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Fondation par un chanoine d’un service au bénéfice de la communauté

Section ii: La possession de biens propres par les chanoines

B) Fondation par un chanoine d’un service au bénéfice de la communauté

Dans le chapitre précédent nous avons essayé de décrire dans sa complexité la question de la possession de biens par les chanoines. Parmi les pratiques interdites aux moines mais autorisés aux chanoines, figuraient la possession de biens propres mais aussi de biens de l’Église. Il n’est pas évident de prime abord de comprendre ce que sont ces biens de l’Eglise mais, à la lecture du De vita contemplativa de Julien Pomère, une œuvre abondamment citée – pas toujours à bon escient d’ailleurs par les auteurs de l’institutio

canonicorum, il semble qu’il faille entendre par biens de l’Eglise un bénéfice

ecclésiastique confié à un chanoine à raison d’un service qu’il rend à la communauté. Deux exemples pris parmi les diplômes de Charles le Chauve permettent de mieux comprendre comment sont administrés les différents offices dans les monastères de chanoines et ce que sont concrètement ces biens d’Eglise détenus par les chanoines.

Le titre de ce paragraphe est emprunté à un récent article de Philippe Depreux290 dans lequel il a étudié les différentes pièces du dossier et notamment le diplôme de Charles le Chauve du 5 janvier 844 ou 845291 que nous allons analyser292.

Nos perspectives seront cependant assez différentes des siennes. Son propos était de retracer l’historique des biens affectés à la rémunération du maître d’école de Saint-Martin de Tours. Notre objectif est plutôt d’essayer de comprendre à partir de l’analyse du diplôme de Charles le Chauve comment est rémunéré un office comme celui de maître d’école et en quoi ce mode de rémunération est ou non conforme aux dispositions prévues par l’institutio canonicorum.

Si nous avons quand même repris le titre de l’article de Philippe Depreux, c’est qu’il nous semble qu’il pose un véritable problème dans sa formulation même. L’auteur utilise en effet le terme de prébende sans mettre de guillemet et sans discuter à aucun moment de sa pertinence.

Une prébende canoniale est, pour une époque postérieure, la part de revenus affectée à chacun des chanoines membre d’une communauté pour sa subsistance. Cependant, pour l’époque carolingienne, l’existence de prébende individuelle dans les communautés canoniales n’est pas attestée. Comme nous l’avons vu précédemment, le chapitre CXX de l’institutio canonicorum prévoyait que les chanoines reçoivent les vivres de manière communautaire.

D’ailleurs le terme « prébende » est très rarement employé dans les textes contemporains de Charles le Chauve. Une occurrence a été relevée par Guy Jarousseau dans une charte du comte et abbé Thibaud en faveur du monastère Saint-Jean-Baptiste d’Angers293

. Le terme praebenda est employé deux fois dans cette charte. L’une des deux occurrences désigne les biens attribués collectivement aux chanoines et non des biens

290 DEPREUX Philippe, « La prébende de l’écolâtre et la gestion des biens de Saint-Martin de Tours » in Les pouvoirs locaux dans la France du Centre et de l’Ouest (VIIIème –XIème siècle), Rennes, P.U.R., 2004, p. 23-38.

291 CHARLES LE CHAUVE 63

292 Outre le diplôme de Charles le Chauve, le dossier concernant la « prébende » de l’écolâtre comprend une charte de l’abbé Alard datée d’août 841 qui est confirmée par le diplôme de Charles le Chauve et une notice de jugement datée probablement du 18 janvier 881.

293 Charte conservée en original aux Archives départementales du Maine-et-Loire éditée par guy JAROUSSEAU, Episcopat et églises en Anjou au haut Moyen Âge, op. cit., annexe 9, p. 542-543. Nous tenons à remercier tout spécialement monsieur Guy JAROUSSEAU pour avoir attiré notre attention sur ce texte.

attribués personnellement à l’un d’entre eux294. Dans l’autre cas le terme praebenda désigne la part conservée par l’abbé295

. En cette charte du comte Thibaud, le terme

praebenda semble plutôt désigner ce que l’on appelle traditionnellement la mense

conventuelle ou abbatiale qu’une prébende individuelle.

