• Aucun résultat trouvé

Supply side

1.1.2 Quelques chiffres : contextes genevois et mondial

1.1.2.2 Production et consommation d’énergie dans le monde

Les chiffres qui sont indiqués dans les pages suivantes sont issus du World Energy Outlook 2009 de l’Agence Internationale de l’énergie (AIE). Le World Energy Outlook, publié chaque année et qui fait autorité dans le domaine de l’énergie, propose une représentation modélisée du système énergétique mondial et des différents paramètres qui influenceront son évolution future. A cet égard, souvenons-nous cependant que les modèles se trompent souvent et qu’un scénario – y compris un scénario de référence - n'est jamais qu'une évolution possible, parmi une multitude d'autres.

L'énergie primaire sert à produire de l'électricité, mais elle permet aussi le transport des biens et des personnes, la production de produits agricoles ou industriels, ainsi que le chauffage et la cuisson des aliments. Les besoins en énergie primaire, multipliés par la croissance de la population et de l'économie mondiales ainsi que par les changements de mode de vie, sont en augmentation constante et soutenue, depuis les premiers âges de la révolution industrielle.

De 1973 à 2007, comme le montre le graphique de la page suivante de l'Agence Internationale de l'Energie (AIE/IEA, 2009b), la production mondiale d'énergie primaire a pratiquement doublé, passant de 6.115 Mtoe à 12.029 Mtoe9. La part de l'énergie fossile dans le total a décru quelque peu, passant de 86,6% à 81,4%. La différence est comblée par l'énergie nucléaire qui passe de 0,9% à 5,9%. Le pourcentage d'énergies renouvelables (hydraulique, biomasse et déchets, et autres10) est resté constant, à environ 12% du total.

9 Millions de tonnes équivalent pétrole, l'unité de mesure commune à toutes les formes d'énergie primaires.

10 La catégorie "autres", qui est passée de 0,2 à 1,1% de 1973 à 2007, comprend les énergies solaire, éolienne, chaleur et géothermique. Il faut noter que l'expression "combustible renewables" fait référence surtout aux forêts, dont le bois est brûlé pour le chauffage ou la cuisson des aliments.

Figure 7 – IEA (2009b, p. 5). World Total Primary Energy Supply by Fuel

Dans les pays de l'OCDE, l'augmentation durant la même période n'est "que" de 46%, mais la progression du nucléaire est assez spectaculaire (qui passe de 1,3 à 10,9%

du total), tandis que la part de l'ensemble des renouvelables dans le total progresse de moins de 3%, en passant de 4,6% en 1973 à 7,2% en 2007 du total de l'offre d'énergie (IEA, 2009b).

Figure 8 – IEA (2009b, p. 24). Evolution from 1971 to 2007 of world electricity generation by fuel (TWh)11

La demande globale d'énergie primaire va continuer de croître à l'avenir. Pour la période 2007-2030, les projections du World Energy Outlook 2009 montrent une

11 ”Other includes geothermal, solar, wind, combustible renewable& waste, and heat” (IEA, 2009 b., p. 24).

persistence de la tendance forte à l'augmentation de la demande mondiale d'énergie, comme l'illustre le graphique ci-dessous12, moins forte cependant que celle qui a marqué les 35 ans de la période 1973-2007.

Figure 9 – IEA (2009a, p. 75). World primary energy demand by fuel in the reference scenario.

Les éléments les plus importants à relever dans le graphique ci-dessus sont les suivants : de 2007 à 2030, la demande mondiale d'énergie primaire augmente d'environ 35% (après une baisse en 2009, qui est dûe aux répercussions économiques de la crise financière). La hausse la plus importante en volume est celle de la demande de charbon qui croît à un taux annuel de 1,9% (plus de la moitié de cette demande future est d'origine chinoise, la Chine étant le 1er producteur mondial de charbon), suivie par le gaz naturel (1,5% de hausse annuelle) et le pétrole. La demande pour les "nouvelles" ou "modernes"

