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LES ETAPES DE LA REGLEMENTATION DES TELECOMMUNICATIONS SPATIALES DU DEBUT DES ACTIVITES JUSQU’EN

Dans les années cinquante, de grands progrès technologiques ont amené rapidement un nombre toujours plus grand d’applications ayant besoin de fréquences radioélectriques, qu’il s’agisse de la navigation aérienne et maritime ou de la téléphonie hertzienne, des recherches scientifiques ou de la radiodiffusion par satellite. Et comme les services utilisant les radiocommunications ne peuvent fonctionner correctement s’ils sont victimes de brouillages préjudiciables causés par d’autres services, le cadre réglementaire a dû être constamment modifié pour l'adapter à l'évolution de la situation.

Vers l’année 1952, des groupements scientifiques avaient décidé d’organiser une année scientifique, intitulée « Année géophysique internationale », en vue d’étudier pendant une année entière, avec des moyens énormes, l’environnement de la Terre : comment est constitué ce que l'on appelle l'espace, quels sont les rayons qui y circulent et leurs impacts sur la vie sur la Terre. Les savants avaient choisi pour cette étude l'année 1957-1958 à cause de l'activité plus importante du soleil pendant ladite période. Au cours de la Deuxième Guerre mondiale et après cette guerre, des progrès importants avaient été réalisés dans les fusées. Aussi, le Comité préparatoire de l'Année géophysique internationale avait suggéré en 1955 d'utiliser des satellites artificiels pour contribuer efficacement au programme de recherches.

Les deux premiers satellites ont été soviétiques, le premier lancé le 4 octobre et le deuxième le 3 novembre 1957, avec à bord Laika, le chien devenu célèbre dans le monde entier. Après un premier échec en décembre 1957, les Américains ont réussi à lancer leur premier satellite en janvier 1958.

Comme nous le savons, pour que des satellites puissent transmettre les renseignements recueillis, des liaisons radio sont indispensables, soit pour situer un satellite dans l'espace par des procédés de télémesure, de télélocalisation ou de

poursuite, soit pour l'interroger par télécommande ou pour recevoir à Terre les observations faites par les instruments contenus dans ce satellite. Pour le fonctionnement de ces liaisons, il faut avoir à disposition ce que l'on appelle des fréquences.

Or, en 1957, aucune fréquence n'avait encore été prévue pour des utilisations spatiales. Par conséquent, l'Union soviétique d'un côté, les Etats-Unis de l'autre, ont choisi des fréquences appartenant à d'autres services, ce qui a occasionné naturellement des brouillages.541

Dans les années suivantes, de grands progrès technologiques ont amené rapidement un nombre toujours plus grand d’applications ayant besoin de fréquences radioélectriques, qu’il s’agisse de la navigation aérienne et maritime ou de la téléphonie hertzienne, des recherches scientifiques ou de la radiodiffusion par satellite. Et comme les services utilisant les radiocommunications ne peuvent fonctionner correctement s’ils sont victimes de brouillages préjudiciables causés par d’autres services, le cadre réglementaire a dû être constamment modifié pour l'adapter à l'évolution de la situation.

Vu le rapide progrès des techniques spatiales, l’Assemblée générale des Nations Unies a commencé à s’occuper de ces problèmes en créant en décembre 1958 le Comité ad hoc des utilisations pacifiques de l'espace, qui a recommandé, dès sa première session en juin 1959, que l'UIT réserve aux télécommunications spatiales les fréquences nécessaires pour les besoins prévisibles des recherches pendant les trois années successives.542

L’UIT traite le problème de la répartition des fréquences à travers ses Conférences mondiales des radiocommunications (CMR), précédemment appelées « Conférences administratives mondiales des radiocommunications » (CAMR). Ces Conférences définissent et modifient les dispositions du Règlement des radiocommunications, traité international juridiquement contraignant qui régit l’attribution et l’utilisation du

541

Pépin, Eugène, « Les télécommunications par satellites », Cours à l’Université de Paris 1965- 1966, p.5.

542

Résolution 1721(XVI).

spectre des fréquences radioélectriques pour plus de 40 différents services dans le monde. Trouver des solutions pour assurer efficacité d’utilisation et équité d’accès aux ressources fréquences-orbites est resté au centre du travail des Conférences de radiocommunications.543

Ci-après nous allons illustrer quelques résultats importants obtenus au cours des Conférences des Radiocommunications et des Conférences de Plénipotentiaires.

1. La Conférence des Radiocommunications de 1959

Pour mettre un peu d’ordre dans le secteur des activités spatiales, une conférence des radiocommunications fut convoquée à Genève en juin 1959. Pour la première fois un "service spatial" fut établi par le Règlement des radiocommunications, et pour la première fois des fréquences étaient attribuées aux télécommunications spatiales, mais exclusivement pour les satellites de recherche scientifique.544

La Conférence devait également faire face à la question de savoir si un spectre planifié était réalisable. Dans les douze années écoulées depuis la Conférence d’Atlantic City, il n’y avait pas eu de progrès significatif dans ce sens. Déjà les demandes de fréquences faites à l’UIT dépassaient largement l’offre de fréquences alors utilisables et aucun accord ne pouvait être conclu pour résoudre ce problème des demandes conflictuelles. Certains Etats, comme l’Union Soviétique, étaient d’ailleurs contre ce projet car ils le considéraient comme une atteinte à leur souveraineté.545

Il devenait donc évident qu’un spectre complètement planifié n’était pas envisageable. C’est pourquoi que la question des plans d’allocation fut abandonnée pour être reprise seulement bien plus tard, à la CAMR de 1977.

