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LA SCIENCE POLITIQUE

Dans le document Les études sur les Amériques en France. (Page 61-63)

sur les Amériques :

LA SCIENCE POLITIQUE

Les universitaires français qui relèvent de la 4ème section du CNU, donc de la science politique, qui ont pour principal objet d'études les États-Unis sont extrêmement rares, plus rares encore qu'en histoire, discipline dans laquelle plusieurs enseignants-chercheurs effectuent l'ensemble de leur recherche sur cet objet scientifique. Depuis le départ à la retraite de Denis Lacorne, qui occupait un poste de directeur de recherche au CERI, on peine à identifier un universitaire français au CNRS en section 40 ou en exercice dans un établissement d'enseignement supérieur sur un poste de professeur des universités ou de maître de conférences qui relève directement à la science politique. En fait il y a deux cas de figure récurrents :

• Des chercheurs qui ont soutenu une thèse en science politique mais qui exercent dans des départements autres que de science politique ou sont nommés sur des postes qui ne relèvent pas de la 4ème section du CNU ou de la 40ème du CNRS.

• Des politistes au CNRS ou en poste dans l'enseignement supérieur qui font un travail comparatif dans lequel il y a de fréquentes incursions sur le terrain étasunien.

On compte aussi quelques cas, tel celui de Laurent Bouvet, professeur à l'UVSQ, de chercheurs qui ont à l'origine écrit sur les États- Unis mais qui se sont par la suite écartés de ce domaine ou n'y reviennent que dans une approche comparative ou transnationale. Daniel Sabbagh, qui est directeur de recherche au CERI, le spécialiste incontesté en France des politiques d'action positive (affirmative action) est sans doute celui des américanistes formés à Sciences Po par Denis Lacorne qui est resté le plus proche de son objet américain initial, même

si aujourd'hui son travail a pris une dimension comparative marquée ; comme beaucoup de chercheurs dans ce domaine, il est aussi très proche des juristes dans son approche.

On ajoutera qu'il existe une porosité disciplinaire forte avec la sociologie, l'histoire ou encore le droit, notamment autour dans ce dernier cas des études sur le judiciaire américain, quand bien même les juristes français envisagent la frontière disciplinaire entre droit et science politique d'une manière radicalement différente – et quasiment hermétique - que les chercheurs américains. Aux États-Unis, les travaux d'Elisabeth Zoller (Professeur de droit public à Paris II) ou de Gwenaëlle Calves (Professeur de droit public à Cergy-Pontoise) seraient mobilisés autant par les juristes que les politistes et auraient évidemment droit de cité dans un département de science politique. En France, la frontière est plus étanche, même si, sur les questions des discriminations en particulier, il est difficile de ne pas faire dialoguer les deux disciplines.

Éric Fassin, spécialiste des discriminations et des minorités sexuelles, est un fin connaisseur du politique américain. Mais on l'identifie plus comme un sociologue que comme un politiste. Camille Froidevaux-Metterie, qui est professeur de science politique à Reims, est sans doute une des meilleures spécialistes du fait religieux aux États-Unis, mais aussi de ses implications dans la conduite de la politique étrangère des États-Unis. Aujourd'hui elle plus connue pour ses travaux sur le féminisme, qui incluent évidemment une réflexion soutenue sur les États-Unis.

Enfin, il faut mentionner le cas assez spécifique des relations internationales et des études de défense et de sécurité, domaines dans lesquels il est impossible de ne pas avoir une connaissance approfondie des États-Unis

mais qui, paradoxalement, comptent peu de chercheurs qui y consacrent l'essentiel de leur travail. Dans ce domaine, les thèses sont souvent dirigées par des chercheurs tel Bertrand Badie avec des jurys renforcés par des collègues américains ou européens pour la soutenance. On pense par exemple à Alexandra de Hoop-Scheffer, l'actuelle directrice du bureau parisien du German Marshall Fund, un think tank américain spécialisé dans les questions de défense et de sécurité transatlantique. C'est d'ailleurs un domaine dans lequel la France est relativement absente ou faible, une des raisons étant l'absence d'une université ou institution qui, à l'instar de King’s College au Royaume Uni ou de l'Université Charles à Prague, joue un rôle moteur dans le domaine de ce que les Anglo- Saxons appellent les security studies. De ce fait, des chercheurs tels Etienne de Durand ou Célia Belin travaillent soit pour des think tanks comme l'IFRI ou pour le Centre d'analyse et de prévision du MAE, centre lui-même dirigé par Justin Vaïsse, qui a une formation d'historien mais une expérience professionnelle, notamment à la tête d'un centre de la Brookings, qui le rapproche fortement de la science politique. On pense aussi à Maya Kandel, docteure d'histoire mais spécialiste de politique étrangère des États-Unis et chargée de mission à l'IRSEM où, là encore, son travail d'analyse sur la politique étrangère et la politique de défense des États-Unis la rapproche fortement de la science politique.

