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Vers une cuisine de la proximité

I- Michel Oliver, un chef amateur

2) La vérité est au fond de la marmite

a. Un format renouvelé

Dis-moi ce que tu mijotes, dont les évolutions de la formule21 sont sûrement révélatrices des difficultés à trouver un format convaincant, quitte la grille des programmes de TF1 après une saison. L'émission de Michel Oliver devait toutefois répondre à un intérêt réel puisqu'Antenne 2 a à son tour fait appel au présentateur22 pour animer une émission de recettes assez proche de celle qu'il animait jusqu'alors. La vérité est au fond de la marmite est alors mis à l'antenne tous les dimanches à 11h30 à partir de septembre 1978. Le programme perdure pendant cinq ans, en étant diffusé le samedi à midi à partir de septembre 1979. L'émission de recettes, toujours synchronisée avec le moment de la préparation du repas, se voit donc résolument inscrite dans la temporalité spécifique du week-end, moment où la pratique de la cuisine fait l’objet d’un intérêt particulier (voir chapitre 4). Le changement du jour de diffusion du dimanche au samedi23 peut certainement s'expliquer par le souci de permettre au public de réaliser les recettes, présentées comme étant destinées à être mangées le dimanche24, peu de temps après la diffusion de l'émission25. Aussi, le jour de diffusion de l’émission a une importance dans la définition de son répertoire culinaire, car les recettes présentées sont adaptées à des circonstances particulières que l’émission met en scène. Celle-ci prend en effet pour référence le déjeuner dominical, ou bien d’autres moments propres au week-end26.

21 Si la partie consacrée à la présentation de la recette est restée inchangée, les échanges entre les téléspectateurs

invités et Michel Oliver semblaient peu spontanés, et ont été abandonnés pour être remplacés par un dialogue avec des invités ayant le rôle d’expert. Le fait qu’à plusieurs reprises Michel Oliver ait présenté seul le programme est sans doute le signe d’une difficulté à suivre chaque semaine ce dispositif.

22 C’est Jean Lanzi qui, selon Michel Oliver, lui a proposé d’animer une nouvelle émission sur Antenne 2. Michel

Oliver, Le rire du chat qui pisse sur la braise, op. cit., p. 184.

23 En quittant le créneau du dimanche midi, l’émission a été déplacée sur un créneau moins exposé. En effet, le

dimanche est le jour de la semaine où le public de la télévision est le plus nombreux à midi. En 1978, on comptait 17% d’audience toutes chaînes confondues le dimanche midi, contre seulement 1% le samedi. « Audience de la radio et de la télévision. 1976-1982 », rapport EQ/83/42 du CEO (Centre d’études d’opinion), juillet 1983. Archives de l’INA, Fonds Jacques Durand : les publics, « Audiences : évolutions 1949-1989 / SOFRES : Panel Radio-TV 1972- 1973 ».

24 Interrogé dans Face à vous en 1979, Michel Oliver définit la cuisine présentée dans La vérité est au fond de la

marmite comme « la cuisine du dimanche ». « Michel Oliver », Face à vous, Antenne 2, 05/12/1979.

25 Lorsque ces recettes sont présentées le dimanche, il est déjà trop tard pour que les téléspectateurs déjà en train de

déjeuner puissent les préparer immédiatement. Les résultats d’une enquête réalisée en 1982 montrent qu’environ 50% des personnes interrogées déclarent prévoir leurs menus entre la veille et plus d’une heure avant les repas (un quart des sondés n’ayant pas répondu à la question). Jean-Louis Lambert, L’évolution des modèles de consommation alimentaire en France, op. cit., p.162.

