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Paragraphe 1 : Les écueils de La déréglementation du recouvrement amiable

B- Absence des cellules spécialisées

93. Si la propension de l’individu au contentieux participe considérablement à la hausse du

contentieux de l’impayé136, l’absence de cellules spécialisées en recouvrement amiable au sein des entreprises marocaines constitue un handicap dans le processus de recouvrement, ces entreprises privilégient la voie judiciaire pour obtenir gain de cause malgré la durée considérable du procès, plutôt que d’essayer de recouvrer la créance par tous les moyens amiables de. Toutefois à la différence des PME qui ont une vocation judiciaire dans leur politique de recouvrement du recouvrement(1), et qui ne disposent pas de cellules spécialisées en recouvrement amiable, une minorité de grandes structures en disposent(2).

1- Les PME

94. Une cellule spécialisée, ou un agent engagé uniquement en interne pour recouvrer

amiablement les créances au sein d’une petite ou moyenne entreprise est une démarche rejetée par les chefs d’entreprises, qui refusent encore de confier leurs créances en souffrance ou non recouvrées à une société spécialisée, compte tenu des charges qu’une créance recouvrée par celle-ci pourrait engendrer137.

Les PME préfèrent en revanche recourir aux services d’un avocat circonscrit dans la sphère judiciaire, et ne disposant d’aucune alternative à part celle-ci, tout en sachant les difficultés que rencontre la voie judiciaire,138 et aussi l’absence de garantie bonne fin du procès, étant donné que ces professionnels ont une obligation de moyen et ne peuvent nullement assurer un sort favorable aux litiges qui leur sont soumis.

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-supra 68 et s.

137- A. SHAMAMBA, « Impayés: Osez l’externalisation de votre recouvrement », l’économiste, édition n° 1861, 24 septembre 2004.

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Dans cette optique, on trouve déplorable que ces entreprises ne s’efforcent pas de créer un service dédié au recouvrement amiable, et de donner une primauté au recouvrement amiable plutôt que de recourir aussitôt que possible à la justice étatique, particulièrement en matière cambiaire.

Cela contribuerait sans doute au développement de ce mode primordial de recouvrement d’un impayé préalablement à toute démarche forcée, qui provoque généralement une véritable rupture des liens contractuels avec le débiteur, et freine parallèlement la croissance de l’entreprise.

95. On peut affirmer d’ores et déjà que la prédominance du recouvrement forcé dans la

sphère des petites et moyennes entreprises constitue une pierre d’achoppement du recouvrement amiable au Maroc, et l’une des principales causes de l’accroissement des litiges d’ l’impayés devant les juridictions commerciales et civiles. Or ce mode n’étant pas tellement développé, la mise en œuvre par ces entreprises de moyens appropriés à cet effet, et notamment le concours d’agents spécialisés pourrait contribuer à sa baisse.

96. En somme, on peut voir d’un bon œil que des actions de sensibilisation soient menées

au profit de ces entités, afin de mettre en évidence l’importance du recouvrement amiable interne à chacune de ces entreprises en exercice. Il faut considérer notamment les avantages qui en découlent, résidant essentiellement dans le gain de temps, toujours précieux pour le recouvrement d’une créance, sachant qu’un procès devant une juridiction peut perdurer sans que le créancier obtienne gain de cause, sans compter les procédés dilatoires qu’emprunte parfois le débiteur du seul fait d’être assigné en justice par son créancier, sans négliger d’autres avantages résultants du maintien des liens contractuels avec le débiteur et la profitabilité économique pour chacun des protagonistes.

2- Les grandes structures

97. Les grandes structures au Maroc ont compris qu’un recouvrement efficace passait par

l’instauration de cellules spécialisées en recouvrement amiable dans l’entreprise, des cellules attachées généralement au service du contentieux au sein de celle-ci. Après un passé assez proche où elles n’accordaient aucune importance à ce mode de recouvrement de créance, et où la voie judiciaire était le sort inéluctable d’un litige qui relève de l’impayé, on assiste aujourd’hui à une transformation de stratégie du recouvrement au sein des grandes entreprises qui consiste à favoriser et à mettre tous les moyens humains en place pour le fonctionnement correct des cellules affectées à cet effet.

