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Le changement de politique du gouvernement israélien envers les Palestiniens Palestiniens

CHAPITRE I : MÉTHODOLOGIE ET PROBLÉMATIQUE

17. Le changement de politique du gouvernement israélien envers les Palestiniens Palestiniens

Après vingt ans d’occupation, le bilan de l’économie palestinienne montre une dépendance quasi totale à l’économie israélienne. L’économie palestinienne génère alors seulement deux tiers de ses revenus nationaux. La consommation est supérieure à la production et le déficit est comblé par des importations israéliennes. La majeure partie du budget, sans compter les salaires de l’administration civile à destination des Israéliens et des locaux, est consacrée à la santé, dont un tiers aux aides sociales. Le budget destiné au

315 TAMIMI Azzam (2007), Hamas, A History from Within. Northampton, Mass., Olive Branch Press. 316 Entretien n° 5, Munira.

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développement est négligeable, attestant un désintérêt évident de l’administration, guère préoccupée par le statu quo relatif au développement317. En revanche, la participation de la population de la Bande de Gaza au budget total de l’État d’Israël est importante et se fait par le biais du paiement de ce que Meron Benvenisti318 appelle l’occupation tax (impôt de l’occupation). Les revenus reçus par la CIVAD (l’administration civile israélienne) dépassent le montant de l’investissement du gouvernement israélien à Gaza. L’une des principales actions de la CIVAD était, avec le ministère de la Défense, en 1986, d’enquêter et de rechercher des projections jusqu’à l’année 2000 pour établir un document confidentiel appelé le Gaza Plan319. Celui-ci présente une série de stratégies concernant des enjeux critiques qui sont, plus ou moins les mêmes, inclus dans l’accord de Gaza et Jéricho sur l’eau, la terre et les colonies. Il est important de rappeler une autre réaction israélienne face à la première Intifada : il s’agit de la construction du mur initial de sécurité autour de Gaza, en 1994. Celui-ci est conçu pour être hermétique, ce qui explique sa composition en dur pour quelques sections, et en constitué de barrières électrifiées ailleurs. Il permet alors au gouvernement israélien d’assurer son contrôle dans les colonies de la Bande de Gaza et de surveiller en permanence les mouvements de près d’un million six cent mille Palestiniens. Ces sections, au nombre de trois, s’étendent sur près de 365 km2.

La Guerre du Golfe, en 1990, annonce de profonds changements dans l’approche politique d’Israël à l’égard des Territoires occupés, et de la Bande de Gaza tout particulièrement. Saddam Hussein, dans un effort pour réhabiliter son nom et sa popularité, au plus bas après les huit ans de guerre avec l’Iran, décide d’envahir le petit émirat du Koweït. Cette intrusion, soutenue par Yasser Arafat, entraîne un nouvel exode et une perte financière dramatique pour des centaines de Palestiniens qui travaillaient au Koweït depuis de nombreuses années. Concomitamment, Israël annule les permis de sortie pour les habitants de la Bande de Gaza et de Cisjordanie320. Cette mesure, en apparence temporaire, est prise par

317 ROY Sara (2004), The Gaza Strip, the Political Economy of De-development, Washington, DC, Institute of Palestine Studies, p. 195.

318 BENVENISTI Meron et KHAYAT Shlomo (1988), The West Bank and Gaza Atlas, Jerusalem, The Jerusalem Post Press.

319 ROY Sara (2004), p. 95.

320 Pour quitter les Territoires occupés et rentrer en Israël, les habitants de Gaza et de Cisjordanie doivent avoir une carte magnétique – le permis pour rentrer en Israël. Quand il y a des bouclages, la validité du permis est suspendue. La fermeture est de divers types : elle peut être générale ou seulement interne. Celles qui sont imposées à Gaza sont habituellement d’ordre général.

