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Le triangle de velours en action

Dans le document Espagne : Belgique France (Page 119-125)

CHAPITRE 2 | TROIS HISTOIRES NATIONALES

4. Comparaison

4.2. Réseaux d’acteurs, rapports interpersonnels et histoire d’une revendication : la thèse du triangle

4.2.2. Le triangle de velours en action

La confrontation du concept de triangle de velours à mes trois cas d’étude permet d’identifier un certain nombre de configurations qui correspondent à cette notion. Dans ce cadre, si l’idée d’ouvrir le mariage civil aux couples de même sexe n’est pas apparue grâce aux triangles de velours, ces configurations triangulaires ont, selon les cas, joué un rôle clé dans l’élaboration et la transformation de son contenu, sa propagation dans la société, sa politisation et, le cas échéant, sa transformation en loi. Dans certains cas, ces réseaux préexistaient à leur mobilisation en faveur de l’ouverture du mariage. Dans d’autres, ils ont été principalement construits pour servir cet objectif ou au cours de la mobilisation relative à celui-ci. Enfin, une différence importante doit être soulignée par rapport au modèle d’Alison Woodward, du moins pour la Belgique et l’Espagne : la faiblesse du pôle académique. Cela tient sans doute pour partie à la relative simplicité technique (voire théorique) de cette revendication. En effet, d’autres sujets tels que l’élaboration d’une loi contre les discrimi-nations et de politiques publiques d’égalité ont mobilisé beaucoup plus d’expertise. Ce constat est sans doute aussi lié à la définition de ce que l’on considère comme relevant de l’expertise. L’ouverture du mariage civil aux couples de même sexe et, de manière générale, toute la problématique de leur statut légal constituent avant tout une question juridique. Pour cette raison, si les acteurs associatifs impliqués n’ont pas nécessairement pris contact avec des professeurs de droit, ces experts ont pu être, en interne, des juristes ou des avocats.

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4.2.2.1. belgique

Le cas belge présente deux grands réseaux pouvant être qualifiés de triangle de velours, qui recoupent la division linguistique et culturelle du pays. Comme je l’ai indiqué, la question de l’ouverture du mariage a été principalement portée par les associations flamandes et c’est logiquement au nord du pays que se trouve le réseau principal, même si celui-ci dispose de quelques ramifications en Belgique francophone. Toutefois, un réseau parallèle et plus diffus, surtout présent dans les milieux socialistes bruxellois, peut aussi être identifié. Celui-ci est progressivement passé de la revendication du contrat de cohabitation légale à celle du droit au mariage.

Un réseau autour de la FWH

Le triangle de velours flamand est étroitement lié à la cellule politique de la FWH, telle que redynamisée par Anke Hintjens à partir de la fin 1996. En effet, lors de son entrée en fonction à la Federatie Werkgroepen Homoseksualiteit, cette activiste s’était fixé pour objectif, outre l’éclaircissement de la position sur la reconnaissance légale du couple de même sexe, la rénovation de la cellule politique de cette organisation (356). Une des méthodes empruntée consistait à augmenter le nombre de membres et à recruter des activistes qui soient en même temps actifs au sein des partis politiques démocratiques flamands (357). Ces derniers ont ainsi pu jouer un rôle clé dans la mise à l’agenda et l’évolution des positions de leurs partis respectifs, tant par rapport à la question du mariage qu’à celle, parallèle, d’une loi contre les discriminations, ce qui illustre la perméabilité des sphères politique et militante. Parmi ces personnes, on peut notamment citer Dirk De Meirleir, Geert Vandenbranden et Ingrid Pelssers. Le premier a longtemps assuré les liens avec le SP en tant que membre du SEVI, le service d’étude du parti, et proche du député Guy Swennen. Il dirige aujourd’hui le service des discriminations non-raciales du Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme. Les deux autres ont été très actifs au sein du CVP/CD&V. Par ailleurs, la FWH/Holebifederatie est histori-quement proche des Verts flamands, avec lesquels Anke Hintjens entretient elle-même de bonnes relations. Plusieurs membres de la cellule (Jean-Marie Vandeurzen, Paul Borghs, Yves Aerts, Stefan Colaes notamment) sont ainsi des membres parfois importants de ce parti ou des sympathisants (358).

