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B — L’absence de valeur normative en matière de régularisation

Dans le document La régularisation en droit administratif (Page 153-167)

189. — La nature du vice ne permet pas de préjuger de son caractère remédiable. Il existe des exemples de régularisation pour tout type d’irrégularité. Pour le montrer, nous introdui- rons à ce stade une distinction entre deux modes de régularisation, direct et indirect. Nous entendons par « régularisation directe » les procédés qui permettent de rendre régulière une norme par une action sur l’acte qui en est le support et par « régularisation indirecte », les procédés qui consistent, à l’inverse, à édicter une norme nouvelle pour rendre régulière soit une autre norme, soit une situation factuelle. La catégorisation classiques des vices qui peu- vent affecter les normes administratives n’a d’influence ni sur les procédés directs (1), ni sur les procédés indirects (2) de régularisation.

1. L’absence d’influence de la nature du vices sur le recours à la régularisa- tion directe

190. — Le recours à un procédé de régularisation directe n’est pas conditionné par la natu- re du vice identifié. Il peut ainsi être remédié aux incompétences, aux vices de forme et de procédure, à l’irrégularité des motifs et à la violation de la règle de droit.

191. — La décision prise par une autorité incompétente peut être régularisée lorsqu’est substitué à l’acte qui en est le support un nouvel acte signé par l’organe régulièrement habilité. Ce nouvel acte peut, par exemple, être adopté par le supérieur hiérarchique de l’organe ayant initialement pris la décision ². Mérite également d’être mentionnée l’affaire Section française de

1. C.É., 20 févr. 1957, Société pour l’esthétique générale de la France, req. nº 21633 ; Rec., p. 115 : « la validité doit être appréciée à la date de [l]a signature ».

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l’Observatoire international des prisons jugée le 4 juin 2012. En l’espèce, par une décision non

formalisée, le ministre de la Justice avait mis en place un système de traitement automatisé de données relatives à des détenus. Dans sa décision, le Conseil d’État considère d’abord qu’une telle mesure aurait dû être adoptée par décret en Conseil d’État pris après avis de la Commis- sion nationale de l’informatique et des libertés ; l’acte était donc entaché d’incompétence. Cependant, la juridiction relève qu’après l’introduction de la requête, un tel décret a été pris, ce qui a permis de régulariser la norme contenue dans la note initiale, ainsi que, de manière indirecte, la situation matérielle qui en a résulté — c’est-à-dire les données recueillies par l’ad- ministration pénitentiaire ¹.

192. — Il peut également être remédié aux vices de forme et de procédure. Sur recours gracieux, hiérarchique ² ou obligatoire ³, un acte régulier peut ainsi être substitué à l’acte ini- tial affecté d’un vice de procédure. S’agissant des autorisations d’urbanisme, l’administration peut ainsi délivrer un permis modificatif pour remédier à l’irrégularité de la procédure ayant conduit à la délivrance d’un permis de construire initial ⁴. En outre, et nous y reviendrons, le Conseil d’État a admis que l’accomplissement ex post de la formalité procédurale initialement omise ou mal exécutée peut régulariser un acte ⁵. Dans cette hypothèse, l’acte initial n’a pas à être refait car la formalité réalisée postérieurement s’y incorpore, en quelque sorte.

De manière tout à fait notable, le Conseil d’État a également admis la possibilité de pallier l’incompatibilité entre une procédure nationale et les objectifs d’une directive. En effet, dans une décision que nous présenterons de manière détaillée ⁶, il a été jugé que l’administration pouvait régulariser en cours d’instance une autorisation environnementale délivrée conformé- ment à une procédure nationale elle-même contraire au droit de l’Union européenne. Dans

1. Cf. pour exemple C.É., 4 juin 2012, Section française de l’O.I.P., req. nº 334777 ; préc.

2. Cf. notamment C.É., Sect., 16 mai 1958, Société de courtage et d’affrètement fluvial ; Rec., p. 276 ; C.É., Sect., 19 nov. 1965, Époux Delattre-Floury, req. nº 62712 ; Rec., p. 623.

3. C.É., Sect., 18 nov. 2005, M. Houlbreque, req. nº 270075 ; préc.

4. C.É., 2 févr. 2004, S.C.I. La fontaine de Villiers, req. nº 238315 ; Rec., tables, p. 914 ; B.J.D.U., 2004, p. 25, concl. Mattias GUYOMAR. En l’espèce, le permis modificatif a été délivré après la consultation, ini- tialement omise, de l’architecte des bâtiments de France.

