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permet de donner naissance à une nouvelle génération d’espoir et à des

Dans le document CHANGÉ A TOUT (Page 22-25)

Entretien avec Michel Sidibé

Le temps pour vous d’achever la lecture de cette phrase, trois nouvelles personnes auront pour la première fois accès à un traitement

anti-VIH qui leur sauvera la vie.

Permettre à 15 millions de personnes d’avoir accès à une thérapie antirétrovirale constitue l’une des principales réalisations de l’histoire de la santé, du financement et du développement à l’échelle mondiale.

Lorsque les objectifs du Millénaire pour le développement ont été fixés en 2000, près de 10 000 personnes en Afrique subsaharienne étaient en mesure d’accéder à un traitement anti-VIH. Pour remettre cela en perspective, la Zambie a inscrit 46 000 personnes supplémentaires au programme de traitement rien qu’au cours du premier trimestre 2015.

La manière dont nous avons atteint 15 millions de personnes est l’exemple incroyable de ce que nous pouvons réaliser si la communauté

internationale s’unit et la preuve que la somme des parties peut créer quelque chose de plus grand que n’importe quel pays ou groupe ait pu imaginer. Lorsqu’un mouvement mondial créé une telle dynamique, cela

permet de donner naissance à une nouvelle génération d’espoir et à des

la communauté internationale n’était pas unie. le sida a révélé le meilleur et le pire dans chacun de nous. en 2000, un traitement anti-vih était disponible sous forme de traitement combiné depuis déjà quatre ans et ce dernier a cristallisé les espoirs et les injustices de la riposte au sida.

faiT : En 2000, les comprimés sont devenus à la fois un symbole d’espoir et de désespoir.

michel : Et c’est compréhensible, car au cours de la première décennie de l’épidémie, on ne pouvait pas offrir grand chose aux personnes mourant du SIDA. Le mieux que l’on pouvait espérer, c’est que votre propre famille ne vous jette pas dehors. Vous auriez donc eu beaucoup de chance que quelqu’un prenne soin de vous, à domicile ou à l’hôpital.

Bien trop souvent, la peur et la suspicion ont donné lieu à des situations impossibles. Le SIDA bouleversait tout. Les grands-mères et les enfants devaient prodiguer des soins et ne plus rien attendre de ceux censés les accompagner. Il s’agit d’une situation qui s’est répétée au sein de communautés dans le monde entier, et notamment en Afrique.

Puis soudainement, l’espoir est apparu sous la forme d’un comprimé, un résultat que les militants avaient réussi à obtenir. Toutefois, vous vous apercevez que tout ce que vous auriez pu gagner en une vie ne suffirait pas pour vous payer le traitement pendant un an. Quel genre d’espoir cette situation doit-elle générer ? La colère a donc commencé à monter.

faiT : À cette époque, 28,6 millions de personnes étaient atteintes du VIH et environ 1,6 millions de personnes étaient décédées de maladies liées au SIDA en 2000.

michel : Avant l’arrivée du traitement contre le VIH, l’histoire du SIDA était avant tout une alternance entre des militants réclamant des actes et des personnes condamnés à mourir en raison de l’inaction de la communauté internationale. Il s’agit d’une histoire qui a perpétué des mythes à propos de ce qui était possible, y compris le mythe selon lequel un traitement combiné ne pouvait pas être administré à tous ceux qui en avaient besoin, et la riposte au SIDA a ouvert les yeux des populations sur ces affirmations ridicules.

L’année 2000 a marqué un tournant. L’histoire a changé. Les gens qui ont eu la chance de bénéficier d’un traitement anti-VIH, après avoir été à l’article de la mort, ont recommencé à travailler quelques semaines plus tard. L’injustice de mourir d’une maladie traitable est devenue intolérable. De même, l’injustice découlant du fait que les gens n’avaient pas les mêmes chances de rester en vie selon le pays où ils vivaient ne pouvait plus être ignorée. La mort de millions de personnes terrassées à la fleur de l’âge à cause du SIDA était de plus en plus connue du grand public et l’épidémie a fini par être considérée par certaines personnes, à l’instar de [l’ancien ambassadeur des États-Unis aux Nations Unies] Richard Holbrooke, comme une menace mondiale pour les économies et la sécurité

Ces idées jumelles de démocratiser les opportunités et de médiatiser une menace à la sécurité mondiale ont effectivement forcé les dirigeants et les communautés du monde à agir. Je suis fier que les Nations Unies aient servi de plateforme pour ce changement, mais admettons aussi qu’il a mis du temps à prendre forme. Fort heureusement, nous n’avons pas ralenti le rythme depuis lors.