Le terme praebenda apparaît aussi dans les capitula promulgués par Hincmar de Reims en 874. Examinons le texte latin de ce passage :

« presbyteri nostrae parochiae dicuntur ecclesias suas negligere, et prebendam in monasterio Monti Falconis obtinere »

Il convient de remarquer que dans ce passage les termes presbyteri et ecclesiae sont au pluriel alors que le terme prebenda est au singulier. On peut en déduire, nous semble-t-il, que les prêtres quittent leurs différentes églises pour détenir collectivement l’unique

praebenda du monastère de Montfaucon. Le terme praebenda désigne donc, dans ce texte,

la mense canoniale et non une prébende individuelle.

On peut donc de se demander si l’emploi du terme de « prébende » est pertinent dans le cas de la rémunération du maître d’école de Saint-Martin de Tours. Examinons comment est présenté ce mode de rémunération dans le diplôme de Charles le Chauve en faveur de Saint-Martin de Tours :

« un diacre du couvent de l’illustrissime confesseur du Christ saint Martin, notre patron particulier, nommé Amauri a légalement offert à Dieu et à saint Martin une partie de son bien propre obtenu par héritage et par achat et il a sollicité par une charte de précaire pour lui un petit bénéfice sur les biens de cette même église à la condition expresse que, ce même Amauri, Milon, Guichard et quiconque leur succédera comme précepteur dans l’école de saint Martin tiennent l’un et l’autre de ses biens le temps de leur vie, et que, en ce lieu, à propos de l’enseignement des élèves, ils ne demandent ni n’exigent aucun salaire en compensation sauf ce qui leur est offert spontanément, et que n’importe lequel des abbés de ce monastère ne sollicite désormais ou ne puisse jouir de la licence d’exiger d’eux ou de leurs successeurs ayant ce même ministère aucune obligation ou service si ce n’est enseigner gratuitement dans l’école ce qui est demandé et se consacrer en ce lieu très fidèlement au travail d’enseignement. »296

294 Idem, p. 543 : « Nous rendons irrévocable du reste qu’ils ne soient pas plus de 21 frères sous l’ordo du sudit monastère à tenir la susdite prébende » (Sancimus de cetero ut sub praedicti monasterii ordine ad praeteaxatam prebendam capessendum (corr. capessendam) non plus quam XXI fratres consistant. »

295

Sur cette occurrence du terme praebenda dont le sens précis n’est pas aisé à saisir, voir l’analyse de Guy JAROUSSEAU in Episcopat et églises en Anjou au haut Moyen Âge, op. cit., p. 275-276.

296 CHARLES LE CHAUVE 63 : « quidam levita ex coenobio praeclarissimi confessoris Christi sancti Martini, peculiaris patroni nostri, nomine Amalricus, quoddam proprium hereditatis suae sive adtractus sui legaliter obtulerit Deo et sancto Martino deprecatusque fuerit per seriem precariae beneficiolum suum ex

La charte confirmée par le diplôme Charles le Chauve comportait deux opérations distinctes : d’une part une donation d’une partie de ses biens propres à Saint-Martin de Tours faite par le diacre Amauri, chanoine du monastère, d’autre part, une concession à titre précaire faite par l’abbé de Saint-Martin de Tours de biens du monastère à ce même diacre Amauri. L’ensemble constitué des biens donnés par Amauri et des biens concédés à titre précaire au même forme un bénéfice affecté à Amauri en tant que maître d’école297 puis nommément à Milon et Guichard qui doivent lui succéder dans ces fonctions et enfin à quiconque exercera la charge de maître d’école de Saint-Martin de Tours. Il est en outre stipulé que le maître d’école n’exigera aucune autre rémunération pour sa charge et qu’en contrepartie l’abbé n’exigera de lui rien d’autre que l’accomplissement de sa tâche. Il nous semble que ces dispositions peuvent être mieux appréhendées à la lumière de l’institutio

canonicorum de 816. Nous avions vu au chapitre précédent que c’est à raison de sa