Cette stratégie de recrutement au sein des partis politiques s’est avérée décisive à plusieurs étapes du processus de décision. La FWH a disposé d’un accès privilégié à l’agenda d’un certain nombre de partis et a parfois contribué à l’évolution de leurs positions. En guise d’exemple, le travail interne de Geert Vandenbranden et Ingrid Pelssers permet d’expliquer, avec le lobbying exercé directement par la FWH et les nombreuses rencontres avec des représentants de ce parti, l’évolution du CVP en faveur, tout d’abord, d’un partenariat enregistré qui devait assurer l’égalité des droits relatifs au couple de manière séparée, puis de l’ouverture du mariage. De même, les relations étroites avec AGALEV se sont avérées essentielles à partir de la mise en place du gouvernement arc-en-ciel en 1999. Elles ont assuré un relais à la FWH lors des négociations gouverne-mentales et des discussions en groupe intercabinets, ainsi qu’un canal direct d’information. Dans ce cadre,

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(356) Entretien avec Anke Hintjens, op. cit.

(357) Paul Borghs, « Van achterblijver tot koploper. Holebirechten in België onder paars(groen) (1999 – 2007) », op. cit.

(358) Il faut de plus mentionner que les trois premiers activistes cités sont proches de Groen Anvers, une section à laquelle appartiennent aussi Mieke Vogels et Eddy Boutmans, qui ont tous deux joué un rôle important dans ce parti quant aux questions LGBT.

Marianne Vergeyle, la directrice de cabinet de Magda Alvoet, et Annemie Mercelis, la collaboratrice chargée du dossier mariage en son sein, ont participé de manière régulière aux travaux de la cellule politique de la FWH et ont organisé plusieurs réunions avec les activistes flamands pour les informer de l’état d’avancement du dossier et élaborer des stratégies conjointement (359). En outre, un groupe LGBT existait au sein d’AGALEV depuis en 1994 (360). Celui-ci maintenait des liens étroits avec la FWH et comprenait des personnes qui sont devenues influentes, comme Marianne Vergeyle, ou Yves Aerts, qui s’est occupé des dossiers LGBT dans le cabinet de Mieke Vogels à la Communauté flamande et dirige aujourd’hui la Holebifederatie.

Si ce réseau ne comprenait aucun professeur d’université dont les domaines d’étude sont pertinents pour la question du mariage (361), un des membres de la cellule politique flamande, Paul Borghs, s’est spécialisé en droit de la famille et est rapidement devenu le conseiller juridique de la fédération flamande, s’exprimant à ce titre comme expert au Parlement, ainsi qu’un des spécialistes flamands des questions LGBT en droit (362). Par ailleurs, un francophone, François Sant’Angelo, en a fait partie, offrant à ce réseau un relais au sud du pays. Membre du Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme et fondateur de la FAGL, il a participé aux contacts avec les partis politiques francophones, principalement le PS et ECOLO (363). Ce parti était par ailleurs proche des premiers responsables de la FAGL (Yves Dewelle, Oliver Collet, etc.), dont plu-sieurs étaient membres ou sympathisants et animaient Ecolo nous Prend Homo (ENPH), le groupe LGBT des Verts francophones (364). Ces relations interpersonnelles aident à expliquer un investissement important de ce parti dans la FAGL au cours des premières années d’existence de celle-ci ainsi que la proximité de la députée Zoé Genot, qui s’occupe de ces questions au sein d’ECOLO.

