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B — La discussion de l’opposition indirecte

Dans le document La régularisation en droit administratif (Page 185-198)

228. — La distinction de la régularisation et de la modification en tant que cette dernière serait une réfection ne nous paraît pas convaincante. Les deux prémisses sur lesquels elle repo- se — soit l’équivalence entre réfection et modification et l’opposition entre régularisation et réfection — sont critiquables.

En premier lieu, la modification ne nous semble pas pouvoir être absolument assimilée à une réfection. En effet, si la modification d’un acte s’apparente parfois à une réfection partiel- le, cette affirmation ne peut pas être généralisée. En particulier, la modification des contrats et des décisions d’urbanisme — dont la régularisation s’est considérablement développée — suit un régime très différent de la réfection (1).

En second lieu, si la distinction entre réfection et régularisation n’est pas infondée d’un point de vue technique, elle nous semble exagérée lorsqu’elle est portée à un rang théorique. En effet, nous ne voyons pas ce qui permet de considérer qu’une réfection ne s’apparente ja-

mais à la régularisation (2).

1. Les limites de l’assimilation entre réfection et modification

229. — À ce stade, nous ne discuterons pas l’idée, développée initialement par Jean-Fran- çois LAFAIX, selon laquelle la régularisation et la réfection sont deux procédés fondamentale- ment distincts. Pour le moment, notre critique ne portera que sur l’utilisation de cette idée par Élise LANGELIER et Aurélie VIROT-LANDAIS, au sein du raisonnement suivant : la modifica- tion d’un acte s’apparente toujours à une double opération d’abrogation et de réitération, ce qui fait d’elle une réfection, absolument distincte de la régularisation.

La modification ne peut pas être généralement considérée comme une réfection. Il est en effet des hypothèses dans lesquelles ces deux procédés sont absolument distincts : la modifica- tion d’un acte s’oppose parfois à sa réfection. Tel est en particulier le cas s’agissant de deux procédés dont la mise en œuvre relève parfois, selon le vocable du législateur ou du juge, de la

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régularisation : le permis de construire modificatif (a) et l’avenant à un contrat public (b). Ces deux procédés de modification ne consistent pas à refaire le permis de construire initial ou le contrat.

a. L’assimilation discutable du permis modificatif à une réfection

230. — L’édiction d’une décision modificative ne peut pas être généralement assimilée à une réfection. Ainsi la délivrance d’un permis modificatif ne consiste-t-elle pas à refaire le permis de construire initial. En effet, une grande partie du régime spécifique du permis modi- ficatif tient à ce qu’il se distingue d’une véritable technique de réfection du permis de construire, consistant pour le pétitionnaire à demander, et pour l’administration à délivrer un nouveau permis. Dans ses conclusions sur l’affaire M. Le Roy tranchée par la Section du contentieux en 1982, Yves ROBINEAU a proposé une définition, souvent reprise, du permis modificatif : « à la différence du permis nouveau [il] a pour objet non pas d’accorder un droit de construire juridiquement distinct du précédent, mais de modifier l’étendue d’un droit déjà acquis à titre définitif » ¹. Ainsi le permis modificatif ne peut-il être délivré que s’il existe un permis initial valide ² et si le projet n’a subi que des changements limités. Dans la décision

M. Le Roy, par exemple, le Conseil d’État juge que les modifications projetées doivent être

« sans influence sur la conception générale du projet initial » ³.

Dans l’hypothèse où l’administration délivrerait un simple permis modificatif alors que l’importance des transformations suppose la délivrance d’un permis nouveau, le juge procède- rait à une requalification ⁴ et appliquerait le régime afférent. Il pourrait alors censurer l’absen- ce d’instruction de l’intégralité du projet, alors qu’une demande de permis modificatif ne sup- pose d’instruire le projet que sur ses caractéristiques modifiées. Mais le juge peut également être amené, inversement, à requalifier un permis de construire en simple permis modificatif. Tel a notamment été le cas dans l’ordonnance Mme Besombes et autres rendue par le Conseil d’État en 2002. En l’espèce, le maire de Champigny-sur-Yonne avait pris un arrêté « annulant et remplaçant » un permis de construire un centre commercial et une station-service qu’il avait délivré deux semaines auparavant. Or cet arrêté de « réfection » ne faisait que « repren[dre] l’intégralité des dispositions du premier arrêté à l’exception de l’une d’entre

1. Yves ROBINEAU, concl. sur C.É., Sect., 26 juill. 1982, M. Le Roy, J.C.P. Gén., 1982, II, p. 19892. 2. C.É., 23 juill. 1993, M. et Mme Marin, req. no 118963 ; inédit.

