Dans une bibliothèque universitaire, les principaux usages effectués par les publics sont la recherche d’information comme usage permanent, la consultation des OPAC, la consultation des dossiers lecteurs, la lecture d’articles scientifiques. À partir de ces quatre différents usages habituels, on peut déjà s’intéresser à la complexité de la notion d’usage. Beaucoup de définitions explicitent la notions d’usage, qui peut aller du choix d’un objet, ou d’un outil jusqu’à leur appropriation, en passant par l’accès et l’utilisation, ce qui peut créer une certaine confusion entre les termes.
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SERRES Alexandre.‐ Dans le labyrinthe. Evaluer l’information sur internet.‐ Caen : C&F Édition, 2012, p. 10 117 Ibidem., pp. 25‐26
Françoise Millerand, soulignant l’ambiguïté du concept qui est souvent utilisé pour désigner le sens d’emploi, d’utilisation, de pratique ou encore d’appropriation, nous apprend que la notion d’usage fait aussi l’objet de différentes conceptions qui portent sur la « technique » et le « social ». Elle considère que « l’usage renvoie à l’utilisation d’un média ou d’une
technologie, repérable et analysable à travers des pratiques et des représentations spécifiques. L’usage devient social dès qu’il est possible d’en saisir (…) les conditions sociales d’émergence et, en retour d’établir les modalités selon lesquelles il participe de la définition des identités sociales des sujets ».118
L’insertion sociale d’une technologie, ou des TIC, dépend donc de ses corpus d’usages projetées et construites par les usagers par rapport à la technologie, aux outils ou aux dispositifs qui leur sont proposés.119 Pour Pierre Chambat, la notion d’usage est double, car elle fait à la fois, d’abord l’objet d’une construction théorique, et ensuite empirique. Le fait de traiter des usages des technologies de l’information et de la communication, amène du même coup à envisager des relations à la fois d’extériorité et d’interdépendance qui lient la technique et le social.120 D’un point de vue sociologique, Serge Proulx définit les usages comme « les patterns d’usages d’individus ou de collectifs d’individus (strates, catégories,
classes) qui s’avèrent relativement stabilisés sur une période historique plus ou moins longue, à l’échelle d’ensembles sociaux plus larges (groupes, communautés, sociétés, civilisations) ».121 L’usage social met en interaction des acteurs et des systèmes ou des dispositifs technologiques ou informatiques.
Par la notion d’usage, nous entendrons par là ce que font les étudiants, les enseignants et les
chercheurs dans les bibliothèques universitaires avec les médias, les Tic, Internet ; plus précisément ce qu’ils font des SRI pour accéder aux ressources numériques.
118 MILLERAND Françoise.‐ Usages des ntic : les approches de la diffusion, de l’innovation et de
l’appropriation (1ère partie). 2008, p. 4. Disponible en ligne sur :
http://www.commposite.org/index.php/revue/article/view/21/21 Consulté le 21.02.2013 119
MALLEIN Philippe, TOUSSAINT Yves. L’intégration sociale des technologies d’information et de communication : une sociologie des usages, TIS, 1994, Vol. 6, n°4, p. 318 120 CHAMBAT Pierre. Usagers des technologies de l’information et de la communication (TIC) : évolution des problèmes, TIS, 1994, Vol.6, n° 3, p. 250 121 PROULX Serge. Penser les usages des technologies de l’information et de la communication aujourd’hui : enjeux – modèles – tendances, Enjeux et usages des Tic : aspects sociaux et culturels, 2005. Disponible en ligne sur : http://sergeproulx.uqam.ca/wp‐content/uploads/2010/12/2005‐proulx‐penser‐les‐usa‐43.pdf Consulté le 20.05.2013
Ce sens que nous donnons au concept d’usage nous amène à nous intéresser à la question des pratiques des usagers des SRI. Dans le cadre des bibliothèques universitaires, les pratiques des usagers ou pratiques informationnelles constituent un prolongement logique des usages des SRI, et portent, en quelque sorte, sur les activités que font les usagers des ressources numériques. Veronika Lux-Pogodalla et Jean Yves Vion-Dury identifient trois types de pratiques fréquentes de la part de l’usager sur les documents numériques :
- réutiliser l’information par copier-coller : cette opération permet à l’utilisateur de tout prendre, voire plusieurs parties du document numérique grâce aux logiciels de traitement de texte. Dans les systèmes universitaires d’information, il a un accès facile à une énorme quantité d’informations de contenu sur le web. Une maîtrise de la structuration du document est cependant nécessaire afin que l’usager puisse opérer des manipulations.
- transformer des documents grâce aux nombreux langages tels que le XML, le RTF, le HTML, etc. À l’aide des réseaux, le document numérique qui présente un caractère d’ubiquité, est en même temps personnalisé selon les profils des usagers potentiels.
- naviguer dans le document (ou dans les collections) : pour accéder et naviguer dans le document ou entre les documents retrouvés grâce aux liens hypertextuels ou hypermédias.122
La notion de pratique informationnelle dans notre recherche sera déterminée par l’acception qu’en donnent Stéphane Chaudiron et Madjid Ihadjadène qui la définissent comme « la
manière dont l’ensemble des dispositifs (techniques comme les logiciels ou non comme les bibliothèques), des sources (en particulier d’informations mais aussi les ressources humaines), des compétences cognitives et habilités informationnelles sont effectivement mobilisés dans les différentes situations de production, de recherche, et de traitement de l’information ».123 La pratique informationnelle fait appel donc à l’emploi d’une technique, à des usages, à des attitudes en fonction d’une situation ou d’un contexte.
122 LUX‐POGODALLA Veronika, VION‐DURY Jean Yves.‐ Réflexions sur la modélisation des documents,
Information interaction intelligence, numéro thématique : le document numérique, 2004, Vol.4, n°1, pp. 28‐33
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CHAUDIRON Stéphane, IHADJADENE Madjid, Des processus aux pratiques : quels modèles informationnels
pour analyser l’accès à l’information en contexte professionnel ? Disponible en ligne sur : http://hal.archives‐ ouvertes.fr/docs/00/46/87/28/PDF/Ihadjadene‐Chaudiron_GRESEC.pdf Consulté le 21.02.2013
Nous l’utiliserons pour désigner la manière concrète dont les usagers des services (des
bibliothèques universitaires) utilisent les technologies mises à leur disposition pour rechercher et accéder à l’information souhaitée dans le contexte socioéconomique et culturel du Sénégal. De nos jours, la complexité des environnements documentaires
universitaires qui continuent de s’équiper de nouveaux outils technologiques et informatiques, exige de la part des usagers l’acquisition de réelles compétences en matière de recherche d’information face à l’accroissement de l’offre en ressources électroniques.