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Lex petrolea et relations transnationales de travail offshore

Liste des abréviations

A. Lex petrolea et relations transnationales de travail offshore

L’objet de la lex petrolea et les conditions de son développement (1) invitent à analyser le 22.

caractère transnational des relations de travail offshore (2).

1. Les fondements fragiles de la lex petrolea

Le concept de lex petrolea apparaît tardivement puisqu’il ne sera employé pour la 23.

première fois qu’en 1982 dans la sentence arbitrale Kuwait v. AMINOIL57 relative à

l’expropriation d’AMINOIL d’une concession pétrolière par le gouvernement du Koweït58. Le

Koweït argumentait au soutien de son acte d’expropriation que de nombreuses négociations internationales et plusieurs arbitrages prononcés entre 1971 et 1977 au sujet du calcul des compensations financières pour expropriation constituaient une règle coutumière valide pour l’industrie pétrolière, une lex petrolea. Cette dernière relèverait d’une branche particulière de la

lex mercatoria, générale et universelle. La lex petrolea est, selon cette décision, constituée par

l’ensemble des règles internationales coutumières qui encadrent l’activité pétrolière et gazière, au même titre que l’une de ses plus anciennes manifestations, la lex maritima59, aurait vocation à

régir l’ensemble des activités maritimes. La lex mercatoria est rattachée historiquement au développement, durant le Moyen-âge, d’une loi des marchands substantielle60, que Sir William

55 Moreau M.-A., « De la transnationalité de la relation de travail », Droit social, 2011, p. 1174.

56 Symeon Symeonides, Idealism, Pragmatism, Eclecticism, General Course on Private International Law,

Recueil des cours de la Haye, tome 384, 2017, pp. 348 et s.

57 The Government of the State of Kuwait v. American Independent Oil Co (AMINOIL), sentence abritrale du

24 mars 1982, ILM, vol. 21, 976.

58 Pour une approche historique du concept de lex petrolea , v. De Jesus O. A., « The Prodigious Story of the Lex Petrolea and the Rhinoceros. Philosophical Aspects of the Transnational Legal Order of the Petroleum Society », TPLI Series on Transnational Petroleum Law, vol. 1, n°1, 2012 ; et Daintith T., « Against « lex petrolea » », Journal of Energy Law and Business, 2017, n°10, pp. 1-13.

59 Sur ce point, v. Tetley W., « The general Maritime Law – The Lex Maritima. With a brief reference to the ius commune in arbitration law and the conflict of laws », Syracuse Journal of International Law and Commerce, 1994, p. 105.

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Blackstone a décrit comme la loi avec laquelle « toutes les nations sont d’accord »61. On doit la

conceptualisation de la lex mercatoria à l’école de Dijon, notamment à son auteur resté le plus célèbre, le Professeur Berthold Goldman, qui mît en avant l’existence d’un ordre juridique autonome spécifique encadrant le commerce international. Berthold Goldman relevait, dans un article resté célèbre, que le droit ne naît pas exclusivement de l’État62, notamment pour ce qui

concerne l’encadrement des relations commerciales qui s’établissent au-delà des frontières étatiques. Le développement de la lex mercatoria s’est appuyé sur l’insertion des usages dans les contrats internationaux, spécifiquement dans les contrats de vente. Malgré sa production et son expansion en dehors des États, Berthold Goldman considérait que la lex mercatoria faisait partie intégrante des règles de droit.

Aujourd’hui, la lex mercatoria désigne un corps de règles spécifique au commerce 24.

international. Il s’agit de normes substantielles, de droit matériel, qui constitueraient un ordre juridique autonome de celui des États et qui échapperaient, dès lors, aux méthodes et aux règles du droit international privé63. Les contours de la lex mercatoria sont difficiles à saisir. Elle

regroupe classiquement, de manière confuse, les grands principes du droit des contrats et les règles du commerce international dégagées par la pratique. L’imprécision du contenu de la lex

mercatoria participe de la difficulté à la considérer comme un ordre juridique autonome64.

