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La chasse aux caribous (Tarandus caribou)

ALIMENTATION ET PREDATION CHEZ LE LOUP

B) La prédation sur les grandes proies

3) La chasse aux caribous (Tarandus caribou)

Le caribou est la forme géographique nord américaine du renne d’Europe septentrionale ( Rangifer tarandus tarandus). L’immigration des caribous peut être comparée à celle des gnous de Tanzanie comptant plusieurs centaines de milliers de têtes. Ils migrent vers le grand nord à partir d’avril, évitant l’embourbement lié au dégel, pour mettre bas en juin, dans la toundra du nord, traversant les 3 200 kilomètres carrés des vastes paysages hostiles des terres stériles. Ils reviennent en automne pour passer l’hiver sous la protection des immenses forêts Arctiques du sud. Au cours des migrations, les caribous sont suivis par les loups qui vont mettre bas sur un territoire à 260 kilomètres du lac Aberdeen où se regroupent les caribous. Ceux-ci repassent dans la région des loups, lors de la migration d’automne, d’où ils sont suivis de nouveau vers les forêts du Sud, où les deux espèces vivent à proximité.

Les caribous ont comme atout essentiel leur vitesse, 60 kilomètres par heure contre 50 pour les loups. Déjà un faon de trois semaines est plus rapide qu’un loup. De ce fait, la plupart des observations de chasse sont celles de vastes champs de manœuvres. Une partie des loups se dirige au centre du regroupement. Ils sont vite dépassés mais ils orientent, une partie au moins du troupeau, vers un troisième loup en embuscade. Dans les rochers où les embuscades sont plus faciles, les chances de réussite sont alors optimisées. Les loups peuvent anticiper les directions prises par les caribous et alors chercher à intercepter un individu (figure 4).

Une fois la panique jetée, ils ciblent l’animal qui aura perdu pieds. Le moindre mouvement non naturel sera observé et l’animal poursuivi. Si l’animal est mordu, le sang est pisté afin de le retrouver au milieu des milliers d’autres (283). Si les tentatives de poursuites sont nombreuses, une fois une proie ciblée, la persévérance des loups, leur débauche d’énergie et la puissance de leur assaut ultime en font des prédateurs redoutables.

Les morsures peuvent avoir lieu au jarret, au niveau de la croupe pour déséquilibrer leur proie et la faire chuter. Souvent, ils peuvent courir de manière parallèle avant de bondir au niveau de son épaule. Une fois au sol ou déséquilibré, les morsures à la gorge entraînent rapidement la mort de l’animal notamment par arrêt cardiaque suite au choc violent (commotio cordis 152). Les autres loups arrivant peuvent alors saisir le caribou en différents endroits, notamment au niveau du mufle par exemple, pour le maintenir au sol.

Même si les chances sont optimisées lors d’une action collective, Buckholder (cité par 155), décrit l’attaque d’une caribou femelle adulte, rattrapée par un seul grand loup noir et harcelée sur 200 mètres. Mais il décrit également une chasse en meute, où les loups avaient pisté un petit groupe de caribous le long d’une crête enneigée. Ils engagèrent la chasse à la fin de la crête, le groupe des caribous se dispersant dans la pente : trois vers la gauche, un vers la droite. Quelques loups suivent le caribou solitaire et l’abattent à deux cents mètres de là, rejoints peu de temps après par les autres.

Figure 4 – Exemple de manœuvre pour 3 loups conduisant à l’interception d’un caribou (283)

LLLLL Lac Gel

fuite du troupeau le long d’une crête Lac gelé

● Interception

Regroupement de caribous

128 4) Chasse à l’élan (Alces alces)

Il existe sept sous espèces d’élans réparties dans les régions nordiques de l’ancien et du nouveau monde. La plus imposante des sous espèces (Alces alces gigas) se rencontre en Alaska et pèse jusqu’à une tonne.

Buckholder (39) relate un exemple de prédation. Un jeune élan adulte se trouvait en haut d’une pente quand il fut repéré. Il fut épié quelques instants comme le prouve une zone de 20 mètres sur 6 piétinée, qui semble indiquer que les loups se sont tapis là dès qu’ils ont aperçu leur proie. Puis les loups se dispersèrent, trois vers la crête en direction de l’élan, les six autres descendant cette même pente. L’élan, en fuyant les trois loups du haut se jeta sur les six du bas. L’affrontement fut court si on se fie aux traces de la zone d’attaque.

