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1.1 L’ « Extrême-Orient » au centre des intérêts occidentau

A l'époque des Grandes Découvertes, entre le XVème et le XVIIème siècle, après avoir

découvert les continents américain et africain, les puissances occidentales continuent à se rendre plus loin en Extrême-Orient à la recherche de nouveaux marchés et de nouvelles ressources. A cette époque, les voiliers sont le principal moyen de transport pour le commerce international et les guerres navales. De ce fait, pour les puissances occidentales, la construction de ports devient une étape primordiale. Elles créent ou développent des ports le long des routes de navigation dans les régions ultramarines nouvellement conquises pour faciliter le commerce océanique (Laux, 2015).

Pour effectuer leur choix d’implantation de leurs comptoirs commerciaux, les puissances occidentales se concentrent sur des îles facilement défendables ou des sites déjà développés. Et ceci en faisant attention à prendre en compte le rythme et la fréquence de navigation, déterminés par le système de mousson. Les comptoirs sélectionnés, comme Malacca (1511), Manille (1567) et Batavia (1619), respectivement administrés par les Portugais, les Espagnols et les Néerlandais, sont aménagés pour abriter les futurs ports coloniaux et préparés à des fins coloniales (Laux, 2015). Ces comptoirs servent de quartiers généraux aux empires maritimes européens en Asie du Sud-Est, créant ainsi de nouvelles relations hiérarchiques avec les ports d'alimentation de ces régions, par contrat ou par la force (Blussé, 2013). De ce fait, chaque empire occidental développe sa propre route de navigation commerciale, jalonnée par des comptoirs et colonies au milieu du XVIIème siècle (Carte 1).

Carte 1 : Le commerce maritime de comptoir des pays européens en Asie au milieu du 17ème siècle

SOURCE :HABBEKRATZ,2016

De toutes les puissances occidentales, le Portugal est la première à émerger en tant que puissance maritime. Grâce à son vaste empire commercial colonial à travers le monde, il monopolise les routes commerciales des épices, soutenu par une puissante thalassocratie à partir de Lisbonne jusqu’au sud de l’Asie (conquête de Goa en 1510 et contrôle du Détroit de Malacca et les régions voisines à partir de 1511). Les Portugais ouvrent le commerce avec la Chine à Canton en 1517, et par la permission des Ming, ils sont autorisés à occuper Macao en 1557. Le Japon, fortuitement atteint par trois commerçants portugais en 1542, attire bientôt un grand nombre de marchands et de missionnaires. Par la proximité géographique, les Portugais sont les premiers à découvrir l'île principale de Taiwan en 1544, qu’ils qualifient de « belle île » (Formosa)6. Cependant

ils ne pensent pas à s’y installer puisqu’ils contrôlent déjà une base voisine en Chine

6 Malheureusement, il n’y a aucune preuve pour confirmer cette origine. Récemment, selon la recherche d’un historien taiwanais, il est plus probable que les Portugais ont parlé de « Formosa » pour l’archipel de

(Macao) et disposent de liens commerciaux avec le Japon et la Chine. Ils établissent une route commerciale entre Canton (Chine) et Nagasaki (Japon) en Asie de l'Est pour le commerce de la soie chinois et de l’argent japonais (Gunn, 2011).

S’inspirant du trajet commercial établi par les Portugais en 1571, d'autres pays européens comme l'Espagne et les Pays-Bas se concentrent également sur les marchés asiatiques pour établir leurs propres comptoirs afin de mettre un terme au monopole du Portugal sur les prix des épices (Jan de Vries & Ad van der Woude, 1997). Les Espagnols choisissent Manille, leur comptoir commercial le plus proche de la Chine et du Japon, comme capitale de leur future colonie et, de là, ils prennent contact avec ces deux pays pour pouvoir commercer. Les marchands Chinois, qui ont besoin de l’argent espagnol pour commercer7 viennent à Manille avec de la soie, la porcelaine et d’autres produits

manufacturés pour effectuer des échanges. Les commerçants Japonais se rendent également à Manille pour échanger leur argent contre de la soie chinoise, des épices de l'Asie du Sud-Est et des aliments en vrac. D'autres villes portuaires d'Asie du Sud-Est apportent également à Manille des épices et d'autres produits naturels ou manufacturés en échange de produits de base chinois, japonais et espagnols. Manille est alors le centre commercial du monde aux XVIème et XVIIème siècles.

Les Pays-Bas émergent, en tant que puissance maritime, après le Portugal et l'Espagne et adoptent une stratégie commerciale maritime distincte. A la différence des Portugais et des Espagnols qui exercent leur puissance maritime à l'échelle mondiale, les Néerlandais installent en priorité leur siège à Batavia8 (aujourd'hui Jakarta, Indonésie) et

7Avec l'expansion continue de l'hégémonie maritime espagnole, depuis la fin du XVIIème siècle, la devise espagnole est la principale monnaie mondiale et est largement utilisée en Europe, en Amérique et en Extrême-Orient (Humphrey, Sutherland, & Allan, 2019).

8 Aux XVIIème et XVIIIème siècles, les écrivains néerlandais considèrent la rébellion des Bataves indépendants et épris de liberté comme le reflet de la révolte néerlandaise contre l'Espagne et d'autres formes de tyrannie. Selon cette vision nationaliste, les Bataves étaient les "vrais" ancêtres des Hollandais, ce qui explique l'usage récurrent du nom au cours des siècles. Jakarta est nommée "Batavia" par les Hollandais en 1619. La république néerlandaise créée en 1795 sur la base des principes révolutionnaires français s'appelait la République de Batavie. Aujourd'hui encore, le batavien est un terme parfois utilisé pour décrire le peuple hollandais, c'est similaire à l'utilisation du gaulois pour décrire le français et du teutonique pour décrire les

se concentrent sur le commerce intra-asiatique (Gunn, 2011). Ainsi, au XVIIème siècle sont

dénombrés plus de trente comptoirs néerlandais dans le monde, dont dix-neuf en Asie. C'est dans ce contexte que Taiwan devient une station commerciale néerlandaise et devient intégrée au commerce international.

1.2 - L’évolution du commerce maritime et les comptoirs des

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