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Les assistants à la recherche

1.3 QUELQUES NOTES SUR L’EFFICACITÉ SYMBOLIQUE ET LA « MODERNITÉ DE LA SORCELLERIE »

1.4.1 Les assistants à la recherche

1.4.1 Les assistants à la recherche

Le travail de terrain s‟est enrichi du travail de plusieurs collaborateurs et amis congolais sans lesquels l‟enquête n‟aurait pas été possible. Julien Boyo, diplômé en communication à l‟Université de Lubumbashi, a été le premier ami et collaborateur qui m‟a accompagné au cours du premier séjour à Lubumbashi en 2010. Le choix tomba sur

3 J'ai mené une recherche d'archive et collecte de matériaux historiques en plusieurs lieux. J'ai consulté l'archive de presse du Centre de presse du Katanga (CPK) à Lubumbashi ; les archives personnelles du professeur d‟histoire Jeff Hoover de l'Université de Lubumbashi ; les archives personnelles de contes et d'entretiens du Père Léon Verbeek à Lubumbashi ; la bibliothèque du Théologicum où j'ai trouvé un grand nombre de thèses de graduat et licence sur les enfants, la sorcellerie et les Salésiens ; la

bibliothèque de l'école de criminologie de l'Université de Lubumbashi ; la bibliothèque du département de Statistique et Démographie de l'Université de Lubumbashi, grâce à l'aide du chef de travaux M. Mukalenge ; l'archive de la congrégation salésienne à Rome.

32 lui après suggestion des collègues lushois de l‟Université Libre de Bruxelles. Au fil du temps, les qualités communicatives, la connaissance approfondie de la ville et, surtout, le vaste réseau de connaissances de Julien sont devenues indispensables pour le développement de mon travail. Sur l‟ensemble des cas d‟enfants accusés de sorcellerie que j‟ai suivi (neuf au total), deux furent suivis par Julien qui a mené également des entretiens. Nous accordâmes ensemble cette démarche dans la tentative de comparer les données que nous aurions produites sur place en recouvrant, de toute évidence, deux positions différentes. Les histoires abordées par Julien ne font pas l‟objet de ce travail. Toutefois les données que Julien sut produire et les débats qui se sont ensuivi entre nous deux ont été fondamentaux pour les considérations qui seront présentées au fil des chapitres. Un autre précieux apport de la collaboration avec Julien a été la connaissance qu‟il possédait du milieu urbain de Lubumbashi. En effet, Julien possède un vaste réseau de connaissances tout à fait transversal : il pouvait disposer du contact de tel vice-ministre provincial de telle Division provinciale tout comme d‟un commerçant ambulant d‟une cité périphérique de la ville ; il connaissait les contextes catholiques tout comme ceux pentecôtistes, étant lui-même un fidèle d‟une église pentecôtiste. Ce dernier élément n‟est pas de moindre importance car il m‟a permis d‟échanger longuement avec lui à propos des thèmes fondamentaux pour la recherche comme les églises néo-pentecôtistes, la sorcellerie, les pratiques de délivrance, la sorcellerie, l‟enfance, les enfants de la rue et beaucoup d‟autres sujets importants. Le partage de la vie quotidienne avec Julien a néanmoins fait surgir des difficultés concernant l‟organisation du travail et la gestion d‟une relation qui, rapidement, est passée d‟une simple collaboration à une précieuse amitié qui continue jusqu‟aujourd‟hui. N‟ayant pas l‟opportunité d‟approfondir ces aspects dans ce chapitre, j‟ai tenté d‟insérer dans les chapitres qui suivent certaines de ces problématiques.

D‟autres personnes ont été fondamentales pour la recherche de terrain. Je ne pourrais pas les considérer strictement comme des collaborateurs mais, en pratique, ils l‟ont été au même titre. Les assistants sociaux des centres salésiens appartiennent à ce cas spécifique. Papa Urbain de Bakanja Ville, Émile Kalobo et Philippe Nyage, de Bakanja Centre ont été à la fois de valables informateurs, collaborateurs et des amis avec lesquels

j‟ai passé de bons moments de détente hors du contexte du travail. En travaillant dans les centres salésiens, les assistants sociaux avaient une connaissance approfondie de l‟œuvre salésienne et de l‟histoire de tous les enfants qu‟ils avaient accueillis. Ils ont pu m‟introduire auprès de certains enfants qui avaient été au centre d‟accusations de sorcellerie ainsi que leurs familles. Avec eux, j‟ai choisi de suivre certains cas en évaluant la faisabilité selon des critères tels que la volonté de l‟enfant de vouloir parler de son histoire et la facilité d‟avoir accès à la famille. Pour autant qu‟il puisse paraître facile d‟avoir accès à une famille d‟un enfant accusé de sorcellerie, en réalité cela ne l‟est pas : en premier lieu, une partie des enfants présents dans les centres d‟accueil des Salésiens sont d‟origine kasaïenne, ce qui comportait le fait que leurs familles résidaient à des milliers de kilomètres de Lubumbashi, dans les deux provinces du Kasaï ; en deuxième lieu, les enfants accusés de sorcellerie peuvent avoir des difficultés de rapprochement vis-à-vis de la famille parce qu‟en famille on les considère dangereux ou bien puisqu‟ils peuvent être source de honte vis-à-vis du voisinage.

Le statut d‟assistants sociaux des collaborateurs salésiens n‟a pas représenté un empêchement dans les relations que je tissais au fur et mesure avec les enfants et leurs familles. Cela pour plusieurs motifs. Premièrement, une fois que j‟étais introduit auprès d‟un enfant et de sa famille, après quelques semaines j‟ai été systématiquement en mesure de maintenir les contacts avec ces derniers de manière autonome sans l‟intermédiation des assistants sociaux. Cela a été rendu possible, d‟une part, du fait de la grande disponibilité démontrée, sauf dans de rares exceptions, par les gens à parler et à m‟accueillir dans leurs foyers ; d‟autre part, par la sensibilité des assistants sociaux qui étaient conscients que leur rôle était inévitablement associée au travail des Salésiens et comprenaient ainsi la nécessité pour moi de pouvoir conduire ultérieurement des visites de manière autonome. Deuxièmement, je dois témoigner la grande souplesse des trois assistants sociaux, en particulier dans leur capacité à sortir de leur rôle d‟assistant social pour redevenir père(s), mari(s), homme(s) et Congolais comme toute autre personne que j‟ai rencontrée au cours des dix mois passés à Lubumbashi. J‟ai toujours eu l‟impression que le rôle d‟assistant social ne prédominait pas sur leur capacité à être, avant tout, des personnes qui, comme mes interviewés, partageaient les mêmes conditions de vie, vivaient dans les mêmes cités ou quartiers, devaient faire face aux mêmes difficultés

34 quotidiennes. Je crois que ces considérations émergent assez clairement des passages d‟entretiens que je présente dans le chapitre 7, en particulier dans ceux dont il est question de la sorcellerie.