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Mise en valeur des inégalités foncières et de l’accaparement foncier en Agriculture Comparée

problématique de recherche :

2.2 Mise en valeur des inégalités foncières et de l’accaparement foncier en Agriculture Comparée

Par ses fondements, les travaux en agriculture comparée abordent particulièrement souvent les mécanismes de distribution du foncier et les réformes agraires. Roudart et Mazoyer, dans un travail publié en 2015, ont proposé une mise en perspective du phénomène actuel de landgrabbing à l’aune de périodes historiques de dépossession- accumulation de terres. Ils se sont basés pour réaliser ce travail, sur une approche propre à l’agriculture comparée, et plus largement à l’économie politique agraire, en se posant à la fois la question de l’identité des possesseurs de foncier, l’usage qui en était fait, les catégories sociales impliquées dans ces usages, les rapports de production existants, les processus des acquisitions et dépossessions, le type de légitimation, etc. Ils analysent les périodes d’accumulation et dépossession de foncier de manière à en souligner les caractères économiques et sociaux communs, notamment les conséquences sociales, économiques et politiques.

Les exemples développés sont ceux de l’empire romain, des enclosures anglaises, des latifundia sud-américains et des collectivisations russes. Les auteurs en commentent les caractéristiques au regard de ce qu’ils décrivent comme les « principaux objectifs économiques et sociaux pour un développement durable : réduire la pauvreté, créer des emplois et des moyens d’existence pour le plus grand nombre, promouvoir la croissance, assurer la sécurité alimentaire pour tous et diminuer les inégalités de revenus » (Roudart et Mazoyer 2015).

Durant l’empire romain, les terres conquises par l’armée romaine avaient été déclarées « ager publicus » (terres appartenant au peuple romain). Elles étaient mise en location par l’Etat à de riches particuliers pour rembourser ses dettes de guerre, ou vendues, le droit de propriété romain étant « individuel, exclusif et peu limité ». Les grands domaines agricoles qui se sont ainsi créés ont été dénommés « latifundia ». Avec le temps et l’expansion de l’empire romain, de riches citoyens occupèrent des terres d’ager publicus non attribuées par l’Etat sans payer d’impôts, usurpant parfois des terres communes. Certains possédaient plusieurs milliers d’hectares répartis entre plusieurs exploitations, parfois dans

64 des régions différentes. Ces propriétés étaient confiées en gérance et fonctionnaient sur la base d’une force de travail esclave, salariée avec des paysans libres faiblement rémunérés, ou basée sur des colons, «sortes de métayers auxquels on attribuait un lot de terre contre prélèvement d’une part de récolte, qui pouvait atteindre les deux tiers de celle-ci (Garnsey, 1988 ; Jones, 1974)» (Roudart et Mazoyer 2015, [10]).

Grâce à cette main d’œuvre à faible coût, les produits issus de ces latifundia, destinés à alimenter les villes, écrasaient la concurrence des produits issus des exploitations familiales. Cela amena les petits paysans et paysans familiaux de l’empire à migrer vers les villes et la « plèbe » de Rome. Pourtant, une loi de limitation de la taille des latifundia12 existait, mais elle n’était pas appliquée. Des propositions de réforme agraire furent effectuées, amenant à l’assassinat de quelques grands défenseurs de ces réformes (Tiberius Sempronius Gracchus puis son frère Caïus…). Avec la fin de l’empire, certains grands propriétaires se réfugièrent dans leurs villas et y organisèrent la production et la défense. Ils y faisaient travailler « d’anciens esclaves, paysans, citadins ou soldats en fuite, à qui le propriétaire attribuait un lot de terre contre redevance d’une part de la récolte et d’importantes corvées sur les terres réservées au propriétaire (Bloch, 1947) », donnant peu à peu naissance au régime féodal (Roudart et Mazoyer 2015, [17]).

En Angleterre, la dynamique des enclosures trouve son origine dans des terres abondantes et une main d’œuvre rare, salariée et au coût en augmentation suite à l’épidémie de Peste Noire en Europe (1347-1350). Les seigneurs commencèrent à louer leurs domaines à de riches paysans plutôt que de s’en occuper eux-mêmes, et le servage disparut. Cet archétype de grandes structures et cette existence de grands propriétaires fonciers (landlord) recevant une rente foncière pour la location de leur terre à un fermier exploitant (tenant farmer), qui emploie des ouvriers agricoles (labourers) vendant leur force de travail, est à la base de la réflexion des fondateurs de l’économie classique (Smith, Ricardo, Malthus, Marx…). Quelques paysans exploitaient également le lot de terre dont ils disposaient de manière indépendante (les yeomen) en complétant l’usage de leurs terres des droits de vaines pâtures sur les grandes propriétés et de l’usage des terres communes (forêts et pâturages) (Roudart et Mazoyer 2015).

