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Cinq mécanismes de convergence potentiels

Dans le document Espagne : Belgique France (Page 170-177)

CHAPITRE 3 | POLITIQUE INTERNATIONALE DE L’IDÉE D’OUVRIR LE MARIAGE CIVIL

1. Cinq mécanismes de convergence potentiels

Dans l’article « What is Policy Convergence and What Causes It ? »(162), Colin J. Bennett a proposé une première synthèse des mécanismes de convergence des politiques publiques. À partir de la littérature sur ce sujet, il en identifie quatre : « L’émulation, où des fonctionnaires copient des actions prises ailleurs, le réseautage entre élites, où la convergence peut surgir de communautés de politiques publiques transnationales, l’harmonisation à travers des régimes internationaux et la pénétration par des acteurs et des intérêts extérieurs » (163). Les trois premiers inspirent le modèle proposé dans le tableau ci-dessous. Ils ont été complétés de deux autres mécanismes sur base des résultats obtenus dans la première partie de ce chapitre et ont été adaptés aux spécificités de mon objet.

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Il est en effet fondamental d’insister sur les différences entre la démarche de Bennett et la mienne et d’en souligner les implications méthodologiques. L’article cité ci-dessus procède d’une démarche d’étude des politiques publiques selon laquelle les convergences caractérisent l’élaboration d’une politique publique et ce sont les acteurs de politique publique eux-mêmes qui en sont les protagonistes. Or, j’ai montré dans le chapitre 2 que la plupart des convergences observées se situent en amont de l’intervention publique, ce qui suppose l’intervention – au moins partielle - d’autres mécanismes et d’autres acteurs. Elles renvoient à l’émergence simultanée de revendications similaires au sein des mouvements LGBT belge, espagnol et français. Dans un contexte de perméabilité importante, ces revendications ont ensuite été souvent reprises par les acteurs de politique publique. Par conséquent, le modèle de Bennett a été adapté en utilisant la littérature sur les mouvements sociaux. J’ai plus particulièrement mobilisé la typologie de David Snow et Robert Benford sur la diffusion transnationale et celle de Sidney Tarrow sur la protestation transnationale. Le tableau ci-dessous synthétise les mécanismes proposés.

Tableau 1 : mécanismes de convergence potentiels

Contraintes, caractéristiques communes Européanisation Diffusion, Transfert, Réseautage Normes internationales - systèmes juridiques - événements partagés - éthos de la citoyenneté - structures institutionnelles communes intervention des institutions européennes (UE, Conseil de l’Europe) à trois niveaux : - conformité institutionnelle - transformation des structures d’opportunités domestiques - transformations des cadres - contacts et échanges directs mais ponctuels entre activistes - échanges indirects entre acteurs (presse et internet) contacts soutenus entre acteurs, voire élaboration commune de revendications, discours, stratégies : - triangles de velours - communautés épistémiques - réseaux transnationaux de revendication influence des normes sur la sphère domestique par des processus de persuasion et d’apprentissage social

Le premier mécanisme de convergence envisagé renvoie à l’existence de contraintes, d’événements ou de caractéristiques communes dans les trois pays étudiés. Ces éléments auraient conduit les associations LGBT belges, espagnoles et françaises, confrontées à des conditions identiques, à adopter des revendications et des stratégies similaires. J’ai par exemple, montré dans un autre texte comment les compétences attribuées aux maires en ce qui concerne la célébration des mariages ont incité les associations à se mobiliser à ce niveau (164). Cette analyse indique aussi combien, dans ce cas, le processus de convergence observé ne suppose ni nécessite un échange d’informations entre acteurs de différents pays. En d’autres mots, les actions entreprises conduiraient à des résultats similaires parce que les conditions de départ se ressemblent. De tels mécanismes peuvent renvoyer, notamment, à des similitudes au niveau de l’organisation institutionnelle, du système juridique, des conceptions de la citoyenneté, des événements ou un passé partagés.

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(165) Colin J. Bennett, op. cit., p. 225.

(166) Paul Magnette, Le régime politique de l’Union européenne, Paris : Presses de Sciences Po, 2006.

(167) L’ILGA, dont le statut consultatif avait été finalement reconnu au Conseil économique et social de l’ONU après plusieurs années d’efforts, a perdu ce statut en 1994, quelques mois après son obtention. Depuis lors, les seuls organisations LGBT à avoir été acceptées sont le COC néerlandais, la CGLQ du Québec, la FELGTB espagnole, la RFSL suédoise, la LBL danoise, ILGA-Europe et la LVSD allemande. L’International Lesbian Wages Due Lesbians américaine et la Coalition of Activist Lesbians australienne ont par ailleurs un statut consultatif depuis longtemps. De même, une résolution intitulée « Droits humains et orientation sexuelle », déposée par le Brésil à la Commission des Droits de l’Homme des Nations-Unies n’a pas encore été acceptée, malgré plusieurs tentatives et une intense campagne de lobbying.