Haber (cité par 96), relate une partie de chasse où le groupe approcha un élan. Tous, sauf le leader se couchèrent en attendant que celui-ci fasse le tour de leur proie. Ses congénères ont alors poussé la proie contre lui. Il cite également l’utilisation d’une stratégie de leurre, de distraction, où un loup s’approcha d’un élan bien à découvert, allant même jusqu'à hurler alors que les autres membres de la meute se glissaient en rampant derrière leur proie sans soupçon.

Comme pour toute proie, la réussite n’est pas toujours de mise.

Mech (cité par 194), retrace l’attaque de cinq loups sur un élan. Ces derniers lui mordirent les pattes arrières et les flans sans pour autant qu’il n’arrête sa course. Par deux fois il tomba au sol et se releva, la seconde fois, l’un des loups le saisit au museau mais il réussit quand même à gagner un bosquet, d’où il fit face aux loups à coups de cornes. Le lendemain, Mech constata que le cervidé était toujours vivant mais les loups avaient disparu. Mech parle d’un taux de réussite sur l’Ile Royale (179), de 8 % pour les élans et pour les cerfs en Ontario de 25 % l’hiver 1 et 63 % l’hiver 2, les variations étant attribuées au changement des conditions d’enneigement (237). La figure 5 relate l’évolution de 66 chasses impliquant 131 élans sur l’Ile Royale. Mech considère que les grosses proies telles que l’élan sont souvent attaquées par derrière, sur les flancs, la croupe ou les membres postérieurs. Souvent un loup saisit un élan par le nez et le tient tandis que le reste de la meute saute sur sa croupe. Young (cité par 194), explique qu’un loup peut cramponner ses crocs dans le mufle élastique d’un élan d’une manière si tenace qu’il peut se retrouver suspendu au-dessus du sol.

En plus de ses atouts physiques, les sabots d’un élan peuvent tuer un loup, l’élan utilise souvent une technique de repli dans l’eau pour fuir les loups. Ces derniers, contrairement à l’élan, sont loin d’être à l’aise dans cet élément. Pourtant, Johnson (cité par 194), observa un loup se nourrissant d’une carcasse flottante d’élan. Nelson (211), relate la chasse d’un cerf par une meute de loups dans une forêt du Nord Est du Minnesota. Durant près de cinq heures, les loups ont poursuivi un cerf qui nageait le long d’un lac. Durant cette période, les loups poursuivaient l’animal en longeant les rives du lac. Ils faisaient preuve d’une grande habilité pour juger de l’endroit où le cerf voulait émerger afin de l’intercepter, obligeant ce dernier à rebrousser chemin. Plusieurs fois les loups ont sauté dans l’eau en suivant le cerf sur une cinquantaine de mètres. Une fois le cerf épuisé, un loup sauta à l’eau avant de le rattraper et de l’attaquer au niveau de l’encolure, de la tête, suivi à tour de rôle par d’autres loups. Une fois morte, la victime fut ramenée sur le bord. Ainsi même si le refuge aquatique est souvent une solution adaptative des proies pour se débarrasser de leurs prédateurs, certaines observations relatent les talents de nageur du loup si sa proie est à bout de forces. Selon Smietana (cité par 152), l’hiver les loups poursuivent parfois leur proie vers une rivière, pour la tuer dans l’eau, car en cette période les sabots ne tiennent pas sur la glace, contrairement aux griffes des loups.

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Figure 5 – Devenir de 131 élans attaqués par des loups sur l’Ile Royale (50).

Chasse au wapiti (Cervus elaphus canadencis)

Smith (152), relate 81 interactions avec des wapitis. Les loups ont attaqué 53 fois sans succès et 20 interactions se sont soldées par la mort de la proie. Les loups commençaient à s’approcher des hordes avant de se précipiter pour faire éclater le groupe. Si les wapitis restaient bien regroupés, la chasse cessait rapidement. Dans le cas inverse, les loups poursuivaient en principe le groupe le plus restreint. Les loups tuent les adultes en courant à leur côté pour les saisir sous le cou. Quand ils attaquent un jeune, ils le mordent plutôt sur le haut de la nuque. Si plusieurs loups sont impliqués, les autres parties du corps sont attaquées. Sur les jeunes faons, les loups se précipitent directement sur lui pour le saisir et s’enfuir avant l’intervention de la mère. Souvent ces tentatives éclairs ne font qu’affaiblir le jeune et plusieurs tentatives sont nécessaires.

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