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La stabilité de la profession monastique sous le contrôle épiscopal

Section i: Stabilité de la profession monastique

B) La stabilité de la profession monastique sous le contrôle épiscopal

Le capitulum 73 de l’Admonitio generalis, que nous avons analysé dans notre premier chapitre, exige des moines et des clercs la fidélité à leur profession en insistant tout particulièrement sur la force contraignante de l’engagement pris par le moine, qui est assimilé à un votum. Le canon 4 du concile de Ver, appliquant ces prescriptions, prévoit en outre les sanctions qui doivent frapper les moines et les clercs qui ont quitté leur profession. La législation sur ce sujet est à la fois infléchie et complétée lors du concile tenu en deux sessions à Meaux (juin 845) puis à Paris (février 846). Dans les canons 57 et 59 de ce concile, les évêques insistent sur le contrôle exercé par l’évêque sur la profession monastique. Dans le canon 57, ils rappellent que l’obéissance doit s’accomplir en communauté dans les monastères et que, sous prétexte de l’obéissance, l’abbé ne doit pas exiger des moines des services à l’extérieur des monastères. Le canon 59, s’intéresse au cas où un moine, en raison de son indiscipline, doit être exclu du monastère. Cette exclusion doit être prononcée en présence de l’évêque diocésain. Nous étudierons ensuite une lettre d’Hincmar de Reims qui nous permet d’apercevoir l’application de ce canon 59.

a) Le canon 4 du concile de Ver : définition des sanctions contre les moines et clercs infidèles à leur profession

Le concile de Ver s’est tenu à la fin de l’année 844. Il rassemble les évêques du royaume de Charles le Chauve. Quelques précisions sur les participants à ce concile sont fournies par une note qui précède le texte des canons dans les manuscrits :

« Canons du concile qui s’est tenu dans le palais de Ver, où présidèrent Ebroïn, évêque de Poitiers, Ganelon, archevêque de Sens, et aussi Louis, abbé

de Saint-Denis, et Hincmar, futur évêque de Reims, la cinquième année du règne de notre seigneur fils de l’empereur Louis, au mois de décembre, indiction septième. »257

Il est assez facile de voir que la rédaction de cette note est de plusieurs mois postérieurs à la réunion du concile puisque Hincmar y est présenté comme futur évêque de Reims, alors qu’il ne sera effectivement élu évêque de cette ville qu’au printemps 845. En décembre 844, le siège archiépiscopal était vacant depuis l’éviction de l’archevêque Ebbon. De ce fait la valeur factuelle de cette note n’est pas assurée.

Elle n’en a pas moins un grand intérêt, en ce qu’elle nous révèle sinon les noms des personnages qui ont effectivement présidé le concile de Ver, du moins les personnages qui par leur fonction étaient amenés à présider ordinairement des conciles dans le royaume de Charles le Chauve. Si l’on analyse, en effet, cette liste, l’on y retrouve les noms des deux principaux dignitaires ecclésiastiques du palais : l’archichapelain qui est l’évêque de Poitiers, Ebroïn, et l’archichancelier qui est l’abbé de Saint-Denis, Louis et les noms de deux évêques métropolitains, l’archevêque de Sens, Ganelon, et Hincmar qui, aux yeux du rédacteur de la notice tient lieu d’archevêque de Reims. On peut conclure, nous semble-t-il, que les conciles au temps de Charles le Chauve sont ordinairement présidés par l’archichapelain, l’archichancelier et les archevêques présents, et que le rédacteur de cette note n’a fait qu’appliquer rétrospectivement ce schéma au concile de Ver, en anticipant la promotion d’Hincmar à l’archevêché de Reims.

