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B — La saisine des autorités compétentes

Dans le document La régularisation en droit administratif (Page 86-94)

104. — Si les autorités de contrôle peuvent exercer leur pouvoir de manière spontanée, elles sont le plus souvent — voire, dans certains cas, exclusivement — saisies de demandes visant à ce qu’elles constate l’illégalité de l’action administrative.

Le constat d’irrégularité opéré par le législateur dans une loi de validation n’est pas vérita- blement issu d’une saisine. Certes, le Parlement se prononce généralement sur un projet de loi ou sur un amendement déposé par le gouvernement, parfois après le constat d’une illégalité par le juge ⁴. Cependant, il ne s’agit pas d’une véritable voie juridique permettant de provo- quer le contrôle de l’action administrative. Nous n’en traiterons donc pas dans les pages sui- vantes.

1. Nous sommes ainsi en désaccord avec David RENDERS, selon qui, par la validation, « plutôt que de confor- mer l’acte administratif au droit […], le législateur peut préférer déclarer que l’acte administratif est applicable nonobstant son irrégularité. » (nous soulignons). David RENDERS, La consolidation législative de l’acte adminis- tratif unilatéral, Bruxelles – Paris, Bruylant – L.G.D.J., 2003, p. 81. En effet, l’irrégularité n’implique pas, per se, l’interdiction d’appliquer une norme juridique.

2. Vo « Valide », in Gérard CORNU (dir.), Vocabulaire juridique, op. cit., : « Valablement formé, conforme aux conditions exigées par la loi à peine de nullité […] en règle, régulièrement délivré, revêtu des formes légales. »

3. Vo « Validité », ibid. : « Qualité d’un acte qui n’est entaché d’aucun vice de nature à justifier son annula- tion. »

4. Cf. par ex. l’art. 35 de la loi nº 97-1239 du 29 décembre 1997, portant loi de finances rectificative pour 1997, voté à la suite de l’annulation de deux décrets par l’Assemblée du contentieux (C.É., Ass., 9 oct. 1996, Mme Wajs et M. Monnier, req. nos 136071 et 142688 ; Rec., p. 387).

105. — Les conditions dans lesquelles les organes du constat de l’irrégularité se pronon- cent diffèrent fortement. Nous verrons en effet que si le contrôle administratif peut être spon- tanée ou provoquée (1), le cadre dans lequel le contrôle juridictionnel intervient est bien plus restreint (2).

1. Un contrôle administratif ouvert

106. — Il faut avant toute chose noter que le contrôle administratif ne nécessite aucune saisine préalable pour être exercé ; il est par essence spontané. La légalité d’un acte, d’une nor- me ou d’une situation factuelle peut être vérifiée par l’organe qui en est à l’origine ou par son supérieur hiérarchique. Cette idée se trouve bien exprimée dans les conclusions de Jean-Mi- chel GALABERT sur l’affaire Dame veuve Ducroux ¹, jugée par l’Assemblée du contentieux le 23 avril 1965. Selon lui, le fondement de « l’idée que la légalité de la décision initiale ne condi- tionne pas nécessairement la légalité de la décision prise sur recours hiérarchique » ² est à re- chercher dans le fait que, « même en l’absence de recours hiérarchique, le supérieur [a] le pouvoir d’intervenir pour modifier ou annuler la décision de son subordonné » ³. La saisine n’est donc que contingente. Un agent ou son supérieur hiérarchique peuvent ainsi spontanément consta- ter l’illégalité d’un acte, d’une norme ou d’une situation avant de prendre une mesure de na- ture à les régulariser.

107. — Qu’en est-il lorsque l’administration est saisie d’un recours ? Est-elle tenue de ré- pondre aux conclusions et aux moyens soulevés par le requérant ? Se trouve-t-elle au contraire libre dans l’exercice de son contrôle ? Saisie d’un recours, l’administration est libre tant à l’égard des conclusions que des moyens. L’organe administratif dispose, par conséquent, d’un large pouvoir d’appréciation de la légalité de l’objet litigieux, malgré l’existence d’un acte de saisine ; il pourra éventuellement procéder à une régularisation en dehors du cadre déterminé par la demande.