3. C.É., Sect., 26 juill. 1982, M. Le Roy, req. no 23604 ; Rec., p. 316. 4. C.É., 27 févr. 1981, M. Pras, req. no 7574 ; Rec., tables, p. 976.

elles » afin « de ne pas retarder le début des travaux en les subordonnant à la condition de la réalisation préalable d’un carrefour giratoire ». Le Conseil d’État a considéré, sur ce point, que l’arrêté contesté « ne constitu[ait] qu’une décision modificative du premier permis délivré qu’il n’a[vait] pas eu pour effet de retirer » ¹. Ainsi la modification et la réfection d’un permis de construire sont-elles deux techniques distinctes. La modification n’équivaut donc pas toujours à la suppression et au remplacement de l’acte initial. Les dispositions du permis modificatif s’ajoutent à celles du permis initial et, même si les deux actes sont distincts d’un point de vue contentieux ², ils constituent, ensemble, l’autorisation d’urbanisme. Ainsi la modification ne constitue-t-elle pas, dans ce cas, une réfection de l’acte initial.

231. — Cependant, comme nous l’avons précédemment évoqué, le Conseil d’État admet que l’administration reprenne intégralement les caractéristiques du projet autorisé par le per- mis initial au sein d’un permis qui n’a de « modificatif » que le nom. Il pourrait alors sembler que la délivrance du second permis équivaut à la substitution d’une autorisation nouvelle à celle initialement donnée, s’apparentant ainsi à une réfection. Or il n’en est rien.

Dans ses conclusions sur l’affaire S.C.I. La Fontaine de Villiers ³, Mattias GUYOMAR propo- sait au Conseil d’État de suivre la ligne jurisprudentielle tracée par les décisions S.A.R.L. Séri, relative à la délivrance d’un permis modificatif qui assure a posteriori la conformité d’un projet aux règles d’occupation des sols ⁴ et M. Desplanques, s’agissant d’un permis modificatif délivré après avis favorable de l’architecte des bâtiments de France ⁵. Le commissaire du gouverne- ment expliquait que « lorsqu’un permis de construire a été délivré sans que soient respectées des formes ou formalités préalables, une telle illégalité peut être régularisée par la délivrance d’un permis modificatif dès lors que celui-ci répond aux exigences de forme ou a été précédé de l’exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises » ⁶. Mattias GUYOMAR concédait cependant qu’une telle solution supposait de « franchir un pas » en admettant qu’un permis modificatif puisse être délivré « aux seules fins de régulariser la procédure initialement

1. C.É., 6 mars 2002, Mme Besombes et a., req. no 238478 ; Rec., p. 78 ; D.A., 2002, comm. no 119, note Rémy SCHWARTZ (commissaire du gouvernement sur l’affaire).

2. C.É., 8 juin 1990, M. et Mme Laffont et ministre de l’Équipement, no 76190 ; inédit. 3. C.É., 2 févr. 2004, S.C.I. La fontaine de Villiers, req. nº 238315 ; préc.

4. C.É., 9 déc. 1994, S.A.R.L. Séri, req. nº 116447 ; Rec., tables, p. 1262. 5. C.É., 29 mars 1996, M. Desplanques, req. no 129636 ; inédit.

6. Mattias GUYOMAR, concl. sur C.É., 2 févr. 2004, S.C.I. La fontaine de Villiers, B.J.D.U., 2004, p. 26. Cette phrase a été en grande partie incorporée au sein du considérant de principe de la décision.

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suivie » ¹. Or un tel acte a pour objet de « modifier l’étendue d’un droit déjà acquis », et non d’en confirmer toutes les caractéristiques. Dès lors, « la sollicitation d’un permis modificatif dont l’objet n’est pas d’apporter des modifications à la construction projetée mais de repren- dre la procédure d’instruction dans le respect des formalités requises » ne relève-t-elle pas du détournement de procédure ² ? La régularisation d’un permis entaché d’un vice de forme ou de procédure ne nécessiterait-elle pas plutôt la délivrance d’un permis nouveau ? Le commis- saire du gouvernement a répondu à ces questions par la négative en se déclarant sensible « à la nécessité d’insuffler, chaque fois que cela est nécessaire, une dose de réalisme, pour ne pas dire de pragmatisme dans le contentieux de l’urbanisme ». En effet, si la délivrance d’un nouveau permis était nécessaire, le juge aurait en l’espèce dû prononcer l’annulation des deux permis, initial et modificatif, sans que cela n’offre de garantie particulière au requérant puisque le pro- jet peut encore être autorisé, tout en « [alourdissant inutilement] la tâche de l’administration », celle-ci ayant à reprendre intégralement la procédure d’instruction ³. Dans sa décision, le Conseil d’État a suivi les conclusions de Mattias GUYOMAR en considérant com- me un permis modificatif celui par lequel l’administration s’est contentée de remédier à l’irré- gularité purement formelle d’un permis initial.

