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425 Lozman v. City of Riviera Beach, US Supreme Court 11-626, 15 janvier 2013, 568 US (2013), Justice Sottomayor Disenting, soutenu par Justice Kennedy, p. 6. À noter qu’ils sont en accord avec le jugement concernant le rejet du « the anything that floats approach » qui put dominer l’analyse. La Cour suprême, à ce sujet, note qu’ « à l’évidence, ni une bassine en bois ou en plastique, une plateforme de bain ou un ponton, un imposant filet de pêche, une porte hors de ses gonds, ni Pinocchio à l’intérieur du cachalot, ne peuvent être définis comme un navire », p. 4 du jugement.

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Jusqu’alors, la méthode consistait à rechercher si la structure flottait et si elle était capable de transporter des personnes ou des marchandises, à rejeter ensuite les structures ancrées de façon permanente au fonds marin et, enfin, si les caractéristiques de la structure et l’absence, dans son passé, de la réalisation d’un transport l’excluaient de la définition de navire. Ces éléments restent déterminants aujourd’hui pour analyser notre sujet.

La qualification des plateformes offshore n’est pas réduite à l’étude de l’arrêt Lozman, y 153.

compris lorsqu’il s’agit de l’application du Jones Act aux travailleurs426. Certaines jurisprudences

ont penché vers l’absence d’assimilation, pour l’application du Jones Act, des plateformes de production de type FPSO427 ou TLP à des navires, ce qui justifie de se poser la question suivante :

la qualification de navire sera-t-elle aujourd’hui exclusivement réservée aux plateformes d’exploration amenées à se mouvoir fréquemment, aux drillships et aux flotels ayant manifestement l’apparence d’un navire et pouvant ainsi emporter l’adhésion d’un « observateur raisonnable »428 ? D’autres jurisprudences, postérieures à l’arrêt Lozman, permettent de douter

d’une pareille systématisation429.

En 2015, la cour fédérale du district sud Texas430 jugeait qu’une barge, fixée au sol de la

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mer et qui ne se déplaçait pas, n’était pas un navire dans le contexte d’un litige où était invoqué le Jones Act. Johnnie Badon travaillait pour Nabors Offshore Corporation en tant que manœuvre, habituellement sur une plateforme de type barge dans le Golfe du Mexique. Cette barge opérait sur plusieurs puits entre lesquels elle se déplaçait de façon autonome. Le jour de son accident, M. Badon travaillait depuis un mois sur une autre structure attachée à la plateforme Spar Genesis, propriété de Chevron, chevillée au sol et immobile. Monsieur Badon poursuivit son employeur,

Nabors, pour négligence et innavigabilité du navire431. La cour fédérale du Texas, se concentrant

426 Schupp. B. O., « Supreme Court Fails to Sweep Up Offshore Legal Minefield », Marine Money Offshore,

avril 2013, pp. 26-27.

427 Sur la question précise de la qualification de « Jones Act Vessel » au sujet des FPSO, avant l’arrêt Lozman, v. Nicholas J., « The Future of Vessel Status in the fifth circuit – Will a Floating Production Storage and Offloading Platform be deemed a Jones Act Vessel ? », Tul. Mar. L. J., vol. 28, 2003, n°1, p. 153.

428 Quoique cela soit également le cas des FPSO, et des FLNG.

429 C’est le cas des jurisprudences qui refusent la qualification de « seaman », non pas en fonction de la

structure sur laquelle le travail est effectué mais en fonction de la nature de l’activité, notamment en termes de pourcentage de temps passé en mer, Op. cit., Wilcox v. Wild Well Control, Inc., et Alexander v. Express Energy Services Operating LP. V. ég. Pitre v. Custom Fab of La., LLC, No. 12-1074, 2013 WL 4499029 (E.D. La. Aug. 20 2013), sur le rejet de la demande de jugement sommaire demandé par un employeur contre son employé, blessé alors qu’il travaillait en tant que soudeur/tuyauteur pour un ROV sur la plateforme semi-submersible Development Driller III de type column stabilised dont la mobilité, en autonomie, est pourtant réduite. M. Pitre demanda l’application du Jones Act ce que refusa l’employeur. La demande fut rejetée au motif que les problèmes juridiques posés relatifs à la qualification de M. Pitre étaient suffisamment complexes et sérieux pour nécessiter une procédure fouillée.