L’application de règles spontannées, coutumières, issues de la pratique du commerce

61 Blackstone W., Commentaries on the Laws of England, Oxford, Livre I 1765, p. 264, « For which reason,

the affairs of commerce are regulated by a law of their own, called the law merchant or lex mercatoria , which all nations agree in and take notice of. And in particular the law of England does in many cases refer itself to it, and leaves the causes of merchants to be tried by their own peculiar customs» ; « (…) pour quelles raisons les affaires du commerce sont réglementées par leur propre loi, dénommée loi des marchands ou lex mercatoria, légitime pour toutes les nations. En particulier, la loi anglaise se réfère régulièrement à cette loi, et laisse les marchands résoudre leurs différends selon leurs propres règles coutumières ». De la même manière, Lord Mansfield estimait au sujet de la lex maritima , dans l’arrêt Luke v. Lyde, de 1779 : « the maritime law is not the law of a particular country, but the general law of nations » ; « la loi maritime n’est pas celle d’un pays particulier, elle est la loi générale des nations ». La lex maritima appartenait en ce sens au jus gentium. La citation de Lord Mansfield, qui portait sur la question de savoir si le fret était dû en cas d’interruption du voyage maritime pour force majeure, était probablement erronée, puisque l’universalité de la solution en la matière ne semblait pas établie, en ce sens, v. Blockmans W., Krom M., et Wubs-Mrozewicz J., The Routledge Handbook of Maritime Trade around Europe 1300-1600. Commercial Networks and Urban Autonomy, Routledge, 2017, p. 75.

62 Goldman, B., « Frontières du droit et « lex mercatoria », Arch. phil. dr., tome IX, 1964, pp.177-192. 63 L’existence de normes autonomes des États, qui échapperaient à la méthode conflictualiste est critiquée

par certains auteurs, v. à ce sujet Lagarde P., « Approche critique de la lex mercatoria », in Études offertes à Berthold Goldman, Litec, 1982, p. 125. Pour cet auteur, il ne peut exister un ordre juridique autonome de celui des États. Il s’agit, pour Paul Lagarde, de règles issues de la pratique du commerce international dont le contenu ne permet pas de constituer un système juridique autonome.

64 Pour un arrêt de la Cour de cassation reconnaissant la décision d’un arbitre de se référer à la lex mercatoria pour statuer en droit, Civ. 1ère, 22 octobre 1991, n° 89-21.528. Toutefois, l’arbitre avait fait

référence à des règles issues de la pratique qui avaient reçu une sanction des jurisprudences nationales. Notons encore que, si un arbitre peut trancher un litige selon la lex mercatoria, ce n’est pas le cas des juges nationaux, au sein de l’Union européenne, qui sont liés par le règlement Rome I du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles. Ce dernier fait référence à la loi d’un État. Ainsi, la lex mercatoria est difficilement totalement dissociable de l’État.

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international, dans un certain nombre de sentences arbitrales participeraient, toutefois, à la reconnaissance d’une lex mercatoria65.

Avant la sentence arbitrale AMINOIL, l’activité pétrolière et gazière avait déjà fait l’objet 25.

d’une autonomisation sous l’angle académique66 et pratique67. Les premiers enseignements d’Oil

and Gas ou de Petroleum law sont apparus dans les années 1960 et 1970, au moment de

l’industrialisation des ressources minérales offshore68. Le Professeur Ahmed Sadek El-Kosheri,

conseiller proche des juges arbitraux de la sentence Koweït v. AMINOIL, avait, en outre, pu utiliser l’expression de lex petroleum à l’occasion d’un cours prononcé à l’Académie de droit international de La Haye en 197569. Il évoquait alors ce concept en matière d’accord de

participation dans le domaine pétrolier. Le Professeur El-Kosheiri écrivait à ce sujet : « qu'il soit choisi par les parties ou déterminé par le juge ou l'arbitre saisi, le cadre légal auquel l'accord de participation est ancré permet surtout une certaine « transnationalisation » en fonction de techniques juridiques appropriées élaborées essentiellement par la pratique et la jurisprudence arbitrale. Ainsi, on peut constater, à la fois, le recours fréquent aux « principes généraux » et l'élaboration graduelle d'une véritable lex petroleum de nature « transnationale » »70.