fonction au sein de la communauté qu’un chanoine pouvait détenir personnellement des biens de l’Eglise. Le cas du diacre Amauri nous paraît en être la parfaite illustration. C’est en tant que maître de l’école de Saint-Martin de Tours qu’il détient en bénéfice des biens de cette église. Si l’on se réfère au chapitre CXX de l’institutio canonicorum, la détention de biens de l’église par un chanoine ne l’empêche pas de recevoir de la communauté la nourriture et la boisson. Si cette disposition est appliquée, Amauri, en tant que chanoine de Saint-Martin de Tours reçoit la nourriture et la boisson comme les autres chanoines sur la mense conventuelle. De ce point de vue, il ne nous semble pas que l’on puisse parler d’une « prébende » du maître d’école, la prébende ayant pour fonction d’assurer la subsistance d’un chanoine. L’expression « bénéfice du maître d’école » nous paraîtrait plus appropriée. Un tel dispositif a des avantages pour les différents partenaires concernés. L’intérêt du donateur et bénéficiaire Amauri est évident. En contrepartie de la donation d’une partie de ses biens propres, celui-ci obtient pour lui et pour ses successeurs - dont on peut penser qu’ils lui sont apparentés – un bénéfice substantiel. L’intérêt de l’abbé de Saint-Martin de Tours, que ce soit Adalard, qui avait présidé à l’opération, ou Vivien qui demande sa

rebus ejusdem ecclesiae, eo scilicet tenore ut utrasque res diebus vitae suae idem Amalricus, Milo atque Guichardus habeant eorumque successor quicumque fuerit praeceptor in scola sancti Martini, nec inibi de doctrina quorumque discentium meritum recompensationis auerant aut exigant nisi quod sponte oblatum sit, neque abbas ejusdem monasterii quilibet deinceps plus servitii alicujus muneris petat vel licentia exigendi ab his eorumque successoribus idem ministerium habentibus perfrui queat quam ut gratis in scola petita doceant necnon fidelissime ibi laborem docendi impendant. »

297 Sur la nature de l’enseignement dispensé par ce personnage et sur sa carrière ultérieure – il devint archevêque de Tours, voir BRUNTERC’H Jean-Pierre, « Un monde lié aux archives : les juristes et les praticiens du IXe au Xe siècle » in Plaisirs d’archives. Recueil de travaux offerts à Danièle Neirinck, p. 422 et note 45.

confirmation, est tout aussi évident : la donation d’Amauri lui permet de rémunérer le maître d’école de Saint-Martin de Tours à moindre frais.

b) La fondation de l’hospice des pauvres à Saint-Quentin

Un dispositif comparable se trouve dans un diplôme de Charles le Chauve en faveur de Saint-Quentin daté du 12 janvier 863 :

« venant un des serviteurs de Dieu très dévoué du monastère de l’illustre martyr du Christ, saint Quentin, nommé Hildrade, en même temps que notre très cher comte Adalard, l’abbé du susdit monastère, il a fait connaître à notre sérénité, de quelle manière, touché par la piété de l’amour divin, il voulait remettre certains biens de sa propriété au susdit monastère pour le salut de son âme et en échange de ces biens, recevoir une villa pour l’avoir à titre d’usufruit seulement sa vie durant avec l’accord de son abbé et des frères. »298

Le dispositif de ce diplôme comme celui du précédent comporte deux opérations distinctes : d’une part, une donation faite par Hildrade d’une partie de ses biens propres au monastère de Saint-Quentin dont il est l’un des chanoines, et, d’autre part, la concession d’une villa à titre d’usufruit faite par l’abbé laïque de Saint-Quentin, Adalard, au profit d’Hildrade.