Si l'on revient à notre typologie simpliste des politistes spécialistes des États-Unis, on compte dans la première catégorie, entre autres, trois anciens docteurs de Denis Lacorne et un de Vincent Michelot, qui lui-même occupe à Sciences Po Lyon un poste de 11ème section :

• François Vergniolle de Chantal est aujourd'hui professeur à Paris-Diderot sur un poste de 11ème section (langue, littérature et civilisation des pays anglo-saxons). Il est spécialiste des institutions

américaines, en particulier du fédéralisme, mais aussi des politiques d'immigration.

• Audrey Celestine est maître de conférences à Lille 3, elle aussi en 11ème section. Elle travaille sur les mobilisations et la construction des identités aux États-Unis.

• Amandine Barb est post-doc à l'Université Humboldt à Berlin. Sa recherche porte sur la laïcité en perspective comparée France/États-Unis et plus généralement sur l'encadrement juridique et constitutionnel du fait religieux.

• Alix Meyer est maître de conférences au département d'anglais de l'Université de Bourgogne. Il est spécialiste du Congrès des États-Unis, des politiques fiscales et aussi du conservatisme américain.

Par ailleurs, Jim Cohen, qui a longtemps enseigné dans un département de science politique, est aujourd'hui professeur en 11ème section à Paris 3. Son expertise porte sur les mouvements contestataires américains et la gauche américaine, sur les mouvements alternatifs, mais aussi sur les Hispaniques aux États-Unis.

Dans la deuxième catégorie et avec une quantité variable de leur travail consacré aux États-Unis, il faut citer :

• Bertrand Guillarme, professeur de théorie politique à Paris 8, spécialiste des travaux du philosophe John Rawls.

• Mathieu Hauchecorne, qui est maître de conférences à Paris 8, a travaillé sur la socio- histoire de l'importation des théories de la justice. Comme Bertrand Guillarme, il se situe dans le domaine de la philosophie politique avec une très bonne connaissance de Rawls et Walzer.

• Les travaux de Laurent Jeanpierre, qui est professeur à Paris 8, portent sur la socio-histoire de la philanthropie et des sciences sociales. Il a rédigé sa thèse sur les émigrés français aux États-Unis.

• Elisa Chelle, qui est chercheuse associée à Sciences Po Grenoble (Pacte), a travaillé sur New York, en particulier sur les politiques de lutte contre la pauvreté et d'assistance sociale et sanitaire.

• Renaud Payre, qui est professeur de science politique à Sciences Po Lyon a rédigé, avec Gilles Pollet, une socio-histoire de l'action publique qui fait la part belle à l'expérience américaine dans le domaine. Il continue son travail d'investigation sur le développement de l'analyse des politiques publiques aux Etats- Unis en perspective comparée.

• William Genieys, directeur de Recherche CNRS, spécialiste des élites politiques. Il a dirigé entre 2008 et 2012 le programme "Operationalizing Programmatic Elites Research in America 1988-2010" (OPERA) qui l'a conduit à interviewer avec ses collaborateurs plus de 200 conseillers politiques de la Maison Blanche des administrations Clinton, Bush et Obama, ainsi que des staffers du Congrès. Il dirige actuellement le CEPEL (UMR5112), laboratoire de recherche de l’Université de Montpellier, et compte dans son équipe des chercheurs comme Marc Smyrl (diplômé de Harvard, maître de conférences à l'université de Montpellier), Jean Joana (professeur et directeur du département de science politique de l'université de Montpellier) ou Saïd Darviche (maître de conférences à l'université de Montpellier).

• Enfin, Olivier Ihl, professeur de science politique à Sciences Po Grenoble a consacré une partie de sa recherche aux États-Unis, toujours en perspective comparée. C'était le cas de son récent collectif sur le vote électronique. Cet inventaire est indéniablement incomplet, partiel, voir lacunaire. Il serait très difficile de recenser de manière exhaustive l'ensemble des contributions des chercheurs français sur les États-Unis qui se placent dans le domaine large de la science politique. Nous espérons au moins n'avoir oublié aucune figure majeure.

Dans le document Les études sur les Amériques en France. (Page 61-63)