énergies renouvelables (énergies éolienne, solaire, géothermale, marée motrice et vagues, par opposition à la classique énergie renouvelable hydraulique) augmente fortement en volume, mais elle reste marginale dans le total, passant de 1% de la demande mondiale d'énergie en 2007 à 2% en 2030. Par conséquent, en 2030, selon le scénario de référence de l'AIE, les énergies fossiles restent de loin les sources d'énergie dominantes : leur part en volume dans la demande mondiale d'énergie primaire reste stable à 80% (en baisse de 1% par rapport à 2007). La part du pétrole, première énergie en volume, baisse de 34% à

12 IEA, 2009a, p. 75.

30%, tandis que celle du charbon, deuxième énergie en volume, augmente de 27 à 29%13. Selon les projections du scénario de référence du weo2009 (IEA, 2009a, p. 76), 90% de la hausse de la demande pendant la période 2007-2030 a lieu dans les pays non-membres de l'OCDE (en particulier la Chine et l'Inde).

En ce qui concerne l’électricité, les chiffres sont encore plus impressionnants. En effet, pendant que la production d'énergie primaire doublait, entre 1973 et 2007, la production mondiale d'électricité faisait plus que tripler, comme le montre le graphique de la page suivante, alimentée en particulier par une forte demande dans les pays non-OCDE. Durant cette période, la part de l'OCDE dans le total a en effet diminué de 72,9%

à 53,9%, tandis que celle de la Chine passait de 2,8% à 16,8%. Les chiffres sont bien sûr très différents d'un pays à l'autre. En voici quelques exemples pour l'année 2007 qui donnent un ordre de grandeur en matière de consommations14 : Suisse 61,64 TWh15, Allemagne 591,03 TWh, Russie 897,68 TWh, Chine 3.072,67 TWh, USA 4.113,07 TWh.

Comme celle de la demande d'énergie primaire, la hausse globale de la demande d'électricité est liée à celle de la population mondiale et à la croissance économique, ainsi qu'aux changements de mode de vie. Cependant, en 2007, 1,5 milliard d'habitants de la planète n'ont toujours pas accès à l'électricité (weo 2009a, p. 109). En Suisse en 2007, la consommation d'électricité à augmenté de 2,3%16.

Comme on le voit à la lecture du graphique ci-dessous, la génération d'électricité au niveau mondial est basée sur l'utilisation intensive d'énergies fossiles (charbon, gaz, pétrole), bien que leur part dans le total soit en baisse : 68% en 2007 contre 75,1% en 1973. En ce qui concerne le mix énergétique utilisé pour produire l'électricité, les évolutions marquantes sont les suivantes : remplacement du pétrole par le gaz naturel ou par le nucléaire, augmentation légère de la proportion du charbon dans le total, baisse

13 IEA weo 2009, pp. 97-98.

14 La consommation d'électricité est égale à la production brute (qui inclut la consommation des centrales pour compte propre) + imports – exports – pertes de transmission/distribution.

15L'unité de mesure de l’électricité est le watt. Un kilowatt représente 1.000 watts ; l’électricité qu’une centrale produit ou qu’un utilisateur consomme sur une période de temps donnée est mesurée en kilowattheure (KWh) : un kilowattheure est égal à l’énergie de 1000 watts consommée en une heure. Un megawattheure (MWh) est égal à un million de wattheures, un gigawattheure est égal à un milliard de wattheures et un tetrawattheure (TWh) est égal à un trilliard de wattheures.

16 Office fédéral de l'énergie (OFEN), Statistique suisse de l'électricité 2008, Berne

sensible de l'énergie hydraulique (qui passe de 21% à 15,6%), légère progression des autres renouvelables.

Figure 10 - IEA (2009b, p. 24). 1973 and 2007 fuel shares of electricity generation.

A nouveau bien sûr ces chiffres masquent de grandes différences de mix énergétique d’un pays à l’autre : par exemple, en 2007 (IEA, 2009b), près de 80% de l’électricité produite en France est d’origine nucléaire (57 centrales), alors que 98,2% de l'électricité produite en Norvège et 84% de l'électricité produite au Brésil sont de source hydraulique. Quant aux USA, plus de 48% de l'électricité y est produite dans des centrales thermiques fonctionnant au charbon17. En 2007, selon l'Office fédéral de l'énergie, le mix énergétique de la production d'électricité en Suisse était le suivant : énergie hydraulique, 56,1%, énergie nuclaire 39%, énergies fossiles (production thermique classique) 4,9%. Les chiffres suisses sont très différents des moyennes européennes (EU/CE-15): énergie hydraulique 10,9%, énergie nuclaire 29%, énergies fossiles (production thermale classique) 56,2%, autres énergies renouvelables 3,9% (3,7%

énergie éolienne, 0,2% géothermie)18.