5. C.É., 22 sept. 2014, SIETOM de la région de Tournan-en-Brie, req. no 367889 ; Rec., tables, p. 753 ; B.J.D.U., 2014, p. 469, concl. XAVIER DE LESQUEN ; A.J.D.A., 2015, p. 106, note Tristan POUTHIER. Cf. infra, p. 326 et s.

6. C.É., avis, 27 sept. 2018, Association Danger de tempête sur le patrimoine rural et a., req. nº 420119 ; Rec., p. 340, concl. Louis DUTHEILLET DE LAMOTHE; A.J.D.A., 2019, p. 513, Yannick FAURE, Clément MALVERTI. Cf. infra, p. 519 et s.

une telle hypothèse, il revient au juge de définir les modalités de cette régularisation. En som- me, il même possible de remédier à la méconnaissance du droit de l’Union.

193. — Le juge ¹ et l’administration sur recours hiérarchique ² peuvent en outre remédier aux erreurs affectant un motif ou une base légale ayant conduit l’administration à prendre une décision. On peut également relever que, par une décision ancienne et isolée, le Conseil d’État a rejeté le moyen de détournement de pouvoir invoqué à l’encontre d’un arrêté de péril au motif qu’à cette décision s’était substituée celle du juge du tribunal administratif, disposant dans ce contentieux de pouvoirs de pleine juridiction. Cette motivation peut être interprétée comme une permission faite au juge de plein contentieux de substituer à la décision de l’ad- ministration, entachée d’un détournement de pouvoir, la sienne purgée de tout vice ³.

194. — Enfin, et cela a déjà été évoqué ⁴, il peut être remédié à un vice entachant la nor- me elle-même, c’est-à-dire le contenu de l’acte normatif. Relèvent de cette hypothèse divers procédés, tels que la réformation administrative ⁵ — dans le respect des règles relatives à l’abrogation — ou juridictionnelle ⁶, la modification unilatérale ou conventionnelle des clau- ses d’un contrat administratif ⁷, la modification des clauses d’un contrat de recrutement avec ⁸

1. C.É., Sect., 3 déc. 2003, Préfet de la Seine-Maritime c. M. El Bahi, req. nº 240267 ; préc., s’agissant de la substitution de base légale, à laquelle le juge peut éventuellement avoir recours d’office ; C.É., 6 févr. 2004, Mme Hallal, req. nº 240560 ; préc., s’agissant de la substitution de motifs, à laquelle le juge peut recourir sur deman- de de l’administration défenderesse.

2. C.É., 23 avr. 1965, Dame veuve Ducroux, req. nº 60721 ; Rec., p. 231. 3. C.É., 30 mars 1984, Mme Wolff, req. nº 34786 ; Rec., tables, p. 718. 4. Cf. supra, nos 167 et s.

5. Cf. Jean-Jacques ISRAËL, op. cit., p. 181 et s.

6. La réformation juridictionnelle prend des formes diverses : réformation en plein contentieux, rectification d’une erreur matérielle commise par l’administration dans la rédaction d’une ordonnance du gouvernement (C.É., 25 mars 2002, Caisse d’assurance-accidents agricole du Bas-Rhin, req. nº 224055 ; Rec., p. 110), modifica- tion du champ d’application territorial d’un décret fixant le périmètre d’un site classé (C.É., Ass., 16 déc. 2005, Groupement forestier des Ventes de Nonant, req. nº 261646 ; Rec., p. 183 ; A.J.D.A., 2005, p. 320, concl. Yann AGUILA) ou encore annulation partielle d’un règlement en tant qu’il comporte quelques mots, modifiant ainsi à la marge la norme signifiée (pour ex. C.É., 11 janv. 2006, Association des familles victimes du saturnisme et a., req. nº 267251 ; Rec., p. 11).

7. Cf. supra nos 95 et s.

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ou sans ¹ l’accord de l’agent public, ou encore la délivrance d’un permis de construire modifi- catif ², le cas échéant sur invitation du juge ³.

Peut-on cependant parler de « régularisation » pour toute modification d’une norme en vue de la rendre régulière ? À partir de quel stade d’altération du contenu peut-on encore parler d’une simple correction ? Cette question sera traitée dans le prochain titre. Nous nous conten- terons pour le moment de dire que se trouve ici l’une des limites de la régularisation directe d’une norme dont le contenu même est irrégulier : lorsqu’une profonde altération est néces- saire pour la rendre conforme au droit, la qualification de régularisation n’est plus satisfaisan- te.