Un deuxième élément notable à propos du concile de Ver est que, ‘d’une manière exceptionnelle, le rédacteur des canons de ce concile est connu. Du moins, la plupart des historiens s’accordent à penser que ce rôle a été tenu par Loup, abbé de Ferrières. Cette opinion se fonde sur une lettre de Loup lui-même à Hincmar de Reims en laquelle il s’exprime en ces termes à propos des canons du concile de Ver :

« Je vous ai envoyé ces mêmes canons, ou comme vous les appelez, les capitula exprimés alors par ma plume. »258

Au cours de la soutenance de notre mémoire de D.E.A., lorsque nous avions présenté la thèse traditionnelle d’un Loup, rédacteur des canons du concile de Ver, en nous

257 Concile de Ver édité par Wilfried Hartmann in M.G.H. Concilia 3,, p. 38 : « Canones concilii in Verno palatio habiti, ubi praesedit Ebroinus Pictavorum episcopus et Wenilo Senonum archiepiscopus necnon et Hludowicus Sancti Dionysii abbas et Igmarus post Remorum episcopus, anno quinto regni domini nostri filii Hludowici imperatoris, mense Decembrio, indictione septima. »

258 Correspondance de Loup de Ferrières éditée par Léon Levillain, tome 1, n°43 : « Canones eosdem, sive, ut vos vocatis, capitula meo stilo tunc comprehensa vobis direxi »

appuyant sur cette citation, Monsieur Jean-Pierre Brunterc’h avait émis des doutes exprimant l’hypothèse que Loup n’avait fait que recopier pour le compte d’Hincmar les canons du concile de Ver. L’emploi par Loup de Ferrières du verbe comprehendo permet, nous semble-t-il, de trancher la question. Le verbe comprehendo peut avoir en latin le sens technique « d’embrasser par des mots dans une formule, exprimer »259. Or le rôle du rédacteur des canons d’un concile semble être d’exprimer dans une formule la pensée des évêques présents. Tel nous paraît bien être le rôle qu’a tenu Loup de Ferrières lors du concile de Ver.

Cette phrase de Loup de Ferrières présente aussi un autre intérêt. Elle nous révèle que l’abbé de Ferrières et Hincmar emploient des termes différents pour désigner le même texte ; Loup parle de canons (canones), Hincmar de chapitres (capitula). Cette double désignation renvoie, nous semble-t-il, au double statut de ce texte, à la fois texte conciliaire élaboré par les évêques et capitulaire royal promulgué par Charles le Chauve qui était présent lors du concile de Ver.

Le canon 4 du concile de Ver traite du cas des moines et des chanoines qui ont quitté leur profession :

« Les moines qui, pour cause de cupidité, vagabondent et déshonorent avec impudence le contenu de la sainte religion, nous ordonnons qu’ils reviennent à leurs monastères et soient régulièrement reçus par la prévoyance des abbés. Or, à ceux qui, même après une profession monastique évidente, ont abandonné l’habit ou qui ont été rejetés pour leur faute, à moins qu’ils ne consentent à rendre et à remplir ce qu’ils ont promis à Dieu, nous croyons qu’il peut être venu en aide par ce remède, si, enfermés dans des ergastules, ils sont tenus à l’écart de l’assemblée des hommes et mortifiés par des œuvres convenables au regard de la piété aussi longtemps qu’il faudra jusqu'à ce qu’ils admettent la justesse de la correction. Et en effet, « ceux qui autrefois moines » et par la suite « ayant abandonné la profession de la solitude, se sont précipités vers le service militaire ou les noces », selon le décret du pape Léon, « doivent être purgés par la satisfaction d’une pénitence publique ». Or au sujet des clercs déserteurs de leurs églises, l’antique règle du concile de Chalcédoine doit être observée, qui prescrit que « si un évêque accueille un clerc appartenant à un autre évêque, que l’accueilli et l’accueillant soient privés de la communion, jusqu’à ce que ce clerc qui avait émigré revienne à sa propre église. »260

259 Le Grand Gaffiot, op. cit., p. 369. Les auteurs du dictionnaire citent en exemple deux phrases de Cicéron, un des auteurs favoris de Loup de Ferrières.

260 Canon 4 du concile de Ver édité par Wilfried Hartmann in M.G.H. Concilia 3,, p. 40-41 : « Monachos qui cupiditatis causa vagantur et sanctae religionis propositum impudenter infamant, ad sua loca iubemus reverti et regulariter abbatum sollertia recipi. Eis autem, qui post evidentem professionem monachicam etiam habitum reliquerunt vel qui sua culpa proiciuntur, nisi redire et quod deo spoponderunt implere

