• Aucun résultat trouvé

L’essor des télécommunications par satellite a suscité un grand enthousiasme auprès des peuples du monde entier pour les multiples bienfaits qu’elles pouvaient amener aux pays industrialisés aussi bien qu’à ceux en développement. Quant aux utilisations civiles, elles étaient perçues surtout comme un service public. Il n’était donc pas difficile de faire adopter à l’unanimité de grands principes qui reflétaient cet esprit : «les nations du monde doivent pouvoir .... communiquer au moyen de satellites sur une base mondiale et non discriminatoire »107, adoptés à l’unanimité par l’Assemblée générale des Nations Unies lors de sa 1085e séance en 1961. Pour réaliser ce projet ambitieux, un premier pas a été fait par le groupe d’Etats qui a créé le consortium INTELSAT en 1963, transformé par la suite en l’organisation intergouvernementale INTELSAT. Comme nous l’avons vu, INTELSAT a repris ce principe fondamental dans son préambule et affirmé que son objectif premier était « la fourniture … sans discrimination, à toutes les régions du monde … des services publics de télécommunications internationales108 de haute qualité et de grande

106

www.eutelsat.com, avril 2007 107

Résolution 1721 (XVI) (D) de l’Assemblée générale des Nations Unies. 108

Accord INTELSAT, article I (k) les termes «services publics de télécommunications » désignent les services de télécommunications fixes ou mobiles qui peuvent être assurés par satellites et qui sont accessibles aux fins d’utilisation par le public».

fiabilité»109. Dans le système INTELSAT, les termes ‘services publics de télécommunications’ désignent « les services de télécommunications fixes ou mobiles qui peuvent être assurés par satellites et qui sont accessibles aux fins d’utilisation par le public».110

Des dispositions semblables ont été incorporées dans la Convention INMARSAT.111 Les deux organisations intergouvernementales ont été des fournisseurs de services internationaux avec leur propre personnalité juridique et par conséquence uniquement sujets au droit international.112

Pendant de nombreuses années, « service public »113 était associé à « monopole », d’après l’idée que seule la puissance publique était en mesure d’accorder à tous les citoyens certains droits dans les mêmes conditions.114

La libéralisation des marchés nationaux, en permettant la création de « systèmes séparés », a forcé la privatisation des organisations intergouvernementales de télécommunications par satellite. La pluralité d’entreprises dans le domaine des services de télécommunications par satellite devait créer des marchés plus dynamiques et procurer des avantages à l’industrie et aux consommateurs.115

Comme nous venons de le voir, du démantèlement d’INTELSAT et d’INMARSAT sont sorties des sociétés privées telles que New Skies sans aucun devoir de service public et d’autres comme Intelsat, Ltd. et Inmarsat, Ltd. avec l’obligation de fournir 109

Accord INTELSAT, article III(a). 110

Ibid., article I(k). 111

Convention INMARSAT, article 7(1). 112

Jakhu, Ram, “Emerging legal Issues of Satellite Telecommunications and Broadcasting”, Proceedings of the 43rd Colloquium on Outer Space, 2000, pp, 428-432.

113

Certains auteurs font une distinction entre « service public » et « service au public » : ainsi F. Lyall, dans “The Protection of the Public Interest in the Light of the Commercialisation and Privatisation of the Providers of International Satellite Telecommunications”, op. cit., p. 44: « The provision of a service to the public is not the same as the provision of a public service. A ‘service to the public’ is intended to be profitable. A public service need not be profitable or economic, but it is provided in the public interest, and as needed its costs may be defrayed either by direct grant or by cross-subsidy from profitable activities within the business of the provider as a whole.” L’UIT cependant a souligné l’importance du service public dans sa Constitution: “Les Etats Membres reconnaissent au public le droit de correspondre au moyen du service international de correspondance publique. Les services, les taxes et les garanties sont les mêmes pour tous les usagers, dans chaque catégorie de correspondance, sans priorité ni préférence quelconque”.(Art. 33, Droit pour le public d’utiliser le service international de télécommunication.) De plus, l’UIT a pour objet “de favoriser le développement de moyens techniques … généraliser le plus possible leur utilisation par le public”, (CS, chap. I, art. 1(c)).

114

Bensoussan, Alain, Les télécoms et le droit, Paris, Hermes, 2e éd., 1996, pp. 137 et ss. 115

Timms, Stephen, « Un nouveau plaidoyer pour la libéralisation », Nouvelles de l’UIT n° 10, octobre 2003, pp. 25-27.

des services publics.

Cependant, même pour les nouvelles sociétés privées ayant des obligations de services publics, ces derniers ne constituent plus une priorité et elles n’y dédient qu’une partie indispensable de leurs réseaux. Le but principal de leur activité est, comme pour toute autre entreprise privée, de maximiser les gains. Il est vrai qu’il y a les « organisations de surveillance » mais il leur sera difficile d’exiger des services le jour où ces sociétés se trouveraient dans des difficultés financières ou même en faillite.

