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publiques au tournant des années 1980 avec l’apparition des technologies Down To Hole

1.7.1 Foreuses : la grande innovation

Les forages étaient initialement effectués avec des « calyx rotative rigs 5 HP » des foreuses rotatives de type calice équipées de moteur 5 chevaux. La rotative découpe un anneau dans la roche par mouvement circulaire, qui est ensuite brisé à l’aide d’une tarière ou d’un marteau à percussion. Le temps nécessaire à cette seconde opération détermine le succès et la productivité des techniques : suivant les caractéristiques de la roche, briser l’anneau et enlever les débris de roche peut prendre plus de temps que de découper l’anneau. Pendant l’opération de forage, un panier (le calice) situé au -dessus du barillet permet de collecter les débris de roches et l’épaisse poussière depuis la base de l’excavation jusqu’à la surface, soufflés par injection d’air comprimé. Une injection d’air comprimé insuffisamment forte ne permet pas de nettoyer les débris accumulés, laissant les marteaux briser en poussière les débris d’excavation. Une fois rendue compacte par les marteaux, la poussière devient impossible à pénétrer, bloquant le forage. Le nettoyage du point de forage est une étape importante à maîtriser : plus elle est rapide, plus les risques d’engorgement se réduisent. D’après les écrits de Limaye, les outils de forage conventionnel permettaient de creuser un puits de 30 mètres de profondeur en un mois de travail sur terrain basaltique. La même opération, sur terrain granitique, nécessitait des jours supplémentaires. Les marteaux DTH (down-the-hole) apparaissent en Inde en 1972. Avec l’apparition de ces nouvelles techniques, l’Inde s’affranchit de son contexte géologique complexe. Les nouvelles foreuses à air compressé permettent de creuser un puits de 150 millimètres de diamètre jusqu’à 60 mètres de profondeur en l’e space d’une journée. Dans les programmes d’irrigation du gouvernement, le puit de 150 mm de diamètre pour 60 mètres de profondeur (parfois atteignant une profondeur de 100 mètres), équipé d’une pompe, devient le standard des programmes d’irrigation indiens.

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1.7.2 Technologies Marteau Fond de Trou : l’extraction est rendue possible dans les

régions de roches dures indiennes

Par le passé, les régions de roche dure (parfois également appelées région de socle) étaient négligées en tant que source possible d’approvisionnement en eau souterraine. Les coûts élevés de forage constituaient un frein important aux forages exploratoires, dans des roches dotées d’un faible taux de perméabilité. Les progrès des techniques de forage au marteau fond de trou (technologie Down To

Hole) ont permis de révéler un fait ignoré : l’idée, contre-intuitive, qu’il puisse aussi y avoir de l’eau

dans les granites et dans les roches dures en général. Les régions de roche dure apparaissent fréquemment dans le monde : elles couvrent 20% de la surface terrestre. Ces régions au potentiel hydrogéologique encore inexploré, ont suscité l’intérêt des chercheurs. Aux techniques primaires de forage s’ajoutent des méthodes d’analyse morphologique et de géologie structurale afin de poursuivre l’exploration.

En Inde, les enjeux d’investigation étaient d’autant plus d’importance que les régions de roche dure couvrent près des deux tiers du sous-continent, soit 2,40 millions de kilomètres carrés. Les développements récents des recherches montrent que ces régions étaient un peu trop hâtivement négligées : on estime aujourd’hui que plus de la moitié des ressources exploitables se trouvent dans ces roches. Un gisement qui dans certains cas pourrait avoir une dimension de durabilité locale, comme dans les Ghats occidentaux (zones de montagne) et l’État de l’Assam, où les précipitations avoisinent les 400 cm/an. Autrefois réduit aux zones alluviales, la course à l’exploitation des eaux souterraines, et l’explosion du nombre de forages durant la Révolution V erte étaient des phénomènes qui se réduisaient aux plaines alluviales qui comptabilisait le tiers du territoire. A la fin des années 1980, les forages de puits tubés s’étendent à ces types de formation géologique aux aquifères profonds. En début d’exploitation d’ouvrage, les débits s’avèrent élevés. Dans le cas de nappes captives, il est possible que l’eau souterraine soit le produit de plusieurs centaines, voire plusieurs milliers d’années de lente accumulation. Le renouvellement de ces aquifères devient e nsuite tributaire des flux issus des aquifères supérieurs et de la percolation de précipitations à la surface du sol, située à plusieurs centaines de mètres. Dans des régions de sécheresse chronique(drought prone areas), le taux de recharge de ces nappes peut être extrêmement faible, posant des limites sévères au modèle d’expansion des puits tubés. C’est le cas des États du Telengana, de l’Andhra Pradesh, du Karnataka, du Rajasthan, ainsi que du Maharashtra : des zones semi-arides où l’extraction souterraine, solution aux faibles précipitations, devient à son tour problématique. Dans les formations montagneuses (près de 17% du territoire de l’Union Indienne), les mêmes effets de surexploitation et de baisse des niveaux de nappe apparaissent au bout de quelques années d’exploitation (MoWR, 2016)