(168) Notamment Jim Buller et Andrew Gamble, « Conceptualising Europeanisation », Public Policy and Administration, vol. 17, nº4, 2002, p. 4 – 24 ; Peter Mair, « The Europeanization Dimension », Journal of European Public Policy, vol. 11, nº 2, 2004, p. 337 – 348 ; Johan P. Olsen, « The Many Faces of Europeanization », Journal of Common Market Studies, vol. 40,

nº 5, 2002, p. 921 – 952.

(169) Pour un aperçu, Maura Adshead , « Conceptualizing Europeanisation : Policy Networks and Cross-National Comparison », Public Policy and Administration, vol. 17, n° 2, 2002, p. 25 – 42.

(170) Kevin Featherstone, « Chapter 1 : Introduction. In the name of ‘Europe’ », in Kevin Featherstone et Claudio M. Radaelli,

The Politics of Europeanization, Oxford: Oxford University Press, 2003, p. 17.

(171) Sophie Jacquot et Cornelia Woll, « Usage of European integration – Europeanisation from a sociological perspective »,

European integration online papers (EioP), vol. 7, n° 12, 2003, < http://eiop.or.at/eiop/texte/2003-012a.htm > (consulté le 3 mai 2007). Deux exemples d’une telle approche: Maria Green Rowles, James A. Caporaso, et Thomas Risse (éds),

Transforming Europe: Europeanisation and Domestic Change, Ithaca, Londres: Cornell University Press, 2001; et Tania Börzel et Thomas Risse, « Conceptualising the domestic impact of Europe », in Kevin Featherstone et Claudio M. Radaelli, op. cit., p. 57 – 80.

La deuxième piste d’explication des convergences observées évoque des mécanismes plus institution-nalisés, que Bennett qualifie d’ « harmonisation ». Ceux-ci nécessitent, selon l’auteur, « l’action autorisée de la part des organisations intergouvernementales responsables » (165). Étant donné l’importance prise par l’Union européenne dans les modes de régulation internes des États européens et son caractère unique par rapport aux autres institutions internationales (166), il semble analytiquement fondamental d’isoler cette institution en utilisant la notion d’européanisation et de considérer l’influence domestique des normes internationales comme un mécanisme de convergence distinct. En effet, les voies empruntées peuvent être très différentes. De plus, comme je l’ai développé précédemment, Kelly Kollman fait explicitement référence à cette notion en comparant la reconnaissance légale des unions de même sexe en Autriche et en Allemagne. Cette chercheure inclut à ce niveau le Conseil de l’Europe dans sa discussion des dynamiques d’européanisation, ce qui m’oblige à faire de même pour pouvoir discuter son travail. Enfin, à l’inverse de la parité et de l’égalité des hommes et des femmes, l’ONU s’est montrée très réticente à intervenir sur les questions LGBT, principalement à cause du poids d’États ouvertement opposés à la reconnaissance de l’homosexualité (167). Si la littérature sur l’euro-péanisation, qui a connu un boom récent, est actuellement traversée d’importants débats théoriques (168), la notion qui la fonde renvoie généralement aux effets et aux impacts domestiques du processus d’intégration européenne (169). Elle désigne « les processus de construction, de diffusion et d’institutionnalisation de règles formelles et informelles, de procédures, de paradigmes de politiques publiques, de styles, de ‘manières de faire les choses’ et de croyances et normes partagées qui sont premièrement définies et consolidées dans le processus politique européen et puis incorporées dans la logique du discours, des structures politiques et des politiques publiques domestiques (nationaux et subnationaux) » (170). La plupart du temps, les phénomènes d’euro-péanisation sont analysés au niveau institutionnel et reposent sur l’hypothèse que des pressions au changement naissent d’incompatibilités institutionnelles (misfits) entre les niveaux européen et statonational (171), ce qui suppose l´étude de mécanismes tels que la transposition de directives dans l’ordre juridique interne ou la reprise de l’acquis communautaire. Toutefois, comme l’indique la définition ci-dessus, certains auteurs ont

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(172) Claudio M. Radaelli, « Europeanisation : Solution or problem ? », European integration online papers (EioP), vol. 8, n° 16, 2004, < http://eiop.or.at/eiop/texte/2004-016a.htm > (consulté le 3 mai 2007), Sophie Jacquot et Cornelia Woll, op. cit.