Ces nouvelles sociétés privées de télécommunications par satellite sont sujettes aux lois des Etats où elles sont enregistrées. Inmarsat, Ltd. a son siège à Londres et est donc sujette à la législation du Royaume Uni. Les fréquences lui sont attribuées par l’Etat britannique, ce qui signifie qu’une autorité régulatrice nationale octroie une autorisation globale. D’après certains auteurs, c’est ce paradoxe qui explique le fait qu’à l’heure actuelle, les opérateurs globaux rencontrent des difficultés importantes dans leurs relations avec les autorités nationales. Ces auteurs suggèrent la création d’une Organisation Mondiale de l’Espace sous la responsabilité de laquelle les opérateurs globaux de satellites devraient s’enregistrer et envers laquelle ils seraient responsables. L’UIT ne peut pas offrir ce type d’engagement, car elle n’est qu’une organisation technique.116 Des réformes ont été proposées pour restructurer l’UIT, mais jusqu’à présent les modifications nécessaires pour pouvoir assumer ce rôle n’ont jamais été effectuées.117

Face à cette réalité, qui ne colle plus aux idéaux de la période d’avant la privatisation, il faut envisager de nouvelles solutions pour protéger l’intérêt public d’une façon adaptée aux conditions de marché actuelles.

Dans la logique des économies de marché, la privatisation des activités profitables telles que les télécommunications par satellite semble être un parcours obligé. Cependant, cela ne devrait pas empêcher la co-existence de certains services d’intérêt public fondamental, offerts par les Etats au niveau national et international.

116

Salin, Patrick A., « Une menace directe sur l’espace extra-atmosphérique : Les conséquences juridiques et institutionnelles de la privatisation et de la militarisation des activités spatiales », Annals of Air and Space Law, vol. XXV, 2000, pp. 216-217.

53 117

Schrogl, Kai-Uwe, „Die Strukturreform der ITU: Auswirkungen auf die Entwicklung der Weltraumnutzung und des Weltraumrechts?“, ZLW n° 2, 1993, pp. 182-193.

CHAPITRE II

LES INSTANCES REGULATRICES ET COORDINATRICES DE L‘ESPACE EXTRA-ATMOSPHERIQUE ET DES TELECOMMUNICATIONS SPATIALES 1. L’Assemblée générale de l’Organisation des Nations Unies

Pour réglementer l’espace aérien et les activités qui s’y déroulent, on se référera à la Convention de Chicago de 1944. Cependant le droit aérien n’est pas applicable à l’espace extra-atmosphérique ni aux techniques spatiales, car il ne réglemente que la circulation dans l’atmosphère des aéronefs qui s’y tiennent grâce aux réactions de l’air.

Vu l’inapplicabilité des normes relatives aux domaines terrestre, aérien et maritime à l’espace extra-atmosphérique, il fallait élaborer des règles et des lois nouvelles pour combler les lacunes dans ce nouveau domaine du droit international. Cependant, le développement progressif de cette branche du droit international n’a pas emprunté la voie traditionnelle de la Commission du droit international mais celle d’un organe politique.118

Dans ce processus, l’acteur principal a été jusqu’à présent l’Organisation des Nations Unies qui tient ce rôle de la Charte des Nations Unies : « L’Assemblée générale provoque des études et fait des recommandations en vue de … encourager le développement progressif du droit international et sa codification.»119

Effectivement, à peine quarante jours après le lancement du premier engin, le satellite soviétique Spoutnik, le 14 novembre 1957, l’Assemblée générale s’est prononcée concernant l’espace et les activités spatiales dans sa première résolution relative à l’espace. Dans cette Résolution120, elle a exprimé ses préoccupations à propos des dangers d’une utilisation militaire de l’espace et a recommandé que l'utilisation de l'espace soit entreprise « à des fins exclusivement pacifiques». A l’époque, les deux superpuissances, les Etats-Unis et l’Union Soviétique, se

118

Dutheil de la Rochère, Jacqueline, Droit de l’espace, Paris, Pedone, 1988, p.15. 119

Charte des Nations Unies, art. 13(a). 120

trouvaient en pleine guerre froide. C’est pourquoi l’Assemblée générale a d’abord voulu aborder le régime juridique de ce qu’on appelait alors « l’espace extérieur » sous l'angle de la limitation des armements (1956-59).

Un premier signe de détente dans les relations Est-Ouest a été la signature du Traité interdisant les essais d’armes nucléaires dans l'atmosphère, dans l'espace extra- atmosphérique et sous l’eau, effectuée à Moscou le 5 août 1963. D’autres instruments seraient nécessaires pour freiner la militarisation grandissante de l’espace.121 Une analyse approfondie de ce phénomène a été conduite récemment au sein de l’Institut des Nations Unies pour la recherche sur le désarmement qui suggère, entre autres, l’établissement d’une organisation internationale pour la sécurité commune dans l’espace extra-atmosphérique.122 De plus en plus d’auteurs s’occupent de questions liées à la militarisation de l’espace123 et depuis peu, il y a une nouvelle revue disponible sur le web et dédiée exclusivement à ce sujet.124

2. Le Comité des utilisations pacifiques de l'espace extra-atmosphérique

Outline

Documents relatifs