26 Quand Michel Oliver présente la recette des croissants, il invite les téléspectatrices à la mettre en application

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Par rapport à Dis-moi ce que tu mijotes, le dispositif de la nouvelle émission comporte des nouveautés, que Michel Oliver lui-même semble avoir souhaité et imposé à la production27. La présentation de l'émission est assurée en tandem : Michel Oliver s'entoure de « complices28 » masculins (à l'exception de Jacqueline Alexandre, dont la participation est peu fréquente) qui l'assistent à tour de rôle. De ce fait, la télévision met en scène des hommes qui font la cuisine, alors même qu'ils ne se présentent pas comme chefs, ce qui est en décalage avec la féminisation très large de cette activité dans la société. Il est toutefois à noter que la participation des hommes à la cuisine familiale a lieu essentiellement le week-end, ce qui rapproche Michel Oliver et ses acolytes du rôle de cuisinier occasionnel qui était alors le plus fréquent chez les hommes29. Michel Oliver explique son choix d’une présentation masculine par la plus grande spontanéité que permet selon lui le dialogue entre hommes, créant un climat de camaraderie qui rend le programme sympathique30. Il s’est ainsi entouré de personnes issues de l’univers des médias et qu’il connaissait personnellement : Olivier de Rincquesen, Maurice Favières et Christian Morin sont ses acolytes les plus fréquents. Olivier de Rincquesen et Maurice Favières étaient des journalistes de radio. Le premier, diplômé du Centre de formation des journalistes (CFJ), a rencontré Michel Oliver lors de la matinale d’Europe 1 dont il présentait le journal de 8h avec un humour qui faisait sa réputation31. Le second, qui avait des talents de comédien, animait avec un ton enjoué la matinale de RTL et a présenté plusieurs émissions de jeux à la radio et à la télévision32, dont Les jeux de 20 heures sur FR3 de 1976 à 1981. Christian Morin, plus jeune, animait des émissions de divertissement sur Europe 1, puis à la télévision où il obtient la présentation des Paris de TF1 en 198233. Ces trois hommes présentent donc un profil atypique par rapport aux personnalités qui assuraient le rôle de médiateur dans les émissions de recettes précédentes.

27 Michel Oliver, Le rire du chat qui pisse sur la braise, op. cit., p. 184. 28 Ibid.

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Dans les années 1970, lorsque Luce Giard mène une enquête sociologique sur les pratiques culinaires, elle note que dans les couples de moins de quarante-cinq ans, les hommes se plaisent à faire la cuisine, mais seulement de temps en temps, lors d’occasions distinctes de l’ordinaire quotidien. Michel de Certeau, Luce Giard et Pierre Mayol, L’invention du quotidien, volume II, Paris, Gallimard, 1994 (1980), p. 307.

30 « J’ai rarement vu un homme et une femme ensemble en cuisine sans que ça pose rapidement des problèmes.

Je peux dire à un copain : « Tu pourrais essayer de faire des efforts pour mieux touiller avec ta cuillère… ». Si je dis ça à une femme, elle va me regarder tristement en disant : « Pourquoi tu me parles sur ce ton ? »

Par contre, deux copains faisant la cuisine ensemble pour le plus grand plaisir de leurs femmes, voilà une idée qu’elle est bonne ! ». Michel Oliver, Le rire du chat qui pisse sur la braise, op. cit., p. 184-185.

31 Voir « Matin, quel journal ! », Télérama, n°2178, 9 octobre 1991, p. 141-142. 32

« Maurice Favières, l’homme du matin de RTL », Télé 7 jours, n°684, 2 juin 1973, p. 115.

33 Voir « Christian Morin : un gagneur ! », Télé 7 jours, n°1133, 13 février 1982, p. 106 et « Christian Morin renonce

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Le décor de l’émission, qui était construit dans un studio dédié à l’émission et n’avait donc pas besoin d’être régulièrement démonté34, est composé d’une partie cuisine et d’une salle à

manger directement attenante (Fig. 5-13 et 5-14), selon le modèle de la cuisine « à l’américaine » qui se diffusait alors35. De ce fait, la préparation du plat se voit liée au repas auquel elle va donner lieu, ce qui semble faire passer au second plan l’objectif exclusivement démonstratif de l’exécution de la recette. Le décor de la cuisine se caractérise par une certaine simplicité : les meubles sont en bois uni et le plan de travail ne semble pas être fait d’une matière noble (Fig. 5-