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Israël du fait des tensions politiques et de la fréquence des couvre-feux, mais devient, au fil du temps, un fait accompli. La CIVAD encourage alors les investissements palestiniens à Gaza et accorde, pour la première fois, des permis, jusqu’alors interdits, pour l’établissement d’usines et d’entreprises industrielles. L’idée de zones d’activités commerciales devient populaire. La « transition » est avérée et, au lieu de laisser les « portes ouvertes », Israël décide de garder les Palestiniens dans la Bande de Gaza tout en les faisant travailler pour Israël321. La situation économique dans les années 1990 est assez précaire, surtout à Gaza, du fait de l’absence de ressources naturelles et d’un manque évident de matières premières comme le charbon, le pétrole ou le gaz322 ainsi que des terres cultivables de superficies limitées323. La Bande de Gaza dispose d’un secteur public désorganisé et d’un système bancaire fragile lié à une forte croissance démographique.

La crise du Golfe affecte aussi l’exportation des agrumes. Les acheteurs les plus importants étaient l’Irak, désormais en guerre, le Koweït, l’Arabie Saoudite et les Émirats. Tous ferment leurs marchés devant le soutien des Palestiniens à la guerre irakienne. L’aide d’Arafat à l’égard de Saaddam Hussein induit que des milliers de Palestiniens sont chassés de ces pays et qu’une vague de déplacés, provenant du Golfe, arrive à Gaza et en Cisjordanie324. La poursuite des attaques en Israël tend davantage encore la situation. En réponse aux actions des Palestiniens en Israël, les autorités d’occupation ferment les territoires en mars 1993, quelques mois avant les accords d’Oslo. Le bouclage empêche presque totalement le contact entre la Bande de Gaza et la Cisjordanie, isolant les territoires entre eux et les coupant du marché arabe le plus important, Jérusalem. Un permis spécial est requis pour se déplacer entre les territoires325. En mai 1994, Israël termine son redéploiement militaire dans la Bande de

321 BENDELAC Jacques (1999), L’Économie palestinienne, de la dépendance à l’autonomie, Paris, L’Harmattan. 322 Un rapport du PECDAR, en 2005, annonce que du gaz naturel vient d’être découvert dans la Bande de Gaza. Le journal libanais Daily Star Lebanon rapporte (26 avril 2010) que British Gas et Israël élaborent des plans pour utiliser ces réserves naturelles.

323 EFRAT Elisha (2006), The West Bank and Gaza Strip - A Geography of Occupation and Disengagement, Londres, Routledge.

324 Le phénomène se répète actuellement avec les événements du printemps arabe, mais de manière marginale. Entretien au ministère des Affaires sociales, septembre 2011. Des réfugiés venant de Lybie, de Syrie et du Yémen arrivent dans la Bande de Gaza en 2011 à la suite du printemps arabe, en passant par les tunnels de Rafah. 325 Sara Roy emploie le concept de « bantustanisation ». Voir aussi FARKASH L., « Palestinian Labor Flows to the Israeli Economy : A Finished Story ? », Journal of Palestine Studies 125, vol. 32, n° 1, 2002, pp. 13-27. Le terme « bantoustan » est tiré de la littérature sud-africaine. Il permet de décrire la position du peuple Bantu dans ses terres et l’impossibilité à sortir sauf en présentant un permis de sortie accordé par les autorités gouvernementales.

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Gaza, qui reste segmentée en trois parties, entrecoupée par des colonies israéliennes et leur réseau routier assorti de passages et de barrages.

18. Les accords d’Oslo et la création de l’Autorité palestinienne en 1994

Les Accords d’Oslo ont constitué, pour la population des Territoires occupés, une réelle surprise, bien que la première phase représentait seulement Gaza and Jéricho.

Le Hamas a condamné la signature de la Déclaration de principes le 13 septembre 1993, considérant qu’il s’agissait là d’une trahison à l’égard des droits fondamentaux des Palestiniens. Citons ici Hassan Balawi : « Or, les dirigeants de l’OLP, qui incarnent le nationalisme palestinien, ont

signé des accords de paix avant même de pouvoir récupérer leur terre » 326 .

