• Aucun résultat trouvé

L’influence des institutions internationales

Dans le document Espagne : Belgique France (Page 159-165)

CHAPITRE 3 | POLITIQUE INTERNATIONALE DE L’IDÉE D’OUVRIR LE MARIAGE CIVIL

2. La revendication de la démocratie paritaire : un autre exemple d’interaction

2.2. Dynamiques inter et transnationales de la parité

2.2.1. L’influence des institutions internationales

Comme l’indique la citation d’Éléonore Lépinard reprise dans cette section, trois institutions inter-nationales ont été particulièrement actives au niveau de l’amélioration de la représentation politique des femmes : l’Organisation des Nations unies, le Conseil de l’Europe et l’Union européenne. Celles-ci ont tant poussé les États à agir dans ce dossier que légitimé l’usage de l’actions positive dans le cadre de politiques d’égalité entre hommes et femmes et leur application spécifique à la question de la représentation politique. Elles ont de plus joué le rôle de laboratoire d’idées et ont ainsi constitué un des lieux d’élaboration des notions de démocratie paritaire et de représentation politique équilibrée des deux sexes. Pour cette raison, l’action de ces

chapitre 3

| P

olitique in

terna

tionale de l’idée d’

ouvrir le mariage civil aux c

ouples de même se

x

e

(106) Margaret E. Keck et Kathryn Sikkink, Activists Beyond Borders, op. cit., p. 12 et 13. (107) Éléonore Lépinard, L’égalité introuvable…, op. cit., p. 68 – 69.

(108) Bérengère Marques-Pereira, La citoyenneté politique des femmes, op. cit., p. 93 – 96. (109) Ibid., p. 95 – 96.

(110) La CEDAW a été ratifiée par par l’Espagne et la France en 1983, par la Belgique en 1984.

(111) Sur l’impact des conférences de l’ONU au niveau de l’assimilation des droits des femmes aux droits humains et de la construction d’une norme internationale en faveur de la protection des droits des femmes, Karen Brown Thompson, « Women’s Rights Are Human Rights », in Sanjeev Khagram, James V. Riker et Katrhyn Sikkink (éds), Transnational Social Movements, Networks, and Norms, Minneapolis : University of Minnesota Press, 2002, p. 96 – 122.

(112) Judith Astelarra, Veinte años de políticas de igualdad, Madrid : Cátedra, 2005, p. 120 – 123.

(113) Karen Celis et Petra Meier, « State feminism and Women’s Movements in Belgium : Complex Patterns in a Multilevel System », in Joyce Outshoorn et Johanna Kantola (éds), Changing State Feminism, Basingstoke, New York : Palgrave Macmillan, 2007, p. 65.

institutions a contribué à inscrire la question de la représentation politique des femmes, puis de la démocratie paritaire, à l’agenda politique de nombreux États et a légitimé le travail de nombreux activistes au niveau interne. Elle a aussi incité les acteurs domestiques à collaborer au-delà des frontières de leur État, voire a contribué à les mettre en réseau. Dans certains cas, cette action a créé les conditions nécessaires à un effet boomerang, défini comme la stratégie par laquelle des ONG domestiques contournent les blocages dans leur État en recourant à des alliés internationaux qui contribuent à augmenter la pression sur celui-ci depuis l’extérieur, amplifiant de la même manière leurs revendications (106). Éléonore Lépinard explique ainsi qu’un certain nombre de Françaises « ont utilisé les instances européennes pour construire un discours qui ne trouvait pas d’arène où se déployer au niveau national » (107). Enfin, ces institutions sont parfois intervenues directement au niveau domestique, notamment en soutenant financièrement certains projets.

L’Organisation des Nations Unies

L’Organisation des Nations Unies est la première de ces institutions à s’être engagée en faveur des droits des femmes. Dès 1953, elle a posé la question de leurs droits politiques en adoptant la Convention sur les droits politiques de la femme. En 1979, elle a de plus approuvé la CEDAW (Convention pour l’élimination de toutes les discriminations à l’égard des femmes) (108). Ce document concerne entre autres la participation des femmes à la vie politique et promeut l’usage des quotas comme stratégie vers l’égalité. Pour cette raison, ses articles 4 et 7 ont servi, pour reprendre l’expression de Bérengère Marques-Pereira, « de jalons pour des mesures législatives telles que la parité ou des quotas sur les listes électorales » (109). Une fois ratifiée, cette convention devient légalement contraignante et impose aux États signataires de remettre des rapports tous les quatre ans. Cette exigence offre un mécanisme de contrôle important et, à travers la demande d’un contre-rapport aux ONG, elle contribue aussi à mobiliser celles-ci et les pousse à agir au niveau international (110).

