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Une diversité intra spécifique corrélée aux modifications observées au cours de l’ontogenèse

COMMENT PASSER DU LOUP AU CHIHUAHUA OU AU SAINT-BERNARD

A) Une diversité intra spécifique corrélée aux modifications observées au cours de l’ontogenèse

En utilisant quatre races très différentes, le lhassa apso, le cocker spaniel, le labrador et le dogue allemand, Wayne a réalisé toute une série de mesures sur le squelette appendiculaire et sur le crâne tout au long de la croissance de ces animaux, au début, toutes les deux semaines puis tous les mois et ceci de l’âge de trois semaines jusqu’à dix mois (296- 297). En comparant ces résultats avec ceux obtenus pour un grand nombre de chiens adultes de différentes races, il a mis en évidence une très grande similarité entre l’allomètrie observée entre les différentes races et celles observées au cours du développement. Il est apparu que les proportions des membres ou du crâne d’un adulte d’une race de petite taille, représentaient les mêmes proportions que celles d’un chiot d’une race plus grande à taille équivalente. Pour Wayne, ceci signifie que les petites races sont juvénilisées ou pédomorphiques.

Les figures 4 et 5 illustrent ces résultats. A partir de la figure 4, on observe que le schéma de croissance obtenu au cours des différents stades de l’ontogenèse est semblable aux mesures obtenues pour des adultes de différentes tailles. Pour les mesures de longueur, on observe une tendance à l’isométrie. Pour les mesures de largeurs et d’épaisseurs, on observe une allométrie similaire entre l’échantillonnage intra spécifique et les mesures obtenues au cours de l’ontogenèse. Pour trois des huit mesures, il n’y a pas de différences significatives. Pour quatre des cinq autres, on observe des schémas variables selon les races (figure 5).

Les adultes des petites races sont situés au-dessus ou sur la droite de régression ontogénique. Ils présentent donc des proportions semblables à ceux des chiens de races plus grandes juvéniles, de même taille ou plus petits. Ainsi, les petites races sont à des degrés divers pédomorphiques. Dans les cas extrêmes, les adultes présentent les mêmes proportions que des bergers allemands nouveau-nés.

Les adultes des grandes races sont situés au-dessus ou au-dessous de la droite de régression ontogénique. Ils sont donc soit pédomorphiques, soit hypermorphiques (équivalent en proportions à des chiens qui prolongent l’ontogenèse des ancêtres).

Figure 4 – Histogramme des coefficients directeurs et des ordonnés à l’origine des droites de répressions entre la longueur du squelette et différente mesure de longueur, de largueur et de profondeur pour différents os du crâne.

Les histogrammes blancs concernent les mesures obtenues entres différentes espèces de Canidés.

Les histogrammes noirs concernent les mesures obtenues pour différentes races de chiens.

Les histogrammes rayés concernent les mesures obtenues au cours de l’ontogenèse du chien. (296)

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Figure 5 – Droite de régression logarithmique de la largeur du palais et le l’os zygomatique par rapport à la longueur du squelette au cours de la croissance (triangle) et pour des races adultes (points).

a) La droite isométrique indique une extension des proportions des nouveau-nés pour des tailles plus grandes. Aussi beaucoup de chiens ont des proportions de nouveau- nés en tant qu’adultes.

b) A représente un dogue allemand de 150 jours

B Idem si le taux de croissance est multiplié par 0,5 (pédomorphique)

C Idem si le taux de croissance est multiplié par 1,5 (hypermorphique) (296).

Le chien ou le loup présente d’importantes modifications entre un nouveau-né et un adulte, contrairement par exemple au chat (figure 6).

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Figure 6 - a) vue dorsale d’un chien nouveau-né

b) vue dorsale d’un adulte qui contraste avec celui du chiot nouveau-né c) vue dorsale d’un chat nouveau-né

d) vue dorsale d’un chat adulte (296).

Les chiots ont un crâne large, arrondi, des orbites importantes et un palais large. L’adulte a un rostre plus long et un crâne effilé. Pour Wayne, cette diversité de conformation qui s’observe au cours du développement explique la grande diversité intra spécifique des adultes. Il observe en effet que la diversité de proportion au sein de différentes races est largement déterminée par la magnitude observée au cours des développements d’une seule race (en l’occurrence ici le berger allemand).Cette diversité de proportions chez les adultes de différentes races se retrouvant au cours du développement, chaque race pourrait être considérée comme une photo d’une étape de ce développement.

Ce parallèle entre l’allométrie intra spécifique et celle observée au cours de l’ontogenèse, est souvent expliqué par des altérations au cours du développement. Prenons l’exemple du taux de croissance du fémur et de l’humérus au cours du développement du lhassa apso, qui évolue de manière identique pour ces deux os. Un adulte de plus grande dimension peut être obtenu si l’on augmente le taux de croissance, soit durant la période néo- natale, soit sur toute la période de croissance rapide, mais aussi si on augmente le taux de croissance initiale ou encore si on augmente la durée de la croissance. Or, pour les quatre races utilisées, les taux de croissances sont environ identiques de 25 à 250 jours. Puisque les nouveau-nés des différentes races sont très similaires dans leur conformation, la disparité entre les races s’explique par une augmentation du taux de croissance chez les grands chiens, comparativement aux petits, sur une courte période après la naissance ainsi que par une croissance prolongée chez les grands chiens (10 mois pour le lhassa apso par rapport à 2 ans pour le danois). Ces changements dans le taux de croissance peuvent s’expliquer simplement, par exemple par une déficience en hormone de croissance. Cependant, les altérations lors du développement, à l’origine de nouvelles races, sont sans aucun doute très complexes, la plupart des différences devant certainement être d’origine polygénique. Par exemple, pour expliquer une largeur du squelette pour certaines mesures (largeur du palais …), plus importante pour certaines petites races que celles du squelette des juvéniles de même taille, il

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faut, en plus d’une diminution globale du taux de croissance, une augmentation en largeur relative à celle en longueur plus importante pour ces petites races, par rapport à des races plus grandes. En d’autre terme, pour ces races, le taux de croissance en largueur est similaire pour petites et grandes races mais le taux de croissance en longueur est inférieur pour les petites races. Les adaptations locales, par exemple via une accommodation à la taille de l’œil pourraient expliquer de telles modifications (51).

Cette étude souligne par conséquent, que des changements opérant au cours du développement, peuvent expliquer la grande diversité des races actuelles, sans avoir recours à plusieurs espèces fondatrices pour le chien. Par ailleurs, Wayne explique les différences entre chiens et espèces proches du renard, par la différence de conformation de leurs nouveau-nés. Sachant que le taux de croissance du fœtus est très proche chez tous les Canidés sauvages et que la croissance du crâne n’est pas isométrique pour la plupart des mesures, les différences de conformations observées, seraient dues à une durée de gestation plus courte (52 jours pour les espèces proches du renard et 63 jours pour les chiens et les loups).

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