Les arrangements étaient secrets, les termes employés n’étaient pas acceptables et les Palestiniens n’étaient pas prêts pour un tel compromis. Suite aux Accords d’Oslo, le Premier ministre israélien et Yasser Arafat signent l’accord du Caire en mai 1994, en présence de représentants soviétiques, américains et égyptiens. Celui-ci confère à l’Autorité palestinienne le contrôle de la Bande de Gaza et 65 km² de la région de Jéricho, frontalière de la Jordanie, et son voisinage ; les Israéliens conservent le contrôle des frontières entre ces territoires autonomes, les colonies juives de la Bande de Gaza et les routes principales d’accès à ces régions. Balawi le souligne : « Aujourd’hui, nous [Israéliens et Palestiniens] sommes ensemble sur un

même bateau. Le bateau ne nous embarque pas les uns après les autres pour faire un tour séparément et puis revenir. Nous sommes à bord, ensemble. Quel autre choix avons-nous que de nous réconcilier ? La réconciliation exige néanmoins l’égalité. Car sans égalité, aucun avenir commun ne sera possible. L’échec des négociations dites d’Oslo est aussi celui du concept de partenaires »327.

L’OLP, ce quasi-État328 sans territoire, devient l’Autorité palestinienne à Jéricho et Gaza d’abord. L’arrivée d’Arafat à Jéricho puis, plus tard, à Gaza est gravée dans les mémoires. À Jéricho, les gens arrivent en grand nombre au stade pour voir Arafat venu avec son keffieh noir, façonné comme la carte de la Palestine, ses yeux brillant d’émotion devant la victoire. À Gaza, les rues ont été envahies par la foule, désireuse de participer à ce rare moment empli de promesses, chacun agitant un petit drapeau palestinien. L’arrivée de l’Autorité palestinienne

326 BALAWI Hassan (2008), p. 9. 327 BALAWI Hassan (2008), ibid. 328 SAYIGH Yezid (1999), pp. 659-674.

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change le quotidien même des Gaziotes. Désormais, un pouvoir central entre en action aux côtés des mairies et des ONG locales, influençant, de fait, leur manière de travailler. Des organisations qui étaient devenues presque étatiques doivent, dès lors, apporter leur soutien à l’Autorité palestinienne. S’ouvre alors une période de tensions, avant que ne s’établisse un

modus vivendi, un peu forcé du fait de la présence des bailleurs de fonds qui, parfois, choisissent

les ONG avant l’Autorité comme organisations de référence pour la gestion de leurs programmes d’aide humanitaire ou de développement.

L’Autorité palestinienne s’est établie comme un corps autonome à Gaza et dans une partie de la Cisjordanie, la région de Jéricho. C’est là un premier pas, avant même le départ des forces d’occupation israélienne du reste de la Cisjordanie. Son principal effort a été la création d’institutions étatiques, d’un plan d’aménagement et d’évaluation de projets à présenter aux bailleurs de fonds qui offrent leur assistance dans le processus de genèse de l’État. Ces derniers sont d’ailleurs fortement intervenus dans les programmes et le développement de l’Autorité palestinienne de la Bande de Gaza329. L’enceinte territoriale crée des contraintes insurmontables qui entravent l’autonomie économique et de production : sa situation géographique, entre l’Égypte et Israël, et son manque de ressources naturelles ne font pas de la Bande une région autonome viable. Le seul moyen pour que ces aspects ne soient plus exclusivement négatifs serait que la zone devienne une région de libre-échange. C’est là le souhait de beaucoup de Palestiniens et d’étrangers qui ont mentionné cette notion à plusieurs reprises, évoquant sa position historique de passage commercial.

Depuis les Accords d’Oslo, et tous les autres efforts de paix qui ont suivi, le programme des bailleurs de fonds s’est modifié pour « s’adapter » aux besoins et aux restrictions gouvernementales de chacun. Durant les dix ans qui ont suivi les Accords, les fonds ont couvert les besoins budgétaires de l’Autorité palestinienne et de plusieurs investissements en matière d’infrastructures. Par la suite, plusieurs opérations militaires israéliennes se sont succédées à Gaza, la plus dévastatrice d’entre elles, au niveau des infrastructures économiques, ayant été l’opération plomb durci à la fin 2008 et au début de l’année suivante330. Sara Roy, dans le post-scriptum de son livre sur la Bande de Gaza, publié il y a

329 Il en va de même pour leur intervention en Cisjordanie.

330 Nous verrons plus tard que l’opération de 2012 visait des cibles précises mais celle qui a dévasté l’économie et le moral de la population gaziote a été la dernière, cinquante-et-un jours de bombardements entre juillet et septembre 2014.