Cette lex petroleum renvoie initialement à l’idée qu’il existe une véritable loi pétrolière 26.

transnationale qui dérive des pratiques commerciales, des usages et des coutumes des acteurs de l’industrie pétrolière globalisée, au premier plan desquels les entreprises pétrolières transnationales. Le développement de la lex petrolea contemporaine plonge ses racines dans l’étude des sentences arbitrales, principalement prononcées au sujet des expropriations au

65 La lex mercatoria, si elle n‘est pas un système juridique autonome peut être sollicitée à travers le choix

des parties de s’y référer, ce qui n’est pas fréquent, ou, dans le silence des parties, à travers son application à l’initiative des arbitres. Voir les travaux d’Emmanuel Gaillard, notamment « Trente ans de Lex Mercatoria. Pour une application sélective de la méthode des principes généraux du droit », JDI, 1995, p. 5 et s.

66 Un premier ouvrage est publié aux États-Unis, en 1898, par George Bryan, The Law of Petroleum and natural Gas, with Forms, éd. FB Rothman, 1898, 521 pages. En France, le Professeur Jean Devaux- Charbonnel a contribué à l’émergence de ces études. En 1951, il soutenait sa thèse intitulée L’intervention des États dans la recherche et dans l’exploitation des gisements de pétrole, Thèse en droit, Université de Paris, 1951, 151 pages. Il fût ensuite le premier à développer une approche comparatiste du droit pétrolier dans le cadre de ses cours, Droit pétrolier, éd. Institut de droit comparé, Paris, 1974-1975.

67 Les avocats américains créent en 1926 une section à l’American Bar Association, spécialisée dans le Mineral Law.

68 Daintith T., « Against « lex petrolea » », Op. cit., 2017, p. 3.

69 El-Kosheiri A. S., « Le régime juridique créé par les accords de participation dans le domaine pétrolier » Recueil des cours de la Haye, 1975, vol. 147, 405 pages.

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Moyen-Orient à partir des années 197071. Le caractère contraignant des pratiques

internationales est alors assuré par les sentences arbitrales, au-delà des ordres juridiques étatiques. La lex petrolea s’est ensuite enrichie d’études relatives à l’apport de la standardisation des contrats liant les acteurs pétroliers entre eux en vue de la réalisation de leur activité72. Dans

ce cadre, la standardisation contractuelle est développée en dehors des ordres juridiques internes, par la pratique des opérateurs privés et par les organisations industrielles et professionnelles. Cette standardisation est particulièrement importante au regard de l’industrie

offshore. Elle concerne les contrats d’accession à l’activité ainsi que les contrats conclus entre les

opérateurs privés particulièrement pour la création des joint ventures73.

Certaines contributions à l’étude la lex petrolea l’envisagent comme un ensemble de 27.

sources associé à l’industrie pétrolière internationale à partir duquel des obligations contraignantes pourraient être tirées. À cet égard, le droit pétrolier, dans ses branches de droit public ou de droit privé, n’est pas seulement issu des normes étatiques, mais aussi de la diversité des sources transnationales et des exigences nationales. Cet ensemble traduit, sur le plan juridique, les particularités de l’industrie pétrolière et gazière74. Le Professeur Terenth Daintith

estime en ce sens que la lex petrolea, dont la « mauvaise traduction latine » obscurcit la compréhension, s’apparente davantage à une catégorie d’un droit transnational. Au lieu de lex

petrolea, l’auteur préfère l’expression de « transnational petroleum law » que l’on peut traduire

par « droit pétrolier transnational »75. Pour une raison tenant aux fondements de la lex petrolea76

et aux difficultés relatives à l’identification de son contenu, le terme de droit pétrolier transnational sera préféré, comme étant l’ensemble des normes qui produisent, de quelque

71 Bishop R. D., « International Arbitration of Petroleum Disputes: The Development of a Lex Petrolea », Yearbook of Commercial Arbitration, 1998, pp. 1131 et s., où l’auteur reprend les sentences arbitrales rendues en la matière sur plus de 25 ans ; voir par ailleurs la mise à jour de ce travail, Childs T. C., « Uptade on lex Petrolea : The continuing development of customary law relating to international oil and gas exploration and production », Journal of world Energy Law and Business, 2011, 4, p. 214.