17US Energy Information Administration,

http://tonto.eia.doe.gov/energyexplained/index.cfm?page=electricity_in_the_united_states

18 Office fédéral de l'énergie (OFEN), Statistique suisse de l'électricité 2008, Berne

Les évolutions prévues dans le domaine de l’électricité sont également spectaculaires. Durant la période 2007-2030, la production d'électricité19 progresse de près de 41%, dans le scénario de référence du weo2009, soit une hausse moyenne annuelle de 2,5%. Le charbon reste la "colonne vertébrale" du système électrique mondial, selon la formule de l'AIE, sa part dans le mix énergétique passant de 42% en 2007 à 44% en 2030. La part des renouvelables non-hydrauliques progresse sensiblement, de 2,5% en 2007 à 9% en 2030. Le nuclaire progresse dans toutes les régions, à l'exception de l'Union européenne (cependant le regain d'intérêt pour le nucléaire qu'on constate actuellement dans plusieurs pays européens pourrait changer cette tendance) mais sa part dans le mix énergétique global est quand même en baisse. Le graphique de la page suivante illustre ces tendances.

Figure 11 - IEA (2009, p. 97), weo 2009.

Plus de 80% de la hausse de la production d'électricité est alimentée par la demande croissante de pays non-membres de l'OCDE, au premier rang desquels la Chine (dont la demande progresse d'environ 14% par an depuis plusieurs années). Le tableau ci-dessous indique les projections d'augmentations par région selon le scénario de référence du WEO 2009 (hausse moyenne annuelle composée). On voit que la hausse de la

19 La production d'électricité inclut la demande finale d'électricité, les pertes de transport sur le réseau, l'utilisation pour compte propre des centrales électriques et "l'autre secteur énergétique" (IEA, 2009a, p.

97).

demande d'électricité dans les pays asiatiques est projetée partout comme étant supérieure à 4,5% par an.

Figure 12 - Figure 9. IEA (2009, p. 96), Final electricity consumption by region in the Reference Scenario (TWh), WEO 2009.

En résumé, on peut dire que les évolutions les plus importantes pour les 20 prochaines années, à retenir du scénario de référence du weo2009, sont les suivantes : augmentation de la demande d'énergie primaire de 35% avec un pourcentage d'énergies fossiles stable dans le total à environ 80%, augmentation de la production d'électricité de 41%, augmentation de la part du charbon dans le mix énergétique mondial (29% de la demande mondiale d'énergie primaire, en 2ème place derrière le pétrole, 44% du mix de génération d'électricité, à la 1ère place, très loin devant le gaz naturel).

Comme nous le rappelle l'AIE (weo 2009, p.75), le scénario de référence du World Energy Outlook "provides a baseline picture of how global energy markets would evolve if the underlying trends in energy demand and supply are not changed".

Autrement dit, il décrit un futur dans lesquels les gouvernements ne font aucun

changement dans les politiques existantes, qui sont susceptibles d'affecter le secteur de l'énergie. Les projections de ce scénario ne peuvent donc en aucune façon être interprétées comme des prévisions de ce qui se passera réellement, dans la mesure où il devient de "plus en plus probable" que les gouvernements prendront des mesures rigoureuses pour relever les défis énergétiques qui se posent. En particulier, "le changement climatique pourrait devenir le moteur principal des politiques dans ce domaine dans les prochaines décades"20. Cette déclaration, formulée avant la 15ème Conférence des parties (COP) de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques21, qui s'est tenue à Copenhague en décembre 2009 avec l'objectif de définir un "après-Kyoto 2012", peut sembler optimiste en regard de l'incapacité que les Etats ont montrée à s'entendre sur des objectifs ambitieux, précis et contraignants de réduction des gaz à effet de serre (GES). Pourtant les défis énergétiques à relever sont de taille, comme nous allons le voir maintenant, et les tendances actuelles du système énergétique mondial les amplifient au lieu de les réduire.