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« le mouvement de lutte contre

Dans le document CHANGÉ A TOUT (Page 25-28)

le sida vise essentiellement à garantir, à protéger et à promouvoir les droits des plus vulnérables. »

faiT : Pendant ce temps, les militants ont aussi fait preuve de créativité.

La Campagne d’accès au traitement a poursuivi le gouvernement d’Afrique du Sud en justice afin de forcer le pays à faciliter l’accès aux médicaments antirétroviraux, et des manifestants ont appelé à la modification de la protection des brevets pour réduire les prix.

michel : Je ne soulignerai jamais assez l’importance des militants engagés dans la lutte contre le SIDA. Ils ont utilisé tous les moyens possibles pour maintenir la pression sur tous les acteurs. Les contraintes exercées sur l’OMC en faveur de la reconnaissance des limites de la protection des brevets en cas de crise sanitaire ont donné lieu à des flexibilités de l’Accord sur les ADPIC [Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce] en ce qui concerne les licences obligatoires et les dérogations.

Ces victoires ont enclenché une dynamique et nous a permis d’oser rêver plus grand, comme lorsque Jim Kim a lancé le concept de

« 3 millions de personnes avant 2005 » à l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), une campagne visant à permettre à 5 millions de personnes de bénéficier d'un traitement en l'espace de 3 ans.

faiT : Cette initiative était audacieuse. Au milieu des années 2000, le PEPFAR [le Plan d’urgence du Président des États-Unis pour la lutte contre le sida] a alors été créé et tout ce dont vous avez parlé s’est mis en place.

Quelque 2,2 millions de personnes avaient alors accès à un traitement.

Nous avons raté l’échéance de 2005, mais nous étions en bonne voie de dépasser le seuil de 5 millions en 2008.

michel : La dernière décennie a été placée sous le signe de l’intensification, d’une intensification vraiment massive, et cela ne pouvait se produire que grâce au leadership des pays, à la résilience des communautés et à une vision partagée de l’objectif zéro :

faiT : zéro nouvelle infection à VIH, zéro discrimination, zéro décès lié au sida.

michel : Cette vision nous a accompagné dans des périodes mouvementées : une récession économique, des crises mondiales, des troubles sociaux, des changements de leadership et bien plus. Malgré tout cela, la riposte au SIDA est restée forte et ne cesse d’augmenter afin de satisfaire la demande.

faiT : Qu’est-ce qui explique la réussite du mouvement ?

michel : Le mouvement de lutte contre le SIDA vise essentiellement à garantir, à protéger et à promouvoir les droits des plus vulnérables. Ce sont les mêmes valeurs que Jim Grant [ancien Directeur exécutif d’UNICEF] m’a insufflées au début de ma carrière à l’UNICEF, et ce sont ces mêmes valeurs qui permettent de rassembler des pays et des communautés.

En 2009, j’ai appelé à mettre fin à la mortalité infantile due au VIH.

Dans les pays à revenu élevé, pratiquement aucun enfant ne naissait porteur du VIH, mais dans d’autres régions du monde, quelque 400 000 enfants avaient contracté le VIH. C’était vraiment scandaleux.

Nous avons lancé le Plan Mondial [pour l’élimination de nouvelles infections par le VIH chez les enfants d’ici 2015] en coopération avec le PEPFAR en 2011. Nous avons appelé les pays les plus affectés à agir. Nous avons mobilisé des fonds. Comme résultat, 73 % de toutes les femmes enceintes atteintes du VIH ont accès à des médicaments antirétroviraux et nous avons réduit le nombre de nouvelles infections à VIH chez les enfants de 58 %. Nous avons aussi amélioré la qualité des médicaments administrés aux femmes et aux enfants.

Une chute de 90 % du taux de nouvelles infections à VIH en Chine chez des personnes suivant

un programme de traitement par méthadone.

90  %

faiT : Comment y êtes-vous parvenu ?

michel : Nous avons entièrement changé de stratégie. Auparavant, les pays avaient recours à l’administration d’une dose unique de névérapine, un médicament peu coûteux mais pas assez efficace. Nous avons réclamé que chaque femme enceinte atteinte du VIH ait accès à la trithérapie et bénéficie d’un accès à vie à un traitement contre le VIH, ce que nous appelons l’option B+. Il aurait été facile pour les pays de traîner les pieds, mais étant chargés de faire le point sur l’état d’avancement, nous avons déclaré que nous ne compterions que les femmes recevant une trithérapie par rapport aux objectifs de notre Plan mondial. Sachant cela, aucun pays n’a voulu être à la traîne et nous avons ainsi pu nous assurer qu’il en serait de même pour les femmes.

Dans le même temps, nous avons appelé à l’utilisation de médicaments de meilleure qualité pour les enfants et tout récemment, la FDA [Agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux] a approuvé l’utilisation de minuscules granules pouvant être introduites dans la nourriture des enfants.

faiT : Peut-on parvenir à l’objectif zéro nouvelle infection à VIH chez les enfants ?

michel : C’est ce que Cuba a réussi à faire. Le pays a reçu une certification avant la publication de cet ouvrage. Il existe plus de 60 pays où le nombre de nouvelles infections à VIH chez les enfants est de moins de 50 par an. Au cours des cinq dernières années, nous avons atteint autant d’objectifs qui nous auraient pris 17 ans par le passé.

faiT : Quelle est l’importance du leadership des pays ?

michel : Énorme. Presque chaque pays du monde a mis en place un plan de lutte contre le SIDA, et cette année, 177 pays ont présentés leurs rapports à l’ONUSIDA. Je ne suis plus surpris par le niveau de connaissances des responsables à propos de leurs plans parce que je constate les effets qu’une puissante stratégie de lutte contre le SIDA a sur un pays. La lutte contre le SIDA est une initiative pionnière dans la gestion de questions difficiles.