108. — S’agissant, d’une part, des conclusions, nous évoquerons la décision Ministre des

Affaires sociales et de l’emploi contre Institution privée mixte de Monistrol-sur-Loire rendue par le 1. C.É., Ass., 23 avr. 1965, Dame veuve Ducroux, Rec., p. 231 ; A.J.D.A., 1965, p. 332 et s., chron. Michèle PUYBASSET, Jean-Pierre PUISSOCHET.

2. Jean-Marc GALABERT, concl. sur la déc. préc., R.D.P., 1965, p. 1192. 3. Ibid., p. 1193 et s. Nous soulignons.

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Conseil d’État le 23 juillet 1993 ¹. En l’espèce, un inspecteur du travail avait demandé aux organes d’un établissement d’enseignement privé de modifier plusieurs articles de son règle- ment intérieur. Saisi d’un recours hiérarchique formé par par l’établissement, le directeur ré- gional de l’emploi prononça le retrait de la décision de l’inspecteur. La décision du directeur régional fit elle-même l’objet d’un recours hiérarchique formé par un syndicat devant le mi- nistre des Affaires sociales. Ce dernier, admettant le recours, enjoignit à l’établissement privé, non seulement de procéder aux modifications demandées par l’inspecteur du travail, mais aussi de retirer un article et d’en modifier un autre dont la légalité n’avait pas été remise en cause initialement.

Le tribunal administratif de Clermont-Ferrand prononça l’annulation de la décision du ministre, notamment au motif qu’en enjoignant à l’établissement privé de modifier et de reti- rer des articles qui n’étaient pas critiqués par l’inspecteur du travail, celle-ci était entachée d’incompétence. Sur un pourvoi en cassation du ministre, le Conseil d’État adopte une déci- sion inverse :

Considérant que si la compétence pour exiger le retrait ou la modification des disposi- tions du règlement intérieur appartient en vertu de l’article L. 122-37 précité du code du travail à l’inspecteur du travail, le directeur régional saisi en application de l’article L. 122-38 et le ministre, saisi, dans les conditions du droit commun, d’un recours hiérar- chique contre la décision du directeur régional, peuvent, dans l’exercice de leur pouvoir hiérarchique, contrôler la légalité de dispositions du règlement dont l’inspecteur du travail s’est abstenu d’exiger la modification ou le retrait.

En l’occurrence, le ministre était saisi d’une demande d’annulation d’une injonction à mo- difier certains articles d’un règlement intérieur. En considérant qu’il relève également de sa compétence de supérieur hiérarchique d’enjoindre à la modification et au retrait d’autres dis- positions de ce règlement, le Conseil d’État juge que les conclusions à fin d’annulation invo- quées devant lui ne restreignent pas le champ de son pouvoir. En somme, le supérieur saisi d’un recours hiérarchique peut se prononcer ultra petita. En retenant cette solution, le Conseil d’État a suivi les conclusions du commissaire du gouvernement Marcel POCHARD, dont l’argu- mentation se fonde notamment sur le Droit administratif général du professeur René CHAPUS ². On peut lire dans ces conclusions qu’« en droit, l’autorité investie du pouvoir hié-

1. C.É., 23 juill. 1993, Ministre des Affaires sociales et de l’Emploi c. Institution privée mixte de Monistrol-sur- Loire, req. nº 99391 ; Rec., p. 564 ; A.J.D.A., 1993, p. 728, concl. Marcel POCHARD.

2. René CHAPUS, Droit administratif général, op. cit., p. 396 : « le pouvoir hiérarchique peut être exercé spon- tanément par l’autorité supérieure, aussi bien qu’en conséquence d’une demande adéquate émanant de tout intéressé. »

rarchique peut en principe agir spontanément et a donc normalement le pouvoir de décider sur des points qui n’ont pas fait l’objet d’une décision de l’autorité subordonnée. » ¹ Cette argumentation doit évidemment être étendue au cas de l’agent saisi d’un simple recours gra- cieux : celui-ci dispose de pouvoirs aussi étendus que son supérieur, ce qui n’a a fortiori rien d’étonnant, attendu que c’est sa propre décision qui lui est déférée ².