Si cet examen de la jurisprudence S.C.I. La fontaine de Villiers nous éloigne quelque peu du concept de modification stricto sensu — c’est-à-dire l’altération du contenu d’un acte —, il nous permet d’apprécier les limites de l’assimilation entre la réfection d’une part et l’adoption d’un acte reprenant partiellement ou totalement le contenu d’un acte préexistant d’autre part. En effet, cette assimilation ne convient pas à l’analyse des autorisations d’urbanisme, car la délivrance d’un permis modificatif, qu’il reprenne intégralement ou non les caractéristiques du projet initialement autorisé, n’est pas une réfection du permis primitif. Dès lors, l’édiction d’un acte dont le contenu est semblable à celui d’un acte préexistant ne peut pas être a priori considérée comme une réfection, qu’il faudrait rigoureusement distinguer de la régularisation. Cette assimilation de la modification à la réfection est également fragilisée par l’exemple de la signature d’un avenant, qu’Élise LANGELIER et Aurélie VIROT-LANDAIS considèrent comme un mécanisme de réfection.

1. Ibid. 2. Ibid.

b. L’assimilation discutable de l’avenant à une réfection

232. — Dans leur article consacré aux mérites et aux limites du recours à la régularisation des actes viciés, Élise LANGELIER et Aurélie VIROT-LANDAIS qualifient expressément de « réfec- tion » la signature d’un avenant dans le but de remédier à l’irrégularité d’un contrat ¹. L’assi- milation de l’avenant à une réfection du contrat masque cependant la spécificité du régime de chacun de ces procédés. Il est en effet très différent, d’un point de vue formel, de modifier un contrat et d’en passer un nouveau : tandis que la signature d’un avenant est soumise à des conditions procédurales limitées, la signature d’un nouveau contrat implique de suivre inté- gralement la procédure de passation. Le pouvoir réglementaire a ainsi, dès 1992, encadré la modification du contrat, en précisant à l’article 20 du code des marchés publics qu’en dehors des cas de sujétions techniques imprévues, « un avenant […] ne peut bouleverser l’économie du marché, ni en changer l’objet ». Les articles L. 2194-1 et L. 3135-1 du code de la com- mande publique, respectivement relatifs aux marchés et aux concessions ², prévoient que « les modifications ne peuvent changer la nature globale » du contrat ³, auquel cas l’altération de son contenu implique la poursuite d’une nouvelle procédure de passation, bien plus contrai- gnante pour l’administration.

233. — En outre, l’assimilation de la signature d’un avenant à une réfection fondamenta- lement distincte de la régularisation du contrat ne correspond à l’état actuel de la jurispruden- ce et de la doctrine. Nous le montrerons à l’aune de deux décisions du Conseil d’État que nous avons abordées dans le chapitre précédent.

La première a été rendue en 2016 sur l’affaire Communauté urbaine Marseille-Provence-Mé-

tropole ⁴. En l’espèce, était en cause la légalité d’une délibération portant approbation de la

cession d’une convention d’occupation du domaine public constitutive de droits réels à un délégataire de service public. L’absence de deux stipulations au sein de cette convention ren-

1. Élise LANGELIER, Aurélie VIROT-LANDAIS, « Mérites et limites du recours à la régularisation… », J.C.P. Adm., 2015, nos 30-34, 2245, p. 40, no 4 : « Concrètement, il est remédié à l’irrégularité d’un contrat par l’édiction d’un contrat de substitution ou d’un avenant ».