La suite du texte stipule que le bénéfice constitué des biens donnés par Hildrade et de biens concédés à titre viager à ce même Hildrade doit servir à la construction d’un hospice pour les pauvres :

« de telle manière qu’à partir de ce jour sur les uns et les autres biens, c’est-à-dire les biens propres et les biens ecclésiastiques, un hôpital soit édifié à l’intérieur de la clôture dans la maison que (Hildradus) lui-même, Dieu voulant, a construit, à côté de laquelle une petite église sera édifiée»299

Le dispositif du diplôme précise ensuite quels services doivent être rendus aux pauvres dans cet hospice et en mémoire de qui ils doivent l’être. Il est notamment précisé qu’il doit être effectué :

298 CHARLES LE CHAUVE 251 : « veniens quidam servorum Dei devotissimus ex monasterio sancti Quintini eximii martyris Christi, nomine Hyldradus, una cum carissimo nobis comite Adalardo, qui et abba prefixi cenobii, innotuit serenitati nostre qualiter, divini amoris tactus pietate, res quasdam sue proprietatis ob remedium anime sue ad jam dictum monasterium vellet tradere et pro his unam villam per consensum sui abbatis atque fratrum in vita sua dumtaxat habendam usufructuario sumere »

299 Ibidem : « ita ut ab hodierna die de iis utrisque rebus, propriis et ecclesiasticis, hospitalis infra claustra in domo quam ipe volente Deo construxit, juxta quam parva basilica edificabitur, (…) edificetur. » Nous avons traduit ici le terme basilica par église car le terme français basilique ne nous paraît impropre pour désigner un édifice qui doit être somme toute de dimension modeste.

« pour la purification de l’âme d’Hildrade lui-même, et également pour le salut de des âmes de son père et de sa mère ainsi que de son frère Etienne et de sa sœur Jérusalem. »300

Ce passage permet de comprendre quels bénéfices le chanoine Hildrade entend retirer de sa libéralité. Il se peut que dans un premier temps il en escompte un avantage matériel puisqu’il semble que, même si cela n’est pas expressément spécifié dans le diplôme, c’est lui qui sera chargé d’administrer l’hospice qu’il vient de fonder. Conformément à ce qui est prévu par l’institutio canonicorum, il peut donc prélever une part du bénéfice consacré au fonctionnement de l’hospice pour son revenu personnel. Cependant, le principal bénéfice qu’Hildrade entend tirer de sa fondation est de nature spirituel : le service des pauvres, considéré comme une œuvre spirituelle dans la mesure où il s’agit d’accomplir des préceptes évangéliques, sera accompli dans l’hospice pour le salut de son âme et de celles de ses proches parents. En fondant un hospice pour les pauvres, le chanoine Hildrade pense tout autant à son salut éternel qu’à son bien-être matériel. En cela ses motivations paraissent quelque peu différentes de celles du maître d’école Amauri, dont les préoccupations paraissaient tout à fait matérielles.

Le dispositif du diplôme spécifie en outre que l’hospice fondé par Hildrade, non content d’accueillir des pauvres extérieurs au monastère, devra aussi servir de refuge pour les chanoines de Saint-Quentin atteints de quelque infirmité :

« Et s’il arrive par hasard que l’un des susdits frères, accablé par une infirmité ou affaibli par la pauvreté, ne peut avoir sur son bien de quoi subvenir à ses besoins corporels, qu’un lieu opportun lui soit ménagé en (cet hospice)) pour qu’il y habite et que le frère qui sera établi à la tête de (l’hospice) fasse l’effort de lui apporter tout soulagement à ses besoins corporels tout le temps de sa convalescence ou peut-être de sa faiblesse. »301

Ce passage du diplôme doit être rapproché de la disposition du chapitre 142 de l’institutio canonicorum demandant la construction dans les monastères de chanoines d’une maison pour les infirmes et les vieillards (mansio infirmorum et senium). Il apparaît que l’une des fonctions de l’hospice fondé par le chanoine Hildrade sera d’abriter les vieillards et infirmes du monastère. La fondation du chanoine Hildrade a don un intérêt pour l’ensemble de la communauté canoniale établie à Saint-Quentin. Cette clause du

300 Ibidem : « pro expiatione anime ipisus Hildradi, pariterque ob remedium animarum genitoris ejusdem ac genetricis illius, germanique simul Stephani atque germane Jherusalem.”

