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La production des formations semble avoir, au cours des dix à vingt dernières années, été « saisie » par le marché. Ma thèse centrale est que cette activité est ainsi, petit à petit, amenée à se penser dans le (ou les) marchés, en tant qu’activité marchande, en partie au détriment de sa culture historique d’éducation populaire.

La brève présentation qui suit, portant sur le contraste historique entre la configuration actuelle et celle qui prévalait il y a quelques décennies permet de mettre en évidence les contingences de l’économie de cette activité, dont la configuration actuelle ne va pas de soi.

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L’animation socio-culturelle est, on l’a dit, une importante activité sociale qui, entre autres, accueille chaque année plusieurs millions de mineurs dans des centres de vacances ou des activités de loisirs. Bien que l’estimation de leurs effectifs soit difficile50, on peut évaluer le nombre d’animateurs à 250 000 dans l’animation conventionnellement dite « volontaire » et à 150 000 « professionnels ». Les emplois de l’animation, quelle que soit leur nature, sont fréquemment temporaires, à temps partiel, mal payés, engendrant une forte circulation entre emplois et une faible durée d’activité des animateurs, de l’ordre de deux à trois ans dans l’animation volontaire.

L’animation trouve son origine dans le mouvement des colonies de vacances dont les premières datent de la fin du XIXe siècle. Pour répondre à une demande sociale, une partie de l’animation s’est professionnalisée à partir des années 196051. En pratique cependant, hormis sur le plan réglementaire, celui des diplômes et des formations, la distinction entre animation volontaire et animation professionnelle est quasiment devenue caduque52.

L’animation assure d’importants services à la société : garde d’enfants, contribution à la tranquillité publique – même si celle-ci est de plus en plus prise en charge par des personnels spécialisés, ou la police –, levier de « développement » c’est-à-dire d’attractivité des territoires. Ses tenants lui attribuent des missions éducatives. De plus, que les animateurs à qui l’on confie des

50 Cf. le § 4.2 « Incertitudes quant aux effectifs de l’animation » dans l’annexe « L’animation et la formation dans

leur contexte historique, politique et économique et social »

51 Cf. le § 3 « Quelques éléments d’histoire de l’animation » dans l’annexe « L’animation et la formation dans leur

contexte historique, politique et économique et social »

52 Je le montre de manière détaillée dans une annexe. Dans les mêmes emplois et pour la même activité (mais non le

même mode de rémunération) travaillent ensemble des titulaires de diplômes de l’animation volontaire et professionnelle. De plus en plus de stagiaires de l’animation volontaire sont des professionnels, en particulier dans les BAFD où ils représentent de l’ordre de 90 % des effectifs de participants. Cf. le § 4.3 « Animation volontaire, animation professionnelle, des catégories caduques » de l’annexe « L’animation dans son contexte historique, politique et économique et social »

mineurs soient préalablement formés et diplômés rassure élus et parents et leur apporte une forme de garantie juridique.

Les premières formations (BAFA, BPJEPS) constituent pour la majorité de leurs participants une étape de transition entre formation initiale et emploi. C’est probablement pour cette raison que, indépendamment de leurs contenus, les formations de l’animation volontaire ont conservé une bonne image sociale. On s’y confronte à la responsabilité, à la contrainte du cadre salarial, au sérieux du professionnalisme, à la vie collective, à la question éducative et donc à la future position de parent.

Le moteur initial de l’implication de jeunes adultes dans l’animation est souvent la volonté d’offrir à la société une contribution altruiste, sans souci primordial de la rémunération et à distance de ce que les intéressés perçoivent comme la vénalité ordinaire. Il peut être aussi le souhait de s’enrichir d’une expérience potentiellement utile à un futur métier de la relation ou de l’enseignement.

Devenir animateur nécessite un diplôme de l’animation, volontaire ou professionnelle. Les formations qui les délivrent n’imposent aucun préalable scolaire et sont donc ouvertes à tous. De la demande sociale d’animation résulte un marché du travail des animateurs et, compte tenu de la quasi obligation de posséder un diplôme de l’animation, un marché de la formation. C’est une activité considérable : on estime à dix pour cent d’une classe d’âge le nombre d’inscriptions au BAFA chaque année.

