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Chapitre 3 : Cadre méthodologique

1. Résultats Reconstitution des itinéraires individuels

1.1.1 Cinq points saillants qui participent au façonnage de l’IP d’Eve

1.1.1.2 Le rapport singulier avec l’ATSEM

Eve éprouve des difficultés à organiser ses observations et se tourne vers l’ATSEM, facilement observable et qui a une habitude de la classe.

Extrait de l’ACS du 29.09, UA 10

Elle a déjà une expérience de la maternelle, elle sait ce que peuvent faire les enfants ou pas.

Extrait de l’ACS du 29.09, UA 11

Je pense que elle en voyant, elle peut très bien se dire ah tiens ça ils vont réussir à le faire, ou quand c’est trop difficile, elle va le dire. Ca, c’est l’expérience qui joue, c’est pas la formation ou le niveau intellectuel, ou la formation universitaire (…). Elle a des années d’expérience en maternelle.

L’ATSEM bénéficie de cette expérience qui fait tant défaut à la PEFI et qui, selon elle, lui permet de connaître le niveau des élèves et d’anticiper ce qu’ils sont capables de faire. Dans certains cas, l’ATSEM est simplement consultée, par exemple pour s’assurer qu’elle peut lui donner un autre groupe (ACS du 03.03, UA 2) ou pour avoir son avis sur la difficulté d’un travail à distribuer aux élèves. Par exemple, l’ATSEM lui dit « j’ai regardé la consigne, je me

suis dit ouah, c’est costaud » (ACS du 29.09, UA 10), ce qui lui permet de réajuster le niveau

des travaux suivants. La stagiaire est satisfaite que l’ATSEM donne son avis et ne prend pas cela « comme une critique » (ACS du 29.09, UA 10). « Si y’a des choses que je fais pas

correctement, ou euh si y’a des choses que je lui demande de faire alors que c’est à moi de les faire, euh… qu’elle me le dise » (ACS du 29.09, UA 18).

Dans la classe d’Eve, l’ATSEM peut également être sollicitée pour intervenir auprès des élèves. C’est par exemple le cas, selon Eve, lorsque la titulaire et sa remplaçante sont malades (« du coup, le matin, [les élèves] étaient avec l’ATSEM », ACS du 16.12, UA 14) ou lorsque la PEFI laisse une ATSEM en formation, donc sans expérience, se substituer à elle, enseignante, pour contrôler la classe et reprendre un élève perturbateur.

Extrait de l’ACS du 03.03, UA 7

Ce qui me gêne un peu c’est qu’elle [l’ATSEM en formation] parle plus fort que moi à ce moment là, déjà, euh… bon, c’est vrai que là, c’est moi qui aurais du dire quelque chose, bon, peut-être que si elle avait rien dit j’aurais dit quelque chose, là, je sais pas (…). Je lui ai rien dit pour l’instant, enfin, parce que y’a rien qui m’a, enfin qui m’a choquée outre mesure, (…) mais

euh… non, je pense que les ATSEM ont aussi un rôle à jouer… on va dire dans le calme de la classe, même si c’est moi qui dois normalement, enfin là, c’est moi qui aurais dû intervenir effectivement, mais… mais bon, je veux dire, je vais pas regarder méchamment une ATSEM qui reprend mes gamins. Au contraire, des fois je suis contente, quand il y en a trop qui, qui mettent le boxon dans le couloir par exemple, au contraire, je suis contente quand elles les retiennent un peu, là.

Alors que c’est « normalement » à elle d’intervenir, Eve profite des remarques formulées par l’ATSEM aux élèves pour observer ses manières de faire. Elle parvient à différencier les statuts, mais considère que l’ATSEM est une « personne ressource », une « aide dans la

classe », « surtout en début de carrière » (ACS du 29.09, UA 18). Paradoxalement, la

stagiaire apprend alors son métier à travers l’observation d’une personne expérimentée, mais qui n’est pas du métier, n’a pas le même rôle qu’elle, ni la même formation. De plus, Eve pointe une forme d’expérience que l’ATSEM possède et que la stagiaire n’a pas encore. Elle est « maman ».

Extrait de l’ACS du 29.09, UA 11

En tant que maman elle a déjà vu l’évolution de plusieurs de ses enfants, donc de la naissance à l’âge qu’ils ont maintenant, donc elle sait ce que sont capables de faire les enfants à tel ou tel âge. Bon, en se référant au cas précis de leur enfant, c’est peut-être pas la généralité, mais ça permet quand même déjà de voir une évolution sur le plan physique, sur le plan psychologique, de ce qu’est capable de faire un enfant. (…) L’ATSEM, elle a l’expérience de ses propres enfants, donc, elle sait qu’à trois ans, par exemple, l’enfant il pourra pas dessiner un bonhomme complet, ou… enfin des choses qu’on ne sait pas forcément tant qu’on n’a pas d’enfant.

L’ATSEM cumule donc cette expérience de maman avec son expérience en classe. Selon la PEFI, ce statut lui permet de savoir précisément ce que sont capables de faire les enfants en fonction de leur âge, tant sur les plans « psychologiques » que « physiques ». Elle connaît donc bien les enfants de la classe car elle connaît « les enfants en général ». Eve considère que si l’ATSEM n’appartient pas au métier et ne maîtrise pas le genre, elle l’observe néanmoins de près depuis des années. La stagiaire pense sans doute que celle-ci est capable de dire ce qu’une enseignante est supposée faire, au moins dans certains registres observables en

classe (contrôler les élèves, faire le silence, faire participer, favoriser leur engagement, réaliser ce qui était prévu, etc.). Le rapport singulier d’Eve avec l’ATSEM s’explique aussi par l’attente d’opérations de la stagiaire, c’est-à-dire de manières de faire ; le fait qu’elle cherche à observer la professeure titulaire en est un signe tangible. Or, en présence de l’ATSEM, elle a accès directement aux techniques (par exemple de regroupement, de rappels à l’ordre), aux savoir-faire communs aux deux métiers. Hormis les différences de connaissances (disciplinaires, didactiques, réglementaires), ce qui diffère entre l’activité de l’ATSEM et celle d’Eve se situe au niveau des motifs.

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