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Les origines possibles du chien

DU LOUP AU CHIEN A TRAVERS LA PALEONTOLOGIE

B) Les origines possibles du chien

Pour revenir à la question des origines du chien, il apparaît donc que les restes des premiers chiens ont été retrouvés en faible nombre en Amérique du Nord, en Europe de l’Ouest, en Russie, au Japon, en Amérique du Sud tout comme en Asie Mineure. Et dans presque tous ces lieux, hommes et loups étaient contemporains. Il est possible de considérer que plusieurs sous espèces de loups ont pu dès lors, être les ancêtres des chiens. En Europe et en Amérique du Nord il pourrait s’agir de Canis lupus lupus, de Canis lupus albus ou de leurs ancêtres, dont la vie est adaptée au climat froid. En Asie Mineure, Méridionale ou Centrale il pourrait s’agir des petits loups arabes (Canis lupus arabs) et indiens (Canis lupus pallipes) ou de leurs ancêtres plus grands. En Asie Occidentale du loup chinois (Canis lupus chanco) ou de son ancêtre Canis lupus variabilis.

Figure 10 – Les groupes principaux des races de chiens et leurs ancêtres possibles (48).

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La figure 10 représente les quatre variétés géographiques de loups et les groupes les plus importants de chiens qui auraient pu en découler. Ainsi il semble peu vraisemblable d’envisager un centre de domestication unique.

Un autre site corrobore cette idée. C’est celui de Vlasac en Roumanie. Malgré son origine plus récente, - 5 400 à – 4 600 avant Jésus Christ il représente une culture humaine plus ancienne de chasseurs cueilleurs, probablement en raison d’un terrain montagneux isolé. Or, un grand nombre de fragments de canidés fut retrouvé et la plupart d’entre eux sont ceux de petits chiens domestiques. Cependant un petit nombre de fragments sont d’une taille et d’une morphologie intermédiaire entre le loup et le chien. Bökönyi (276) a suggéré que ces spécimens représentaient des chiens qui furent domestiqués in situ, à partir de loups locaux. Il faut cependant noter que de telles découvertes sont plutôt rares. Mais elles corroborent la théorie d’une domestication polycentrique.

Il semble pourtant que la plupart des restes de chiens domestiques, trouvés sur les sites préhistoriques dispersés à travers le monde, présentent une grande similarité en taille et en proportion ce qui pourrait indiquer qu’une petite population de chiens aurait diffusé à partir d’un petit groupe fondateur, dans les premiers temps préhistoriques. Sur le site de Bedburg Köningshoven, en Allemagne, datant du mésolithique, la découverte d’un crâne d’un chien adulte a révélé qu’il était similaire en taille et en proportion à celui du spécimen de Star Carr en Angleterre. Or, ce crâne est beaucoup plus proche des restes ossifères des premiers chiens d’Asie Occidentale que des grands loups européens, comme celui de Star Carr par exemple. Ces données sont donc plutôt en faveur d’une théorie diffusionniste, des transversales ayant pu s’établir d’une région à l’autre aux grés des migrations humaines.

Un intérêt tout particulier peut être attribué à l’étude des chiens feraux. Certains d’entre eux furent isolés depuis très longtemps et par conséquent ils pourraient être des représentants actuels des chiens primitifs.

Prenons l’exemple du dingo d’Australie. Les données archéologiques indiquent que les humains ont colonisé l’Australie il y a plus de 40 000 ans. Or, aucun reste de dingo n’existe dans les plus vieux sites. Les premiers dingos sont apparus en Australie il y a moins de 12 000 ans. Cette hypothèse découle du fait qu’aucun reste n’a été découvert en Tasmanie, qui fut isolée géographiquement de l’Australie par le détroit de Bass environ à cette époque. En fait les restes les plus anciens date de – 3 500 ans. Le dingo présente des caractères associés à la domestication, en l’occurrence des marques blanches sur le pelage, un museau large, des dents très resserrées au niveau des prémolaires et des sinus frontaux importants. On peut donc le considérer comme un chien marron, c’est à dire redevenu sauvage. Or, l’anatomie du squelette est étroitement ressemblante à celle des petits loups indiens, Canis

lupus pallipes, comme à celle des chiens parias d’Asie du Sud Est. Il est donc probable que le

dingo descende directement des chiens originairement domestiqués à partir des loups indiens apprivoisés (Corbett cité par (48)). Une fois emporté en Australie, il a pu devenir un animal féral, s’étendre rapidement et vivre comme un canidé sauvage.

Un autre exemple intéressant est celui du chien de Caroline. Ces chiens vivent à l’état sauvage en Caroline du sud, à la périphérie du site de L’U.S Department of Energy’s Savonnah’s River dans une zone de plus de 780 kilomètres carrés de forêts marécageuses. Cette région était habitée il y a plus de 2 000 ans par des aborigènes américains et des restes de chiens ont été trouvés en association avec eux sur les sites de leurs villages. Or, la morphologie de ces chiens ressemble étroitement à celle du dingo, en particuliers par leur taille mais aussi en raison d’une fourrure dense et courte, d’une queue avec une boucle fine, des oreilles dressées, d’un museau identique. (38). Ainsi on avança l’hypothèse selon laquelle ces chiens représentaient le type des chiens qui ont franchi le détroit de Béring, avec les hommes primitifs. Quoi qu’il en soit, ils ont la même apparence que les chiens parias en Inde

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ou que les basenjis du Zaïre. Ces données sont donc également en faveur d’une théorie diffusionniste notamment à partir des loups d’Asie.

Pourtant, certains points sont à noter. Les animaux domestiques redevenus sauvages sont évidemment exposés à une sélection naturelle comparable à celle exercée sur leurs parents sauvages. Ils pourront donc subir des changements et retrouver des traits sauvages. Mais au cours de la domestication, une partie du patrimoine génétique de la forme sauvage a été éliminée par divers processus. Ainsi, même si la sélection naturelle arrive à effacer la partie du patrimoine due à la sélection subie pendant la domestication, elle ne peut recréer ce qui a été perdu. Or, d’une part, on ne connaît pas à l’heure actuelle, de groupes marrons qui ne possèdent plus du tout de traits domestiques, d’autre part le volume de leurs cerveaux par exemple, tout comme leurs tailles, restent au-dessous des valeurs observées chez leurs ancêtres sauvages. Par conséquent, il est difficile d’interpréter les données précédemment citées, d’une part puisque l’adaptation à des niches écologiques semblables peut avoir, par convergence, engendré le même type de ressemblances morphologiques, d’autre part, car des modifications engendrées par le processus de domestication, telle la diminution de la taille, ne sont pas réversibles. Ainsi, un chien peu descendre d’un loup de grande taille sans pour autant retrouver la taille de ce dernier car il est redevenu sauvage. Par conséquent, les deux théories sont possibles et ne s’excluent pas. Il est plausible d’admettre une diffusion du chien à partir de différents centres de domestications paléolithiques supérieurs, l’un vraisemblablement en zone périglaciaire Eurasiatique, l’autre en zone tempérée proche orientale. Il ne semble donc pas y avoir un Adam canin. Mais une question reste en suspens. Pourquoi et comment le chien est-t-il devenu une espèce domestique ?

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CHAPITRE IV

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