Un réseau socialiste plus diffus

À côté de ce réseau majoritairement flamand et engagé depuis longtemps en faveur de l’ouverture du mariage, on observe un réseau plus diffus, articulé autour de l’association Tels Quels, du parti socialiste (bruxellois) et de la faculté de droit de l’ULB. Celui-ci est progressivement passé de la revendication d’un contrat alternatif au mariage à la demande d’ouverture de celui-ci et, à l’inverse du précédent, il s’articule avant tout à l’intersection d’un parti politique et des milieux juridiques. Ce réseau comprend notamment Michel Pasteel, qui corédigé la proposition initiale de contrat de vie commune avec Jacques Hamaide, puis a suivi les dossiers mariage et adoption au sein du cabinet de Laurette Onkelinx avant de diriger l’Institut pour l’Égalité des Femmes et des Hommes. On y retrouve également Michel Vincineau, ancien professeur de droit de l’ULB et copropriétaire des saunas Macho, Luc Legrand, Serge Moureaux, Yvan Mayeur, Michel

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(359) Entretien avec Anke Hintjens, op. cit. ; Entretien avec Annemie Mercelis, op. cit. ; Entretien avec Magda Alvoet, op. cit.

(360) Entretien Yves Aerts, Anvers, 27 décembre 2007.

(361) Ce groupe comprend actuellement un professeur de l’Université d’Anvers, Bart Eeckhout, mais ce dernier enseigne la littérature nord-américaine (notamment LGBT).

(362) Paul Borghs a ainsi été auditionné en commission de la justice du Sénat et de la Chambre des Représentants sur les dossiers LGBT et a publié de nombreux articles et ouvrages. Quand cela s’est avéré nécessaire, il a pris contact avec des juristes au sein des universités flamandes.

(363) Entretien avec François Sant’ Angelo, op. cit.

(364) Comme je l’ai indiqué précédemment, les États-Généraux de l’Écologie politique constituent une des origines de la FAGL, ce qui a renforcé la proximité de cette dernière avec ECOLO. Aujourd’hui, même s’ils conservent des liens étroits avec ce parti, les responsables de la FAGL sont plus proches du PS.

Duponcelle ou, plus récemment, Bernard Bléro, professeur de droit à l’ULB, Annemie Schaus, qui enseigne dans la même université, Dan Van Raemdonck, un ancien président de la Ligue des Droits de l’Homme devenu vice-président du Centre d’Action Laïque et Karine Lalieux, députée et maître de conférences à l’École des sciences criminologiques de l’ULB. Ces différents personnes sont parfois des amis et des collègues très proches et se sont dans tous les cas fréquentées, y compris dans un contexte paraprofessionnel.

4.2.2.2. espagne

En Espagne, un triangle de velours construit autour de la FELGT et le PSOE est né au croisement de deux évolutions. D’une part, un groupe LGBT fut fondé en 1999 au sein du PSOE par Miquel Angél Fernández. D’autre part, comme je l’ai indiqué précédemment, l’entrée de militants dans les partis politiques figurait parmi les stratégies de la FELG pour obtenir le mariage. Plusieurs leaders du mouvement se sont ainsi présentés sur des listes électorales, comme Boti García pour Izquierda Unida et Pedro Zerolo pour le PSOE à Madrid, Miquel Angél Fernández pour le PSOE à Valence et Jordi Petit pour le PSC à Barcelone. Ces deux dynamiques ont créé une situation de grande porosité entre le Parti socialiste et la fédération LGBT espagnole à partir de la fin des années 1990 et, surtout, durant les années 2000. Celle-ci était principalement le fait de deux personnes, Miquel Angél Fernández et Pedro Zerolo. Le premier, responsable du groupe LGBT du PSOE était un membre engagé de ce parti à Valence, très lié à la députée Carmen Montón, qui a défendu l’ouverture du mariage au Congrès des Députés. Il dirigeait en même temps le Col.lectiu Lambda de Valence et était le secrétaire général de la FELG. Le second, président historique de COGAM et de la FELG entré en politique à l’invitation de Trinidad Jiménez et devenu conseiller municipal madrilène pour le PSOE, a été élu en 2004 membre de l’exécutif de ce parti et responsable du Secrétariat aux mouvements sociaux et aux relations avec les ONG, dont Miquel Angél Fernández est devenu le bras-droit. Combinée à un travail de lobbying classique de la part de la FELGTB, cette situation de porosité a contribué à sensibiliser le PSOE aux revendications d’ouverture du mariage et de l’adoption aux couples de même sexe et à les inscrire dans le programme du PSOE. La différence apparaît d’autant plus clairement quand on compare cette situation à celle du dernier gouvernement de Felipe González, durant laquelle le mouvement LGBT espagnol discutait avec le PSOE, mais ne disposait pas de relais aussi puissants au sein de celui-ci. À nouveau, si la FELGTB a aujourd’hui constitué un réseau de chercheurs qui lui sont proches, ce n’était pas encore le cas pour la question du mariage, dans laquelle sont de plus surtout intervenus des juristes. Parmi ceux-ci, il faut souligner le travail de Pedro Zerolo, qui a participé à ce processus comme avocat de COGAM avant d’en devenir un des fers de lance. Ensuite, l’action du juriste argentin Daniel Borrillo, qui sera détaillée dans le chapitre suivant, a été décisive. Ce dernier est en effet progressivement devenu un des référents et conseillers de la FELG ainsi qu’un ami personnel de Pedro Zerolo, Beatriz Gimeno et Boti García.