En effet, la majorité des grandes entreprises sondées dans le contexte de ce travail, ont déclaré qu’elles disposaient ou venaient de mettre en place une cellule destinée au

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recouvrement amiable, particulièrement les banques et les compagnies d’assurance139, qui privilégient ce mode de recouvrement, et ne recourent à la justice que si le recouvrement s’avère compromis et jusqu’à épuisement de toutes les démarches amiables entreprises par ses employés dans ce cadre.

98. Quant aux modalités déployées dans ce contexte, les agents de recouvrement qui ont

procédé au remplissage des questionnaires, déclarent que leur mission repose sur la célérité et la promptitude. De plus, se doter d’un constant esprit d’anticipation est une condition sine qua non pour garantir le recouvrement dans les meilleurs délais. Pour ce faire, ces agents doivent être en permanence tenus informés par le service concerné selon le secteur d’activité de l’entreprise de l’ensemble des incidents de paiement ou de défaillance relevant d’un crédit ou de n’importe quelle créance devenue exigible à l’échéance, et ce pour pouvoir relancer par des lettres le débiteur, le cas échéant, prendre contact avec le débiteur défaillant pour savoir d’emblée les causes principales de sa défaillance, s’il s’agit d’une anomalie passagère, d’un problème de trésorerie, ou d’une autre cause pouvant inquiéter l’agent ou mettre en péril le recouvrement de la créance. Cette démarche s’appuie à la fois sur la psychologie et sur l’analyse profonde de la situation du débiteur en question pour tenter d’y remédier, et il faut ajouter que plusieurs facteurs peuvent conditionner la démarche entreprise par l’agent, entres autres le type de débiteur et le montant de la créance.

99. En l’occurrence, le gestionnaire a pour tâche de proposer la solution la plus opportune

au débiteur en fonction de la situation de ce dernier ; il peut par exemple proposer un plan de rééchelonnement si la créance est importante, et s’il estime que la créance ne peut absolument pas être recouvrée instantanément en totalité. dans ce cas le rééchelonnement fait l’objet d’un engagement écrit souscrit par le débiteur et, en l’espèce, la durée la plus fréquente de recouvrement varie entre 6 mois et une année.

L’agent peut également faire bénéficier le défaillant de remises partielles de créances ou de frais s’il juge que le recouvrement est en danger, et qu’en aucun cas le débiteur ne pourra faire face à l’ensemble de la créance en question ; cependant, si ces deux dernières démarches se sont épuisées vainement, l’agent transmet sans tarder le dossier au contentieux qui emprunte la voie judiciaire la plus appropriée pour contraindre le débiteur à s’acquitter.

Ipso facto, cette démarche s’est avérée fructueuse en faveur des grandes structures au Maroc, eu égard aux résultats obtenus par ces services spécialisés, et, à ce propos, un établissement bancaire affirme que ces cellules sont missionnées dans certains cas pour recouvrer des sommes importantes, et la proportion de dossiers de recouvrement qui ont

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fait l’objet d’un recouvrement amiable réussi dépasse 55%140, tandis qu’un autre déclare atteindre 60% pour la même proportion141.

On ne peut que saluer cette nouvelle méthode de recouvrement empruntée par les grandes entreprises, qui se focalisent sur le recouvrement amiable et ne soumettent leur litiges de l’impayé aux juridictions que dans les cas où la situation l’impose, encourageant de cette manière le recouvrement amiable, et ne participant pas considérablement à l’encombrement des tribunaux par des affaires d’impayé.

Paragraphe 2 : Les stratégies abusives de recouvrement amiable des sociétés de

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