directive. II se pourrait que l'on se trouve simplement face à un mécanisme d'interprétation, puisque la directive prévoit dans le même art. 5 qu'en cas de doute sur le sens d'une clause, c'est l'interprétation la plus favorable au consommateur qui prévaut671. Pourrait-on cependant aller plus loin et déduire d'autres conséquences, par exemple la nullité de la clause pour manque de transparence? La directive ne prévoit en tout cas pas que l'intransparence d'une clause au sens de l'art. 5 rend celle-ci automatiquement abusive au sens de l'art. 3; il n'existe aucun lien direct et explicite entre ces deux dispositions. La question du sort de clauses non transparentes est donc importante et elle a suscité des discussions, notamment dans la perspective allemande672. La jurisprudence allemande a en effet développé le principe du "Transparenzgebot" qui permet de considérer comme nulle une clause ne répondant pas à certaines exigences de transparence673.

Il nous semble que le législateur communautaire n'a pas directement opté pour cette solution de la nullité et que la question des sanctions a été laissée au

669

670

671 672

673

considérées comme non acceptées), mais une telle disposition n'a pas été reprise dans le texte final de la directive (TENREIRO, clauses abusives, p. 4; REMIEN, p. 63). Le considérant 20 n'étant donc plus matérialisé par une disposition formelle, on peut dire que la directive contient une lacune en matière d'information précontractuelle: REICH, information, p. 27.

Sur ces deux notions ("Klarheit" et "Versttindlichlœit"), cf. en détail GOZZO, p. 151 ss;

REICH, AGB, p. 47 ss.

Art. 4 para. 2.

TENREIRO, clauses abusives, p. 4; WEIUPUIS, p. 130. Cette règle d'interprétation n'est toutefois pas applicable dans le cadre des procédures de contrôle général et abstrait prévues par l'art. 7 para. 2 de la directive (cf. art. 5 dernière phrase).

Voir par exemple: GOZZO, p. 122 s., 144 ss; HEINRICHS, Transparenzgebot, p. 171 ss;

KIENDL, p. 200 s.; REICH, Umsetzung, p. 5; MICKLITZ, Umsetzung, p. 78; NASSAL, p. 692 s.; WOLF, in: WOLF/HORN/LINDACHER, Art. 4 RiLl no 21, Art. 5 RiLl no 1 et 7; GRAF VON W ESTPHALEN, p. 165; SCHMIDT-SALZER, p. 1493;

HABERSACKIKLEINDIEKIWIEDENMANN,p. 1674; ULMER, p. 344. Cf. aussi BUESO GUILLEN, p. 309 ss; STAUDER, Klauseln, p. 33 et note 73, p. 40; SCHMID J., Richtlinienvorschlag, p. 254 s., et Klauselkatalog, p. 52, 54.

Cf. en détail infra no 282 ss.

choix des Etats membres674. La directive 93/13/CEE est en effet une directive d'harmonisation minimale, les Etats membres peuvent adopter ou maintenir des dispositions plus strictes, compatibles avec le traité, pour assurer un niveau d~

protection plus élevé au consommateur. Partant, la seule obligation à charge des Etats membres est de prévoir dans leur législation que les clauses des contrats conclus avec des consommateurs doivent être rédigées de façon claire et compréhensible et qu'en cas de doute sur une clause, si celle-ci peut être interprétée, c'est l'interprétation contra stipulatorem qui s'applique. Au-delà, les Etats membres devraient être libres d'adopter n'importe quelles sanctions dès lors qu'elles restent compatibles avec la directive et le traité, ou même de n'adopter aucune autre sanction675. Dans cette optique, un régime comme celui du "Transparenzgebot" en Allemagne et donc la nullité des clauses en cas de non-transparence devrait être admissible; il s'agit vraisemblablement là du meilleur système, le plus efficace pour protéger le consommateur. Nous y reviendrons676.

233. Quoi qu'il en soit, le régime juridique préférable à une approche horizontale comme la directive concernant les clauses abusives, qui ne vise qu'à éviter que des dispositions contractuelles ne soient pas transparentes, reste toutefois une approche verticale, avec une définition précise des obligations positives d'information à respecter. Or en matière de paiements transfrontières, il existe diverses règles communautaires de ce type, règles que l'on peut décomposer selon le mode de paiement.

Il. Les moyens de paiement face-à-face

234. Il n'existe pas à ce jour de textes communautaires traitant à proprement parler des paiements transfrontières face-à-face. En revanche, les textes généraux applicables à certains paiements face-à-face n'excluant pas leur application aux situations transfrontières, on doit en conclure que les exigences qu'ils posent en matière d'information sont également applicables aux paiements internationaux qui nous intéressent ici. Depuis une dizaine d'années ce sont les recommandations 'Bî?/598 et 88/590 qui ont défini le standard de transparence attendu pour les principaux moyens de paiement face-à-face. Après l'adoption de la récente recommandation 97/489, il est intéressant de voir si des améliorations ont véritablement été apportées.

674 Du même avis: WOLF, in: WOLF/HORN/LINDA CHER, Art. 5 RiLi no 7.

675 Cf. aussi STAUDER, Klauseln, p. 33 et note 73.

676 Infra no 282 ss.