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1.7.3 France : hydraulique villageoise africaine et retours d’expérience en

métropole

Pendant que l’hydrogéologie française prend un tour nouveau en France dans les années 1960, le travail se poursuit en Afrique avec d’autres équipes. On poursuit les inventaires et les synthèses hydrogéologies en Afrique de l’Ouest : Sénégal, Côte-d’Ivoire, Mauritanie, ainsi qu’en Afrique du Nord qui permettra de développer le développement de l’hydraulique villageoise, en plus de no uvelles techniques. Avec la technologie dite marteau-fond-de-trou se développe ce que l’on appela pendant longtemps « l’hydraulique villageoise », pour alimenter les villages en eau permet de réaliser rapidement des forages dans les roches cristallines fissurées, passant d’un rythme de 3 forages par an à 12 forages par mois. Dans le Sud-Est Mauritanien, le BURGÉAP crée en 1961 les premières implantations de forages en zone de socle : un dispositif de photographies aériennes permet de repérer les fractures propices au forage.

Au début des années 1970, le BRGM réalise des missions auprès du Centre Interafricain d’Etudes Hydrauliques sur les régions de socles de l’Afrique de l’Ouest, alors jugées imperméables. Les analyses concluent à la présence d’eau dans les fractures des roches granitiques entre 80 et 100 mètres. Les recherches de zones fissurées dans les socles ont lieu par prospection géophysique électrique. Régions de socle cristallin ou sédimentaire ancien, les techniques de forage courantes ne sont pas adaptées à la dureté des terrains. La technologie dite de marteau fond de trou, à l’origine utilisée pour la prospection minière, permet de résoudre le problème de délai de forage : lors des premiers essais au Mali lors de la sécheresse des années 1972-1973, les marteaux fond-de-trou forent des puits d’une centaine de mètres de profondeur en l’espace d’une journée. Les campagnes de forage s’étendent les années suivantes à d’autres pays, sur d’autres zones géologiques (formations basaltiques, roches cristallines). Des forages Marteau Fond de Trou sont réalisés au Cap Vert en 1972, qui se poursuivront après l’indépendance du pays en 1975, et jusque dans les années 1990.

Financés par les fonds de coopération français et internationaux, ces missions se voie nt attribuer le surnom d’« hydraulique villageoise ». Avec le marteau fond-de-trou, la pompe à motricité humaine constitue le deuxième élément clé de cette hydraulique villageoise africaine. Le modèle de pompe, conçu par Marc Vergnet en 1974, est distribué par l’entreprise éponyme. Fonctionnant à pied ou manuellement, la pompe est équipée d’un cœur en caoutchouc, qui la rend plus légère et plus

142 résistante que les modèles précédents fonctionnant avec une tringle métallique85. En 1975, 20 000 forages auront été réalisés en Afrique de l’Ouest dans ces programmes.

Des milliers de villages seront ainsi équipés en Afrique du Nord et Afrique de l’Ouest, dont les travaux de forage seront conçus et supervisés par le BURGÉAP, la SOGREAH, ainsi que le BRGM. Le financement se fera par les fonds de coopération européens et de l’État Français. Autre acteur français, le Burgéap va poursuivre en Afrique ses travaux commencés dans les années 1950. Après les années 1970, le début de la grande sécheresse au Sahel fait exploser les besoins en eau souterraine des populations.