Dans une vue plus générale, l’animation est soumise aux effets de macro-régulations sociales53 qui ne la visent pas mais l’influencent indirectement, comme un bouchon est déplacé par les vagues. Les formations de l’animation en sont de même affectées. Le meilleur exemple contemporain est la montée puis la décrue en quelques années de l’emploi en péri-scolaire en lien avec « l’aménagement des rythmes scolaires »54.

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« Au nom du social entendu comme principe correcteur des défauts de la société, des préjudices qu’ils font subir aux individus »55, l’animation a toujours été le produit d’initiatives

53 Cf. les § 1 « Macro-régulations » et 2 « Les ressacs de l’animation et de la formation à l’échelle locale » dans

l’annexe « L’animation et la formation dans leur contexte historique, politique et économique et social »

54 Francis Lebon et Maud Simonet ont apporté d’intéressantes contributions sur les effets de ces évolutions

réglementaires mises en place par Vincent Peillon en 2012, modifiées par Benoît Hamon en 2013 puis quasi supprimées de fait par Jean-Michel Blanquer en 2017, tous trois en tant que ministres de l’Éducation nationale. Cf. Francis Lebon et Maud Simonet, « La Réforme des rythmes scolaires ou quand les associations font la loi et (dé)font le travail dans les services publics ? », Revue française d’administration publique, n° 163, 2017, « Quand les associations remplacent l’État », pp. 575-586 ainsi que Francis Lebon et Maud Simonet, «“Des petites heures par-ci par-là”. Quand la réforme des rythmes scolaires réorganise le temps des professionnels de l’éducation », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 220, décembre 2017, pp. 4-25.

privées, dont les « colonies de vacances » ont été la grande manifestation historique. Elle a longtemps été le fait d’acteurs, religieux et, surtout, instituteurs qui, conformément à leur « vocation », prolongeaient « hors les murs » leur action éducatrice durant les heures de la journée et les jours de l’année qui suivaient l’école, avec la volonté d’en faire des moments de socialisation dans la continuité de leur enseignement56. « […] le professionnalisme n’était que l’incarnation de la vocation et sa mise en forme technique. »57. Ce qui a été nommé « animation » était alors d’évidence de nature éducative, et territoire de ceux qui faisaient profession d’éduquer.

Entre deux guerres a émergé l’idée selon laquelle il est nécessaire d’être préalablement formé pour prendre des responsabilités. Les formations de l’animation ont été pensées à partir du début des années 1930 et créées – sous la forme de l’internat – en 193758. Elles se sont rapidement développées après-guerre en suivant l’expansion de l’animation. Depuis lors, leur structure générale est restée remarquablement stable.

Le projet initial des inventeurs de ces formations était inspiré par ceux de l’éducation populaire59 et de l’« éducation nouvelle »60. Il visait à transformer la société en agissant sur l’éducation. Moyennant des formations plutôt efficaces en ce qui concerne l’apprentissage de l’animation61, et justement parce qu’elles étaient efficaces, ils comptaient sur leurs stagiaires pour mettre en œuvre dans leurs terrains respectifs les conceptions et les pratiques de l’éducation qu’ils s’étaient efforcés de leur transmettre. Cela faisant, ces formations étaient en même temps des lieux de transmission de valeurs sociales, de production d’habitus, de circulation d’un ethos incarné, celui du formateur, dans un nouvel ethos incarné, celui du formé. Cette transmission résultait naturellement de la dynamique des formations, dispositifs, contenus, interactions. Le but des formateurs était de s’adjoindre les forces des animateurs qu’ils formaient pour « porter » ensemble leur projet et de susciter des vocations similaires aux leurs. Ils jouaient un rôle d’« opérateurs de conversion »62. Il s’agit de ce que F. Dubet nomme le « programme institutionnel »63, celui des

56 Et ce depuis au moins les années 1880 qui ont vu la mise en place de l’école obligatoire, laïque et gratuite pour

tous. La Ligue de l’enseignement a été fondée en 1866, la première colonie de vacances a été organisée en 1876 en Suisse par le pasteur Hermann Walter Dion.