Cette problématique ne concerne d’ailleurs pas exclusivement la régularisation des normes dont le contenu est vicié mais aussi celles dont les motifs sont erronés. En effet, lorsque l’ad- ministration fait valoir que la décision qu’elle a prise pouvait être justifiée par un motif régu- lier, il appartient au juge « d’apprécier s’il résulte de l’instruction que l’administration aurait pris la même décision si elle s’était fondée initialement sur ce motif » ⁴. Cela montre une nou- velle fois que le recours aux procédés de régularisation ne dépend pas de la nature du vice constaté.

Cependant, même lorsque le contenu d’une norme est vicié par essence, la régularisation ne peut pas être totalement exclue. En effet, il est parfois possible dans une telle hypothèse d’avoir recours à la régularisation indirecte.

2. L’absence d’influence de la nature du vice sur le recours à la régularisation indirecte

195. — La régularisation indirecte peut revêtir différentes formes. Elle peut consister en une modification des règles substantielles applicables à un acte ou à une situation. Un tel pro- cédé, souvent qualifié de « validation », peut être mis en œuvre par le législateur. Or les lois de

1. C.É., 22 sept. 2017, M. Leroy, req. nº 401364 ; sera mentionné aux tables du Recueil ; A.J.D.A., 2017, p. 1810, note Carine BIGET : « Considérant que, lorsqu’elle n’implique la modification d’aucun de ses éléments substantiels, l’administration procède à la régularisation du contrat de l’agent, sans être tenue d’obtenir son accord ».

2. C.É., 9 déc. 1994, S.A.R.L. Séri, req. nº 116447 ; Rec., tables, p. 1261.

3. Art. L. 600-5 (par ex. C.É., Sect., 15 févr. 2019, Commune de Cogolin, req. no 401384 ; préc.) et L. 600-5-1 (par ex. C.É., 10 juill. 2019, M. et Mme Jardin c. commune de Sanary-sur-Mer, req. no 408232 ; préc.) du code de l’urbanisme.

validation peuvent concerner toutes les irrégularités. Le législateur est seulement tenu de pré- ciser soigneusement le vice pour lequel l’acte doit être considéré comme régulier, que ce vice ne soit pas une inconstitutionnalité et que le maintien de l’acte relève d’un motif impérieux d’intérêt général ¹. La nature de l’irrégularité ne détermine donc pas la possibilité d’avoir re- cours à ce type de procédé correcteur.

196. — La régularisation indirecte consiste généralement à modifier les règles qui rendent un objet fondamentalement illégal (a) ou à conférer une base légale valide à un objet qui en est dépourvu (b).

a. La régularisation des actes fondamentalement illégaux

197. — La régularisation consiste dans ce cas non pas à modifier l’objet contraire au droit mais à modifier le droit afin que l’objet devienne régulier. Cette technique permet de remédier au vice dont un acte est fondamentalement atteint. Nous mentionnerons deux décisions pour illustrer ce point.

198. — La première décision a été rendue le 16 décembre 2016 dans une affaire Société

Ligérienne Granulats SA et ministre de l’Écologie, du développement durable et de l’énergie ². Était

en l’espèce contestée la délivrance en mars 2011, par le préfet du Loiret, d’une autorisation d’exploiter une carrière. Les requérants se fondaient sur deux arguments principaux pour de- mander son annulation. Le premier argument était tiré de la contrariété entre l’autorisation et le plan local d’urbanisme de la commune de Mardié qui, s’agissant de la zone « Nd » concer- née par le projet, permettait seulement la création d’installations compatibles avec la préserva- tion des sites. Cependant, à la demande du préfet du Loiret, la commune a modifié son plan

1. Cf. notamment C.C., 14 févr. 2014, déc. nº 2013-366 Q.P.C., S.E.L.A.R.L. P.J.A. ; A.J.D.A., 2013, p. 1204, note Jérôme ROUX.

2. C.É., 16 déc. 2016, Société Ligérienne Granulats SA et ministre de l’Écologie, du développement durable et de l’énergie, req. nos 391452 et 391688 ; Rec., p. 566 ; B.J.D.U., 2017, p. 88, concl. Xavier DE LESQUEN ; A.J.D.A., 2017, p. 694, note Jean-Charles ROTOULLIÉ.

