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Obligation d’utilisation due à la nature du contrat

Dans le document La mise à disposition d'une chose (Page 130-133)

Titre II I DENTIFICATION DES CARACTERISTIQUES DE LA MISE A DISPOSITION

SECTION 2 Caractéristiques de l’utilisation

II) Obligation d’utilisation due à la nature du contrat

256. L’obligation d’utilisation est principalement de l’essence de deux contrats : la franchise et le parrainage publicitaire.

257. La franchise est un contrat autonome qui se caractérise par la réitération d’une réussite commerciale et qui repose sur un savoir-faire et une marque287. Le franchisé doit répéter le modèle mis en place par le franchiseur, il est donc dans l’obligation d’utiliser l’enseigne et la marque du franchiseur, ainsi que les autres biens éventuellement mis à sa disposition. Davantage qu’une simple obligation d’utilisation, comme il en existe par exemple en matière de brevets, il y a là une obligation d’utilisation conforme, c’est-à-dire que le franchisé doit utiliser les choses mises à sa disposition conformément aux indications du franchiseur : visibilité de l’enseigne, disposition du mobilier, utilisation de la marque, notamment au cours d’opérations publicitaires, etc.

258. Cette obligation d’utilisation conforme se retrouve de façon similaire dans le contrat de parrainage. Le commodat classique est réputé conclu dans l’intérêt de l’emprunteur, ce qui explique certaines faveurs accordées au prêteur sur le plan du régime. Ce point permet de distinguer le prêt à usage du parrainage publicitaire dans lequel la mise à disposition est faite dans l’intérêt du parrain. Le parrain-disposant met alors à disposition du parrainé-bénéficiaire un ou plusieurs biens (un voilier portant la marque du parrain, par exemple), à charge pour le bénéficiaire d’utiliser ledit bien. En ce cas, le parrainé est contractuellement contraint d’user du bien et le contrat sert les intérêts des deux parties (le parrainé qui bénéficie du bien et le parrain qui profite d’une publicité ciblée). Le contrat de parrainage, comme le contrat de commodat, est conclu au regard de la personne du bénéficiaire, l’intuitu personae est fortement présent et le bénéficiaire, représentant l’image de la marque, doit utiliser la chose mise à disposition de façon conforme aux prescriptions de disposant (notamment afin d’éviter d’altérer ladite image de la marque).

287 V. Didier FERRIER, Droit de la distribution, 6ème éd., Paris : LexisNexis, 2012, 432 p. ou encore Didier FERRIER, « Franchise et savoir-faire », in Mélanges offerts à Jean-Jacques Burst, Litec, 1997, p. 157.

§3 : Utilisation destructive ?

259. Lorsque la mise à disposition porte sur une chose consomptible, l’utilisation de ladite chose par le bénéficiaire amène inéluctablement à l’altération, voire à la disparition de la chose consommée. En ce cas, le transfert d’utilités opéré lors de l’autorisation d’utilisation s’accompagne d’un transfert de propriété, accordant l’abusus au bénéficiaire qui pourra ainsi consommer le bien, jusqu’à sa disparition, le cas échéant.

260. Par ailleurs, la consomptibilité de la chose n’empêche pas la stipulation d’une obligation de restitution, si telle est la volonté des parties, puisque, si la chose consomptible est fongible, le bénéficiaire effectue alors une restitution par équivalent (en qualité et en quantité).

261. Ces hypothèses de destruction de la chose mise à disposition du fait de son utilisation, en raison de sa nature consomptible288, sont tout à fait classiques et ne recèlent aucune originalité dans le cadre d’une mise à disposition. À l’inverse, il existe une hypothèse moins commune dans laquelle la chose mise à disposition est détruite, non par l’utilisation qui en est faite, mais pas la cessation de l’utilisation, c’est-à-dire par la fin de la mise à disposition.

262. En effet, dans le domaine bancaire, l’établissement financier met à disposition de son client des moyens de paiement (une carte bancaire, par exemple)289. Les moyens mis à disposition du client demeurent la propriété de la banque qui pourra en demander restitution. La nature de cette mise à disposition est assez singulière, car elle ne peut pas véritablement être qualifiée de prêt, puisqu’elle n’intervient pas à titre gratuit, mais le

288 Le cas de la destruction d’une chose non consomptible du fait d’une utilisation trop intensive ou inappropriée est également envisageable, mais il ressort alors de l’abus de droit et/ou de l’inexécution d’une obligation de conservation de la chose mise à disposition (sauf dans l’hypothèse où la mise à disposition est accompagnée d’un transfert de propriété, en ce cas, le bénéficiaire est libre de détruire le bien s’il le souhaite).

289 La mise à disposition de moyens de paiement constitue une section du Code monétaire et financier, comprenant les articles L311-3 et suivants. L’article L311-3 dispose : « Les opérations de mise à disposition de

la clientèle ou de gestion de moyens de paiement comprennent les services bancaires de paiement mentionnés à l'article L. 311-1, les activités d'émission et de gestion de monnaie électronique et les services de paiement dont la liste figure au II de l'article L. 314-1 ».

terme de louage ne convient pas complètement non plus. En effet, les moyens de paiement, tels qu’une carte bancaire ou un chéquier, ont la particularité d’être personnalisés, définitivement, puisque le nom du bénéficiaire y est inscrit de manière indélébile. Le moyen de paiement ne saurait être utilisé par quelqu’un d’autre que le bénéficiaire de la mise à disposition. À l’issue de la mise à disposition, nul ne peut donc en récupérer la jouissance, pas même le propriétaire. Au surplus, lors de la « restitution », le client doit généralement rendre le bien détruit (carte coupée en morceaux, chèques annulés), la fin de la mise à disposition entraîne donc la disparition du bien, ce qui est assez particulier. Il nous semble que la propriété n’est ici qu’un artifice pour contraindre le client à cesser l’utilisation du bien. En effet, si le client était propriétaire de ses moyens de paiement, il serait ardu de le contraindre à détruire son bien, étant le seul à disposer de l’abusus. Or, la conservation par le client de ses moyens de paiement après la rupture de la convention bancaire serait risquée pour les tiers, car elle donnerait l’apparence d’une capacité de paiement pourtant éteinte. À l’inverse, il est sans doute plus aisé de comprendre que le bien, contenant des informations personnelles du client, ne puisse subsister entre les mains de la banque après la fin du contrat, le droit de propriété de l’établissement financier cédant face à la protection des droits fondamentaux du client290. Il n’en demeure pas moins que cette particularité d’un bien qui, in fine, se consomme non par l’usage, mais par la fin de sa mise à disposition, est singulière.

290 La banque n’a, par ailleurs, aucun intérêt à vouloir réutiliser ou conserver les moyens de paiement du client après la fin de son contrat, la question est donc plus théorique que pratique.

Conclusion du chapitre 1 : Les caractéristiques intrinsèques de la

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