57 François Dubet, 2002, p. 31.

58 En 1937, l’expérience de ce qu’on a plus tard nommé le péri-scolaire, tout comme celle des colonies de vacances,

a donc déjà deux générations et plus de soixante ans.

59 Cf. l’annexe « L’éducation populaire ».

60 « Nouvelle » à la fin du XIXe siècle et au début du XXe. Sous ce nom, on fait habituellement référence aux

expériences et travaux de Roger Cousinet, Ovide Decroly, John Dewey, Célestin Freinet, Maria Montessori, Fernand Oury, Rudolf Steiner, Alexander Sutherland Neill, etc.

61 Efficaces au sens de ce que l’on pouvait attendre a priori d’une formation à l’animation, c’est-à-dire qu’elle dotait

les stagiaires des connaissances et savoir-faire les rendant capables d’animer, en situation.

62 Samuel Julhe, Marina Honta, 2015, p. 162.

63 François Dubet, 2002, 2010. La formulation que j’emploie est un peu inexacte. Il faudrait plutôt dire que, du

formations de l’animation et, au-delà, de l’animation elle-même. La cible restait celle de l’éducation populaire et de l’école, la jeunesse du pays et principalement celle de ses classes populaires ; le levier était constitué par les animateurs. Un projet à longue portée. S’inscrivant dans une activité dont le cœur était typiquement porté par des instituteurs formés par des instituteurs dans le but de prolonger le programme institutionnel de l’école et de faire en retour évoluer l’institution scolaire, pendant des décennies les stagiaires, entraînés par l’esprit d’engagement social et altruiste de l’animation, bien qu’acheteurs de formations, ne se sont pas conçus comme des clients d’une prestation64.

Avec le développement en volume des formations, la référence à l’éducation nouvelle, voire à l’éducation populaire, s’est pourtant rapidement limitée à un contexte discursif et à un ensemble de techniques, mais l’intention de transformation sociale est encore annoncée de nos jours par une partie des organismes de formation.

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Le programme institutionnel de ces formations est à peu de choses près le même que celui de l’école : prendre en charge des individus pour continuer leur éducation et, finalement, produire des citoyens à la fois mieux socialisés et autonomes : « […] un dispositif symbolique et pratique chargé d’instituer des sujets [...] », consacré à « la production des personnes » et visant à « agir directement sur les conduites, les sentiments, les valeurs et les représentations des individus. »65 Ce modèle a longtemps prévalu dans les formations de l’animation et domine encore de nos jours au moins dans l’animation volontaire : s’emparer des participants, les déstabiliser par un cadre de vie et des méthodes pédagogiques qui se veuleut contraster avec ceux dont ils sont familiers, le système scolaire, les faire réfléchir sur eux-mêmes, « leur apprendre à penser »66 ou à prendre des responsabilités, les transformer. Le cadre en est fortement rythmé et ritualisé, ce qui en fait l’efficace67. Les contenus pourraient n’être là que comme habillage et prétexte, comme produit d’appel. « Ce programme est assez largement indépendant de son contenu culturel [...] »68 puisqu’il agit principalement comme une socialisation. Et c’est bien d’abord cette socialisation qu’essayent encore de nos jours de maintenir les formations de l’animation alors même que leurs contenus tendent à s’appauvrir en même temps que les compétences et capacités des formateurs.

formations de l’animation, qui en est en même temps le moyen.

64 Ce n’est que par la disparition des instituteurs de l’animation, dont on peut situer le déclenchement en 1983 quand

a cessé pour eux l’obligation de suivre le premier stage du BAFA au cours de leur formation, que s’est progressivement perdu cet « état d’esprit » centré sur la vocation et qu’a pu émerger une relation client - fournisseur, c’est-à-dire une relation perçue comme marchande, entre les stagiaires et les organismes de formation.

