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Les différentes méthodes de recueil de données

systèmes étudiés (redondance titre ?)

4.2. Les différentes méthodes de recueil de données

Plusieurs méthodes ont été mobilisées afin de collecter les données. L'essentiel de ce travail a été réalisé par le biais d'entretiens semi-directifs auprès d'un échantillon d'acteurs hétérogène. Toutefois, il convient de signaler la conduite d'un travail de recherche documentaire, de type qualificatif et quantitatif. Par ailleurs, l'observation participante et non participante ont aussi complété ce dispositif de recherche.

4.2.1. Recherche documentaire

Resituer les bassins dans leur histoire régionale

La première étape du travail a consisté à effectuer un recensement des éléments bibliographiques propres à chaque terrain dans une approche de type monographique. Dans cet objectif, le détour par l'histoire agraire régionale a été privilégié et à ce titre chaque région offrait une liste d'ouvrages de référence. Corse et Sardaigne ont assez récemment fait l'objet d'investigations ethnographiques associées à des références fondatrices qui dressent un portait des sociétés autour notamment des "genres de vie" associés aux économies agraires tels que ceux de Ravis-Giordani, Pernet-Lenclud en Corse ou Le Lannou en Sardaigne. Cette approche

bibliographique a été associée au visionnage de films qui offrent aussi un matériau précieux comme le film Padre Padrone à propos de la Sardaigne, ou la littérature romanesque en Corse incarnée par Mérimée, Dumas, Maupassant. Ces apports sont essentiels dans la mesure où, contrairement à des travaux plus contemporains, ils abordent le fonctionnement des sociétés. Ils offrent un cadre de compréhension important qui m'a, par la suite, permis de disposer des repères pour caractériser le changement technique et la trajectoire des bassins. Dans l'Arganeraie, ce parallélisme s'est révélé plus complexe dans la mesure où les travaux d'anthropologues assez anciens étaient principalement tournés vers des débats entre écoles de pensée, incarnés par Jacques Berque, Paul Pascon, Ernest Gellner. Ce travail très riche sur les structures sociales marocaines se révélait toutefois lacunaire puisque relativement étranger des dimensions agraires mis à part des recherches plus récentes conduites par exemple Romain Simenel (2010), permettant d'intégrer des approches fonctionnelles du territoire, qu'elles soient religieuses ou agraires.

Situer les trajectoires auxquelles ont été associés les produits

La littérature scientifique offre une abondance de travaux à propos des productions principales tels que ceux menées sur le Brocciu en Corse, l'huile d'argan au Maroc, ou le Pecorino Romano en Sardaigne. Ils offrent des perspectives multiples associées à la caractérisation des productions, à leur inscription socio-économique dans ces régions. D'autres les resituent plus spécifiquement au regard des systèmes d'élevage dans leurs contextes nationaux tels que les travaux de Laurent Rieutort (1995) et Claire Delfosse (2007). Les coproduits n'y sont toutefois envisagés généralement que comme des appendices et l'on ne trouve que de rares recherches documentées. Tout autant qu'ils sont abandonnés des logiques professionnelles, ils le sont bien souvent aussi par la recherche. Il faut dès lors démultiplier les sources et situer les lieux d'existence de ces coproduits au-delà de la science ou l'agenda quotidien des organisations professionnelles. Leur existence est ainsi située dans d'autres espaces sociaux et leur statut de patrimoine en offre alors des mises en scène importantes à décrypter. Un travail journalistique a été réalisé par un recensement d'articles dans le quotidien Corse-Matin. Ces écrits ont permis de resituer ces productions au sein de leur société avec des articles consacrés aux agneaux et aux cabris durant les périodes de fêtes, les bonnes tables, recettes, etc. Par ailleurs, le format journalistique a permis d'identifier des chroniques associées au fonctionnement des abattoirs ou aux formes de publicité que les acteurs donnent à leur engagement, ce qui m'a permis de resituer ce produit au fil de son émergence dans les discours professionnels. Les livres de cuisine ont aussi représenté un matériau d'étude permettant notamment d'envisager les différentes préparations, les modes de valorisation associés aux différents morceaux. Dans le cas marocain,

ce travail en dehors des cadres bibliographiques a été principalement réalisé à partir de la lecture de documents relatifs aux politiques publiques tels que le Plan Maroc Vert et sa déclinaison locale autour de l'élevage caprin dans l'Arganeraie. Enfin, les cahiers des charges propres à chacune de ces productions ont été analysés afin notamment de délimiter l'identité de ce produit représentée par une profession.

Recueillir des informations quantitatives

J'ai pu avoir accès à certaines bases de données issues des organismes agricoles dans chacun des terrains, fournies par l'ILOCC (Inter-profession Laitière Ovine Caprine de Corse) en Corse, le centre AGRIS en Sardaigne, la DPA d'Essaouira au Maroc. Elles m'ont permis d'acquérir des informations relatives aux exploitations, leur taille, le nombre de travailleurs, les surfaces, tailles de troupeaux, type d'alimentation. Cette approche statistique a été aussi associée à des diagnostics agraires réalisés par des stagiaires ou les typologies d'élevage élaborées par des bureaux d'études dans le cas de la Corse30. Certains organismes et notamment les représentants régionaux des projets de certification (agneau corse et sarde), m'ont donné accès à des bilans de campagne permettant d'avoir des informations chiffrées sur les animaux collectés et vendus, par type de marché, ou destinations géographiques. J'ai aussi pu bénéficier d'informations chiffrées accessibles auprès des services vétérinaires ou en ligne sur les abattoirs dans les trois régions permettant d’avoir une représentation visuelle de la saisonnalité des abattages ou leur répartition régionale.