543

White/Lauria-White : “Evolving Principles of Space Communication Regulation in the ITU : 1959- 1985”, Proceedings of the 31st Colloquium on the Law of Outer Space, 1988, p. 304.

544

Jakhu, Ram, “The Evolution of the ITU’s Regulatory Regime Governing Space Radiocommunication Services and the Geostationary Orbit”, Annals of Air and Space Law vol. VIII, 1983, pp. 394-395.

545

Leive, David, International Telecommunications and International Law : The Regulation of the Radio Spectrum, Leyde, Sijthoff, 1970, p. 68.

La Conférence de 1959 s’est cependant bien rendue compte qu’il y avait intérêt à étudier la question de l’identification des émissions radioélectriques en provenance des satellites artificiels et autres véhicules spatiaux et à inviter « les Membres et Membres associés de l’Union qui lancent des satellites ou d’autres véhicules spatiaux … à présenter les résultats de leurs études aux C.C.I.R. »546 Vu la nécessité de s’occuper de ce nouveau domaine d’activité, la Conférence a recommandé que le Conseil d’administration examine la situation au cours de ses sessions ordinaires de 1962 et de 1963 et convoque une Conférence administrative extraordinaire des radiocommunications s’il la considérait « suffisamment justifiée ».547

En effet, les progrès dans les activités spatiales ne se faisaient pas attendre. Le 10 juillet 1962 fut lancé Telstar 1, le premier satellite à transmettre en direct une émission télévisée ainsi que la première conversation téléphonique.548

Le Conseil d’administration examina la question et décida qu’une telle conférence549 se réunirait à Genève le 7 octobre 1963. Avec l’accord préalable de la majorité des membres de l’Union, il fixa l’ordre du jour.

2. La Conférence administrative extraordinaire des radiocommunications spatiales de 1963

La tâche principale de cette Conférence était de décider des attributions des bandes de fréquences indispensables aux différentes catégories de radiocommunications spatiales. Elle a défini de nouveaux services spatiaux et leur a attribué plus de 6,000 MHz sur une base exclusive ou partagée.550 Ainsi on a passé d’une attribution de seulement 1% en 1959 du spectre de fréquences aux services spatiaux à 15% en 1963.

Tout cela a comporté une révision partielle du Règlement des radiocommunications, avec l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions le premier janvier 1965.551

546

Résolution N° 7 relative aux émissions radioélectriques des satellites artificiels et autres véhicules spatiaux, Actes finals, CAMR-1959, Genève.

547

Recommandation N° 35 relative à la convocation d’une Conférence administrative extraordinaire des radiocommunications chargée d’attribuer des bandes de fréquences pour les

radiocommunications spatiales, Actes finals, CAMR-1959, Genève. 548

Labrador, Virgil S., Galace, Peter I., Heavens fill with Commerce – A Brief History of the Communications Satellite Industry, Sonoma, Satnews Publishers, 2005, pp. 41-42.

549

Conseil d’administration UIT, Résolution N° 524, Session 1963. 550

Actes finals de la Conférence administrative extraordinaire des radiocommunications spatiales, Genève, 1963.

551

Actes finals Conférence administrative extraordinaire des radiocommunications chargée d’attribuer

Face à cette rapide évolution technologique, et vu la règle « premier arrivé – premier servi », les pays en développement ont commencé à être préoccupés quant à leurs possibilités d’accès à ces ressources le jour où ils auraient eu les moyens de le faire. C’est pourquoi ils ont souhaité un changement du Règlement des radiocommunications concernant la notification et l’enregistrement pour les services spatiaux. Cependant, les pays déjà actifs dans l’espace et d’autres pays industrialisés se sont opposés à cette proposition. Finalement, c’est le point de vue de ces derniers qui l’a emporté. Seulement une nouvelle procédure de coordination a été rajoutée aux règles déjà existantes concernant les fréquences partagées avec d’autres services.552

Le point de vue des pays en développement a été exprimé dans la Recommandation N° 10A de la Conférence. Dans cette Recommandation, la Conférence a fait référence aux Résolutions 1721 (XVI), partie D, et 1802 (XVII), partie IV.3, de l’Assemblée générale des Nations Unies, où il est affirmé que les systèmes de télécommunications par satellite doivent être organisés sous forme mondiale et d’une manière telle que tous les pays puissent y avoir accès sans aucune discrimination. De plus, la Conférence a reconnu dans cette Recommandation le droit de tous les pays à « une utilisation équitable et rationnelle des bandes de fréquences attribuées aux communications spatiales » et que « l’utilisation et l’exploitation des bandes de fréquences attribuées pour les radiocommunications spatiales soient soumises à des accords internationaux fondés sur des principes de justice et d’équité et de nature à permettre l’utilisation et le partage de ces bandes dans l’intérêt mutuel de toutes les nations »553. La Conférence de 1963 a établi les services spatiaux avec le même régime que les autres services, mais avec l’introduction du nouveau concept d’ « accès équitable » aux ressources de l’espace. Ainsi s’est mis en marche un mouvement qui a conduit finalement aux conférences de planification de l’orbite géostationnaire des années 1985 et 1988.554

des bandes de fréquences pour les radiocommunications spatiales.

552

Smith, op. cit., pp. 59-60. 553

Recommandation N° 10A relative à l’utilisation et au partage de fréquences attribuées par les radiocommunications spatiales, Actes finals, Conférence administrative extraordinaire des radiocommunications spatiales, Genève, 1963.

554 Ibid.

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