À partir de 1975, l’ONU a organisé de grandes conférences sur les femmes qui ont chaque fois eu un impact domestique important, y compris dans les États étudiés (111). C’est par exemple à l’occasion de la conférence de Mexico de 1975 et de l’Année internationale de la Femme que le mouvement féministe espagnol a commencé à se fédérer, profitant à la fois de cet agenda international et des premiers signes d’ouverture du régime franquiste après la mort du dictateur (112). De la même manière, la Belgique a créé le secrétariat d’État à l’Environnement et à l’Égalité des chances, confié à Miet Smet, au lendemain de la conférence de Nairobi en 1985 (113). Par ailleurs, comme l’écrit Françoise Gaspard, « ces conférences ont joué un rôle décisif

chapitre 3

| P

olitique in

terna

tionale de l’idée d’

ouvrir le mariage civil aux c

ouples de même se

x

e

(114) Françoise Gaspard, « Les enjeux internationaux de la parité », op. cit., p. 201.

(115) Entretien avec Monique Dental, op. cit. ; Entretien avec Milagros Candela, Bruxelles, 4 décembre 2007.

(116) Declaración de Bejing y Plataforma para la acción : IV Conferencia mundial sobre las mujeres : Bejing (China) septiembre 1995, Madrid : Gabinete de Relaciones Internacionales del Instituto de la Mujer, 1996, p. 183.

(117) Entretien avec Agnès Hubert, Bruxelles, 23 novembre 2007.

(118) De même que plusieurs de ses collaboratrices, comme Paloma Saavedra, sa directrice de cabinet, ou Marina Subirats, directrice de l’Instituto de la Mujer.

dans le développement de l’internationalisation des mouvements féminins et féministes, désormais présents sur tous les continents » (114).

Dans ce cadre, c’est la conférence mondiale de Bejing, en 1995, qui a connu le retentissement le plus important. Cette rencontre a été précédée de plusieurs réunions de préparation, entre ONG et entre décideurs, qui ont contribué à accroître les collaborations militantes et politiques au-delà des frontières stato-nationa-les (115). Elle a confirmé l’importance de l’enjeu de l’amélioration de la représentation politique des femmes et l’utilisation des stratégies d’actions positives, considérées comme des instruments à la fois utiles et légitimes dans la lutte pour l’égalité. La plate-forme d’action de la conférence demande ainsi aux gouvernements de « s’engager à établir comme objectif l’équilibre entre femmes et hommes dans les organes et comités gouvernementaux, ainsi que dans les institutions administratives et judiciaires, ce compris, entre autres choses, la fixation d’objectifs concrets et de mesures d’application, dans le but d’augmenter substantiellement le nombre de femmes, avec l’objectif de parvenir à une représentation paritaire des deux sexes par l’établissement de mesures d’actions positives en faveur des femmes pour tous les postes de gouver-nement et d’administration publique quand cela s’avère nécessaire » (116). À ce titre, la Conférence de Bejing a constitué, pour reprendre l’expression d’Agnès Hubert, un « facteur d’accélération de la diffusion des idées » (117). Par ailleurs, comme la délégation européenne était présidée par la Ministre espagnole Cristina Alberdi, cette conférence a accru les contacts entre l’Espagne et l’Union européenne, d’une part, et mes deux autres pays, d’autre part. La ministre espagnole, qui a par ailleurs maintenu plusieurs réunions avec l’Unité d’Égalité des chances de la Commission européenne (118), a par exemple été longuement inter-viewée par Parité-Infos en cette occasion, qui avait consacré un dossier spécial à l’Espagne.

Le Conseil de l’Europe

Des trois organisations présentées, le Conseil de l’Europe est probablement celle qui a le plus appro-fondi le travail théorique sur la parité, à tel point qu’elle est souvent considérée comme le berceau de cette notion. Cette institution s’est intéressée aux droits politiques des femmes dès 1981 et, au cours des années 1980, elle a commandé plusieurs études sur cette question à des chercheuses comme Janine Mossuz-Lavau, Mariette Sineau ou Éliane Vogel-Polsky. Suite au premier rapport de Janine Mossuz-Lavau, un comité d’experts chargé de l’étude de la situation des femmes dans la vie politique (DH-WPP) a vu le jour en 1982 et, en 1985, un programme d’action par rapport à la situation des femmes dans la vie politique a été mis en place. Celui-ci a notamment promu l’usage de l’action positive. En 1986, une première conférence ministé-rielle sur l’égalité entre les femmes et les hommes a été organisée à Strasbourg. La résolution finale prônait à nouveau l’adoption de formes de quotas pour améliorer la représentation politique. En 1989, le Conseil de l’Europe a organisé un séminaire sur la « démocratie paritaire » auquel a participé, entre autres, la philosophe française Elisabeth Sledziewski. Cet événement est souvent considéré comme l’acte de naissance du concept