Avec l’essor de la demande de laine de l’industrie drapière (Flandres, Angleterre) au XVIème siècle, des grands fermiers et propriétaires de terres commencèrent à s’approprier des terres communes en les clôturant de murs ou de haies pour pouvoir en faire un usage privatif pour l’élevage de mouton13. Ce mouvement fut accentué par la récupération de terres de l’Eglise Catholique par le pouvoir protestant et la chasse des paysans qui

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125 ha et 100 têtes de gros bétail ou 25 têtes de petit bétail, obligation d’emploi d’une proportion d’hommes libres

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65 occupaient ces terres. Des révoltes paysannes surgirent et des lois furent votées pour limiter ces abus mais elles furent peu appliquées. Les « enclosures » se poursuivirent jusqu’au XIXème siècle, soutenues ensuite par des lois parlementaires visant à promouvoir le remplacement des jachères par des cultures fourragères afin d’accroître l’élevage, la fertilité et la production végétale (Mazoyer et Roudart 2002). « Ces lois supprimaient le droit de vaine pâture, prévoyaient de partager les communaux, de remembrer les terres des propriétaires, et obligeaient ceux-ci à les enclore (Mingay, 2014 ; Slater, 1907) » (Roudart et Mazoyer 2015, [23]).

Les plus petits propriétaires terriens ne purent effectuer l’action coûteuse d’enclore leurs terrains, ce qui, additionné à la perte des communaux, les amena à vendre leurs terres. Une main d’œuvre nombreuse s’accumula dans les villes, supérieure à ce que pouvait absorber la révolution industrielle en marche. C’est ce qui alimenta l’exode vers les colonies de peuplement des Amériques, d’Océanie et d’Afrique du Sud. Grâce à un accès à des terres peu coûteuses et à de bons équipements, les paysans qui s’installèrent dans ces colonies « devinrent alors plus compétitifs que leurs homologues européens. Au point que les industriels britanniques, soucieux d’abaisser le plus possible leurs coûts de production, estimèrent qu’il était plus avantageux pour eux que le pays importe des denrées agricoles à bas prix (blé d’Amérique pour nourrir les ouvriers, laine d’Australie et de Nouvelle-Zélande pour approvisionner les filatures) plutôt que de les produire sur place » (Roudart et Mazoyer 2015, [26]). Cela entraina le vote du Corn Belt en 1846, abolition des lois protectionnistes sur les céréales, entrainant la faillite de nombreuses exploitations au Royaume-Uni.

Dans les colonies sud-américaines, les conquistadors espagnols étaient des nobles désargentés qui empruntèrent à des commerçants et des banquiers « le capital nécessaire pour financer leurs frais d’armement, de voyage et d’installation en Amérique, ainsi que les coûts des hommes de main dont ils s’entouraient » (Roudart et Mazoyer 2015, [28]). Dès le début de la colonisation, les terres conquises furent attribuées par le pouvoir royal à des nobles ou personnages qu’elle souhaitait remercier, avec des droits pour deux générations. Le fonctionnement de ces « encomiendas » était de type féodal (exploitation des richesses, servage de la population y résidant, objectif d’évangélisation de la population autochtone). Les abus des « encomenderos » sur la gestion de la population des terres dont ils avaient la charge furent dénoncés par les autorités religieuses, et le régime d’exploitation des terres fut progressivement transféré vers celui d’une propriété individuelle et privée comparable à celle du droit romain, pour des propriétés de plusieurs milliers d’hectares appelées « haciendas » (Roudart et Mazoyer 2015).

Les populations indiennes furent regroupées dans des « reducciones » sur les terres moins fertiles où ils mettaient en place des cultures et avaient des pâturages communs, tout

66 en ayant des obligations de paiements de tributs en travail ou en nature. Malgré les révoltes régulières, les « haciendas » s’agrandirent notamment lors des périodes propices au commerce international (1850-1873 et 1890-1920 par exemple). Ces structures foncières « sont à l’origine des structures foncières lati-minifundistes qui ont perduré dans la plupart des pays d’Amérique latine jusqu’à nos jours, car les réformes agraires ultérieures ont généralement été insuffisantes pour renverser ces structures dualistes (Chonchol, 1970 ; Graziano Neto, 1991 ; Kay 1998, 2014) » (Roudart et Mazoyer 2015 [33]).

Les auteurs citent également l’exemple de la Russie, avec l’occupation des domaines des nobles qui avaient fui la révolution de 1917 par des paysans qui se répartirent les terres. Ce processus fut entériné par le décret sur la terre d’octobre 1917 favorisant la création de comités agraires locaux. Après les difficultés d’approvisionnement en céréales de 1928 (« bataille du blé »), l’Etat mis en place la collectivisation de 1929 qui obligea les paysans au travail au sein des coopératives de production ou sur des fermes d’Etat pour l’alimentation des villes et de l’industrialisation du pays, amenant les paysans à un quasi « servage d’Etat » (Roudart et Mazoyer 2015).