72 Martin T. A., et Park J. J., « Global Petroleum Industry Model Contracts Revisited : Higher, Faster,

Stronger », Journal of World Energy Law and Business, 2010, pp. 4-43. Cet article complète et met à jour une première étude, Martin T. A., « Model Contracts : a Survey of the Global Petroleum Industry », Journal of Energy and Natural Resources Law, aout 2004, vol. 22, n°3, pp. 281-340. Citons également Talus K., Looper S., et Otillar S., « Lex Petrolea and the Internationalization of Petroleum Agreements: Focus on Host Government Contracts », Op. cit., p. 181.

73 Cf. infra, respectivement n°305 et s., et n°372 et s.

74 Wawryk A., « Petroleum regulation in an international context: The universality of petroleum regulation

and the concept of lex petrolea », in Hunter T. (dir.), Regulation of the Upstream Petroleum Sector. A Comparative Study of Licensing and Concession Systems, éd. Edward Elgar publishing, coll. « New Horizons in Environmental and Energy law », 2015, pp. 3-35, et Talus K., Looper S., et Otillar S., « Lex Petrolea and the Internationalization of Petroleum Agreements : Focus on Host Government Contracts », Journal of World Energy Law and Business, 2012, p. 181.

75 Daintith T., « Against « lex petrolea » », Op. cit., p. 9, « One may reasonably as why the nature of this

entreprise needs to be osbscured by the use of bad Latin, when it could as easely, and much more clearly, be expressed in good English as « transnational petroleum law » ».

76 En résumé, son inscription dans la lex mercatoria et dans l’arbitrage international impliquant les

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manière que ce soit, un effet de droit au sein de l’industrie pétrolière. Cette approche entend s’affranchir des oppositions internes à la nature de la règle de droit et à l’identité de ceux qui la produisent. Cette conception permet de ne pas exclure de notre champ d’études les normes a

priori non contraignantes en raison de leur nature ou de leurs auteurs. Ces premières indications

doivent être précisées au regard de la transnationalité des relations de travail et des ordres juridiques impliqués.

2. La transnationalité des relations de travail offshore

L’étude du droit transnational des relations de travail77 offshore permet de couvrir le

28.

spectre des principales évolutions juridiques qui ont stimulé le développement du droit transnational78, les conséquences de son expansion et les perspectives de sa régulation79 par un

pluralisme juridique éclectique.

Dans son ouvrage de 1956, le juge Philipp Jessup proposait un passage du droit international à un droit transnational, entendu comme un droit de nature à gouverner les activités transnationales. Dans ce cadre, le droit transnational était défini comme « toutes les lois qui réglementent les actions ou les évènements qui transcendent les frontières nationales »80. Selon

Jessup, les sources du droit transnational se définissent par l’objet auquel elles s’appliquent, spécifiquement aux actions et aux évènements. Dans la perspective ouverte par Jessup, le droit transnational concernerait donc toutes les lois qui réglementent les actions ou les évènements liés aux relations de travail transcendant les frontières nationales, ou toutes les lois dont l’objet, lié aux relations de travail, se déploient hors des frontières nationales.

77 Sur la question du droit transnational du travail, v. particulièrement Blackett A., et Trebilcock A. (dir.), Research Handbook on Transnational Labour Law, Edward Elgar Publishing, 2015, 608 pages ; Rogowski R., Reflexive Labour Law in the World Society, Edward Elgar, 2013, 335 pages.

78 À ce sujet, v. Lhuilier G. Le droit transnational , Dalloz, coll. Méthodes du droit, 2016, 522 pages.