chapitre 3

| P

olitique in

terna

tionale de l’idée d’

ouvrir le mariage civil aux c

ouples de même se

x

e

(119) Ce n’était toutefois pas le cas d’Éliane Vogel-Polsky, qui était aussi experte au Conseil de l’Europe. De même, Sabine de Béthune reconnaît avoir rencontré ces travaux avant de coordonner le réseau européen « Femmes dans la prise de décision » et les avoir utilisés dans les actions de Vrouw en Maatschappij. Entretien avec Sabine de Béthune, op. cit.

(120) Entretien avec Françoise Gaspard, Paris, 19 septembre 2007 ; Entretien avec Claude Servan-Schreiber, Paris, 24 octobre 2007 ; Entretien avec Sabine de Béthune op. cit.;

(121) Entretien avec Paloma Saavedra, op. cit.; Entretien avec Carlota Bustelo, Madrid, 1er août 2007; Entretien avec Carmen Martínez-Ten, op. cit.

(122) Entretien avec Agnès Hubert, op. cit.

(123) Agnès Hubert, L’Europe et les femmes : Identités en mouvement, Paris : Éditions Apogées, 1998.

(124) Laure Bereni, « Le mouvement français pour la parité et l’Europe », in Sophie Jacquot et Cornelia Woll (dir.), Les usages de l’Europe : acteurs et transformations européennes, Paris : L’Harmattan, 2004, p.50.

(125) Agnès Hubert, « From Equal Pay to Parity Democracy: The Rocky Ride of Women’s Policy in the European Union », in Jytte Klausen et Charles S. Maier (dir.), Has Liberalism Failed for Women ? Assuring Equal Representation in Europe and the United States, New York: Palgrave, 2001, p. 143 - 164.

de parité, qui n’est désormais plus seulement présenté comme un moyen d’atteindre l’égalité des sexes, mais aussi comme un principe s’inscrivant dans la défense des droits de la personne humaine et de l’approfondis-sement de la démocratie. L’idée de dualité de l’humanité y a été introduite, tout comme deux autres éléments clés de la future rhétorique paritaire: la présence des femmes est une condition nécessaire du caractère démo-cratique d’un système politique et repose sur une critique de l’universalisme des droits.

Toutefois, l’influence des travaux du Conseil de l’Europe est relativement limitée, du moins en ce qui concerne mes acteurs nationaux. Ceux-ci ont en effet souvent pris connaissance de la notion de démocratie paritaire grâce à l’Union européenne et ont par conséquent lu les rapports du Conseil de l’Europe plusieurs années après leur parution (119). Françoise Gaspard et Claude Servan-Schreiber se rappellent avoir pris connais-sance des rapports du Conseil de l’Europe quand leur livre était en bonnes feuilles, c’est-à-dire peu avant la nomination de la première comme experte européenne (120), tandis que plusieurs actrices espagnoles relient l’apparition du concept dans leur travail militant au sommet d’Athènes de novembre 1992 (121). Au sein de la Commission européenne, Agnès Hubert ne se rappelle d’ailleurs pas en avoir entendu parler avant que Claudette Apprill vienne la rencontrer à Bruxelles (122).

L’Union européenne

L’Union européenne (123) s’est engagée très tôt en faveur des droits des femmes, légitimant notamment, à l’instar de l’ONU et du Conseil de l’Europe, l’usage des actions positives. L’action de ses différentes institu-tions de l’Union a été fondamentale pour les revendicainstitu-tions paritaires et, comme l’écrit Laure Bereni : « Au tournant de la décennie quatre-vingt-dix, l’Europe a été l’un des lieux de reconstruction des bases conceptuelles de demandes d’inclusion des femmes à la représentation politique, à travers la substitution d’une demande de « parité » aux traditionnelles demandes de « quotas » » (124). Dans ce contexte, c’est le travail de la Commission qui a été le plus important. En effet, dans son troisième programme d’action communautaire à moyen terme pour l’égalité des chances (1991 – 1995), l’Unité d’égalité des chances de la Commission a identifié l’absence des femmes des postes de décision comme un obstacle majeur à la réalisation de l’égalité des chances entre hommes et femmes, suivant notamment un avis d’un groupe d’experts de haut niveau de l’OCDE (125). Sur cette base, elle a créé en 1992, avec l’appui de la Commissaire aux Affaires Sociales Vasso Papandreou,