En ce canon les évêques s’en tiennent pour l’essentiel à un rappel de la règle canonique ancienne. Dans la continuité de ce que nous avons aperçu dans les conciles réformateurs de la fin de règne de Charlemagne, les moines sont ici définis par leur profession publique. Ils sont tenus d’accomplir les promesses qu’ils ont faites au cours de celle-ci. L’emploi par le rédacteur du canon, probablement Loup de Ferrières, du verbe

spondere, qui est un terme de droit romain signifiant « promettre solennellement »261, renforce l’idée que la profession monastique est un engagement solennel auquel le moine ne peut absolument manquer. L’on peut remarquer, dans ce canon 4 du concile de Ver, la même dissymétrie que dans le chapitre 73 de l’Admonitio generalis : la partie du canon consacrée à décrire l’engagement pris et non-respecté par les moines est à la fois plus longue et plus précise par le vocabulaire employé que celle concernant les clercs pour lesquels le rédacteur se contente du simple terme « déserteurs » (desertores). Conformément à ce que nous avons pu observer dans le chapitre précédent, l’engagement dans la vie monastique apparaît à la fois plus contraignant et mieux défini que celui dans la vie cléricale.

Quant aux sanctions prévues par les clercs ayant abandonné leur profession, elles apparaissent tout à fait conformes à la législation canonique antérieure. Pour les fixer les évêques du concile de Ver se fondent sur des textes canoniques anciens, une décrétale du pape Léon Ier pour les sanctions contre les moines infidèles à leur profession, le concile de Chalcédoine pour celles contre les clercs déserteurs de leur église. Il convient de remarquer que ces textes canoniques avaient déjà étaient mis en avant sur ce même sujet dans l’Admonitio generalis. Le chapitre 26 de l’Admonitio generalis qui insistaient sur le fait que les clercs et les moines devaient être fidèles à leur vœu et propositum s’appuyait sur le concile de Chalcédoine. Quant au chapitre 27 qui stipulait que les moines devaient demeurer fidèles à la vie monastique même après une promotion à la cléricature, il était emprunté à une décrétale d’un autre pape Innocent Ier. L’on s’aperçoit ici que la législation canonique carolingienne est élaborée à partir d’un corpus de textes canoniques de l’antiquité tardive qui sont sans cesse repris, cités et commentés.

consentiant, hoc credimus posse remedio subveniri, si in ergastulis inclusi tamdiu a conventu hominum abstineantur et pietatis intuitu convenientibus macerentur operibus, donec sanitatem correctionis admittant. Namque illi « qui quondam monachi » postea « relicta singularitatis professione, ad militiam vel ad nuptias devolvuntur. », papae Leonis decreto, « publicae paenitentiae satisfactione purgandi sunt. » De clericis autem ecclesiarum suarum desertoribus antiqua forma Calcidonensis concilii sevanda est, quae prescribit ut « si episcopus susceperit clericum ad alium episcopum pertinentem, et susceptus et suscipiens communione priventur, donec is, qui migraverat, clericus ad propriam revertatur ecclesiam. »

261

b) Les canons 57 et 59 du concile de Meaux-Paris : les évêques garants de l’obéissance monastique

L’histoire des conciles de Meaux et Paris est longuement exposée dans la préface qui précède les canons dans le manuscrit le plus complet de ce concile daté du Xe siècle. Selon Elisabeth Magnou-Nortier qui a consacré un récent article à ce concile262, deux discours opposés se mêlent dans cette préface : le discours des évêques « régaliens » favorables aux droits du roi sur les églises et celui des évêques « isidoriens » favorables aux thèses développées dans la collection canonique du pseudo-Isidore. Elle laisse entendre que des clercs « isidoriens » auraient interpolé et remanié le texte originel de cette préface en rendant l’utilisation délicate. Nous reviendrons ultérieurement sur les éventuelles interpolations de canons du concile de Meaux-Paris lorsque nous aborderons la question de la condamnation lors de ce concile de l’abbatiat laïque.

En attendant, il convient d’utiliser les informations données par la préface avec une grande prudence. Nous nous contenterons de reprendre es indications factuelles qu’elle comporte sur le déroulement des deux sessions du concile qui ne nous paraissent pas suspectes et qui sont d’ailleurs acceptées par Madame Magnou-Nortier.