Aujourd’hui, un an de traitement anti-VIH coûte moins de

dollars 100 us

faiT : La résolution 1308 du Conseil de Sécurité, le Sommet du Millénaire pour le Développement et la toute première Session extraordinaire de l’Assemblée générale des Nations Unies relative au VIH/SIDA ont tous renforcé l’action en y association des objectifs et des cibles.

michel : Ils sont même allés plus loin : ils ont permis de réunir les chefs d’État et les personnes atteintes du VIH ainsi que l’ensemble des différents partenaires et acteurs qui gèrent et soutiennent la riposte au SIDA depuis lors. Il s’agit de la principale différence à propos de ce mouvement : il a permis d’engager et de responsabiliser chaque secteur et chaque couche de la société.

Les gens ont immédiatement pensé aux obstacles qui empêchaient les malades de rester en vie. L’une des principales percées a été de se convaincre que rien n’était impossible et que personne ne devait être laissé pour compte. Cette vision impliquait le traitement de personnes vivant dans des villages reculés ainsi que ceux vivant dans l’ombre, mais cela a aussi supposé de ne pas avoir peur de s’attaquer aux groupes pharmaceutiques et aux pratiques commerciales injustes.

Prenons le prix du traitement de première intention : 10 000 dollars US par an en 2000. Lorsque vous ajustez ce prix à l’inflation, un an de médicaments coûterait actuellement environ 14 000 dollars US. L’industrie pharmaceutique exerçait une certaine emprise sur les politiques gouvernementales et une véritable mainmise sur les prix. Par ailleurs, n’oublions pas qu’il s’agissait d’une époque où les dirigeants de ce monde négociaient la protection des droits de propriété intellectuelle à l’OMC [Organisation Mondiale du Commerce].

Toute concession pouvait ouvrir grand les portes aux exceptions.

Le Brésil et la Thaïlande se sont alors mis à fabriquer des médicaments antirétroviraux génériques de manière astucieuse : ils ont révélé que les comprimés étaient relativement peu coûteux à fabriquer. Cette révélation a coupé l’herbe sous le pied de l’industrie pharmaceutique et permis à l’ONUSIDA d’engager des négociations avec ces groupes afin de réduire les prix.

Personne ne souhaitait se mettre autour de la table : les responsables des groupes ne voulaient pas être accusés de fixer les prix et les militants estimaient que nous étions fous à la seule idée d’organiser une telle réunion. Cette initiative a constitué une importante étape préliminaire, laquelle a permis une tarification différentielle en fonction des capacités de paiement. Ensuite, une autre percée a eu lieu : des fabricants ont commencé à produire des médicaments génériques en Inde. En 2001, Cipla a réduit le prix des médicaments de 800 dollars US à 350 dollars US. Je me rappelle qu’à cette époque, l’ancien président [des États-Unis] Clinton avait annoncé qu’à la fin de son mandat, la réduction des prix serait sa mission. Aujourd’hui, un an de traitement anti-VIH coûte moins de 100 dollars US.

faiT : Toutefois, les prix avaient-ils été assez réduits à cette époque ? michel : Pas encore. La plupart des pays ne disposaient pas du budget

nécessaire au paiement du traitement, même à prix réduit. En outre, à cette époque, aucun organisme ne finançait le traitement. Kofi Annan [ancien Secrétaire général des Nations Unies] avaient alors appelé à la création d’un fonds afin d’obtenir des résultats sur le terrain. Pour revenir à la question de l’injustice et de la peur, les gens de toutes les couches de la société ont commencé à croire en la possibilité d’une certaine justice et d’autres encore ont reconnu cette épidémie comme une menace à la sécurité. Les arguments qui ont poussé les responsables politiques à riposter au SIDA ont également permis de

« le mouvement

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