chapitre 3

| P

olitique in

terna

tionale de l’idée d’

ouvrir le mariage civil aux c

ouples de même se

x

e

(126) Réseau européen d’expertes « Les femmes dans la prise de décision », Les femmes dans la prise de décision. Panorama d’activités, Bruxelles : Commission européenne, 1997 ; Sabine de Béthune, « Le réseau européen « les femmes dans la prise de décision » », in Hedwige Peemans-Poullet (dir.), La démocratie à l’épreuve du féminisme, Bruxelles : Université des Femmes, 1998, p. 253 – 262. (127) Étaient notamment présentes Simone Veil, Édith Cresson, Miet Smet, Matilde Fernández, Mary Robinson et Melina Mercouri. (128) Agnès Hubert, « From Equal Pay to Parity Democracy: The Rocky Ride of Women’s policy in the European Union »,

op. cit.; Id., « Moving beyond Quotas in the EU : An Emerging Stage of democracy »,in International Institute for Democracy and Electoral Assistance (IDEA)/CEE Network for Gender Issues Conference, Budapest, 2004, p. 4.

(129) Monique Leijenaar, How to Create a Gender Balance in Political Decision-Making, Luxembourg : Office for Official Publications of the European Communities, 1997.

le réseau européen d’expertes sur le thème « Femmes dans la prise de décision » (126). Celui-ci comprenait une experte par pays (Françoise Gaspard pour la France, Éliane Vogel-Polsky pour la Belgique et Carlota Bustelo pour l’Espagne) et une coordinatrice (la Belge Sabine de Béthune). Cet organe était chargé d’étudier les mécanismes politiques et sociaux qui créent des inégalités sur base du sexe, de récolter des données statistiques sur la participation des femmes aux différents niveaux de la prise de décision et de proposer des stratégies concrètes pour contribuer à l’inclusion politique des femmes. Sur cette base, il devait alimenter le débat, mobiliser les acteurs (associatifs et politiques) et encourager les gouvernements à adopter des lois et des politiques à même de changer cette situation.

Ce réseau a été lancé en novembre 1992 lors du Sommet d’Athènes, auquel plusieurs femmes politi-ques avaient été invitées pour signer la Déclaration du même nom (127). Ce sommet a bénéficié d’une très grande visibilité médiatique, contribuant à populariser le concept de démocratie paritaire. La Déclaration d’Athènes, qui avait repris l’argumentation du Conseil de l’Europe, revendiquait en effet explicitement cette notion. Elle a également vulgarisé plusieurs arguments centraux du discours paritaire et, très vite, cinq éléments sont apparus pour justifier ce principe : l’égalité, la démocratie, le bon usage des ressources humaines, les besoins et intérêts spécifiques des femmes et la qualité de la prise de décision (128).

Ce sommet a été suivi d’autres conférences. Une première a été organisée sur le thème « Les femmes dans la vie politique – Horizons élections européennes » à Bruxelles en 1993 et a permis de mettre sur pied une campagne de sensibilisation sur la représentation équilibrée pour les élections de 1994. En mars 1995, un deuxième séminaire européen, portant sur « les stratégies pour un équilibre entre les femmes et les hommes dans la prise de décision politique », a été organisé à Dublin. Enfin, le réseau a conclu ses travaux lors du sommet « Les femmes pour le renouveau de la politique et de la société », organisé à Rome en mai 1996. Au cours de cette rencontre, la Charte de Rome a été signée par les ministres compétentes de chaque pays, dont Miet Smet pour la Belgique. Le 2 décembre de la même année, le Conseil européen a adopté une recommandation « concernant la participation équilibrée des hommes et des femmes à la prise de décision » (96/694/CE). Ce texte ne recommandait toutefois plus l’usage de l’action positive.