4.2.2. Observation participante et non participante

Si l'observation participante est une méthode généralement envisagée en ethnologie et mobilisée sur un temps assez long, j'ai pu dans le cas de la Corse me situer dans une telle posture au travers du partage des modes de vie et de ma participation à certaines activités. La vie au village, Venaco, Tralonca, m'a permis d'entretenir des relations privilégiées avec la population, des bergers, enfants de bergers, ou parents de berger, restaurateurs, avec qui des échanges continuels ont pu être maintenus durant l'ensemble du séjour en Corse. Les rencontres de café, l'achat de fromages ou d'agneaux à la ferme, le ramassage du fumier, sont des moments propices pour capter des informations sans se positionner en tant qu'enquêteur, ce qui laisse au discours une plus grande flexibilité. S'il s'agissait parfois de discussion autour de l'élevage, les échanges étaient surtout associés à "la Corse", ses fonctionnements sociaux, la nature des groupes, leur mode d'organisation, les guerres politiques pré-électives, qui ne sont jamais très éloignées de la

question agricole. Par ailleurs, les groupes d'amis auxquels j'étais associé étaient fortement impliqués dans le monde agricole, en tant que salariés d'organisations socioprofessionnelles (ILOCC, Corsica Vaccaghi un organisme chargé de l’élevage bovin corse). Les échanges, souvent relatifs au monde agricole, m'ont permis d'agrémenter ce travail d'autres apports liés à des ressentis, distincts de ceux construits dans un cadre scientifique, mais issus des "réalités de terrain". Les foires rurales ont aussi été des lieux que j’ai régulièrement fréquentés (Fiera di Bocognano, Fiera di u Casgiu de Venaco), et permettent de situer les productions insulaires dans un cadre relationnel autre que le marché. Dans l'Arganeraie, sans pouvoir définir un tel type de proximité, des suivis de parcours ont été organisés auprès des éleveurs durant le séjour à une dizaine de reprises, sur des demi-journées. Ces moments étaient propices à l'observation des modes de conduite des bergers, la compréhension de la relation de l’éleveur à ses animaux sur le parcours, qui peut se matérialiser par des gestes, regards, cris, etc.

Un travail plus spécifique a été réalisé en Corse autour de la pratique de l'abattage fermier. J'ai été présent durant trois campagnes pour observer cette pratique dans sa dimension matérielle et commerciale, en assistant aux différentes séquences associées aux tueries jusqu'à la livraison du produit fini au consommateur. Ce travail a, par ailleurs, fait l'objet d'un dispositif de recherche associé au tournage de microfilms afin à terme de soumettre ces séquences à une auto-confrontation par l'éleveur, mais ce dispositif n'a pu aboutir. Dans un contexte de tension juridique associé à cette pratique, j'ai pu travailler plus particulièrement en lien avec une organisation locale de producteurs, Casgiu Casanu et avec certains de ses élus membres de la Confédération paysanne31. J'ai ainsi pu interagir avec leurs représentants nationaux dans le cadre de l'atelier "relocalisation", où il s'agissait d'envisager les moyens d'encadrer cette pratique en s'appuyant sur la flexibilité de la législation européenne. Ce travail a notamment permis de participer à l'un des ateliers organisé au siège à Bagnolet où étaient présents différents représentants régionaux. J'ai aussi eu l'occasion d'être présent lors des campagnes d'expédition des agneaux vers la Sardaigne en présence des livreurs et des collecteurs en identifiant les modalités d'allotissement des animaux et l'organisation des tournées de collecte. Le séjour au Maroc s'est accompagné de visites des souks hebdomadaires ou j'ai pu me familiariser avec les modes de livraison, de vente et de tuerie des animaux. Cette présence m'a notamment permis de situer l'existence du chevreau au sein d'une économie de proximité. Au-delà de ces dimensions fonctionnelles, le souk est un lieu social permettant d'y réaliser des rencontres avec différents interlocuteurs (vétérinaires, éleveurs, Caïd, etc.).

4.2.3. Entretiens semi-directifs

La plus grande partie du corpus méthodologique est liée à la conduite d’entretiens semi directifs. Ils se sont déroulés sur la base de l’administration d’une grille d’entretien préalablement construite selon l’identité des personnes rencontrées (annexe 2). Celles-ci étaient formulées sous formes de questions ouvertes. Ces grilles ont au fil du temps évolué selon les informations déjà acquises et analysées. Les précisions quant aux personnes enquêtées et aux grilles d’entrée sont à consulter dans les parties précédentes (Cf. 3.1 et 3.2).

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