Voilà ce que dit la préface de la première session du concile

« des évêques vénérables, c’est-à-dire Ganelon archevêque de Sens avec ses suffragants, Hincmar, évêque de la sainte Eglise de Reims avec ses co-évêques et Raoul, archevêque de Bourges, tous les autres prêtres du Seigneur montrant même leur présence par des légats ou des écrits, se rassemblèrent en l’église de Meaux, venant de leurs cités, et là siégeant selon la règle de l’ordre synodal, en l’an de l’incarnation du Seigneur 845, la sixième année du pieux roi Charles s’accomplissant heureusement, avec son accord et par la volonté divine la réunion se tint là le 17 juin »263

262

MAGNOU-NORTIER Elisabeth, Les deux discours dans les actes des conciles de Meaux ( juin 845) et de Paris (février 846) in Famille, violence et christianisation au Moyen Age. Mélanges offerts à Michel Rouche, Paris, P.U.P.S., 2005, Cultures et civilisations médiévales n°31, p. 409-430, ici p. 412-414.

263 Préface du concile de Meaux-Paris édité in M.G.H. Concilia 3, p. 83 : « venerabiles episcopi, Wenilo scilicet Senonicę sedis archiepiscopus cum suffraganeis suis, Hincmarus quoque sanctę metropolis ecclesię Remorum episcopus cum coepiscopis suis et Hrodulfus Bituricę civitatis archiepiscopus, ceteris etiam Domini sacerdotibus legatis vel scriptis suam presentiam exhibentibus in Meldensem ecclesiam de suis civitatibus convenerunt, ibique secundum synodalis ordinis censuram residentes anno dominicę incarnationis DCCCXLV, piique regis Karoli succrescente feliciter VI, cuius consensu sub divino nutu illuc conventum est XV Kalendas Iulii »

Ce passage indique que cette première session du concile réunie à Meaux a rassemblé principalement les évêques des provinces de Reims et de Sens. Nous avions déjà remarqué que la note précédant les canons du concile de Ver de 844 notait parmi les présidents du concile l’archevêque de Sens, Ganelon, et Hincmar, considéré par anticipation archevêque de Reims. Il semble donc que les conciles nationaux tenus au début du règne de Charles le Chauve regroupent essentiellement les évêques des provinces ecclésiastiques de Reims et de Sens. L’archevêque de Bourges, Raoul, semble, de son côté, présent à titre personnel puisque la présence de ses suffragants n’est pas mentionnée.

Les évêques expliquent ensuite qu’ils ont repris au cours de ce concile de Meaux différents éléments de la législation antérieure mais qu’ils ne sont pas parvenus à les faire appliquer de manière satisfaisante d’où la réunion d’un nouveau concile ou plutôt d’une nouvelle session du concile à Paris en février 846 :

« les susdits vénérables évêques réunis avec également le vénérable Gombaud, archevêque de Rouen, et ses co-évêques, avec l’accord du susdit très glorieux Charles, en l’an de l’incarnation du seigneur 846, le 15 février, se rassemblèrent à Paris »264

Cette deuxième session réunie donc en plus des évêques présents aux premiers conciles, ceux d’une autre province ecclésiastique de la Francie proprement dite, celle de Rouen. Nous avons là encore la confirmation que ce ne sont pas tous les évêques du royaume qui participent aux conciles nationaux mais bien principalement les évêques du

regnum de Francie compris comme l’un des tria regna à côté de l’Aquitaine et de la

Bourgogne et plus particulièrement ceux des provinces ecclésiastiques de Reims et de Sens où se situe le cœur du pouvoir royal.

Le plus ancien manuscrit du concile de Meaux-Paris, daté de la seconde moitié du IXe siècle, ne comporte que 16 canons. Un manuscrit du début du Xe siècle comporte lui 81 des 83 canons repris dans différentes collections canoniques. Selon Wilfried Hartmann, les 16 canons retranscrits dans le manuscrit le plus ancien correspondent à ceux qui ont été accepté par le roi lors d’un plaid tenu à Epernay en 846265

.