Toutefois, si la liberté de l’autorité de contrôle — hiérarchique ou non — est étendue, elle comporte une limite lorsqu’elle est sollicitée par un administré. En effet, en cas de saisine, l’autorité est tenue de rapporter l’acte irrégulier. Le contenu de la décision de l’administration est donc conditionné par le caractère sollicité du contrôle. Cela découle notamment d’une décision Ministre de la Santé publique et de la population contre Sieur Lautier du 7 octobre 1960 dans lequel on peut lire que les supérieurs, saisis de recours distincts, « étaient tenus dans l’exercice de leur pouvoir hiérarchique de prononcer l’annulation des décisions attaquées dès lors que celles-ci étaient entachées d’illégalité. » ³ La solution est identique concernant les recours gracieux dont l’administration pourrait être saisie ⁴. Cette jurisprudence implique simplement que le juge annulera toute décision dans laquelle l’administration, saisi d’un re- cours, constate l’irrégularité d’un acte mais refuse de le rapporter. Cette jurisprudence impli- que-t-elle que lorsque l’administration est saisie d’une demande de retrait ou d’abrogation d’une décision illégale, elle n’est pas en mesure de la régulariser ? Tel ne nous semble pas être le cas. En effet, dans sa décision Dame veuve Ducroux de 1965, l’Assemblée a jugé qu’un supé- rieur hiérarchique pouvait rejeter le recours formé contre une décision tout en substituant un nouveau motif à celui erroné retenu par son subordonné ⁵. Dans cette hypothèse, le supérieur hiérarchique constate effectivement l’irrégularité de la décision initiale ; il rejette cependant le recours formé à son encontre puisqu’il a purgé la décision de son vice. De même, s’agissant des recours préalables obligatoires, la Section a jugé que l’autorité saisie peut, « dans la limite

1. Marcel POCHARD, concl. sur C.É., 23 juill. 1993, Ministre des Affaires sociales et de l’Emploi c. Institution privée mixte de Monistrol-sur-Loire, A.J.D.A., 1993, p. 729.

2. Dans ce sens, cf. notamment Jean WALINE, Droit administratif, op. cit., p. 673. L’auteur ne fait aucune distinction entre recours gracieux et hiérarchique : « À l’égard du recours, l’autorité administrative a tout pou- voir : elle peut n’y donner aucune suite ; elle peut le rejeter ; elle peut y faire droit, en partie, en totalité, ou même accorder plus qu’on ne lui demandait. Elle dispose, pour modifier l’acte, de la même compétence qui lui a permis de le prendre, réserve faite des droits acquis à des tiers ».

3. C.É., 7 oct. 1960, Ministre de la Santé publique et de la population c. Sieur Lautier, Rec., p. 522. Dans cette décision, le Conseil d’État reprend en grande partie la motivation figurant dans C.É., 4 déc. 1959, Ministre du Travail et Sieur Geoffroy c. Compagnie générale de construction de fours, Rec., p. 654.

4. Cf. notamment C.É., Sect., 11 juin 1982, M. Plottet, req. no 16567 ; Rec., p. 221 ; A.J.D.A., 1983, p. 42, concl. Bruno GENEVOIS.

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de ses compétences, […] remédier aux illégalités dont pourrait être entachée la décision ini- tiale » ¹. Il apparaît en définitive que lorsqu’une autorité administrative constate, à l’occasion d’un recours, qu’une décision est irrégulière, elle doit soit remédier au vice, soit la rapporter.

L’apport de la décision Ministre de la Santé publique et de la population contre Sieur Lautier ne se limite cependant pas à cette question : il concerne également l’étendue des pouvoirs de l’administration à l’égard des moyens invoqués devant elle.

109. — S’agissant, d’autre part, des moyens invoqués, la motivation de la décision Ministre

de la Santé publique et de la population contre Sieur Lautier contient une importante précision :

sur recours d’un administré, le supérieur hiérarchique est tenu d’annuler une décision illégale « même pour des motifs autres que ceux exposés dans [le] recours ». Et puisqu’il y est tenu, il est nécessairement aussi en mesure de le faire.

Le recours hiérarchique, comme le recours gracieux, n’est en somme qu’un moyen de dé- clencher un contrôle entier de l’autorité administrative. Les moyens invoqués à l’occasion d’un recours administratif n’ont, en somme, guère d’incidence sur le contrôle exercé par l’ad- ministration : rien n’oblige l’administré à les formuler ², et rien n’empêche l’autorité saisie de contrôler l’acte à l’aune de règles qui n’ont pas été invoquées devant elle. Par conséquent, les arguments de l’auteur du recours ne restreignent pas les possibilités de régularisation, en ce sens que l’administration peut prendre une mesure pour purger un vice que l’auteur du re- cours n’avait pas relevé. Les règles qui régissent l’intervention du contrôle juridictionnel sont tout autres.