À l’occasion des élections européennes de 1994, ce réseau a également mis sur pied une importante campagne de sensibilisation réalisée par une femme de l’agence Saatchi & Saatchi. Dans ce cadre, un kit de campagne, comprenant notamment un logo et des slogans chocs (« Pourquoi 80 % des parlementaires doivent se raser le matin ? » ou « Pouvez-vous imaginer un monde avec 81 % de Roméos et 19 % de Juliettes ? »), a été mis à disposition des militantes des États-membres. À l’issue de cette campagne, le nombre d’élues au sein de l’Assemblée européenne est passé de 19 à 27 %. En outre, plusieurs outils pratiques ont été réalisés et disséminés dans l’Union en 1995 et 1996, dont le guide « Comment créer un équilibre hommes-femmes en politique » (129).

chapitre 3

| P

olitique in

terna

tionale de l’idée d’

ouvrir le mariage civil aux c

ouples de même se

x

e

(130) Françoise Gaspard, « Du suffrage à la citoyenneté : le mouvement pour la parité en Europe », in Françoise Gaspard (dir.),

Les femmes dans la prise de décision en France et en Europe, Paris : L’Harmattan, 1997, p. 21 - 34, ainsi que Id., « De la parité : genèse d’un concept, naissance d’un mouvement », Nouvelles Questions féministes, vol. 15, n° 4, 1994, p. 29 – 44.

(131) Agnès Hubert, « From Equal Pay Treatment to Parity Democracy… », op. cit.

(132) Emanuela Lombardo, La europeización de la politica española de igualdad de género, Valencia : Tirant lo Blanch, 2004, p. 134. (133) Entretien avec Paloma Saavedra, op. cit. ; Entretien avec Teresa Nevado, Madrid, 3 juillet 2007 ; Entretien avec Milagros

Candela, op. cit. ; Entretien avec Dolors Renau, op. cit. ; Entretien avec Carmen Martínez-Ten, op. cit.

Enfin, l’Unité Égalité des chances de la Commission européenne a cofinancé plusieurs projets relatifs à la participation des femmes à la prise de décision : le projet relatif aux élections européennes (1993-1994), des projets locaux et régionaux (1994-1995) et la création de réseaux nationaux. C’est grâce à ce système que la revue française Parité-Infos, qui, comme je l’ai souligné, a joué un rôle important de mobilisation des actrices, et de diffusion des informations, a pu être créée. Une pétition de la CLEF a également bénéficié des financements européens. En Belgique, des actions de sensibilisation de la coordination des groupements de femmes politiques pour la démocratie paritaire, le réseau national « les femmes dans la prise de décision politique, économique et sociale » et la conférence « Partager le pouvoir demain,… stratégies pour un futur paritaire », organisée par Éliane Vogel-Polsky ont ainsi été financés. En Espagne, un colloque organisé par CELEM au Sénat en mars 1994 et des actions de la Communauté autonome Castille - La Manche ont aussi bénéficié de telles interventions financières.

Si le réseau n’a pas été reconduit dans le programme d’action communautaire suivant (1996-2000), son action a été décisive pour la diffusion et la vulgarisation de l’idée de démocratie paritaire au sein des différents États européens (130). Comme l’a écrit Agnès Hubert quelques années après sa dissolution, « l’expérience acquise à cette époque a créé une précieuse source de référence et d’inspiration, a mobilisé les associations de femmes et aidé les « machineries » nationales. La pression exercée sur les gouvernements nationaux de la part des acteurs de la société civile (associations, partis) ainsi que les recommandations et les résolutions adoptées au niveau européen ont impulsé de nouvelles dynamiques sur la scène nationale. (…) Rétrospectivement, il semble que l’évolution du débat sur la représentation des femmes dans la sphère publique et le nouveau déplacement conceptuel dans la manière de penser les politiques d’égalité de genre ont constitué un des résultats de cette période » (131).

En Belgique, en France et en Espagne, l’action du réseau a dynamisé les débats sur l’amélioration de la représentation politique, tout particulièrement en favorisant le passage de revendications fondées sur une stratégie de quotas à des demandes formulées en termes de démocratie paritaire. L’action européenne a aussi accru la mise en réseau des actrices de ces trois pays (132). Dans ce cadre, le choix des expertes s’est avéré fruc-tueux, dans la mesure où Éliane Vogel-Polsky (en tandem avec Sabine de Béthune), Françoise Gaspard et Carlota Bustelo disposaient de réseaux domestiques importants, qu’elles ont pu mobiliser et développer. Les trois expertes et la coordinatrice ont ainsi constitué des courroies de transmission importantes d’idées et de stratégies entre les niveaux européen et domestique (voire régional). En Espagne, les actrices interrogées (133)

relient toutes le début de la mobilisation pour la démocratie paritaire au Sommet d’Athènes, renvoyant ainsi à l’action du réseau et à son importation en Espagne par Carlota Bustelo. Un document de la Tertulia de la Residencia de estudiantes mentionne par exemple en décembre 1992 que « la déclaration souscrite à Athènes par des femmes européennes avec des responsabilités publiques en novembre 1992 a constitué un point de

Dans le document Espagne : Belgique France (Page 159-165)