15). Différents détails indiquent que le décor entend prendre modèle sur une cuisine domestique :

la présence de bocaux sur des étagères montre qu’elle sert de lieu de stockage à des conserves, des torchons sont suspendus à côté de l’évier situé en arrière-plan, ce qui signifie que les aspects utilitaires de la cuisine ne sont pas laissés hors-champ36. Cependant, les dimensions de la cuisine ainsi que la présence de deux tables de cuisson à gaz, une sur chaque côté du plan de travail en forme de L, montrent que son aménagement est adapté pour permettre la réalisation successive de deux recettes dans une partie différente de la cuisine. Le fait que la cuisine ne soit pas seulement filmée en plans de face, mais également en contre-champ par rapport à ce point de vue classique (Fig. 5-16), fait qu’elle ne semble pas se réduire à une « façade ». La salle à manger, quant à elle, est figurée avec un certain réalisme : la présence d’un bar à l’arrière-plan et la décoration soignée (cadre au mur, bibelots sur des étagères) témoignent de volonté de recréer une atmosphère conviviale et chaleureuse. D’une manière générale, la décoration du plateau est marquée par la recherche d’une certaine authenticité, qui passe notamment par l’omniprésence du bois qui, par opposition aux matériaux modernes de plus en plus employés dans l’ameublement, place le décor du côté de la tradition37.

b. La cuisine est un théâtre

34 « Je veux un studio rien que pour moi, dans lequel je peux aller répéter dans les conditions du direct ». Le studio

de l’émission est « un ancien cinéma à Neuilly », ce qui lui permet d’avoir de grandes dimensions et d’être équipé « d’une deuxième cuisine hors caméra où l’on tient au chaud les plats à leurs différents niveaux de finition ». Michel Oliver, Le rire du chat qui pisse sur la braise, op. cit., p. 184, 186.

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Pascale Pynson montre qu’à partir des années 1980, « la cuisine-laboratoire, hermétiquement isolée du reste de la maisonnée, cesse de devenir le modèle dominant dès lors que le chic commande au contraire de l’intégrer à la salle à manger et d’en faire une pièce à vivre ». Il est à noter que la référence à ce dispositif permet de rendre la disposition d’un plan de travail face aux caméras de télévision moins artificielle. Pascale Pynson, La France à table, Paris, La Découverte, 1987, p. 201.

36 De même, on peut voir à l’antenne Michel Oliver passer l’éponge sur le plan de travail : « Je fais le ménage,

comme vous à la maison, ne vous inquiétez pas ».

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Pascale Pynson montre que le succès remporté par les meubles de cuisine en bois s’explique par le fait qu’ils incarnent une forme de tradition, d’authenticité renvoyant au passé familial. Pascale Pynson, La France à table, op. cit., p. 203.

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La cuisine que pratique Michel Oliver dans l’émission est définie par son accessibilité, sa simplicité et le plaisir qu’elle apporte à celui qui cuisine et qui la consomme. Le premier générique de l’émission (conservé jusqu’en 1982) est composé, sur fond de musique frénétique, de dessins représentant une marmite dans laquelle sont déposés des ingrédients (Fig. 5-17). Le style de dessins, assez enfantin, n’est pas sans rappeler les illustrations du livre La cuisine est un

jeu d’enfants qui avait fait le succès de Michel Oliver. Le pull « Super chef » qu’il porte

régulièrement lors de l’émission (Fig. 5-18) témoigne également de l’approche ludique qui caractérise sa cuisine, ce qui tend à souligner la facilité des recettes proposées. Lorsqu’il cuisine, Michel Oliver refuse d’aborder la préparation du plat sous l’angle de la technique mais a le souci de montrer la proximité de ses façons de faire avec celles des téléspectateurs. Il vante ainsi une pratique fondée sur la recherche de simplicité et de commodité, qui n’est pas marquée par le respect d’une orthodoxie d’ordre technique. Il prend ainsi souvent la précaution de préciser aux téléspectateurs qu’il propose sa version personnelle de la recette qu’il présente, sans nécessairement appliquer les codes qui définissent certaines spécialités : lorsqu’il réalise une daube de bœuf, il présente sa recette comme étant celle de « ma daube à moi », et non comme celle de la véritable daube. De même, il propose une façon de faire de la pâte feuilletée, tout en précisant :

« Attention, je ne vous dis pas que c’est la vraie [nous soulignons pour retranscrire l’insistance vocale] pâte feuilletée, mais c’est une pâte feuilletée rapide, qui marche admirablement ».

