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CHAPITRE 2 : LES ENJEUX DU DESIGN L’IMPACT DES

2.3 Du design à l’empowerment du bien-être

2.3.2 Le design : un dispositif sociotechnique d’empowerment

Michel Foucault définit le dispositif comme « un ensemble résolument hétérogène comportant

des discours, des institutions, des aménagements architecturaux, des décisions réglementaires, des lois, des mesures administratives, des énoncés scientifiques, des propositions

1 Ibid.

2 Rabia BENAMAR, Xhemile BUZAKU, Jérôme LEGROS, ibidem, p.11. 3 Georges CANGUILHEM, Le normal et le pathologique, op.cit., 1966, p.157.

4 INSPQ, « Réaliser un projet en lien avec la responsabilité populationnelle ». https://www.inspq.qc.ca/, mis en ligne le 14 juillet 2016, consulté le 23 janvier 2018. Url : https://www.inspq.qc.ca/exercer-la-responsabilite-populationnelle/realiser-un- projet-en-lien-avec-la-responsabilite-populationnelle/analyser-la-situation-convenir-de-l-orientation-et-de-la-structure-du- projet-avec-les-partenaires/analyser-les-interventions-quelles-sont-les.

5 Michel FOUCAULT, « Le jeu de Michel Foucault » dans Dits et écrits II, Paris, Gallimard, p.299, in Sylvain LAFLEUR, « Foucault, la communication et les dispositifs », Communication [En ligne], vol. 33/2, 2015, mis en ligne le 26 janvier 2016, consulté le 23 janvier 2018. Url : http://journals.openedition.org/communication/5727.

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philosophiques, morales, philanthropiques ; bref, du dit aussi bien que du non-dit »1. Inscrits dans les jeux de pouvoirs opérant au sein des sociétés, les dispositifs sociotechniques semblent alors de prime abord antinomiques avec la notion d’empowerment2.

Pour Michel Foucault, la communication « est un liant qui permet de maintenir des rapports

entre des êtres différenciés. Elle est une puissance concourant à mailler, à enrôler, à tenir des individus hétérogènes à l’intérieur de relations intéressées par l’intermédiaire d’énoncés ou d’objets techniques » 3 . Ainsi, les dispositifs sociotechniques d’information et de

communication apparaissent également ici sous la forme de technologies d’asservissement. Dès lors au sein de ces derniers, puisque le dispositif est un tremplin au pouvoir d’agir du pouvoir, il s’avère que le dispositif est porteur de la fonction d’empowerment. Tout dépend donc de l’entité qui est dans cette position. Or, analysés en dehors de leur contexte, les mondes numériques et vidéoludiques permettent aux individus asservis dans des contextes habituels d’endosser cette fois un ou des rôles alternatifs et subversifs.

En effet, à l’ère des technologies numériques, des réseaux, des outils d'informations et des méthodes de communication, l’humain est dorénavant capable de se démultiplier et d’exister simultanément à la fois biologiquement, mais aussi et surtout numériquement et virtuellement au sein d’un truchement de dispositifs4. Aussi, en développant son pouvoir d’agir dans un

système alternatif, une population peut alors développer des aptitudes clés pour son

empowerment au sein de dispositifs différentiels équivalents5.

Grace aux avancées technologiques, les représentations graphiques sont de plus en plus ressemblantes à l’environnement tel qu’il est perçu par l’œil humain. Ainsi, notamment au travers des jeux vidéo, il est possible de reconstituer des univers alternatifs aux ressemblances remarquables vis-à-vis de la réalité non numérique. Tout en réutilisant les mêmes mécanismes sociotechniques que ceux exposés par Erving Goffman, les jeux vidéo deviennent des dispositifs subversifs au sein desquels se déploient, s’expérimentent et se cultivent autant de nouvelles sociabilités que de pouvoirs d’agir. Par ailleurs, parce qu’ils sont éprouvés dans des univers construits sous le même modèle, la structure de ces aptitudes est aussi opérante au sein des dispositifs traditionnels. Cependant, c’est le réalisme rendu possible par le design qui rend ces simulateurs de vies alternatives différentes et singulières par rapport aux jeux classiques qui

1 Sylvain LAFLEUR, ibidem 2 Ibid.

3 Ibid.

4 Hovig T. MINASSIAN, dirigé par, « Comment trouver son chemin dans les jeux vidéo ? Pratiques et représentations spatiales des joueurs. », L’Espace Géographique, no. 40, mars 2011, Montpellier, p.245-262, p.4 et pp.8-9.

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n’ont pour support que les dispositifs classiques et l’imagination. Ainsi, les espaces vidéo ludiques se positionnent comme des dispositifs à part entière, et pas seulement comme un dispositif au sein d’un autre dispositif.

Aussi, le jeu vidéo, ou plus précisément son game design, est un média d’empowerment au sein des dispositifs. A la différence des simulateurs ou à l’image de certains jeux sérieux, le design des jeux vidéo se fait le point de départ de l’ensemble des ingrédients de l’empowerment : les marqueurs et les mécanismes ludiques ainsi que le flow. A eux trois, ils permettent de réunir dans un rapport ludique le travail, l’œuvre et l’action1, activités fondamentales à la vie humaine.

En effet, les travaux précédents ont permis de conclure que « par sa dimension non productive,

par le sentiment de plénitude qu’il induit et enfin par son caractère prévisible, mais aussi par ses propriétés réversibles, le jeu permet à l’Homme d’ajouter une variable au potentiel effectivement compensatoire face aux constantes et aux fonctions génératrices et organisatrices de la vita activa. »2. Aussi, grâce aux propriétés des milieux dans lequel il a été accumulé, ce

capital de « pouvoir d’agir » s’avère potentiellement transférable d’un dispositif à un autre. Dès lors, il s’agit de comprendre de quelle manière employer le game design en tant que technologie d’information et de communication, sous sa fonction de dispositif sociotechnique d’empowerment, mais aussi et surtout d’identifier quels sont les fluidifiants qui facilitent le glissement d’un univers à un autre.

2.3.3 Quelques exemples du serious gaming en France de nos jours : de la recherche à la