301 Idem : “Et si forte evenerit ut aliquis predictorum fratrum, infirmitate gravatus aut paupertate attenuatus, de suo unde necessitatem corpoream supplere valeat habere nequiverit, ad habitandum ibi ei locus paretur oportunus, et frater qui super hoc constitutus erit omnem ei corporee necessitates curam quandiu aut convaluerit aut forte defecerit contendat.”

diplôme montre aussi que certaines dispositions de l’institutio canonicorum n’ont été appliquées qu’avec un certain retard. S’il est précisé que l’hospice fondé par Hildrade doit tenir lieu de « maison des infirmes et vieillards » cela implique, nous semble-t-il, que le monastère de Saint-Quentin n’était pas doté auparavant d’un lieu spécialement dévolu à cet usage.

C) Synthèse

L’analyse de certains des diplômes de Charles le Chauve permettent d’apercevoir comment les dispositions de l’institutio canonicorum concernant la propriété personnelle des chanoines sont appliquées sous le règne de ce souverain.

Deux diplômes de Charles le Chauve dont la tradition est incertaine comprennent des clauses concernant les maisons des chanoines. Si l’on accepte l’authenticité de ces deux documents, il en ressort que les maisons situées à l’intérieur de la clôture canoniale sont réservées aux seuls chanoines. Cependant, des évolutions semblent apparaître entre ces deux diplômes : l’un datant du début du règne de Charles le Chauve (844-845), l’autre de la fin (874), on aurait - le conditionnel semble de rigueur étant donné le petit nombre de document et les soupçons pesant sur leur authenticité – passage d’un simple droit d’usage du chanoine sur sa maison à un véritable droit de propriété consacré par la licence accordée à chaque chanoine de vendre sa maison à l’un de ses confrères.

Deux autres diplômes permettent d’apercevoir un trait original de la vie canoniale telle qu’elle est organisée par l’institutio canonicorum de 816 qu’est la possibilité pour un religieux de détenir à titre personnel un bénéfice ecclésiastique. Cette licence accordée aux chanoines a inspiré des dispositifs par lesquels un membre de la communauté fonde au profit de tous un service sur des biens personnels et communautaires. De tels arrangements profitent à tous, au fondateur qui s’assure sa vie durant la détention personnelle d’un bénéfice substantiel, aux chanoines dans leur ensemble qui, grâce à l’initiative personnelle de l’un d’entre eux voient l’un de leurs besoins satisfaits, à l’abbé - un laïc dans les deux cas que nous avons étudié – qui peut pourvoir aux besoins de sa communauté sans dépenser une grande quantité de biens. Cependant l’on peut penser que ce système n’est pas sans conséquence sur la vie communautaire. Le chanoine fondateur pourvu à titre personnel d’un confortable bénéfice peut être tenté de vivre uniquement sur les revenus de

son bénéfice sans plus avoir une véritable vie communautaire. Il n’est pas interdit de voir dans ce système des bénéfices ecclésiastiques attribués personnellement à un chanoine en raison du service qu’il rend à la communauté l’un des éléments préfigurant l’institution de prébendes individuelles.

Conclusion du chapitre

L’objectif principal de ce chapitre était d’apercevoir si la législation canonique concernant les moines et les chanoines promulguée par Louis le Pieux était ou non appliquée au temps de Charles le Chauve. Il nous semble que l’on peut répondre par l’affirmative.

Cela est particulièrement vrai pour les monastères de moines. La lettre de Loup de Ferrières adressée à l’archevêque Ganelon de Sens témoigne d’une conception de la vie monastique tout à fait conforme à l’esprit de la réforme de Benoît d’Aniane. De même les quelques textes canoniques concernant les moines promulgués au temps de Charles le Chauve sont dans la continuité de la législation élaborée à Aix-la-Chapelle en 816 et 817. Ils sont toutefois marqués par un renforcement du contrôle épiscopal sur l’observance monastique qui s’explique peut-être par la multiplication des abbés laïques.

La réponse doit être plus nuancée, s’agissant des chanoines. Des prescriptions de l’institutio canonicorum ne sont appliquées que tardivement dans certains monastères. Ainsi, l’hospice pour les pauvres prévu par le chapitre 142 de l’institutio canonicorum