Le canon 57 du concile de Meaux-Paris revient sur la question des moines gyrovagues mais dans des perspectives différentes de celles du concile 4 de Ver :

264

Ibidem, p. 83-84 : « praedicti venerabiles episcopi una cum aeque venerabili Gunbaldo Rotomagensi archiepiscopo ac coepiscopis suis consensu suprascripti gloriosissimi regis Karoli anno incarnationis dominicę DCCCXLVI, XVI Kalendas Martias Parisius convenerunt »

265 HARTMANN Wilfried, « La transmission et l’influence du droit synodal carolingien » in R.H.D.F.E., 1985, n°4, p. 483-497

« Que les moines auxquels la charge des monastères n’a pas été confiée ne viennent pas au palais de manière dispersé sans autorisation, et n’y demeurent pas et n’aient pas non plus la présomption de courir de ci de là et de divaguer sans tête. Mais s’il y en a quelques-uns que l’on trouve utiles et nécessaires à l’Eglise et au princeps, qu’ils s’y rendent de manière canonique et religieuse avec l’autorisation de l’évêque. Sinon, qu’ils demeurent religieusement dans leurs monastères, tout comme l’institution canonique et régulière l’enseigne. Et que ni l’évêque ni l’abbé ni quiconque d’autre ne les dépêche instamment dans des missatica à la manière des courriers, parce que par certains d’entre eux les affaires ecclésiastiques et civiles sont perturbées contre l’autorité canonique. Et qu’ils ne servent pas à l’administration des villae sous prétexte d’obéissance, mais qu’accomplissant pleinement l’obéissance chacun à leur place, conformément à la règle, comme on le lit au sujet de saint Benoît, ils habitent dans un monastère et se réconfortent et reprennent courage ensemble. Or que ceux qui transgressent cela qu’ils soient excommuniés, les supérieurs parce qu’ils l’ont favorisé, les sujets parce qu’ils l’ont obtenu. »266

Ce canon 57 figure parmi les 16 canons transcrits dans le plus ancien manuscrit du concile Meaux-Paris. Il aurait donc été accepté par Charles le Chauve lors du plaid d’Epernay. Ce canon 57 ne figure pas d’ailleurs pas parmi ceux que Madame Magnou-Nortier soupçonne d’avoir été interpolé, bien que la dernière phrase comporte une menace générale d’anathème contre les moines et abbés contrevenant à ce canon, le recours abusif à l’anathème étant selon elle l’un des traits caractéristiques des falsificateurs isidoriens267

. Nous pensons également qu’il n’y a pas lieu de suspecter ce canon.

Ce canon 57 s’intéresse au cas des moines qui se rendent au palais sans autorisation. Ceuxci sont assimilés par le vocabulaire employé pour les désigner

266 Canon 57 du concile de Meaux-Paris édité in M.G.H. concilia 3, p. 111 « Ut monachi, quibus

monasteriorum cura commissa non est, passim et sine auctoritate palatium non adeant nec in eo immorentur vel ubi et ubi discurrere ac pervagari acephali praesumant. Sed si tales quilibet fuerint, ut utiles et necessarii ecclesię ac principi repperiantur, cum auctoritate episcopi canonice ac religiose pergant ; sin autem, in monasteriis suis, sicut canonica et regularis docet institutio, religiose resideant. Quos etiam nec episcopus nec abbas vel quilibet alius eos veredariorum more in missaticis instanter transmittat, quia per quosdam illorum contra canonicam auctoritatem et ecclesiastica et civilia perturbantur negotia. Nec sub praetextu oboedientię vilicationibus inserviant, sed regulariter oboedientiam vicissitudinis suae peragentes secum ut de sancto Benedicto legitur, in monasterio habitent atque se ipsos recolligant. Hęc autem transgredientes sive prelati in favendo, sive subditi in obtinendo excommunicentur. » L’expression « se ipsos recolligere » pose un problème de traduction. D’un point de vue purement grammatical, l’expression n’a guère de sens puisque le verbe recolligere se retrouve avec deux complément d’objet direct le pronom personnel réfléchi se et le pronom démonstratif ipse. Cependant il nous semble que l’on peut comprendre le sens de l’expression employée par les évêques à partir du verbe se recolligere. Selon le Grand Gaffiot, op. cit., p. 1339 , se recolligere signifie se ressaisir se reprendre courage. Il nous semble donc que les évêques ont voulu exprimer par l’expression se recolligere ipsos, l’idée que le fait d’être réunis ensemble au monastère permet aux moines de se ressaisir dans l’exercice de l’obéissance.

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MAGNOU-NORTIER Elisabeth, Les deux discours dans les actes des conciles de Meaux ( juin 845) et de