Michel Oliver se refuse également d’employer un vocabulaire technique pour décrire les opérations qu’il réalise. Au moment de saupoudrer de farine la viande qu’il a fait revenir pour réaliser la daube, Michel Oliver n’indique pas que cette technique – qu’il présente comme étant une touche personnelle – a pour nom « singer » la viande. Aussi, lorsqu’il retire la peau des tomates après les avoir ébouillantées, il dit, en s’excusant presque d’employer un terme qui ne serait pas connu des téléspectateurs : « Ca s’appelle, enfin, c’est un terme technique, je vous le dis une fois, je ne vous le redirai plus jamais, ça s’appelle émonder une tomate ». A l’inverse, le vocabulaire utilisé par le présentateur se caractérise par une certaine familiarité qui frise parfois l’imprécision. Il emploie couramment le terme « touiller » pour signifier qu’il mélange, dit qu’il « tartine » (et non « badigeonne ») un lapin de moutarde ou désigne une maryse38 comme « la truc en caoutchouc, là ».

Michel Oliver propose des recettes dont la simplicité se veut adaptée aux capacités des

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Fig. 5-13 et 5-14 – Décor de l’émission : cuisine et salle à manger

Fig. 5-15 – Cuisine simple Fig. 5-16 – Vue de l’arrière de la cuisine

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Fig. 5-19 – Démonstration du geste Fig. 5-20 – Repas convivial

Fig. 5-21 – Réalisation de la recette face à

son auteur

Fig. 5-22 – Michel Oliver et le chef

Christian Ignace

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téléspectateurs auxquels il s’adresse39. Le matériel qu’il utilise pour préparer les plats est

représentatif de l’équipement ordinaire des foyers français : les ingrédients sont présentés dans des assiettes et d’autres récipients en porcelaine, et les mélanges sont faits dans des saladiers en verre (dont la transparence a l’avantage de laisser voir au téléspectateur ce qui s’y passe) ou en terre plutôt que dans des culs de poule propres à la cuisine professionnelle. Le mode opératoire de certaines recettes se voit adapté aux possibilités offertes par un équipement domestique moyen. Lorsqu’il prépare des éclairs au chocolat, Michel Oliver garnit les choux à l’aide d’une cuillère et non d’une poche à douille, et propose, au lieu de réaliser un classique glaçage, de saupoudrer les éclairs de sucre glace. Pour cela, il utilise un pot de confiture dont il perce le couvercle, en substitut d’un véritable saupoudreur que peu de Français devaient posséder. L’objectif de l’émission apparaît comme étant de montrer que tout ce que fait Michel Oliver peut être reproduit à l’identique par les téléspectateurs. Comme celui-ci le répète fréquemment : « Si je peux le faire, vous pouvez tous le faire ! ». Les étapes jugées techniques ou délicates font de ce fait l’objet d’explications très détaillées afin de paraître moins intimidantes : Michel Oliver demande à Maurice Favières de regarder attentivement quelle doit être la consistance de la pâte à quenelles, avant de montrer avec insistance comment former les quenelles à l’aide de deux cuillères (Fig. 5-

19). C’est donc en insistant sur la proximité avec ses pratiques que l’émission entend attirer

l’attention de son public, amené à se sentir d’autant plus concerné par le programme qu’il lui permet d’intégrer des recettes qu’il pourra reproduire aisément.

D’autre part, Michel Oliver et ses acolytes affichent un réel enthousiasme et mettent en avant le plaisir qu’ils retirent de la préparation puis de la dégustation de la recette proposée. La décontraction et la convivialité qui émanent du dispositif de l’émission permettent sans doute d’expliquer l’intérêt que les téléspectateurs pouvaient avoir à la regarder. L’apparente complicité entre Michel Oliver et ses différents acolytes donnait à l’émission la tonalité d’une conversation entre amis, d’autant que la personnalité du présentateur semblait particulièrement chaleureuse. Comme l’indique un article de Télé 7 jours :

« Avec son accent bordelais ʺgouleyantʺ, son langage coloré et sa manière toute personnelle, directe, un peu bourrue de nous mettre à l’aise dans ʺLa vérité est au fond de la marmiteʺ, Michel Oliver est le plus populaire de nos maîtres-queux40

».