79 On ne saurait ici retracer l’ensemble des problématiques relatives à l’emploi du terme de « régulation ».

La polysémie du terme est manifeste, Frison-Roche M.-A. et Cohen-Tanugi L. (dir.), La régulation : monisme ou pluralisme ? Équilibres dans le secteur des services publics concurrentiels, Petites Affiche, dossier spécial, 10 juillet 1998. v. aussi Jeammaud A., « Introduction à la sémantique de la régulation juridique. Des concepts en jeu », in Clam J. et Martin G. (dir.), Les transformations de la régulation juridique, LGDJ, coll. Droit et société. Recherches et travaux, 1998, pp. 47-72. Dans notre étude, la régulation est employée justement en raison de sa plasticité. C’est un terme qui, à la différence du terme « réglementation », permet de s’abstraire d’une conception du droit restreinte aux règles de droit contraignantes. La régulation inclut les normes produites par d’autres acteurs que l’État ainsi que les litiges qui éludent la médiation étatique. En ce sens, Chevalier J., « La régulation juridique en question », Droit et société, 2001/3, n°49, pp. 827-846. Enfin, dans son acception économique le droit de la régulation comporte ceci d’intéressant qu’il entend rééquilibrer les pouvoirs par la réintroduction d’une médiation tierce, notamment pour les « entreprises cruciales », c’est-à-dire celles qui ont « un rôle structurel déterminant dans un espace essentiel » ; v. Frison-Roche M.-A., « Définition du droit de la régulation », D., 2004, p. 126 et « Réguler les entreprises cruciales », D., 2014, pp. 1556-1563.

80 Jessup P., Transnational Law, Yale University Press, New Heaven, 1956, p. 2 ; « all law which regulates

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Nous qualifierons cette conception du droit transnational des relations de travail, 29.

attachée aux objets sur lesquels portent les sources juridiques, de conception interne. Par ailleurs, la relation de travail doit également être appréhendée au regard d’une transnationalité externe. Cette transnationalité externe repose sur la conception d’ordres juridiques transnationaux, au regard des sources normatives elles-mêmes. La transnationalité des sources découle des acteurs qui produisent les normes ainsi que du champ d’application de ces dernières, qui s’affranchissent tous deux des frontières étatiques.

La transnationalité externe des relations de travail est fondée sur l’absence de référence aux frontières étatiques, que ce soit par la localisation d’un élément du rapport de droit sur le territoire de plusieurs États ou par l’utilisation de la rupture entre les ordres juridiques internes et la réalisation d’une activité dans plusieurs États81. Les sources se déploient en dehors des

frontières d’implantation des sociétés ou de l’État d’accueil. Elles suivent les travailleurs et les sociétés, partout où l’activité se réalise. La transnationalité interne, quant à elle, est fondée sur l’existence, au sein d’un rapport de droit interne, de sources juridiques qui se développent au- delà de l’ordre juridique de l’État d’accueil. La transnationalité interne et la transnationalité externe des relations de travail représentent les dynamiques juridiques qui constituent les soubassements des relations de travail offshore et des moyens leur régulation.

Dans un premier temps, l’analyse du droit transnational des relations de travail offshore 30.

nous conduit à analyser l’objet des relations de travail au regard des parties qui la composent. Les relations de travail sont celles qui lient, selon le paradigme classique du droit du travail, un salarié et un travailleur. Le droit du travail s’est construit autour de la notion de travail subordonné qui qualifie la soumission d’un travailleur à un employeur82 par le contrat de travail.

Or, la perception de la relation de travail à travers le seul contrat ne permet pas de rendre compte des formes de réalisation du travail qui s’établissent en dehors du salariat ni de la complexité des organisations sociétaires dans lesquelles s’inscrivent les relations de travail. D’ailleurs, l’utilisation du terme de « relation de travail » renvoie historiquement à un « socle de

81 On entend par là la stratégie des acteurs de l’industrie offshore qui utilisent les frontières pour en tirer

des profits dans la réalisation de leur activité, et s’en affranchissent lorsqu’il s’agit d’éviter des effets négatifs. Concrètement, il peut s’agir de soumettre un contrat de travail à la loi d’un État aux normes sociales faibles, de créer une société d’investissement soumise à la lex societatis d’un État à la fiscalité avantageuse et d’implanter une autre filiale au sein de l’État d’accueil pour la gestion des opérations.

82 Lequel était confondu avec l’entreprise, plus précisément la société qui correspondait à l’employeur

Introduction

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nature institutionnelle qui est lié à l’appartenance du salarié à l’entreprise »83, se distinguant

par-là de la logique d’une analyse centrée sur le contrat de travail84. Cette première tentative

d’extraire les relations de travail du seul lien entre l’employeur nominal et le salarié à travers la théorie institutionnelle de l’entreprise n’est toutefois pas satisfaisante pour étudier les changements qui affectent les relations de travail offshore. Au premier rang de ces transformations, le droit du travail se heurte à la complexification des techniques sociétaires

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