Les caractères communs de ces exemples tiennent à l’usurpation de terres, à moindre frais, par un faible nombre de bénéficiaires au détriment d’un grand nombre d’usagers ou d’ayants-droits préalables. Ceux-ci se retrouvent dépossédés de leurs terres et moyens de production alimentaire. Dans une partie des cas, tout ou partie de la force de travail des « dépossédés » est utilisée pour la production sur ces domaines (esclavage, servage, métayage ou salariat…). Dans les cas où elle n’est pas utilisée, la population est forcée à l’exil. Ces terres et cette force de travail peu chères confèrent un avantage comparatif important aux productions issues de ces unités de production, produites à moindre coût. Des résistances sont dans tous les cas visibles, révoltes appelant une répression violente, ou résistances au quotidien freinant le mouvement d’acquisition, sans le renverser (Roudart et Mazoyer 2015).

La violence des répressions s’accompagne généralement d’un discours légitimant les mouvements d’accaparement et d’une décrédibilisation de la population en résistance. On retrouve ainsi un discours de stigmatisation dénonçant l’« incivilité des barbares pour les Romains, inhumanité des Indiens pour les conquérants ibériques, vilenie des paysans pour les nobles britanniques, aspirations bourgeoises des paysans pour les bolcheviks » (Roudart et Mazoyer 2015 [52]). Des arguments de rationalité ou de modernité accompagnent les discours de légitimation. Ces mouvements « d’acquisition-dépossessions » s’appuient enfin sur « un ensemble de dispositions légales et réglementaires formelles, instaurant et protégeant les droits des nouveaux acquéreurs au mépris des droits préalables des dépossédés » (ibid., [51]). A travers cette comparaison historique, Roudart et Mazoyer

67 (2015) soulignent finalement que ce genre de mouvement d’accaparement de terres n’est pas propre à la période contemporaine et au capitalisme.

D’autres types d’inégalités de distribution ou d’accaparement productif du foncier ont été mis en valeur à travers des travaux effectués en agriculture comparée en Amérique Latine. Ainsi qu’évoquée par Cochet (2011a) (cf. sous-partie précédente), l’inégalité foncière est à la base d’une part importante des mécanismes de différenciation dans les systèmes agraires. Mais elle n’est pas toujours basée sur l’accaparement de la propriété. Elle peut être basée sur la captation des facilités d’accès aux capitaux et / ou à la force de travail, permettant la mise en valeur d’un foncier fragmenté. Un exemple de ce type est mis en avant dans les travaux de Cochet, Léonard, et Tallet au Mexique (Cochet 1993; Cochet, Léonard, et Tallet 2010). Les auteurs expliquent l’échec des réformes agraires mexicaines par l’absence de prise en compte dans le processus de réforme foncière d’un mode répandu de faire-valoir indirect des terres, le métayage, déterminant des rapports sociaux de production.

L’étude des rapports sociaux prérévolutionnaires mexicains a été le plus souvent limitée à une opposition grand propriétaire – peón (ouvrier rural) avec d’un côté un faire- valoir direct et de l’autre la vente de la force de travail. Cette approche négligeait l’existence de rapports de production de type métayage ou contrat à part-de-fruit (faire-valoir indirect), qui étaient en réalité structurants de l’usage du foncier et des rapports sociaux qui liaient patrons-propriétaires terriens et salariés ruraux. Si l’ouvrier vendait sa force de travail pour participer à la gestion de l‘élevage du patron-propriétaire, le propriétaire mettait également à disposition de l’ouvrier des terres à cultiver, et participait à la constitution d’un attelage de bœufs, parfois à la fourniture de semences et d’avances de liquidités. En l’échange de cela, l’ouvrier reversait au patron-propriétaire une partie des récoltes.

Lors des réformes agraires, ces rapports de production mettant le patron-grand propriétaire dans la position d’un fournisseur de capitaux productifs pour l’ouvrier-métayer jouèrent un rôle particulier, puisque les réformes agraires ne furent pas accompagnées conjointement de répartition de capital technique et économique. Les ouvriers qui se virent octroyer des surfaces de terres, firent appel aux grands possesseurs de capitaux pour pouvoir mettre en place une production sur leurs terres. C’est ainsi que de grands propriétaires de bétail (bovins) placèrent des animaux à la reproduction sur la terre des petits propriétaires. Ce prêt de capital était rémunéré par un paiement en nombre de génisses, avec des mécanismes de remboursement du capital qui n’étaient pas en rapport avec les taux de reproduction du troupeau et entrainaient une grande difficulté de remboursement et de capitalisation pour les petits propriétaires fonciers (Cochet, Léonard, et Tallet 2010).