Il y a quelques années, à l’occasion de la journée mondiale de lutte contre le sida, j'ai été invité en Chine à une réunion de travail par le Premier ministre d’alors, Wen Jiabao, et plusieurs autres ministres, dont les Ministres de la Santé publique et des Finances, ainsi que des personnes atteintes du VIH et des membres de la société civile.

Grâce à son programme de lutte contre le SIDA, la Chine étend son traitement par méthadone aux personnes consommant des drogues injectables. Lancé en 2004 sous la forme d’un projet pilote de moindre envergure couvrant seulement quelques sites auxquels Peter Piot avait rendu visite alors qu’il était Directeur exécutif [de l’ONUSIDA], ce projet s’est aujourd’hui étendu à tout le pays et couvre plus de 700 cliniques traitant près de 200 000 toxicomanes. Ainsi, la Chine a vu son taux de nouvelles infections à VIH chuter de 90 % chez les personnes incluses au programme. Une nouvelle formidable.

faiT : Il s’agit de l’année où la Chine faisait face à un déficit de financement international.

michel : Et ce déficit aurait pu menacer de ralentir l’expansion des programmes, tels que les cliniques de traitement à la méthadone. Cette réunion a vraiment été incroyable : le Premier Ministre s’est tourné vers le Ministre des Finances pour lui demander de combler le déficit par des fonds nationaux, il s’est ensuite tourné vers nous et à appelé la communauté internationale à respecter son engagement à l’égard de notre vision

Il existe de nombreux exemples illustrant des changements importants.

Des pays tels que l’Afrique du Sud s’investissent fortement aujourd’hui dans leur stratégie de lutte contre le SIDA. La confusion et la

frustration régnaient néanmoins avant l’arrivée au pouvoir du président [sud-africain] Zuma en 2009. Les responsables de programme et chercheurs du gouvernement on travaillé dans les coulisses afin de faire ce qu’ils pouvaient tandis que les activistes étaient en première ligne pour obtenir une plus grande mobilisation.

Je me souviens d’un dessin humoristique en Afrique du Sud qui représentait tout simplement une feuille blanche sur laquelle figurait l’en-tête « Plan de traitement de l’Afrique du Sud ». Aujourd’hui, près de 3,0 millions de personnes suivent un traitement contre le VIH en Afrique du Sud qui est payé par le gouvernement. Le Président Zuma et son ministre de la Santé publique, Aaron Motsoaledi, méritent d’être salués pour avoir mené cette transformation.

L’Afrique du Sud s’est aussi fortement appuyé sur la société civile et les communautés afin de contester le refus et l’inaction, et de partager la charge de la fourniture des services par la mise en œuvre de programmes de VIH aux côtés du gouvernement et en partenariat avec ce dernier.

faiT : Rien de tout cela n’aurait été possible sans financement.

michel : Nous n’aurions pas pu faire face à un problème aussi nouveau et grand que l’épidémie de SIDA sans de nouveaux financements.

Depuis 2002, 84 milliards de dollars US ont été investis dans la riposte au SIDA par des donateurs. Près de 48 % de ces fonds proviennent des États-Unis. Nous ne remercierons jamais assez le peuple américain pour sa reconnaissance de la crise et sa poursuite des investissements nécessaires à sa résolution.

Ce dont bon nombre de personnes ne se rendent peut-être pas compte, c’est que les pays apportent jusqu’à 60 % des investissements totaux. Ce partenariat de solidarité mondiale et de responsabilisation des pays fonctionne.

Le financement innovant est une autre caractéristique de la riposte au SIDA. La France a montré la voie en créant l’organisation UNITAID financée par une taxe imposée sur les billets d’avion [en 2006].

Les pays nordiques ont été les champions en matière d’efforts de prévention du VIH. Le Royaume-Uni a toujours établi un lien entre le VIH et d’autres problèmes de développement. L'Australie est un pays pionnier dans la réduction des risques dans la région Asie-Pacifique.

Dans un contexte où les dirigeants du monde entier sont préoccupés par les questions de terrorisme, le SIDA a permis de révéler le meilleur de la solidarité mondiale.

Il a servi de modèle à d’autres problèmes de développement, tels que les changements climatiques, les maladies non transmissibles et l’éducation.

Pour revenir au SIDA, les ressources ont permis aux personnes atteintes du VIH de commencer un traitement vital.

faiT : En 2011, vous avez appelé à ce que 15 millions de personnes puissent bénéficier d’un traitement d’ici 2015. Avez-vous été surpris que les États membres des Nations Unies acceptent cette revendication et en fassent un objectif de leur Déclaration politique ?

michel : Tout le monde savait que l’initiative « 15 x 15 » serait très ambitieuse.

Les pays gagnent en confiance et je suis sûr que nous pourrons un jour atteindre les 15 millions de personnes, mais je suis assez convaincu que personne n’aurait cru que nous réaliserions cet objectif avant la date butoir.

« j’ai toujours

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