• Aucun résultat trouvé

Le processus primaire et la représentation phantasmatique :

Le processus primaire nécessite de prendre en compte trois concepts clés, à savoir l’image de chose, le masochisme primaire et l’image de mot. Les images de mots ne sont introduites que dans une deuxième phase et elles donneront lieu à des modifications des productions du primaire : ces productions seront dites « primaire- secondaire ».

3.3.5.1 Définition du processus primaire :

La mise en place d’un tel processus nécessite que soit reconnue par la psyché, la présence d’un autre corps séparé du sien propre. Le lien entre ces deux espaces psychiques séparés constituera ce que l’auteure nomme une représentation phantasmatique ou une mise en scène. Cette représentation allie subtilement la reconnaissance de la séparation et sa négation. Ces deux espaces psychiques séparés restent néanmoins sous l’empire du tout-pouvoir du désir d’un Autre. C’est pourquoi, tout plaisir et tout déplaisir ressentis seront considérés comme l’effet du tout-pouvoir de cet Autre et ils seront envisagés respectivement comme un désir de réunification (amour) entre ces deux espaces ou comme un désir de rejet (haine) de ce même espace.

Le matériau constitutif de la représentation phantasmatique est l’image de chose témoignant soit du lien entre les différentes parties érogènes de son corps, soit du lien existant entre ces mêmes parties avec le corps de l’Autre. L’image du monde et des choses dans le monde coïncident avec l’image représentant le corps et ses parties.

Le tout-pouvoir du désir de l’Autre cause l’affect éprouvé qu’il s’agisse d’amour ou de haine : dans cette mise-en scène, le fantasmant est dans la position de celui auquel soit on offre le plaisir de voir, d’entendre et d’être, soit être celui qui est

rejeté par le vu, l’entendu et l’existant. L’accessibilité du processus secondaire se fait par la perception de l’écart entre l’affect du monde et l’affect du phantasmant.

Le postulat du processus primaire est donc celui-ci : « Tout ce qui témoigne de l’existence du hors-soi sera interprété comme manifestation du désir de l’Autre, l’éprouvé du phantasmant comme effet de la réponse que ce désir attend ou impose » (Aulagnier, 1975, p. 87). Cette mise en scène suppose donc deux objets et à l’extérieur de cette scène, un regard qui la contemple et éprouve du plaisir ou du déplaisir.

3.3.5.2 Les prototypes du secondaire avant les images de mots :

Précédant les images de mots, il existe néanmoins des prototypes du secondaire. L’auteure identifie et distingue le prototype identificatoire, le prototype de l’Œdipe et le prototype de la castration.

Premièrement, le prototype identificatoire désigne une réflexion sur elle- même de l’activité du primaire, à la source du sujet de l’inconscient. Ce résultat est la réponse donnée par le primaire lorsqu’il interprète le désir projeté sur l’Autre. Cette mise en scène de la relation entre le désir de la mère et le plaisir de l’infans repose sur la projection d’un Autre désirant et l’introjection sur la scène psychique d’un désir qui est imputé à l’Autre. Plusieurs scénarii différents peuvent être imaginés en fonction des relations à travers lesquelles, la psyché interprète les situations de rencontre entre la bouche et le sein, que ce soit dans le sens du plaisir ou du déplaisir.

Deuxièmement, le prototype de l’Œdipe intervient lorsque l’infans sera convaincu qu’il n’est pas l’objet exclusif du désir de la mère. L’Autre désire un ailleurs qui le déloge de cette position privilégiée, si bien que l’objet x deviendra le représentant d’un attribut paternel. De plus, il s’agit d’un appendice qui peut soit compléter le corps de la mère, l’agresser, lui donner quelque chose, soit lui enlever un morceau. Par ailleurs, le précurseur de l’Œdipe pour cet infans, n’est rien d’autre que ce qui de l’Œdipe parental, se fraye un accès. Lorsque le primaire partage un espace psychique avec le secondaire parental, tout évènement affectif sera marqué par l’Œdipe parental, c’est-à-dire par ce qui doit rester refoulé. De plus, cet Œdipe parental historise le désir dans l’ordre humain, c’est-à-dire que la manière dont ces parents se comportent avec leur enfant réel sera toujours marquée par les « affects » anciens éprouvés il y a longtemps.

Troisièmement, le prototype de castration se manifeste par une angoisse de mutilation qui est le résultat d’une figuration, qui se sert du corps pour représenter sa relation au plaisir érogène et au désir de l’Autre. Tout évènement, survenant dans le monde, désigne pour le phantasmant, un accident qui affecte son corps ou celui de l’Autre. Que ce soit son corps agressé ou le corps complété de la mère, la contemplation de l’agression pose le regardant dans une position de mutilé ou d’unifié puisque c’est la conséquence du désir imputé aux acteurs de la mise en scène.

3.3.5.3 L’introduction de l’image de mot :

Aulagnier (1975) prétend que l’inscription psychique de l’image de mot prend toute sa place dans le fonctionnement des processus primaires. Elle pose l’hypothèse selon laquelle la représentation d’une idée nécessite d’adjoindre aux représentations de choses, des représentations de mot, que la psyché doit à la perception des sons et des voix, une fois qu’ils peuvent être signifiés. Il faut donc que cette perception acoustique se transforme en une perception d’une signification qui est émise par la voix de l’Autre. Ainsi, le couplage de l’acoustique à la signification met en place un système de signification respectant le postulat du primaire, c’est-à-dire qu’il démontre le tout-pouvoir du désir de l’Autre.