2. Ces articles codifient les articles 65 de l’ordonnance nº 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics et 55 de l’ordonnance nº 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession

3. Cf. également sur cette question Hélène HOEPFFNER, « La modification des contrats », R.F.D.A., 2016, p. 280.

4. C.É., 11 mai 2016, Communauté urbaine Marseille-Provence-Métropole, req. nº 390118 ; préc. Cf. supra, 140 et s.

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dait son approbation illégale. Il manquait en effet une clause relative à l’agrément de l’admi- nistration en cas de cession de ses droits par l’occupant ¹ et une autre interdisant la constitu- tion d’une hypothèque qui garantirait un emprunt contracté pour la réalisation d’une opéra- tion dépourvue de lien avec la parcelle occupée ². Le Conseil d’État a donc annulé cette déli- bération « sans préjudice de la possibilité pour les parties de décider de régulariser le contrat en mettant en conformité les stipulations de la convention conclue le 21 mars 2005 avec les dispositions du code général de la propriété des personnes publiques aujourd’hui applicables ».

La seconde décision a été rendue l’année suivante sur l’affaire Ville de Paris contre M. Ha-

non ³, dans laquelle le Conseil d’État a repris la même formule que dans la décision Commu- nauté urbaine Marseille-Provence-Métropole. Le juge prononce en effet l’annulation d’une déli-

bération approuvant la conclusion d’un bail emphytéotique administratif « sans préjudice de la possibilité pour les parties de régulariser le bail en y insérant » la clause qui lui faisait défaut — il s’agissait en l’occurrence d’une clause résolutoire garantissant, conformément à l’article L. 1311-2 du code général des collectivités territoriales, l’affectation du bien donné à bail à une association cultuelle.

Le Conseil d’État admet donc que les parties puissent, en signant un avenant, régulariser — c’est en tout cas le verbe employé dans ces décisions — un contrat dont l’illégalité tient à ce qu’une clause devrait y figurer. Jean-François LAFAIX, dans le commentaire qu’il a consacré, avec Étienne FATÔME, à la décision Communauté urbaine Marseille-Provence-Métropole, n’a pas abandonné la distinction qu’il a proposée entre la réfection et la régularisation ⁴. Il écrit ce- pendant qu’en matière contractuelle, c’est « le contrat initial qui est maintenu grâce à […] un avenant » et que « si l’acte initial n’était pas maintenu, il serait difficile de distinguer la régula- risation d’une réfection rétroactive ». En d’autres termes, la signature d’un avenant ne consiste pas, même pour Jean-François LAFAIX, en une réfection du contrat ; il s’agit au contraire d’un moyen d’assurer le maintien formel du contrat initial. Dans une étude plus générale, Jean-François LAFAIX se fonde également sur cette jurisprudence pour considérer que la régu-

1. Art. L. 34-2 du code du domaine de l’État et art. L. 2122-7 du code général de la propriété des personnes publiques.

2. Même art. du code du domaine de l’État et art. L. 2122-8 du code général de la propriété des personnes publiques.

3. C.É., 10 févr. 2017, Ville de Paris c. M. Hanon, req. nº 395433 ; préc.

4. Etienne FATÔME, Jean-François LAFAIX, « Attribution et consolidation des titres d’occupation du domaine public », note sur C.É., 11 mai 2016, Communauté urbaine Marseille-Provence-Métropole, A.J.D.A., 2017, p. 611 et s., spéc. note no 5.

larisation d’un contrat peut impliquer la passation d’un avenant ¹ : celle-ci doit être distinguée de la réfection, qui consiste en revanche « à passer un nouveau contrat ayant le même objet que celui qui était irrégulier et qui disparaît » ². Ainsi, d’un point de vue théorique, la signatu- re d’un avenant ne doit pas être confondue avec la réfection du contrat : tandis que la premiè- re n’affecte pas l’existence même du contrat initial et n’en altère le contenu que de manière limitée, la seconde le remplace totalement. En cela, Élise LANGELIER et Aurélie VIROT-LAN- DAIS vont au delà de la distinction proposée par Jean-François LAFAIX.

234. — La passation d’un avenant, à l’instar de la délivrance d’un permis modificatif, sont des procédures distinctes de la réfection. L’assimilation des procédés de modification, de repri- se partielle et de réfection d’un acte n’est donc pas satisfaisante.

Nous aurions également pu invoquer au soutien de cette critique le procédé de la substitu- tion de motifs ³, qui est assez largement considéré comme une régularisation ⁴. Il s’agit en effet d’une modification juridictionnelle de l’acte initial pris par l’administration : le processus rationnel ayant conduit l’administration à prendre une décision particulière est partie inté- grante de cet acte. Substituer un motif valable à un motif défectueux revient par conséquent à modifier l’acte initial, non pas son dispositif mais son support logique ⁵. Dans les conclusions qu’elle a prononcées sur l’affaire Mme Hallal, Isabelle DE SILVA explique d’ailleurs qu’en met- tant en œuvre cette technique, le juge administratif « rest[e] dans le cadre de [sa] mission tra-

1. Jean-François LAFAIX, « La régularisation en matière contractuelle », C.M.P., 2017, nos 8 – 9, étude nº 9, nos 67 à 69.