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déjà plus de vingt ans, fait un commentaire toujours pertinent : « Les programmes des bailleurs de

fonds [depuis 1993] essaient d’atténuer les effets pernicieux du blocus et les restes de mesures restrictives au lieu de les éradiquer. Les résultats [de ces programmes] ont confiné l’aide internationale et les initiatives de développement dans un cadre étroit de paramètres d’action ».

Mises à part quelques municipalités qui ont continué à fonctionner dans le cas des plus grandes villes, il y avait, avant les accords d’Oslo, peu de structures locales de gouvernement autres que celles montées de toutes pièces par les autorités militaires d’occupation. Ces dernières avaient été instaurées principalement dans les localités palestiniennes prêtes à collaborer avec les autorités militaires. Cela a notamment été le cas des petites villes, bourgades et villages. Le constat est ici celui d’un vide de pouvoir ou, pour être plus juste, celui d’une dépossession du pouvoir local au profit de l’occupant pendant plus de cinquante ans.

L’étude Masterplanning the State of Palestine ; suggested guidelines for comprehensive development publiée en 1992, soit un an avant les accords d’Oslo, antérieure donc à l’instauration de l’Autorité palestinienne dans les territoires, a été réalisée par le Centre d’ingénierie et d’aménagement (CEP) de Ramallah. Le CEP est l’un des rares cabinets d’expertise palestiniens présents durant l’occupation israélienne. Il produit là le premier rapport d’audit révélant l’existence d’un vide juridique et institutionnel au niveau local. Cette étude met l’accent sur le manque d’institutions politiques locales, pourtant légalement reconnues en Palestine, et sur la faiblesse des institutions existantes. Il conseille la création d’un certain nombre de municipalités, le remplacement de plusieurs conseils existants, dans trois districts de Cisjordanie et de la Bande de Gaza notamment, dans la perspective de la forte croissance démographique attendue.

Le manque d’institutions locales est de nouveau souligné dans un rapport réalisé par le même organisme, en partenariat avec le PNUD, peu de temps après les accords d’Oslo. Celui-ci recense les localités rurales de plus de 1 000 habitants dépourvues de tout statut juridique. Mais le vide juridique mis en évidence par les différents rapports renvoie surtout à la situation qui prévalait à l’intérieur des municipalités palestiniennes officiellement reconnues au moment des accords d’Oslo, à savoir la « disparition » des équipes dirigeantes et la quasi-fermeture des services techniques. Cette situation ne peut se comprendre que rapportée à une double réalité : la stratégie territoriale changeante du gouvernement israélien qui l’a conduit à adopter une

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politique de cooptation et de répression à l’égard des notables locaux, et l’implantation progressive de l’OLP dans les Territoires et sa prétention à parler au nom de l’ensemble des Palestiniens où qu’ils soient331.

La bureaucratie formée pendant les années d’exil revient en Palestine. Les autochtones, ceux de dedans332, qui ont prouvé leur force face à l’occupation et qui ont travaillé avec des moyens limités, par le biais de mairies et d’associations de la société civile, ont mis de côté leurs peurs et leurs critiques pour laisser place à la construction de l’État. Les ministères se sont formés dont l’un des plus importants, celui de l’Aménagement du territoire. Nous tenons à le mentionner car, pour les Palestiniens, l’une des restrictions les plus gênantes durant les années d’occupation a été leur impossibilité de concevoir le développement de leurs villes, ou simplement de pouvoir demander un permis de construire pour une maison. Avec l’administration israélienne, il était, en effet, particulièrement difficile d’obtenir ce permis, la plupart des demandes étant rejetées. Les immeubles, à Gaza et ailleurs, ont donc été érigés clandestinement, illégalement, sans aucune garantie que la résidence ne serait pas démolie peu après sa construction. Mais les Palestiniens, inlassablement, continuent de dresser des bâtiments, c’est là une forme de résistance. La nouvelle Autorité n’a pas mené un travail gouvernemental cohérent au niveau de la ville dans le but de changer les comportements. En revanche, cela a été fait ad hoc par des organisations de la société civile qui ont tenté d’augmenter la conscience civique de la population, sans programme préétabli toutefois. Le nouveau gouvernement est formé en grande partie de rapatriés (a’edin), qui ne sont pas en mesure de connaître les mœurs et les habitudes des autochtones, des gens de dedans et, de fait, les frictions restent, comme à l’arrivée de l’Autorité, assez fréquentes.

