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1.3.1 Les pratiques

Chapitre 5. L’identité: dimension dynamique

II- Représentations identitaires et processus identitaires

Les connaissances que les individus ont d’eux-mêmes et d’autrui, à propos des différents groupes auxquels ils appartiennent et à propos des différents groupes avec lesquels ils sont en interaction sont conçues par Deschamps et Moliner comme étant des représentations identitaires parce qu’elles autorisent et en même temps régissent les comparaisons, les similitudes et les différenciations, elles constituent de ce fait le fondement du sentiment identitaire.

1. Les représentations endogroupes

Les représentations endogroupes sont formées par les connaissances, les informations, les attitudes que le groupe a de lui-même et qu’il a intériorisées dans ses rapports avec les autres groupes. En effet, ces représentations sont construites, en partie, par l’idée que les autres ont de Nous, qui en fonction de nos interactions et nos réactions sont susceptibles de positiver l’image de notre appartenance ou de la dévaloriser. Lorsque l’identité du groupe est menacée, les représentations endogroupes ont tendance à s’homogénéiser pour augmenter la cohésion (Moliner, 2003) du groupe. Quant aux représentations intergroupes, elles sont formées « au travers des jugements portés par des groupes sur d’autres groupes, jugements eux-mêmes déterminés par la nature des rapports entre ces groupes (Deschamps, 1973, p.115). Les stéréotypes sont les éléments les plus consensuels, les plus importants et les plus centraux dans ces représentations. Shérif et al., (1961) montrent que les connotations du contenu des représentations intergroupes dépendent de la nature des relations entre les groupes, la connotation positive revient à un rapport de coopération alors que les connotation négative s’explique par un rapport de compétition. Avigdor (1953) souligne que les rapports intergroupes affectent aussi les caractéristiques que les groupes attribuent les uns aux autres.

2. Les représentations intergroupes

Les représentations intergroupes sont différentes des représentations de soi et des représentations endogroupes parce qu’elles sont principalement collectives, longuement partagées par les membres du même groupe et se constituent au cours des interactions sociales, notamment au cours des rapports intergroupes et interviennent aussi dans ces

Page 134 rapports (1973). Doise (1973) et Deschamps (1973) définissent les représentations intergroupes comme « des jugements portés par des groupes sur d’autres groupes, jugements eux-mêmes déterminés par la nature des rapports entre ces groupes » (Deschamps, 1973, p.715, cité par Vidal et Brissaud-le-Poizat, 2009), elles sont aussi définies par Deschamps et Moliner (2008) comme étant « des représentations sociales relatives à l’endogroupe ou l’exogroupe, et résultant des interactions entre groupes différents ». Ainsi, dans une de ses expériences, Doise (1969) informe les sujets qu’ils vont affronter un groupe antagoniste dans une interaction compétitive. Avant l’interaction, il leur demande de se décrire puis de décrire les membres de l’exogroupe. Il constate que les sujets décrivent les membres de l’exogroupe plus négativement que les membres de leur propre groupe et leur attribuent plus de comportements hostiles. Doise explique cette attitude inverse comme une façon pour justifier les comportements hostiles de l’endogroupe à l’égard de l’exogroupe. Abric (1994) réagit à ces résultats en mettant l’accent sur le rôle que jouent ces représentations dans les processus de comparaison sociale et dans l’affirmation de l’identité sociale. Il écrit que « la représentation de son propre groupe est toujours marquée par une surévaluation de certaines de ses caractéristiques (...) dont l’objectif est bien de sauvegarder une image positive de son groupe d’appartenance » (Abric, 1994, p. 16). Toutes ces considérations prouvent que les représentations et l’identité se conjuguent ensemble pour fournir aux individus des cognitions et des connaissances leur permettant de réaliser des évaluations multiples entre soi et l’endogroupe ou l’endogroupe et l’exogroupe, c'est-à-dire des comparaisons inter et intragroupes, nécessaires pour le maintien d’une identité sociale positive. Ces représentations sont pour Lorenzi- Cioldi (1988) « des croyances qui se rapportent à la structure sociale dans son ensemble qui modulent les processus d’acquisition et d’expression de l’identité sociale » (Lorenzi-Cioldi & Dafflon, 1999, p. 133).

Toutefois, Deschamps et Moliner (2008) expliquent que si les représentations intergroupes sont le produit du processus de catégorisation sociale, les stéréotypes et les prototypes le sont aussi. De ce fait, il ne faut pas réduire les représentations intergroupes aux stéréotypes ou aux prototypes du fait que les premiers sont plus consensuels et les seconds sont plus variés. Rappelons que les traits stéréotypiques peuvent concerner les membres de l’endogroupe (auto stéréotypie) ou de l’exogroupe (hétéro stéréotypie), ils ont pour rôle de simplifier la perception de la catégorie dans quelques traits de caractère ou de comportement de certains de ses membres et d’interpréter les comportements d’autrui ou les informations à son égard (Hamilton et Rose, 1980 ; Synder et Uranowitz, 1978).

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2.1. Fonctions des représentations intergroupes

Les représentations intergroupes ont plusieurs fonctions (Doise, 1973 ; Moliner et Gutermann, 2003 ; Vinet et Moliner, 2006) :

- justifier les comportements des membres d’un groupe à l’égard des membres d’un autre groupe, que ces comportements soient de dominance ou de soumission,

- anticiper les stratégies d’actions permettant aux groupes de réagir et de légitimer leurs actions par avance afin de maintenir la spécificité et l’identité du groupe,

- expliquer les comportements des membres de l’endogroupe ou des membres de l’exogroupe.

2.2. L’impact des représentations intergroupes sur la perception de

l’endogroupe

Quand l’endogroupe produit la représentation que l’exogroupe a de lui, la représentation intergroupe renseigne dans ce cas sur la représentation de la relation qu’il a avec ce groupe. Certains chercheurs la conçoivent comme étant des méta-stéréotypes. Ce terme de méta-stéréotype désigne la représentation qu’un groupe d’individus (A) pense être comme celle (la représentation) qu’un autre groupe (B) adopte à son égard (Vorauer, Main & O’Connel, 1998). L’intérêt du repérage des représentations intergroupes dans notre étude consiste dans l’éclairage des relations intergroupes entre le Musulman Tunisien et le Musulman d’Orient. Rappelons que dans les théories de l’identité sociale, (Tajfel, 1981; Tajfel & Turner, 1986 ; Turner, Hogg, Oakes, Reicher, & Wetherell, 1987; voir aussi Haslam, 1997), le contenu des stéréotypes dépendrait des relations intergroupes et du contexte, en fonction de la relation au fait entre son groupe et l’exogroupe, l’individu va produire si tel ou tel trait caractérisent le plus les membres de son groupe. La représentation intergroupe permet de vérifier à un autre niveau si la représentation endogroupe correspond réellement à celle que l’autre groupe a sur le sien. C’est à partir de cette comparaison que l’on peut juger si l’identité sociale du groupe est positive ou négative.