430 Johnie Badon v. Nabors Offshore Corporation, 2015, US district, Lexis 26382 (S.D. Tex ; Houston Division

2015).

Le pluralisme applicable au lieu de travail

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sur la seconde installation de travail de Johnnie Badon, déterminait que ce dernier n’était pas un marin car l’installation n’était pas un navire.

La jurisprudence Naquin v. Elevating Boats432 éclaire sous un autre angle le sujet. La 155.

société pour laquelle travaillait Naquin s’occupait de la maintenance et de la réparation d’une flotte de navires de levage, ainsi que de grues marines potentiellement installées sur ces navires. Monsieur Naquin occupait la fonction de superviseur des opérations de réparation des navires sur le chantier naval de Houma, en Louisiane. Il réalisait à ce titre environ 70 pour cent de son activité en mer et le reste sur le chantier naval. Néanmoins, les navires sur lesquels il opérait étaient soit ancrés, soit amarrés à quai pour les besoins des travaux. Alors qu’il manipulait une grue à terre, celle-ci s’effondra occasionnant la mort du mari de sa cousine. Par ailleurs, M. Naquin subit de nombreuses blessures parmi lesquelles une hernie abdominale, des fractures du pied et des troubles mentaux. Il effectua donc une action en négligence contre son employeur en vertu du Jones Act. L’US district Court for the Eastern district of Louisiana, après l’avoir qualifié de

Seaman, considéra que l’entreprise avait bien commis des négligences dont l’accident était la

conséquence directe.

L’entreprise fit appel du jugement au motif que M. Naquin ne pouvait pas être qualifié de « seaman ». La cour d’appel pour le 5ème circuit jugea à son tour que M. Naquin était bien un

« seaman » et que l’entreprise était coupable de négligence. M. Naquin effectuait un travail qui contribuait aux fonctions du navire et, par ailleurs, son activité complémentaire, à terre, était également réalisée pour les besoins du fonctionnement des navires. En outre, les liens entre M.

Naquin et les navires étaient substantiels en temps et en nature. Il satisfaisait en cela aux

exigences du test de qualification de « seaman » tel qu’il ressort de la jurisprudence Chandris et

Barrett. Le juge Edith Jones, dans une écriture dissidente à l’arrêt Naquin, formula un avis

contraire à la majorité de la cour puisqu’elle estima que la nature de l’activité ainsi que sa durée étaient insuffisantes à la qualification de « seaman ». La jurisprudence Barrett ne serait en ce sens qu’un Guideline et non pas un automatisme. La nature de l’activité devrait dominer la méthode de qualification. Or, M. Naquin effectuait son travail sur des navires principalement amarrés, élevés sur jambe ou à quai. Il n’était donc pas suffisamment exposé aux périls de la mer, ce qui était la condition sine qua non de la qualification de « seaman »433.

On notera pour conclure un net mouvement de fermeture du régime du Jones Act aux 156.

plateformes offshore qui ne peuvent clairement pas être qualifiées de navire depuis l’arrêt

432 Naquin v. Elevating Boats, L.L.C., 744 F.3d 927 (5th Cir. 2014).

433 V. aussi O’Hara T. M., « Naquin v. Elevating Boats, LLC : The Fiftth Circuit’s Improper Expansion of Jones

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Lozman434. Néanmoins, les plateformes qualifiées de navire, essentiellement eu égard à leur mobilité, restent ouvertes à la qualification de « Jones Act Vessel ». Leurs travailleurs peuvent être qualifiés « seaman » et couverts par le Jones Act à condition qu’ils satisfassent au « two

prong test » de l’arrêt Chandris. S’il est incontestable que la problématique est recentrée sur la

qualification de navire435 la nature de l’activité demeure importante. À défaut, ils seront couverts

par le couple LHWCA-OCSLA. L’arrêt Lozman n’est manifestement pas de nature à tarir la jurisprudence sur le sujet comme le notait justement dans son avis dissident Justice Sottomayor.

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