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La première initiative socialiste et les événements de l’entre-deux-guerres 206 Le contexte du lancement de la première initiative socialiste Depuis cinquante ans, le

CHAPITRE I : L'ELECTION DU CONSEIL FEDERAL PAR LE CORPS ELECTORAL

3. La première initiative socialiste et les événements de l’entre-deux-guerres 206 Le contexte du lancement de la première initiative socialiste Depuis cinquante ans, le

parti radical a une position d’hégémonie non seulement aux chambres, mais aussi au sein du Conseil fédéral et de l'administration fédérale, et le principe de la séparation des pouvoirs n'est pas suffisamment respecté; ainsi naît une bureaucratie radicale de plus en plus puissante qui n'a pas de succès ni dans le domaine des finances fédérales ni dans celui de l'étatisation des chemins de fer. Beaucoup de politiciens veulent une meilleure prise en compte de la séparation des pouvoirs et un exécutif plus responsable.

Dans ces circonstances, une élection partielle au Conseil fédéral a lieu, en 1897, suite à la démission d'Emil Frey.

Trois candidats radicaux se présentent : un représentant de l'aile conservatrice, Paul Speiser, un candidat de l'aile progressiste, Theodor Curti, et Ernst Brenner du centre.

Le groupe parlementaire radical désigne Ernst Brenner comme candidat, mais à l'Assemblée fédérale, c'est Paul Speiser qui semble être le favori parce qu’il est soutenu par le centre libéral et la droite. Ainsi, il faut quatre tours de scrutin à Brenner pour s'imposer face à Speiser par 96 voix contre 811148. Mais cette élection provoque un grand malaise chez les conservateurs et les socialistes.

1144 Gschwend, 1973 p. 4. 1145 Gschwend, 1973 p. 4-5. 1146 Gschwend, 1973 p. 6. 1147 Gschwend, 1973 p. 24. 1148

146 207. Le lancement de l’initiative. Au vu de ces événements, le parti socialiste1149 décide de lancer deux initiatives populaires, l'une demandant que les élections au Conseil national ait lieu selon le mode de la proportionnelle1150, l'autre demandant simultanément l'élection du Conseil fédéral par le peuple et l'augmentation à neuf du nombre des ministres1151.

Les deux initiatives ont abouti en 1899, la première avec 64 478 signatures valables et la seconde avec 56 031 signatures valables.

Les conseillers fédéraux seraient élus par les citoyens lors du renouvellement du Conseil national, c'est à dire tous les trois ans.

"Les vacances qui se produisent dans l'intervalle des trois ans sont immédiatement repourvues pour le reste de la période, à moins que le renouvellement intégral ne doive intervenir dans les six mois"1152.

Les élections s'opèrent en une seule circonscription comprenant toute la Suisse. Deux conseillers fédéraux (sur neuf!) doivent provenir de Suisse romande. Le scrutin a lieu au système majoritaire à deux tours (sont élus, au premier tour, le ou les candidats qui obtiennent la majorité absolue; le second tour est libre et se déroule, bien sûr, à la majorité relative)1153. Le système départemental est maintenu jusqu'à l'entrée en vigueur d'une nouvelle loi sur l'organisation de l'administration et le Conseil fédéral ne peut délibérer qu'en présence d'au moins cinq membres.

208. Les débats parlementaires et le résultat du scrutin. Par 79 voix contre 33, le Conseil national préconise aux citoyens de repousser l’initiative1154. Dans l'autre chambre, celle-ci ne trouve que 7 partisans contre 281155.

Remarquons que poursuivant deux buts distincts, cette initiative concernant le Conseil fédéral viole le principe de l'unité de la matière (art. 121 al. 3 de la Constitution de 1874)1156.

Elle est rejetée le 4 novembre 1900 par 270 522 voix contre 145 926 et par 14 cantons contre 8 (ces huit cantons acceptant sont les sept cantons du Sonderbund, moins Lucerne, ainsi que Glaris et le Tessin; en résumé, des cantons qui n'ont pas encore eu beaucoup de conseillers fédéraux)1157.

A titre de comparaison, l'initiative demandant l'élection proportionnelle du Conseil national est repoussée par 73 voix contre 451158 à la chambre du peuple et par 24 voix contre 15 dans celle des cantons1159; elle est refusée par 244 666 voix contre 169 008 et par dix cantons et demi contre onze cantons et demi (ces onze cantons et demi acceptant regroupent tous les cantons du Sonderbund plus Glaris, le Tessin, Genève et Appenzell Rhodes-Intérieures)1160. 209. Conclusions et suite des événements. Entre 1898 et 1900, la volonté de faire élire les conseillers fédéraux par le peuple relève plus d'une lutte entre partis que d'une exigence démocratique1161.

1149

Voir Aubert, 1967a p. 73 no 183.

1150

Cette initiative veut en outre que chaque canton et chaque demi-canton forme un collège électoral.

1151 FF 1899 IV 906-909. 1152 FF 1899 IV 907. 1153 FF 1899 IV 907. 1154 BO CN 1900 334. 1155 BO CE 1900 496. 1156 Aubert, 1967a p. 153 no 391. 1157 FF 1900 IV 923. 1158 BO CN 1900 286. 1159 BO CE 1900 490. 1160 FF 1900 IV 922. 1161 Gschwend, 1973 p. 24.

Les initiants hésitent à inclure l'élection populaire dans leurs doubles initiatives et, en lançant ces deux initiatives, le parti socialiste fait preuve d'opportunisme; pour lui, l'élection du Conseil fédéral par le corps électoral n'est au fond pas fondamentale.

La récolte des signatures est relativement laborieuse.

De plus, la majorité de la population n'est pas disposée à remettre en cause l'hégémonie radicale; il s'agit plutôt de l'action de quelques politiciens très actifs1162.

L'initiative demandant l'élection du Conseil national à la proportionnelle fait un meilleur score que celle exigeant à la fois l'augmentation du nombre de Conseillers fédéraux et l'élection de ces derniers par le peuple1163; l'élection du gouvernement fédéral par le corps électoral n'a donc pas été au centre des débats - non plus dans la population.

On peut ainsi sérieusement douter que l'élection des magistrats par les citoyens aurait été requise en l'absence des autres questions posées au constituant1164.

En 1913, dans son message au sujet de la loi sur l'organisation de l'administration, le Conseil fédéral se prononce à nouveau contre sa désignation par le corps électoral1165.

En 1917, dans son message au sujet de l'augmentation du nombre de ses effectifs, le Conseil fédéral n'y fait pratiquement pas allusion1166.

La question n'est plus soulevée pendant une vingtaine d'années - du moins à notre connaissance.

4. La seconde initiative populaire socialiste tendant à l’élection du Conseil fédéral

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