2. Un contrôle juridictionnel étroit

110. — Le contrôle juridictionnel est schématiquement un contrôle provoqué et enserré dans une demande argumentée.

111. — Le caractère provoqué du contrôle juridictionnel est moins évident qu’il n’y paraît. S’il n’est guère douteux que le juge ne se prononce qu’exceptionnellement — pour dire peu — de sa propre initiative, l’explication de ce constat n’est pas aisée.

1. C.É., Sect., 18 nov. 2005, M. Houlbreque, req. nº 270075 ; préc.

On pourrait d’abord penser que l’absence de spontanéité du contrôle juridictionnel relève du concept même de juge. Autrement dit, prima facie, l’un des critères de la juridiction serait qu’elle ne prend des décisions que dans le cadre d’une saisine. Or tant la jurisprudence que la doctrine administrative ne retiennent pas une telle définition de la juridiction.

D’une part, à notre connaissance, aucune décision du Conseil d’État n’a refusé la qualifica- tion de juridiction à un organe pouvant se prononcer en l’absence de saisine. Plus encore, dans une décision Société Habib Bank Limited de 2000, le juge administratif a admis qu’un organe pouvait se saisir lui-même sans perdre son caractère juridictionnel : « la possibilité conférée à une juridiction […] de se saisir de son propre mouvement d’affaires qui entrent dans le domaine de compétence qui lui est attribué n’est pas, en soi, contraire à l’exigence d’équité dans le procès énoncée par ces stipulations » ¹.

D’autre part, dans l’article de référence qu’il a consacré à la notion de juridiction, René CHAPUS n’évoquent pas ce problème ². Une phrase écrite par Raymond ODENT pourrait ce- pendant venir au soutien d’une définition du juge par le fait qu’il ne peut pas prendre sponta- nément une décision ³, mais elle reste assez isolée. Certains auteurs en droit privé retiennent également la saisine comme un élément de la définition du juge ⁴.

Puisque la spontanéité du contrôle n’exclut pas absolument la qualité de juridiction, peut être son caractère exceptionnel résulte-t-il d’une règle interdisant au juge de se prononcer en dehors d’une saisine. En d’autres termes, le caractère provoqué du contrôle ne relèverait pas de la notion de juridiction mais de son régime. Ainsi, dans un avis qu’elle a rendu sur un projet de loi relatif au Conseil supérieur de la magistrature, la section de l’intérieur du Conseil d’État a identifié un « principe constant du droit français » selon lequel « une juridiction n’a pas le pouvoir de se saisir elle-même » ⁵. Il faut entendre par là, comme il ressort de l’article 1er du

1. C.É., 20 oct. 2000, Société Habib Bank Limited, req. nº 180122, Req., p. 433 ; concl. Francis Lamy.

2. René CHAPUS, « Qu’est-ce qu’une juridiction ? La réponse de la juridiction administrative », Mélanges en l’honneur de Charles Eisenmann, Paris, Cujas, 1975, p. 285.

3. Raymond ODENT, Contentieux administratif, t. 1, p. 597 : une juridiction est un « organisme qui est saisi de litiges, qui a pour mission de les régler en se fondant sur des considérations d’ordre juridique et qui les tranche avec force de vérité légale. »

4. Cf. notamment Georges WIEDERKEHR, « Qu’est-ce qu’un juge ? », Nouveaux juges, nouveaux pouvoirs ? Mélanges en l’honneur de Roger Perrot, Paris, Dalloz, 1996, p. 583 : « C’est ainsi qu’on doit comprendre la règle qui interdit au juge de se saisir lui-même car l’autosaisine démontrerait qu’il se sent concerné par l’affaire. L’arti- cle premier du nouveau CPC prévoit qu’elle peut comporter des exceptions légales. Mais on peut douter que ces exceptions puissent correspondre à des procédures vraiment juridictionnelles, autrement dit à des cas où le juge exerce vraiment la fonction de juger. »

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code de procédure civile ¹, qu’un juge n’a pas, en principe, ce pouvoir mais qu’il peut en être doté par un texte spécifique. En outre, le Conseil constitutionnel a fixé des limites dans les- quelles le législateur peut instaurer une auto-saisine ².