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local d’urbanisme en décembre 2011 ¹. Le site d’extraction s’est alors trouvé classé dans une zone « Nb », où ne sont interdites que les constructions et installations qui n’ont pas de lien avec l’exploitation d’une carrière. Dès lors, si la conformité de l’autorisation aux règles d’occu- pation des sols était très incertaine lorsque le terrain d’assiette de l’installation était classé en zone Nd, elle ne donne lieu à aucune hésitation à partir de son classement en zone Nb. Ainsi le préfet du Loiret a-t-il imposé à la commune de Mardié de prendre une mesure de nature à régulariser l’autorisation qu’il a lui-même délivrée. Saisie de cette affaire, la cour administrati- ve d’appel de Nantes a rejeté ce moyen : « dans le dernier état de la procédure, la délivrance de l’autorisation précitée était, contrairement à ce que soutient la commune, conforme aux pres- criptions du document d’urbanisme applicable sur le territoire de la commune de Mardié ».

Toutefois, et c’était le second argument des requérants, l’autorisation d’exploiter la carrière n’était pas non plus compatible avec les prescriptions du schéma de cohérence territoriale de l’agglomération orléanaise, qui prévoit la création d’une coupure verte dans une zone située à l’est de la commune Mardié, et dans laquelle l’exploitation de la carrière était autorisée. Ainsi, non seulement le plan local d’urbanisme modifié, mais également l’autorisation délivrée par le préfet étaient incompatibles avec les prescriptions du schéma de cohérence territoriale. La cour administrative d’appel de Nantes a accueilli ce second moyen : jugeant que la création de la zone Nb par le plan local d’urbanisme de la commune de Mardié n’était pas compatible avec les orientations et les objectifs définis par le schéma de cohérence territoriale, elle a décla- ré ce document illégal et annulé l’autorisation du préfet ².

Saisi d’un pourvoi en cassation contre cet arrêt, le Conseil d’État adopte un raisonnement différent. En effet, s’estimant saisie d’un recours de plein contentieux, la cour avait contrôlé la conformité de l’autorisation d’exploitation de la carrière aux règles d’urbanisme applicables à

1. Cette modification, qui ne ressort ni de la décision du Conseil d’État, ni des conclusions de Xavier DE LESQUEN. Elle est cependant mentionnée dans le premier arrêt de la cour administrative d’appel (C.A.A. Nan- tes, 11 mai 2015, Commune de Mardié et association Mardiéval, req. nos 13NT01425 et 13NT01426 ; Énergie - Environnement - Infrastructures, 2015, nº 7, comm. 63, comm. David GILLIG), dans les conclusions de son rapporteur public Christine GRENIER (non publiées) et dans l’arrêt qu’elle a pris sur renvoi de l’affaire (C.A.A. Nantes, 22 janv. 2018, Commune de Mardié et association Mardiéval, req. no 16NT04082, inéd.). Le fait que la modification ait été demandée par le préfet du Loiret ressort d’ailleurs de ce second arrêt de la cour administra- tive d’appel de Nantes : la commune soutient en effet devant elle que « la modification ultérieure du plan local d’urbanisme, approuvée le 14 décembre 2011, dans la zone d’implantation de la carrière litigieuse, qui est dé- sormais localisée en zone Nb de ce plan, est irrégulière dès lors que cette modification a été imposée par le préfet à la commune sans aucune justification urbanistique » (nous soulignons).

2. Arrêt préc. : « la création de cette zone Nb par le plan local d’urbanisme de la commune de Mardié n’est pas compatible avec les orientations et les objectifs définis par le schéma de cohérence territoriale de l’agglomé- ration Orléans Val de Loire ».

la date de sa décision. Or, invité à le faire par Xavier DE LESQUEN, le Conseil d’État considère que lorsque le juge doit se prononcer sur la légalité d’une autorisation au regard des règles d’urbanisme, il doit le faire vis-à-vis des règles « applicables à la date de sa délivrance ». Une telle solution présente un avantage et un inconvénient. D’une part, elle permet d’éviter l’an- nulation d’une autorisation d’exploitation du seul fait de l’évolution des règles d’urbanisme locales ¹. D’autre part, elle empêche à l’administration de régulariser une autorisation a poste-

riori en modifiant les règles d’urbanisme qui lui sont applicables. En effet, dans une décision M. Colombet rendue par la Section du contentieux le 7 février 1986, le Conseil d’État avait

admis que la modification d’un document d’urbanisme permettait, dans une matière relevant du plein contentieux, de régulariser une autorisation d’exploiter une installation classée déli- vrée antérieurement ². Revenir sur cette caractéristique du recours devait donc priver l’admi- nistration d’un pouvoir de régularisation dont elle disposait depuis longtemps.