(173) Christoph Knill et Dirk Lehmkuhl, « The national impact of European Union regulatoray policy : Three Europeanization mechanisms », European Journal of Political Research, nº41, 2002, p. 255 – 280.

(174) Colin J. Bennett, op. cit., p. 220. (175) Ibid.

(176) Virginia Gray, « Innovation in the States: A Diffusion Study », The American Political Science Review, vol. 67, n° 4, 1973, p. 1174 – 1185 ; Robert Eyestone, « Confusion, diffusion, and innovation », The American Political Science Review, vol. 71, n° 2, 1977, p. 441 – 447 ; Colin J. Bennett, « Understanding Ripple Effects : The Cross-National Adoption of Policy Instruments for Bureaucratic Accountability », Governance, vol. 10, n° 3, 1997, p. 213 – 233 ; Covadonga Meseguer, « Policy Learning, Policy Diffusion, and the Making of A New Order », The Annals of the American Academy of Political and Social Sciences, n° 598, 2005, p. 67 – 85.

(177) Mark Evans et Jonathan Davies, « Understanding Policy-Transfer : A Multi-level, multi-disciplinary perspective »,

Public Administration, vol. 77, n° 2, 1999, p. 361 – 385.

(178) David P. Dolowitz et David Marsh, « Learning from Abroad : The Role of Policy Transfer in Contemporary Policy-Making »,

Governance, vol. 13, n° 1, 2000, p. 5. Voir aussi David P. Dolowitz et David Marsh, « Who Learns What from Whom ? A Review of the Policy Transfer Literature », Political Studies, vol. 44, n° 2, 1996, p. 343 – 357 ; Diane Stone,

« Learning Lessons and Transferring Policy across Time, Space and Disciplines », Politics, vol. 19, n° 1, 1999, p. 51 – 59.

étendu sa portée pour prendre en compte l’action des acteurs dans ces dynamiques (172), dépassant une analyse strictement top-down des processus d’européanisation au profit d’approches bottom-up. Christoph Knill et Dirk Lehmkuhl ont synthétisé ces différentes approches en proposant trois mécanismes d’européanisation (173). Celle-ci peut se produire par conformité (compliance) institutionnelle quand l’Union européenne oblige ou encourage fortement les États à adopter des mesures spécifiques en application de certaines de ses décisions. À ce niveau, on pourrait, à l’instar de Kelly Kollman, ajouter les décisions des Cours européennes. L’euro-péanisation peut aussi découler d’une transformation des structures d’opportunités domestiques et d’une redistribution des pouvoirs et des ressources entre acteurs domestiques suite aux politiques européennes. Enfin, l’action de l’Union européenne peut, en l’absence des deux mécanismes précédents, contribuer au « recadrage » des croyances et des attentes domestiques, modifiant ainsi les stratégies des acteurs nationaux. Ce dernier phénomène peut être rapproché de ce que Kelly Kollman a qualifié d’émergence d’une norme de droit mou et de ses effets en politique interne. Pour résumer, si on suit l’hypothèse de l’européanisation, les convergences observées en Belgique, en France et en Espagne sur la question de l’ouverture du mariage découleraient de décisions et de développements intervenus au niveau européen et de la manière dont les acteurs nationaux ont réagi à ce nouvel environnement politique.

Un troisième type de mécanisme renvoie à des contacts et échanges ponctuels entre acteurs nationaux. Ceux-ci peuvent être directs et personnels ou indirects (via internet, la presse, etc.) et conduisent à des échanges ou à des reprises de stratégies à travers des opérations de traduction, d’importation, etc. Selon Colin J. Bennett, ce mécanisme découlerait de la « tendance à regarder à l’étranger, à voir comment d’autres États ont répondu à des pressions similaires, à partager des idées, à tirer des leçons et à apporter des preuves étrangères à produire au sein des processus domestiques d’élaboration de politiques publiques » (174). Qualifié d’émulation par cet auteur, il nécessite une opération consciente d’imitation, de lesson-drawing ou d’adaptation (175). Au sein de la littérature sur les politiques publiques, ce mécanisme a été décrit sous les termes de diffusion (176) et, surtout, de transfert de politique publique (177). Ce concept traduit « un processus dans lequel la connaissance relative à des politiques publiques, des arrangements administratifs, des institutions et des idées dans un contexte politique (passé ou présent) est utilisée dans le développement de politiques publiques, d’arrangements administratifs, d’institutions et d’idées dans un autre contexte politique » (178). Au sein de la sociologie des