39 Michel Oliver revendiquait cette accessibilité dans un entretien publié dans Télé 7 jours : « A la télévision, je ne

donne jamais de recette que ne puisse réaliser une mère de famille de deux enfants et dont le mari ait un salaire modeste ». « Michel Oliver est devenu un ʺsuper chefʺ pour être digne de son grand-père », Télé 7 jours, n°1069, 22 novembre 1980, p. 121.

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Le rapport établi avec le public, mis « à l’aise » par le présentateur, est donc marqué par un climat de familiarité41. C’est donc la convivialité, au sens premier, qui définit l’atmosphère du programme : le repas pris à table, invariablement accompagné d’un verre de vin (Fig. 5-20), fait de l’émission une réception à laquelle peut prendre part le téléspectateur convive42

.

Tout au long de la préparation du plat, Michel Oliver a à cœur de mettre en appétit les téléspectateurs en vantant les qualités de ce qu’il s’apprête à manger à la fin de l’émission. Les qualifications positives sont nombreuses dans ses paroles : les plats sont souvent qualifiés de « petite merveille », le présentateur souligne qu’ils sont bons et les déguste toujours avec appétit et une satisfaction non cachée. La description qu’il fait de ses plats dénote sa gourmandise : la façon dont les qualités des quenelles qu’il a réalisées sont évoquées au moment où il les déguste (il les dit être légères et moelleuses, par opposition aux quenelles industrielles) relève d’un rapport sensible à l’alimentation. De ce fait, l’intérêt du public est fortement sollicité. Comme l’affirme Odile Bächler, le plat en vient à « joue[r] le rôle d’objet de désir du téléspectateur », ce dernier étant « apprêté à sa réception mais […] ne le reçoi[t] pas43 ». L’élaboration du plat, qui débouche sur un sentiment de frustration auprès du public privé du plaisir de la dégustation, permet donc la construction progressive d’une envie chez les téléspectateurs.

Il faut alors se souvenir de la façon dont Michel Oliver, qui avait été élève quelque temps du Cours Simon44, concevait la structure de ses émissions :

« J’aime imaginer qu’une recette de cuisine à la télé est toute pareille à une pièce de théâtre classique en trois actes.

1er acte : on présente les personnages.

2e acte : l’action se noue : on mélange les ingrédients.

3e acte : le dénouement avec suspense : qu’est-ce qui va sortir du four ? […] Ce qui me semblait le plus important, c’était de respecter une forme de progression dramatique pour éviter que le téléspectateur ne décroche45 ».

La progression des émissions avait donc pour but de créer une tension croissante autour de la préparation du plat. Pour cela, les recettes « sont mitonnées avec autant de minutie et de précision

41 Michel Oliver s’adresse souvent aux téléspectateurs en les appelant « mes enfants ». 42

« L’on a envie de pénétrer dans cette cuisine […] et de s’attabler avec lui [Michel Oliver] pour ʺune bonne bouffeʺ ». « Les ʺchefsʺ se mettent à table », Télé 7 jours, n°1128, 22 janvier 1983, p. 106.

43 Odile Bächler, « Les émissions culinaires à la télévision française », dans Jérôme Bourdon et François Jost (dir.),

Penser la télévision. Actes du colloque de Cerisy, Paris/Bry-sur-Marne, Nathan/INA, 1998, p. 129.

44 Michel Oliver, Le rire du chat qui pisse sur la braise, op. cit., p. 70-74. 45 Ibid., p. 193-194.

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qu’une pièce classique46

». L’improvisation n’avait en effet pas sa place dans les émissions que Michel Oliver répétait longuement en amont afin d’adapter la préparation de la recette aux exigences télévisuelles liées à la durée de l’émission47

et à la lisibilité de ses gestes à l’écran48. Les répétitions successives aboutissaient à l’écriture d’un véritable script, dont on a pu retrouver des exemples dans les archives du Comité d’histoire de la télévision49. On peut y voir que