C’est pour cette raison que Xavier DE LESQUEN a proposé au Conseil d’État de « préciser qu’en cas de méconnaissance de la règle d’urbanisme en vigueur à la date de l’autorisation, le juge du plein contentieux des ICPE a la faculté de prendre en compte la circonstance, appré- ciée à la date à laquelle il statue, que le PLU a été modifié et ne fait plus obstacle à l’implanta- tion d’installations relevant de la catégorie de celle en cause » ³. On peut ainsi lire dans les motifs de la décision Société Ligérienne Granulats SA : « eu égard à son office, la méconnaissan- ce par l’autorisation des règles d’urbanisme en vigueur à cette date ne fait pas obstacle à ce qu’il [le juge] constate que, à la date à laquelle il statue, la décision a été régularisée par une modification ultérieure de ces règles ». Le Conseil d’État, qui ne se prononce pas sur le fond de l’affaire ⁴, confirme ainsi la faculté dont dispose l’administration de régulariser, de manière indirecte, une autorisation d’exploiter une installation classée en modifiant les règles d’urba- nisme qui lui sont applicables.

1. Xavier DE LESQUEN, concl. C.É., 16 déc. 2016, Société Ligérienne Granulats SA et ministre de l’Écologie…, B.J.D.U., 2017, nº 2, p. 89.

2. C.É., Sect., 7 févr. 1986, M. Colombet, req. no 36746 ; Rec., p. 29. 3. Xavier DE LESQUEN, concl. préc., B.J.D.U., 2017, nº 2, p. 90.

4. La cour administrative d’appel de Nantes s’est prononcée sur le renvoi dans un arrêt du 22 janvier 2018 (req. no 16NT04082), dans lequel elle applique le raisonnement prescrit par le Conseil d’État. La cour apprécie dans son arrêt la légalité de l’autorisation au regard des prescriptions d’urbanisme applicables au moment de sa délivrance, c’est-à-dire le plan d’occupation des sols approuvé par la commune en 1998 et le SCOT de l’agglo- mération orléanaise approuvé en 2008. La cour juge que l’autorisation est conforme à toutes les prescription d’urbanisme et rejette les requêtes de la commune de Mardié et de l’association Mardiéval. La modification du plan d’occupation des sols imposée par le préfet du Loiret n’était donc pas nécessaire.

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199. — La seconde décision a été rendue par la cour administrative d’appel de Bordeaux en 2017 ¹, également relative au droit de l’urbanisme. En 2011, le maire d’une commune a autorisé une société à lotir un terrain, autorisation dont un particulier a demandé l’annulation au tribunal administratif de Toulouse, notamment pour la raison suivante : l’autorisation de lotir ne tient pas compte de deux prescriptions du plan local d’urbanisme, l’une relative à la largeur des trottoirs et l’autre à l’existence d’une contre-allée en bordure du secteur concerné par l’autorisation. Le tribunal a considéré que l’autorisation était effectivement contraire aux prescriptions du plan local d’urbanisme mais, conformément à l’article L. 600-5 du code de l’urbanisme, il a décidé, d’une part, d’annuler partiellement l’autorisation — le vice n’affec- tant qu’une partie du projet et pouvant être régularisé — et d’autre part, d’accorder un délai de trois mois au pétitionnaire pour qu’il dépose une nouvelle demande de permis d’aménager.

La cour administrative d’appel de Bordeaux a annulé l’autorisation du maire et le jugement du tribunal administratif, tout en confirmant partiellement son raisonnement. En effet, s’agis- sant de la largeur des trottoirs, la cour estime que « la mise en conformité […] peut s’effectuer sans modifier l’assiette de la voirie » et que, « dès lors, la régularisation de ce vice ne peut être regardée comme emportant une modification de la conception générale du projet » ; le tribu- nal a donc valablement pu laisser à la société un délai pour demander la régularisation du permis d’aménager. S’agissant de la contre-allée, prévue par le plan local d’urbanisme mais pas par l’autorisation de lotir, la cour considère que sa prise en compte entraînerait la réduction de sept lots sur quarante-huit, « remet[ant] donc nécessairement en cause la conception générale du projet de lotissement ». Cependant, la cour ajoute que le plan local d’urbanisme révisé en 2012 ne prévoit plus la réalisation de la contre-allée. Or la cour considère, de manière assez surprenante que, « pour l’application des dispositions de l’article L. 600-5 du code de l’urba- nisme, le juge administratif doit apprécier si, à la date à laquelle il statue, le vice qu’il a relevé peut être régularisé par un permis modificatif ». Ainsi, le plan local d’urbanisme ayant été révisé, il suffit, pour régulariser l’autorisation, que le maire délivre un permis modificatif : la régularisation était donc impossible directement — car la correction supposait de porter at-

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