La situation de perméabilité entre acteurs politiques et mouvements sociaux avait été précédée d’une situation similaire en Catalogne, où un groupe consacré à la diversité sexuelle fut créé au sein du Partit dels So-cialistes de Catalunya (PSC) en 1996 par Miquel Iceta i Llorens (365). Si ce dernier n’était pas un militant LGBT au même titre que Pedro Zerolo ou Miquel Angél Fernández, il n’en était pas moins proche des associations LGBT catalanes et en contact régulier avec les leaders du mouvement. Cette proximité s’est révélée importante en plusieurs moments. C’est ainsi à la demande de Jordi Petit, également sur les listes du PSC, qu’il a fait son coming out au cours d’un acte de campagne en 1999, devenant le premier homme politique espagnol

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ciellement homosexuel. C’est également à la demande des associations qu’il a déposé la résolution en vue de présenter au bureau du congrès des députés une proposition de loi modifiant le Code civil en matière de mariage au Parlement catalan en 2001.

4.2.2.3. france

La situation française est la plus complexe, dans la mesure où, comme l’historique qui précède l’a montré, elle comprend un plus grand nombre d’acteurs, ce qui crée une multitude de relations possibles entre individus et entre groupes. Deux grandes caractéristiques la distinguent des cas belge et espagnol. Première-ment, si les promoteurs du CUC étaient proches de Jean-Pierre Chevènement et les défenseurs du pacs du Parti socialiste, les partisans de l’ouverture du mariage n’ont pendant longtemps quasiment pas bénéficié de relais politiques, même s’ils avaient les sympathies des Verts. Certains de ses membres ont même régulièrement attaqué le Parti socialiste (366). Pour cette raison, le triangle de velours n’a vraiment compris un pôle politique qu’à partir de 2004, quand cette revendication a reçu le soutien actif de Noël Mamère.

Deuxièmement, le versant académique du triangle de velours y est beaucoup plus développé qu’en Belgique et en Espagne et ne se limite pas qu’à des juristes et des avocats. Comme je l’ai décrit, plusieurs intellectuels et chercheurs se sont engagés dans ce dossier depuis ses origines (Daniel Borrillo, Pierre Lascoumes) ou dans le cadre des débats sur le pacs (Didier Éribon, Éric Fassin, Marcella Iacub, etc.). Certaines associations comme l’APGL ont même contribué activement à la production de connaissances à leur sujet. La mobilisation au niveau des idées a par conséquent été sans comparaison avec les deux autres pays étudiés, ce qui s’est traduit par un nombre impressionnant de manifestes, livres, cartes blanches, colloques, conférences, etc. Deux pistes de réflexion peuvent être envisagées pour expliquer cette spécificité française. D’une part, il s’agit, comme je l’ai montré, d’une parole qui réagit aux critiques intellectuelles des demandes de reconnaissance légale des unions de même sexe, plus fortes en France qu’en Belgique et en Espagne. D’autre part, on peut émettre l’hypothèse selon laquelle la mobilisation académique serait liée à la fermeture du système politique. Comme le décrit Jan Willem Duyvendak, il est difficile pour les mouvements sociaux français, surtout identitaires et récents, d’accéder à l’arène politique. Cette situation découle notamment du modèle républicain, qui proscrit de céder aux « lobbys » au nom de la défense de l’intérêt général, et de l’occupation du peu d’espace disponible par des mouvements sociaux plus traditionnels et plus anciens (367). Cette situation oblige les militants à inventer d’autres stratégies et à utiliser d’autres formes d’action. Dans les deux cas, ces éléments auraient poussé les acti-vistes du droit au mariage à affiner et renforcer leurs arguments, à mener la bataille sur un autre front que celui du lobbying politique et à utiliser l’arme de l’opinion pour tenter de faire plier les partis politiques.