65 François Dubet, 2002, respectivement pp. 17, 10 et 9. 66 Selon une fréquente déclaration d’intention de formateurs. 67 Cf. André Leroi-Gourhan, 1965, tome II, chapitre XI. 68 François Dubet, 2010, p. 18.

Former des animateurs est donc une activité de promotion de l’animation, de l’éducation et du rôle des éducateurs dans la société. Former est également pensé comme un investissement pour l’avenir, qui produira ses fruits dans la transformation de la société. On compte sur celui qu’on a formé pour porter – transporter, reporter, rapporter – dans son environnement les convictions qu’on a cherché à lui transmettre, au-delà des savoir-faire qu’on lui a fait acquérir.

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Tant le programme institutionnel décrit par F. Dubet que l’éducation populaire dont se réclame l’animation s’appuient sur une forme assumée de domination. L’accès à la compréhension du monde et à l’intégration supposent selon cette approche une forme de médiation, une aide compétente, et ses auteurs se considèrent eux-mêmes comme des experts de l’émancipation. Il s’agit, pour des éducateurs se percevant dans leur domaine comme des élites sociales, de pourvoir à l’éducation des enfants et à celle du peuple et, ce faisant, de leur assurer, dans un cadre en général militant, une forme de « rattrapage » des conséquences de leur position sociale, une aide à l’émancipation ou à l’ascension sociale. « […] le sens vient “d’en haut” » et « en appelle à des principes surplombant la vie sociale, à des valeurs universelles, religieuses, politiques et militantes. » Le programme institutionnel, soutenu par sa rhétorique, « est, surtout du point de vue de ceux qui y travaillent, une machine à réduire les dimensions tragiques du travail sur autrui, à le rendre cohérent et supportable. »69

Les formateurs de l’animation (volontaire), lorsque pour beaucoup il s’agissait d’enseignants, puisaient ainsi leur légitimité de formateurs – encadrant des stagiaires lycéens et étudiants – dans le programme institutionnel de l’école et dans la similitude à celui-ci du programme institutionnel de l’animation. Elle était de nature traditionnelle et, selon les individus, souvent charismatique70. Cela justifiait leur position de domination.

Est pourtant passée par là la vague de la non-directivité, modalité éducative et pédagogique de la « critique artiste »71 qui, compte tenu de leur caractéristiques sociales, a amené en particulier les jeunes formateurs à récuser toute forme d’autorité, fût-elle de compétence72. Un début de professionnalisation de l’animation – matérialisée par la mise en place d’infrastructures73, par un très fort développement des centres de loisirs pour répondre à une demande sociale de garde des

69 François Dubet, 2002, respectivement pp. 24, 232 et 47. 70 Selon la typologie de Max Weber.

71 Luc Boltanski et Ève Chiapello, 1999.

72 La décentralisation et la régionalisation (à partir des lois de 1982-1983) ont conduit les organismes de formation à

s’organiser en entités régionales juridiquement autonomes (ou à approfondir une telle organisation). Celles-ci en ont été appauvries d’autant en compétences, et la contestation de l’autorité n’a pas permis de les renouveler localement. L’évolution du rapport à l’autorité se double d’une transformation institutionnelle qui la renforce.

73 Construction de locaux à destination de centres sociaux, de maisons de jeunes etc., dans le cadre des plans de

enfants et finalement par l’établissement d’une convention collective nationale74 en 1989 –, a progressivement conduit les animateurs à se comporter, non plus en fonction d’une vocation qui aurait été intrinsèque à leur activité, mais en salariés. Les comités d’entreprise et les mouvements d’éducation populaire, prenant de la distance avec les « œuvres sociales », sont progressivement devenus des acheteurs, des producteurs et des vendeurs de loisirs, dont les bénéficiaires devenaient des usagers et des clients, et les acteurs des employés. Les changements affectant le recrutement des enseignants, leur position sociale, partant leur conception de leur mission75, sont probablement pour beaucoup dans leur retrait des activités péri-scolaires et de l’animation. Ces évolutions, lentes, étalées des années 1980 aux années 200076, ont abouti à une transformation importante des ressources humaines des organismes de formation.