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(179) David Strang et John W. Meyer, « Institutional conditions for diffusion », Theory and Society, vol. 22, n° 4, 1993, p. 487 – 511 ; Doug McAdam et Dieter Rucht, « The Cross-National Diffusion of Movement Ideas », The Annals of the American Academy of Political and Social Sciences, vol. 528, n° 1, 1993, p. 56 – 74 ; David Strang et Sarah A. Soule, « Diffusion in Organizations and Social Movements: Hybrid Corn to Poison Pill », Annual Review of Sociology, vol. 24, n° 1, 1998, p. 265 – 290 ; Sarah A. Soule, « Diffusion Processes within and across Movements », in David A. Snow, Sarah A. Soule et Hanspeter Kriesi (éds), The Blackwell Companion to Social Movements, Oxford : Blackwell, 2007, p. 294 – 310. (180) David A. Snow et Robert D. Benford, « Alternative Types of Cross-National Diffusion in the Social Movement Arena »,

in Donatella della Porta, Hanspeter Kriesi et Dieter Rucht (éds), Social Movements in a Globalizing World, Basingstoke, Londres : Macmillan, 1999, p. 23 – 39.

(181) Doug McAdam et Dieter Rucht, op. cit.

(182) J’ai souligné dans le chapitre 2 la grande perméabilité entre les sphères politique et militante sur ce dossier. (183) Colin J. Bennett, « Review article : What is Policy Convergence and What Causes It ? », op. cit., p. 224.

mouvements sociaux, c’est plutôt le terme « diffusion » qui a été privilégié (179). Dans ce cadre, la typologie proposée par David A. Snow et Robert D. Benford (180) introduit des distinctions utiles pour approfondir l’analyse de ses modalités. À partir d’une distinction entre les « unités » qui transmettent et celles qui adoptent et de leur rôle respectif dans le processus de diffusion étudié, ces auteurs ont identifié quatre modèles de diffusion réunis dans le tableau ci-dessous.

Tableau n° 2 : modèles de diffusion

Transmetteur/exporteur

actif passif

Adoptant actif « reciprocation » adaptation

passif ajustement contagion

Source : David A. Snow et Robert D. Benford, op. cit., p. 26.

La « reciprocation » (échange) décrit un processus dans lequel les transmetteurs et les adoptants sont activement engagés dans le processus de diffusion et constitue la forme de diffusion la plus courante parmi les mouvements sociaux. Elle implique souvent des liens personnels entre les acteurs, du moins au début des interactions (181). L’adaptation renvoie à une situation dans laquelle seul l’adoptant est actif et emprunte de manière intentionnelle des éléments issus d’un autre contexte tout en les adaptant à son propre contexte. En cas d’ajustement, c’est l’exportateur qui est actif et souhaite promouvoir des éléments étrangers au contexte auquel il s’adresse. Enfin, la contagion consiste en une situation dans laquelle ni l’adoptant ni l’exportateur ne sont actifs et désigne pour cette raison des cas extrêmement rares.

Ces échanges doivent être distingués d’un quatrième mécanisme, fondé sur des échanges plus soutenus et plus fréquents entre acteurs, voire l’élaboration commune de revendications, de discours et de stratégies au sein de véritables communautés militantes et/ou de politique publique transnationales (182). Pour cette raison, ce mécanisme peut être désigné sous le terme générique de réseautage. Ici, « la convergence résulte de l’existence d’idées partagées au sein d’un réseau relativement cohérent et durable d’élites engagées dans des interactions régulières au niveau transnational » (183). Ce mécanisme inclut un grand nombre de configurations, dont certaines, comme les triangles de velours et les communautés épistémiques, ont été rencontrées et présentées précédemment. Il renvoie aussi à certains modes d’organisation transnationale des mouvements

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(184) La transnationalisation des mouvements sociaux a entraîné l’émergence d’une littérature très abondante. Outre les ouvrages déjà cités de Sidney Tarrow, Donatella della Porta, Hanspeter Kriesi et Dieter Rucht, consulter Pascale Dufour et Isabelle Giraud (dir.), « Les solidarités sans frontières : entre permanence et changements »,

Lien social et politiques, n° 58, 2007 ; Id., « When the Transnationalization of Solidarities Continues : The Case of the World March of Women Between 2000 and 2006 : A Collective Identity Approach », Mobilization, vol. 12, n° 3, 2007, p. 307 – 323 ;Id., « Globalization and political change in the women’s movement : The politics of scale and political empowerment in the World March of Women », Social Science Quarterly, vol. 88, n° 5, 2007, p. 1152 – 1173 ; Bérengère Marques-Pereira, Petra Meier et David Paternotte (éds), op. cit.