Les associations de la société civile sont habituées à se faire respecter et à lutter contre l’occupation. Paradoxalement, le préjudice le plus important observé à l’égard des pouvoirs locaux et les abus principaux relevés à l’encontre des organisations de la société civile, à l’exception de l’occupation israélienne de Gaza, apparaissent après les accords d’Oslo. Se met

331 SIGNOLES Aude (2005), Les Représentations du passé en Palestine. Municipalités d'hier, municipalités d'aujourd'hui, éd. de l'EHESS, pp. 109-126.

332 Khalil Shikaki parle de la vieille garde et de la nouvelle, les autochtones, les gens du dedans et les rapatriés, les gens du dehors. SHIKAKI Khalil (2001), Old Guard, Young Guard: the Palestinian Authority and the Peace Process at Crossroads. http: //www.pcpsr.org/strategic/occasionalpapers/youngvsoldguard.html: PSR - Strategic Analysis Unit, Occasional Papers. Voir aussi LEGRAIN Jean-François (2006), « La dynamique de la « guerre civile » en Palestine ou comment refuser à Hamas d’exercer son mandat », Critique internationale n°36, juillet-septembre, documents additionnels numériques.

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alors en place un pouvoir central qui porte, effectivement, atteinte aux libertés publiques, à l’indépendance de la presse et de la justice. Depuis la signature des dits accords, l’Autorité palestinienne n’est pas parvenue à développer les institutions nationales ni la société civile. Les gens commencent à douter du succès du processus de paix. Progressivement, un certain nombre d’associations se mettent au service des factions politiques dont les motivations sont davantage personnelles et politiques que professionnelles.

Une explication possible de ces abus contre la société civile est avancée par Abu Sada dans sa recherche sur les ONG palestiniennes, sur la position « étatique » acquise par celles-ci pendant l’occupation israélienne. Elle s’interroge sur la notion de vie associative, de société civile, appliquée au cas palestinien. Dans les territoires palestiniens occupés, les associations de la société civile ont proliféré du fait de l’absence d’État pour s’occuper du travail étatique. La force de ces associations, comme elle l’indique, vient du fait que la population « peut rester rassemblée autour de structures sociales traditionnelles et se mobiliser autour de discours et de modes d’action dits modernes. » Les hamulas (les groupements des familles étendues) et l’importance des chiukh (les notables de village, parmi lesquels les makhatir), dans la société traditionnelle, sont intégrés aux réseaux de ces associations. Avec l’autorité palestinienne (à l’arrivé d’Abu Ammar) et encore plus avec le Hamas, le mukhtar gagne énormément en importance333 par sa participation dans des comités de réconciliation334 et d’intermédiaire dans les cas des problèmes familiaux.

Malgré tous ces éléments qui pourraient nous laisser entrevoir une absence de société civile à Gaza, la vie associative persiste et se dynamise en permanence335. Le PNGO (Réseau Palestinien des organisations non gouvernementales) regroupe cent trente-deux ONG, dont les plus importantes. Nous relevons des dizaines d’associations de moindre importance qui travaillent avec des fonds privés ou par le biais de projets d’ONG. « La prolifération des ONG

333 Pendant l’occupation israélienne les makhatir avaient perdu leur position sociale parce qu’ils ont été accusé avec fréquence de collaborer avec les autorités israéliennes. S’il n’a actuellement pas de charge officielle, le mukhtar remplit le même rôle de médiateur en cas de conflit. Lorsque des familles s’adressent à lui, l’Autorité accepte son jugement. Entretien n° 5 Munira.

334 Ces comités de réconciliation dépendent du Département des affaires tribales (dâ’ erat shu-ûn al-‘ashâ’ er), lequel relève directement du bureau du Président Arafat. Ils étaient très présents pendant la première Intifada. Les comités de réconciliation ont été créés pendant l’intifada pour pallier l’absence de système judiciaire palestinien et éviter de recourir à celui de l’occupant. PIRINOLI Christine (2002), « Entre terre et territoire : enracinement de