Jean Margat revient sur cet épisode : Cette technique s’est développée plus tard, dans les terrains pas

très riches en eaux souterraines, comme il y en avait beaucoup au Sahel, des roches éruptives, dures, pas très aquifères mais qui le sont quand même un petit peu. Alors là-bas on a fait des milliers de puits. Le BRGM s’en est occupé je suis allé voir un peu les équipes qui s’en occupaient. C’était surtout au Mali, Niger, Burkina, qu’on a fait ça. Un peu dans le sud Maroc. On s’arrangeait pour faire un forage par jour, c’était rapide. Donc on avait trouvé cette technique de forage par percussion, qui allait assez vite, et on prévoyait déjà le lendemain où on ferait le forage suivant, il fallait aller très vite. Les forages ne donnaient pas de très bon débit, c’était des nappes assez pauvres. Quelques mètres cubes par jour, c’était peu, mais cela répondait à l’objectif de faire des points d’eau pour des villages. »

Les effectifs du BRGM sont mobilisés pour des missions de service public ou de bureau d’études, en France comme à l’international dans des climats arides (Afrique de l’Ouest, corne du Sahel, Arabie Saoudite) : « j’avais donc une double casquette j’étais à la fois service public et bureau d’étude pour

trouver des clients, non seulement des clients français mais aussi à l’extérieur. J’ai par exemple beaucoup travaillé en Arabie Saoudite. Cela m’a fait connaître beaucoup de pays du monde et j’ai fait des missions au Brésil et dans d’autres pays, beaucoup de pays d’Afrique, du Sahel ».

L’hydraulique villageoise se poursuit jusqu’au milieu des années 1980, dans le cadre de la Décennie de l’eau potable et de l’assainissement. Elle constitue un terrain d’expérimentation pour les différents acteurs de l’hydrogéologie française. Etablissements publics (BRGM), entreprises de droit privé (BURGEAP, Vergnet), Ministères mais aussi centres universitaires. À l’Université d’Avignon, le Centre de Formation Internationale à la Gestion des Ressources en Eau (CEFIGRE) publie en 1984 avec le soutien du Ministère de la Coopération & du Développement un manuel d’hydrogéologie d’Afrique de l’Ouest86. De 1982 à 2001, 300 étudiants obtiennent la Licence « Gestionnaire de l’eau en pays agricole

85Toujours en activité dans le secteur de l’adduction d’eau en zones rurales enclavées, l’entreprise affirme avoir commercialisé 100 000 pompes Vergnet sur l’ensemble du continent africain en l’espace de 40 ans.

86Synthèse des connaissances sur l’hydrogéologie de l’Afrique de l’Ouest, socle crystallin et crystallophillien, sédimentaire ancien, Ministère de la Coopération & du Développement, 2ème édition, 1990, 133 p.

143 méditerranéen » de l’Université d’Avignon. On retrouve les logiques d’élaboration des techniques en climat aride et le rapatriement des acquis d’expérience.

A la fin de la décennie 1970 en France, trois années de faibles précipitations conduisent à une diminution des eaux de surface dans une grande partie du territoire. Cette situation, connue sous le nom de sécheresse de l’été 1976, attire l’attention des pouvoirs publics sur le rôle d’appoint que peuvent constituer les eaux souterraines en cas de sécheresse. Alors inexplorés, les terrains difficiles d’accès sont étudiés, suivant les retours d’expérience en zone aride. Le BRGM développe des recherches de zones aquifères fissurées dans les régions de roches cristallines par prospection géophysique électrique. Suivant le développement des techniques mises en place en Afrique de l’Ouest, des centaines de forages de faible débit (de quelques centaines de litres à 20 mètres cubes par heure) sont réalisés dans les massifs anciens.

C’est le cas du Massif armoricain, région de socle

où l’approvisionnement en eau est jusque-là essentiellement par les eaux de surface. Les

aquifères carbonatés font aussi l’objet de recherche dans les régions calcaires (aquifère de la

Craie du Nord, Jura, Bassin de Paris, Pyrénées). C’est à ce titre que sont étudiés le système

karstique de la Fontaine de la Vaucluse et celui du Baget dans les Pyrénées à des fins

expérimentales.

1.7.4 Mise en visibilité du lien entre surexploitation des eaux souterraines et

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