En définitive, la procédure de saisine d’office n’est pas incompatible avec la qualification de juridiction mais elle est très exceptionnelle ³. On relèvera d’ailleurs que le code de justice ad- ministrative prévoit que les juridictions administratives générales « [sont] saisie[s] par requête » ⁴. Il en découle que la régularisation en cours d’instance n’est pas issue du constat spontanée d’une irrégularité mais qu’elle suit toujours la saisine du juge dans un litige particu- lier.

112. — S’agissant ensuite des conclusions et des moyens invoqués devant le juge, le contrôle juridictionnel est enserré dans les limites de la demande qui introduit l’instance. Il est fait interdiction au juge de se prononcer ultra ou infra petita. D’une part, et sauf disposition contraire, il est fait interdiction au juge de se prononcer sur la régularité d’un acte ou d’une partie d’un acte qui n’est pas contesté devant lui ⁵. D’autre part, et sauf disposition contraire, le juge ne peut pas contrôler l’action administrative à l’aune de règles qui n’ont pas été invo- quées par les parties au litige, à l’exception de celles qui peuvent donner lieu à des moyens d’ordre public ⁶. En effet, le juge peut, quels que soient les moyens soulevés devant lui, pro-

1. Cet article dispose que « seules les parties introduisent l’instance, hors les cas où la loi en dispose autre- ment. »

2. C.C., 7 déc. 2012, Société Pyrénées services et autres, déc. nº 2012-286 Q.P.C. ; C.C., 1er juill. 2016, déc. nº 2016-548 Q.P.C., Société Famille Michaud Apiculteurs SA et autre : « Une juridiction ne saurait, en principe, disposer de la faculté d’introduire spontanément une instance au terme de laquelle elle prononce une décision revêtue de l’autorité de chose jugée. La Constitution ne confère pas à cette interdiction un caractère général et absolu, sauf si la procédure a pour objet le prononcé de sanctions ayant le caractère d’une punition. Dans les autres cas, la saisine d’office d’une juridiction ne peut trouver de justification qu’à la condition qu’elle soit fon- dée sur un motif d’intérêt général et que soient instituées par la loi des garanties propres à assurer le respect du principe d’impartialité. »

3. Jean-François KERLÉO, « L’auto-saisine en droit public français », R.F.D.A., 2014, nº 2, p. 297 et s. 4. Art. R. 411-1 du C.J.A.

5. C.É., 8 août 1919, Sieur Delacour ; Rec., p. 738 : « au nombre [des] règles générales qui s’imposent, même en l’absence d’un texte exprès, à toutes les juridictions, figure celle d’après laquelle le juge ne peut statuer que sur les conclusions dont il est saisi par les parties en cause ».

6. Cf. notamment Jacques FOURNIER, Guy BRAIBANT, chron. sur C.É., 26 mars 1956, Dame veuve Ginestet, A.J.D.A., 1956, p. 224 : « Saisi d’un recours contre un acte administratif, le juge, mis à part les moyens d’ordre public, qui sont rares, n’examine que les moyens soulevés par le requérant : il n’est pas saisi de l’ensemble des problèmes de légalité posés par l’acte attaqués, mais seulement de ceux que le requérant lui a soumis ; le rejet du recours ne signifie pas que l’acte est légal en soi, mais qu’il l’est au regard et dans la limite de l’argumentation du recours. »

noncer l’irrégularité d’un acte administratif — dès lors, évidemment, qu’il est contesté devant lui — lorsqu’il est entaché d’une incompétence, par exemple ¹. En dehors de ces cas, si un requérant ne soulève pas un moyen de nature à convaincre le juge de l’irrégularité de l’acte qu’il lui défère, celui-ci doit être considéré comme régulier. Il n’y a là rien d’« aberrant » ².

Par conséquent, lorsque la régularisation a lieu en cours d’instance ou immédiatement après une décision juridictionnelle, elle est conditionnée par les moyens invoqués par le requé- rant et par ceux que le juge peut soulever d’office. Par exemple, le champ de la régularisation d’un permis de construire en cours d’instance est déterminé par les moyens fondés que le re- quérant soulève devant le juge ³. Dès lors, si aucun moyen de sa requête n’est fondé, il n’y a pas lieu pour le juge d’inviter l’administration à prendre une mesure de régularisation. L’admi- nistration peut cependant constater l’illégalité du permis en dehors de l’instance et procéder spontanément à sa régularisation ⁴. Il est également possible pour le juge de relever d’office un

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