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PRÉSENTATION DES CHAPITRES

La thèse est organisée en trois parties. La première partie est une section de contextualisation qui nous aide à cerner le cadre historique des dynamiques familiales et des politiques de l‟enfance depuis l‟époque précoloniale jusqu‟à nos jours. Le chapitre 2 est consacré aux dynamiques familiales. Dans ce chapitre, je prends en considération le rôle traditionnellement confié aux enfants depuis l‟époque précoloniale, durant la période coloniale et postcoloniale. En ce qui concerne la période coloniale, l‟analyse se concentre sur les politiques de l‟enfance et de la famille dans le cadre de la stabilisation de la main d‟œuvre à l‟Union Minière du Haut-Katanga (UMHK). Il est démontré par plusieurs études que les politiques de l‟UMHK ont façonné un idéal de famille dont l‟influence,

fût-elle en termes de continuité ou de rupture, s‟est étendue sur toute la province du Katanga et jusqu‟à nos jours. Il sera aussi question, dans cette section, d‟évoquer les dynamiques familiales les plus récentes. En effet, après le boom minier des années 2000, dont les conséquences se sont manifestées à partir des années 2005 et 2006, il apparaît peu opportun de parler de « crise » tout court. L‟environnement socio-économique lushois ne se caractérise plus seulement par un processus de déclin industriel. Le boom minier des années 2000, résultat de la libéralisation du secteur minier katangais, a mis en marche une période de croissance économique dont les revenus et les bénéfices semblent bénéficier à une petite portion de la population. Les rubriques ayant trait aux caractéristiques de la cohabitation, des dépenses ordinaires et extraordinaires, de la composition des ménages, etc., présentées dans cette partie montrent que nous assistons à une réconfiguration socio-économique des dynamiques familiales urbaines, qui creusent des distances entre les familles les plus pauvres et celles plus nanties.

Le chapitre 3 est consacré à l‟histoire de l‟implantation de la congrégation salésienne de Don Bosco au Kantanga. Les Salésiens ont une longue histoire au Congo compte tenu qu‟ils s‟y sont installés depuis 1911. Leur présence a fortement influencé, au cours du siècle passé, les idées liées à l‟enfance et aux pratiques d‟éducation des enfants. Nous allons constater que l‟évangélisation des Salésiens, mais on pourrait peut-être étendre le discours à l‟Église catholique plus en général, visa les enfants et les jeunes comme cibles préférentielles. À l‟époque coloniale, le Noir était considéré comme incapable à se « civiliser » et donc incapable de se convertir réellement aux principes chrétiens. C‟est pour cette raison que les efforts des religieux s‟adressèrent aux plus jeunes : enfants et jeunes se trouvaient dans une phase de la vie durant laquelle ils pouvaient être « encadrés » selon l‟éducation et la scolarisation occidentales et espérer ainsi devenir des « évolués ». Dans le chapitre 4, nous verrons les conceptions de l‟enfance qui se sont façonnées dans les politiques les plus récentes.

La deuxième partie de la thèse s‟attache à étudier les dispositifs sociaux qui entraînent les accusations de sorcellerie envers les enfants. Cette partie s‟ouvre par le chapitre 5, où j‟ai analysé la vie des enfants à Bakanja Ville et la construction, de la part des enfants de la rue, d‟une sous-culture qui leur est propre. La sous-culture des sheges (enfant de la rue) est largement interprétée par la population dans les termes de la

42 sorcellerie. Dans l‟avancement de la recherche, j‟ai progressivement réalisé que la plupart des observateurs, nationaux et étrangers, qui s‟occupent de ces sujets avaient tendance à concevoir la sorcellerie comme la cause principale de l‟augmentation des enfants de la rue dans les villes de la RDC (Human Rights Watch 2006 ; Save the Children 2005; UNICEF 2009, 2010). En même temps, je me demandais si on ne pourrait pas prendre en considération la dynamique inverse : dans quelle mesure les enfants de la rue, à travers leur manière de vivre et de se comporter, correspondent-ils bien à l‟imaginaire de la sorcellerie.

Le chapitre 6 est consacré aux nouvelles Églises de la mouvance néopentecôtiste et du « réveil africain ». Au cours des années quatre-vingt-dix, on a assisté au « réveil africain » qui a favorisé la naissance d‟un nombre impressionnant d‟Églises « hybrides » appelées néopentecôtistes, de réveil, indépendantes, de guérison. Ce sont ces dernières entités qui sont engagées dans les « combats spirituels » entre Dieu et satan et dans lequel les enfants et les jeunes se trouvent être à la fois des belligérants et des victimes. Ce chapitre s‟occupe ainsi d‟esquisser les lignes d‟action et l‟idéologie qui demeurent à la base du succès de ces nouveaux acteurs religieux. Ensuite, le chapitre prend en analyse les différentes sociabilités qui se construisent au quotidien dans les lieux de ces institutions religieuses d‟un point de vue ethnographique. En dernière analyse, je présente l‟exemple d‟une église néopentecôtiste : la vie des croyants qui la fréquentaient, la place des jeunes dans cette église et, enfin, un cas d‟étude portant sur la délivrance d‟une enfant.

La troisième partie s‟attaque à trois études de cas. Le chapitre 7 est consacré à l‟histoire de Jérôme. Le cas de Jérôme montre bien les difficultés de recomposition d‟un foyer dans un contexte de forte précarité. La première section de ce chapitre revient sur la question de la relatedness. Je tente d‟expliquer comment les pratiques qui créent les liens familiaux se réalisent à Lubumbashi. Le cas de Jérôme, ensuite, montre bien de quelle façon ces mêmes pratiques sont inversées lorsqu‟elles sont prises par le dispositif de la sorcellerie. Dans les sections suivantes du septième chapitre, j‟ai tenté d‟explorer les itinéraires des acteurs sociaux dans leur vie quotidienne tout comme dans les stratégies

mises en place pour faire face aux problèmes concernant les enfants, la maladie, la mort et le divorce.

Le chapitre 8 propose une autre étude de cas, celle des deux frères Valina et Junior. Cette étude de cas focalise l‟attention sur certains éléments qui sont au centre des accusations de sorcellerie dont les enfants font l‟objet. Si, dans le chapitre consacré à Jérôme, l‟axe de l‟inversion opéré par le discours sorcellaire émerge plus clairement, il me semble, à l‟aide du cas de Valina et Junior, mettre en évidence l‟axe de la « contagion » des enfants par « le virus » de la sorcellerie.

La troisième étude de cas, chapitre 9, est l‟histoire de Neno. Ce cas est également important puisqu‟il souligne de quelle façon l‟itinéraire d‟un enfant se structure selon plusieurs variables concomitantes ayant trait aux parents et à la famille dans laquelle l‟enfant vit. Neno, se retrouvant dans une position familiale ambiguë (orphelin, frère « rebelle», etc.), est sujet à un travail d‟observation par ses parents. Les qualités qu‟il possède sont, dans le déroulement des faits, constamment remises en question : il oscille entre l‟image d‟enfant-talent et celle d‟enfant-sorcier.

Enfin, dans les conclusions générales, je reprendrai le fil du raisonnement qui nous a guidés tout au long de ce travail. Je proposerai ensuite des pistes de réflexion pour mieux encadrer et comprendre le phénomène des enfants-sorciers. En dernière analyse, je proposerai des perspectives futures ouvertes par cette thèse dans l‟analyse des dynamiques familiales, de l‟enfance et de la sorcellerie en Afrique centrale.

I PARTIE