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2.4.2 Ben Ali et l’Islam

Chapitre 2. L’identité : dimension psychosociale

II- Les théories de l’identité sociale

1. Les processus identitaires selon la théorie de l’identité sociale de Tajfel

1.2. La comparaison sociale

Pour expliquer les effets mis en évidence par l’expérience et voir comment les individus membres d’une même catégorie arrivent à se ressembler davantage entre eux et à se distinguer des autres, Tajfel et Turner (Tajfel, 1978 ; Tajfel et Turner, 1979, 1986) recourent à la théorie de la comparaison sociale de Festinger (1954) et la conçoivent autrement. Tajfel et Turner (1979) expliquent « lorsque les gens s’engagent dans une comparaison sociale, ils sont mus par un besoin de maintenir leur estime de soi. Lorsqu’ils comparent leur catégorie aux autres, ils vont alors privilégier la leur afin de donner une image favorable d’eux- mêmes » (Leyens, Yserbyt et Schadron, 1996, p.90). C’est au cœur de la comparaison que réside la variable motivationnelle de l’estime de soi. Cela montre que les enjeux du conflit entre groupes sont plutôt symboliques que matériels à savoir le statut social, l’estime de soi et les croyances qui valorisent les bénéfices objectifs (Ibid, 1999).

L’estime de soi, par définition, est la valeur émotionnelle que le sujet s’attribue à lui- même. De ce fait, selon la théorie de l’identité sociale, l'individu a toujours besoin de se surestimer par l’appartenance à un groupe socialement valorisé et la comparaison sociale va lui permettre d’atteindre cet objectif en évaluant positivement son endogroupe et dévalorisant les exogroupes. Ce favoritisme endogroupe a pour effet de faire apparaître l’endogroupe différent sur des dimensions jugées importantes et valorisées par la société. L’identité sociale positive est ainsi le fruit d’une comparaison favorable à l’endogroupe et seule la discrimination permet d’atteindre le favoritisme endogroupe. Avec les travaux de Tajfel, la comparaison sociale acquiert deux fonctions, la première, informationnelle, qui vise à valider les opinions personnelles avec celles du groupe, la seconde évaluative qui vise à différencier les groupes pour hausser l’estime de soi et satisfaire le besoin d’avoir une identité sociale positive.

Page 67 Toutefois, Morse et Gergen (1970) ont montré dans une expérience sur l’estime de soi que la comparaison avec autrui peut augmenter tout comme elle peut baisser l’estime de soi. Ainsi, en se comparant à autrui, de niveau social élevé augmente l’estime de soi et le contraire est aussi vrai. D’autres recherches anciennes et récentes (Tversky, 1977 ; Codol, 1987 ; Karylowsky, 1990 ; Mussweiller et Strack, 1999 ; Mussweiller, 2001a et 2001b ; Chokier et Moliner, 2006 ; Chokier et Rateau, 2009) ont montré aussi que les effets de la comparaison varie selon l’ordre du jugement, c'est-à-dire selon que le sujet prend Soi ou Autrui comme point de référence d’une comparaison. Une comparaison de Soi à Autrui tend à générer de l’assimilation alors qu’une comparaison d’Autrui à Soi tend à générer du contraste. De fait, la valeur que le sujet attribue à son estime varie en fonction de l’ordre de la comparaison (Soi/Autrui ou Autrui/Soi) et du statut social du comparant (individu ou groupe), selon que ce comparant est similaire, supérieur ou inférieur à Soi. Ces résultats ont amené les chercheurs à étudier avec le processus de comparaison sociale d’autres dimensions psychologiques comme les performances, les compétences et les représentations sociales. Tous ces travaux ont abouti à distinguer trois types de comparaisons sociales :

1.2.1. La comparaison latérale

Il s’agit, ici, de se comparer avec des individus semblables à soi (même âge, sexe, pays, religion) ou proches (ami, collègue, famille) pour évaluer ses opinions, ses performances et ses compétences (par exemple, être pour ou contre le port du voile relève d’une prise de position en Tunisie). Face à cette incertitude, chacun va chercher à comparer ses positions à celles des Autres qu’il estime «ԜvalablesԜ». La similitude de ses opinions avec les leurs servira à la validité de ses propres opinions. Le sujet sent qu’il a des «ԜalliésԜ» qui légitiment ses prises de position et le réconfortent pour faire face aux opinions adverses. Cette forme de comparaison, quand elle est manipulée par l’expérimentateur, permet de mesurer l’homogénéité du groupe et l'interdépendance de ses membres. En matière d’opinions, la force du consensus autour d’un objet social donné renseigne bien sur l’homogénéité des réponses de l’endogroupe et leur identification au groupe d’appartenance, ce qui peut engendrer des comportements discriminatoires vis-à-vis des autres groupes (Gagnon, 1993).

1.2.2. La comparaison descendante

Il s’agit là de se comparer à des individus inférieurs à soi. Cette forme de comparaison permet d’atteindre un but d’auto valorisation. C’est une comparaison très

Page 68 recherchée par le sujet social parce qu’elle lui permet d’augmenter facilement son estime de soi et d’affronter courageusement les difficultés de la vie.

1.2.3. La comparaison ascendante

Cette comparaison consiste à se comparer avec des individus que l’on estime supérieurs à soi afin de s’auto-évaluer ou s’auto valoriser. C’est là où s’exprime l’envie de progresser. Cette troisième forme de comparaison permet de s’identifier à un supérieur, à un modèle positif afin de satisfaire un sentiment de supériorité. S’il n’y a pas de conflits entre les deux groupes ou individus, la comparaison ascendante sera très bien vécue, le succès de l’un fera le bonheur de l’autre. Cette situation correspond à la relation entre enseignant et élève, entre époux, entre amis et aussi entre groupe d’appartenance et groupe de référence. On peut alors se valoriser par identification ou par émulation. On se sentira important si l’on peut se vanter des mérites d’un ami, d’un époux, d’un enseignant très compétent ou d’un référent.