(185) Sidney Tarrow, Power in Movement…, op. cit., p. 184 – 189. Voir aussi Sidney Tarrow, « Transnational Contention »,

EUI Working Paper RSC nº 2000/44, San Domenico : European University Institute, 2000, dans lequel

cette typologie est moins élaborée et où les ONG internationales sont considérées de manière distincte aux mouvements sociaux transnationaux et aux réseaux transnationaux de revendication.

(186) Ibid., p. 186.

(187) Selon ces auteures, les réseaux transnationaux de revendication incluent « les acteurs pertinents travaillant internationalement sur un sujet qui sont liés entre eux par des valeurs partagées, un discours commun et de denses échanges d’information et de services ». Ils sont particulièrement présents dans les secteurs « caractérisés par un contenu éthique important et une incertitude en termes d’information ». Ce sont les échanges d’information qui figurent au cœur des relations entre les acteurs. Margaret Keck et Kathryn Sikkink, Activists Beyond Borders, op. cit., p. 2. Voir aussi Margaret Keck et Kathryn Sikkink, « Transnational advocacy networks in international and regional politics », International Social Science Journal, vol. 51, n° 159, 1999, p. 89 – 101.

(188) Margaret Keck et Kathryn Sikkink, Activists Beyond Borders, op. cit., p. x.

sociaux (184). À ce niveau, la typologie des formes d’action collective transnationale proposée par Sidney Tarrow permet de préciser ce qui relève de ce mécanisme de convergence. Dans Power in Movement(185), cet auteur distingue quatre types de protestation transnationale à partir du cadre temporel dans lequel ils s’inscrivent et de leur relation aux réseaux sociaux domestiques (voir le tableau ci-dessous). Les deux premiers, de brève durée voire ponctuels, s’apparentent plutôt aux mécanismes de diffusion identifiés précédemment. Les phénomènes de diffusion désignent en effet « la communication d’idées de mouvement, de formes d’organisation ou de défis vis-à-vis des mêmes cibles d’un centre de protestation à un autre » (186), tandis que les échanges politiques surgissent quand des formes de collaboration temporaires sont mises en place entre acteurs nationaux, sans toutefois déboucher sur la mise en place de communautés durables et structurées au-delà des frontières étati-ques. Dans les deux cas, ce sont donc des acteurs ancrés au niveau stato-national qui entrent en interaction. Par contre, tant dans le cas de réseaux thématiques que de mouvements sociaux transnationaux, on note l’émergence de formes d’organisation et de communautés spécifiques au-delà de l’État. Dans le premier cas, il s’agit de mobilisations plus ponctuelles portant sur un enjeu précis, que Tarrow compare avec les réseaux transnationaux de revendication décrits par Margaret Keck et Kathryn Sikkink (187). Les mouvements sociaux transnationaux évoquent à l’inverse des formes d’organisation plus soutenues, dont les cibles et les objets de mobilisation peuvent varier au cours du temps. Sidney Tarrow cite en exemple Greenpeace et les mouvements pacifistes des années 1980. Dans les deux cas, comme dans ceux du triangle de velours et de la communauté épistémique, les convergences observées résulteraient de l’élaboration commune de discours, de stratégies et de revendications, dépassant ainsi les simples échanges entre acteurs nationaux. Comme l’écrivent Margaret Keck et Kathryn Sikkink dans une citation qui pourrait être étendue à l’ensemble des configurations que je viens de présenter, « quand ils réussissent, les réseaux transnationaux de revendication figurent parmi les sources les plus importantes d’idées, de normes et d’identités nouvelles dans le système international » (188).

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(189) Peter J. Katzenstein, « Introduction », in Peter J. Katzenstein, The Culture of National Security : Norms and Identity in World Politics, New York: Columbia University Press, 1996, p. 5, cité in Margaret Keck et Kathryn Sikkink, Activists Beyond Borders, op. cit., p. 3.

(190) Thomas Risse, Stephen C. Ropp et Kathryn Sikkink, op. cit. ; Kathryn Sikkink, Mixed Signals : U.S. Human Rights Policy and Latin America, Ithaca : Cornell University Press, 2004.

(191) Sanjeev Khagram, James V. Riker et Kathryn Sikkink (éds), op. cit.; Thomas Risse, Stephen C. Ropp et Kathryn Sikkink, op. cit.

(192) Martha Finnemore, « International organizations as teachers of norms: The United Nations Educational, Scientific, and Cultural Organization and science policy », International Organization, vol. 47, n° 4, 1993, p. 565 – 597. Pour une discussion plus nuancée, Jeffrey T. Checkel, « Norms, Institutions, and National Identity in Contemporary Europe »,

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