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(366) Voir notamment Daniel Borrillo et Pierre Lascoumes, op. cit.; Éric Fassin, « Pacs socialista », op. cit.; Didier Éribon, D’une révolution conservatrice et de ses effets sur la gauche française, Paris : Léo Scheer, 2007.

(367) Jan Willem Duyvendak, « Identity Politics in France and the Netherlands : The Case of Gay and Lesbian Liberation », in Mark Blasius (éd.), Sexual Identities. Queer Politics, Princeton : Princeton University Press, 2001, p. 56 – 72. Voir aussi Jan Willem Duyvendak et Olivier Fillieule, « Gay and Lesbian Activism in France : Between Integration and Community-Oriented Movements », in Barry D. Adam, Jan Willem Duyvendak et André Krouwel (éds), op. cit., p. 184 – 213.

Bègles 2004

Le réseau d’acteurs français en faveur de l’ouverture du mariage, tel que dévoilé lors du mariage de Bègles en juin 2004, rappelle la coalition des acteurs les plus critiques à l’égard du pacs, faisant apparaître cette mobilisation comme une sorte de revanche de ce premier combat. Daniel Borrillo en constitue un des principaux maillons et un des membres les plus anciens. Juriste, il s’est intéressé aux rapports entre homo-sexualité et Droit suite au décès du sida d’un de ses amis argentins à la fin des années 1980. Ses premiers travaux ont porté sur les rapports entre Droit et sida, puis sur la répression juridique de l’homosexualité, pour aboutir aux questions du statut légal des unions de même sexe et des familles homoparentales. Lors de son arrivée à Paris, il a rejoint la commission juridique d’Aides Île-de-France, où, comme je l’ai indiqué plus haut, il a parti-cipé à l’élaboration de la demande d’ouverture du mariage. Durant les débats sur le pacs, il fut un des hérauts de cette revendication, qu’il a ensuite approfondie dans ses travaux. À ses côtés, le philosophe et journaliste Didier Éribon constitue l’autre acteur à l’origine du Manifeste pour l’égalité des droits. Il s’est aussi engagé de longue date en faveur des droits LGBT, avant tout comme journaliste et essayiste. Ces deux personnes illustrent la porosité entre les sphères associatives et intellectuelles, tant ils ont agi à la fois comme des intel-lectuels engagés et des activistes éclairés. D’autres acteurs importants de la mobilisation sur le pacs, comme Éric Fassin ou Marcella Iacub, sont par contre restés plus en retrait lors des derniers combats pour le droit au mariage. Bien qu’acquis à cette revendication, le premier l’a plutôt soutenu par ses prises de position publiques et académiques, tandis que la seconde s’est distanciée de ces mobilisations. D’autres intellectuels sont inter-venus à des degrés divers, entre autres Françoise Gaspard, Janine Mossuz-Lavau, Rostom Mesli, Bruno Perreau et Louis-Georges Tin.

À côté de ces intellectuels, trois experts du droit, Caroline Mécary, Yann Pedler et Emmanuel Pierrat, sont intervenus dans ce dossier. Leur rôle a été beaucoup plus technique et juridique (encadrement juridique de l’opération, défense de Noël Mamère et des mariés, négociation des droits avec les médias, etc.). De manière générale, tous les trois sont, sous des formes diverses, reconnus comme des avocats spécialisés dans les questions LGBT (368). Caroline Mécary a publié plusieurs ouvrages et articles sur les droits des homosexuel-le-s (369), dont elle est devenue une des spécialistes en France, et a introduit plusieurs recours devant la Cour européenne

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