2. Ibid., no 19.

3. C.É., Sect., 6 févr. 2004, Mme Hallal, req. nº 240560 ; préc.

4. Cf. notamment Marc PELLETIER, Les normes du droit fiscal, Paris, Dalloz, 2008, coll. « Nouvelle bibliothè- que de thèses », p. 524 et s. ; Vincent DAUMAS, concl. sur C.É., Sect., 1er juill. 2016, Commune d’Émerainville et a., Rec., p. 302 ; Louis DUTHEILLET DE LAMOTHE, Guillaume ODINET, « La régularisation, nouvelle frontière de l’excès de pouvoir », chron. sur la même décision, A.J.D.A., 2016, p. 1862 ; Henri BOUILLON, « La régularisa- tion d’un acte administratif après annulation conditionnelle : une technique en gestation », A.J.D.A., 2018, p. 144 ; Benoît PLESSIX, « Le droit à l’erreur et le droit au contrôle », R.F.D.A., 2018, p. 852 ; Gweltaz ÉVEILLARD, « Les effets de la régularisation, des effets rétroactifs ? », in Alix PERRIN (dir.), La régularisation, op. cit., p. 57 in fine ; Charles TOUBOUL, « L’objet de la régularisation : de la simple erreur matérielle à une illégalité plus substantielle », ibid., p. 80 ; Pascale GONOD, « La régularisation de l’acte administratif par le juge adminis- tratif », ibid., p. 224 et s. Cf. contra, Jean-Jacques ISRAËL, op. cit., p. 101 et s. L’analyse de l’auteur était cepen- dant relative à une jurisprudence aujourd’hui abandonnée (C.É., Sect., 23 juill. 1976, Ministre du Travail c. URSSAF du Jura ; Rec., p. 362) : Cf. contra également, pour une autre raison : Élise LANGELIER, Aurélie VIROT- LANDAIS, « Mérites et limites du recours à la régularisation… », J.C.P. Adm., 2015, nos 30-34, 2245, no 3 ; Jean-François LAFAIX, « La régularisation en matière contractuelle », C.M.P., 2017, nos 8 – 9, étude nº 9, no 23. Ces auteurs excluent la régularisation juridictionnelle.

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ditionnelle : une éventuelle “confirmation” d’un acte partiellement réformé, mais pas une réfec- tion totale de cet acte » ¹. L’acte administratif n’est donc pas supprimé pour être remplacé par un acte juridictionnel.

Il est dès lors possible de douter de l’affirmation selon laquelle les procédés modificatifs et ceux de régularisation sont absolument distincts, en tant que les premiers relèveraient plutôt de la réfection. Cependant, même en souscrivant à cette affirmation, l’existence de procédés de régularisation modificatifs ne nous paraitrait pas nécessairement exclue. En effet, la distinc- tion de la régularisation et de la réfection nous semble elle-même relative.

2. Les limites de la distinction entre réfection et régularisation

235. — Il ne s’agit pas ici de nier l’existence de toute différence entre la réfection et la régularisation d’un acte, en particulier un acte contractuel. Les arguments avancés par Jean-François LAFAIX dans sa thèse sont, sur ce point, tout à fait convaincants : la réfection d’un contrat est une technique requérant la réalisation d’un nombre bien plus important de formalités qu’une simple régularisation qui préserve l’acte initial ². Les concepts de réfection et de régularisation, lorsqu’ils sont appliqués à un acte, surtout contractuel, peuvent ainsi être conçus comme distincts d’un point de vue technique. En revanche, notre réserve porte sur le caractère très large que Jean-François LAFAIX lui donne, en opposant d’une manière générale ces deux concepts d’un point de vue non pas technique mais fonctionnel. La distinction entre réfection et régularisation nous semble très relative, ce dont il résulte que les procédés modifi- catifs ne nous semblent pas pouvoir être exclus a priori du champ de la régularisation en rai- son d’une éventuelle similitude avec les techniques de réfection.

236. — Jean-François LAFAIX désapprouve en effet l’utilisation du terme « régularisation » pour désigner les techniques assurant le maintien des situations de fait. Il n’emploie d’ailleurs jamais l’expression « régularisation d’une situation », et lorsqu’il y est contraint pour restituer

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