Les formateurs actuels de l’animation volontaire, étudiants et « jeunes précaires », ne peuvent plus s’adosser de la même manière à une domination dont ils ne bénéficient pas d’emblée dans leurs activités, et que de plus ils récusent ; ceux de l’animation professionnelle, qui sont des salariés issus de l’animation, ne disposent pas non plus d’une telle légitimité77. Les uns et les autres en nient d’ailleurs souvent toute forme, tout en cherchant à la maintenir par les multiples moyens de ce que je nomme « la domination pédagogique ». Le langage du « contrat » – les règles dites « négociables » – et du « projet » – projet pédagogique, projet d’activité, projet personnel de formation – viennent à point pour faciliter cette occultation. Ils font désormais de l’école leur repoussoir, discursif – « ici ce n’est pas l’école » – et pédagogique.

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Par ailleurs, l’intégration par tout un chacun d’une attente et d’un sentiment d’égalité, d’« individualisme concret » dirait F. de Singly78, « l’affirmation de la souveraineté égale de tous »79, ont mis à mal cette dissymétrie entre le maître et les élèves, ici le formateur et les stagiaires. Les individus sont plus que jamais attachés à leurs libertés individuelles, souvent assimilées à celles du client ou du consommateur. Le discours des libertés politiques, collectives, ne fait plus recette de la même manière qu’il y a seulement une ou deux générations. Et l’égalité individualisée ainsi attendue ne se manifeste jamais mieux que dans la relation marchande, dans

74 Et, dans la foulée et sur cette base, de conventions collectives au sein des organismes de formation. 75 Bien étudiées par les sociologues de l’éducation, ces questions sortent du champ d’exploration de ma thèse. 76 Durée bien plus longue que celle de l’activité de la quasi totalité des animateurs et des formateurs.

77 La distance sociale entre les stagiaires et les formateurs de l’animation volontaire a disparu. Lorsque des incidents

– rares – émaillent une formation, ce sont le plus souvent les parents de ces stagiaires qui interviennent et qui, parviennent aisément à se placer en position de domination sociale vis-à-vis des formateurs. Dans l’animation professionnelle, la position de client permet à l’occasion aux stagiaires d’inverser la relation de domination avec leurs formateurs.

78 François de Singly, 2005.

79 Jacques Donzelot, 1994 (1984), p. 10. Ouvrage écrit pour traiter d’un contexte fort différent mais finalement

laquelle l’institution dépend, de fait, de l’achat de ses prestations. Les stagiaires sont dès lors devenus des « usagers » qui pourraient être des « clients ». Inversement, les mêmes évolutions sociales ont pour effet que la production du sens, la désignation de ce qui est important, la formulation de ce qui transcende les individus, élaborations qui étaient le fait de l’institution, enseignants ici et formateurs là, perdent de leur force en même temps que leurs auteurs. Elles sont remplacées, dans l’esprit des stagiaires, par des visées plus proches de leurs préoccupations concrètes voire immédiates, le diplôme, l’emploi, la rémunération. À nouveau, ces intérêts reformulés les situent dans le marché. Pour le dire crûment, particulièrement dans les formations de l’animation professionnelle, les stagiaires considèrent acheter un diplôme. Les Conseils régionaux, en finançant ces formations dans une logique de traitement social du chômage, ne font que confirmer cette interprétation.

Le projet des formations de l’animation proposait, antérieurement aux années 1990-2000, une modalité de la relation entre formateurs et stagiaires différente de celle du marché. Certes apprenants, les stagiaires étaient des alliés pour une intention plus large visant la jeunesse française. Cette alternative est mise à mal dans la configuration contemporaine.

« Le problème posé par cette évolution douce et qui s’impose par la force des choses vient de ce qu’elle incline progressivement à réduire le travail sur autrui à une suite de services. L’acteur [ici le stagiaire mais aussi le formateur dans sa relation à l’organisme de formation qui l’emploie] fait le choix qui lui est le plus favorable