68 Au fur et à mesure de l’évolution des conditions politiques et économiques du Mexique et des prix relatifs, les animaux passèrent d’un placement pour la reproduction à un placement pour l’engraissement. C’est le début d’un nouveau type de contrat qui porta sur une partie du gain de poids des animaux engraissés, déduction faite des avances en intrants et des avances numéraires (contrat « a medias »). L’ensemble des coûts de production sont assumés par le propriétaire foncier, qui doit rendre le capital fixe si le contrat vient à se rompre. Le propriétaire foncier est aussi fournisseur de fourrage et de travail. Il « se retrouve en situation de dépendance vis-à-vis du « preneur » capable de fournir le capital nécessaire au processus de production » (Cochet et al. 2010, p.624). Le propriétaire des terres, « doté de trop faibles moyens de production », n’a alors pas les moyens d’investir en capital sur ses terres, et accepte la proposition de grands possesseurs de bétail de prendre en pension leurs bêtes. Sans ces propriétaires de bétail, il ne parvient plus à mettre en valeur ses terres. La domination est alors exercée par le propriétaire du capital (cheptel) (Cochet, Léonard, et Tallet 2010). Cela traduit finalement une forme de verrouillage, d’accaparement des maillons les plus lucratifs de la filière par les possesseurs de capitaux, et un rapport de domination inversé entre possesseurs de capitaux et propriétaires fonciers par rapport aux problématiques agraires exposées dans l’approche classique. Ces « baux à cheptel » sont apparus dans les années 1950-1960 et donnèrent naissance au concept de « reverse tenancy » ou tenure inversée (Binswanger et Rosenzweig, 1984 ; Colin, 2003, cités par Cochet et al., 2010).

Cet exemple montre le rôle particulier qu’ont eu des rapports de production verrouillant les possibilités de capitalisation des bénéficiaires de la réforme agraire dans la mise en œuvre d’un accaparement qui n’est pas lié à la propriété du foncier. « Le rapport au foncier devient un élément secondaire de la négociation (…). Ce nouveau « tenancier », éventuellement dépourvu de toute propriété foncière, mais capable de fournir la quasi- totalité du capital (fixe, circulant, social...) nécessaire au fonctionnement du système de production, prend la place du grand propriétaire d’antan dans les rapports sociaux et de pouvoir au niveau local et régional » (Cochet, Léonard, et Tallet 2010, p.635). Cela marqua le retour de grands domaines non plus fonciers mais capitalistiques. Cette évolution résulte du « monopole exercé sur la possession des facteurs de production clés du processus productif » par de grands possesseurs de capitaux, et est accentuée par la transformation des filières agricoles associées (Cochet, Léonard, et Tallet 2010). Ce concept de « tenure inversée » est également utilisé pour désigner l’inversion qui existe dans les rapports de force entre grande entreprise de production de commodities qui prend en location des terres (type pool de culture international), et le propriétaire terrien qui les met en location (Guibert 2013).

69 L’ensemble de ces exemples nous amène à souligner l’importance de la description fine des rapports sociaux de production et de la bonne prise en compte de leur diversité dans la compréhension de la dynamique de transformation des systèmes agraires. Cela implique d’être vigilant à ceux moins mis en avant par la littérature existante, qui a souvent réduit au couple latifundio-minifundio l’étude des systèmes agraires latino-américains. Dans le cas de modes de faire-valoir indirects, la répartition des charges et des produits est une clé essentielle de compréhension des dynamiques d’accumulation. Elle est une composante explicative forte des échecs des politiques de réforme agraire, qui se focalisent sur le fait de soutenir l’accès au foncier en oubliant la facilitation de l’accès aux moyens de production et aux marchés (accès au matériel, aux intrants ; infrastructures de transport, de stockage, de transformation…) (Cochet 2002).

Les spécificités des mouvements actuels d’accaparement du foncier, sur lesquels les informations sont « incertaines et lacunaires » (Scoones et al. 2013, cités par Roudart et Mazoyer 2015), tiennent au caractère international du mouvement, souvent mis en œuvre par des acteurs privés sur des territoires multiples et au niveau mondial. Pour Roudart et Mazoyer 2015, la libéralisation des politiques publiques a favorisé ces mouvements en déstructurant, via les politiques d’ajustement structurel, les programmes d’aides et d’appuis techniques aux producteurs. Elle a aussi facilité l’accès au crédit de grands investisseurs qui acquirent de grandes surfaces de terres avec parfois le soutien du gouvernement de leur pays d’origine. Les organisations internationales (FMI, Banque Mondiale, OCDE, OMC…) ont soutenu ces mouvements en fournissant des garanties aux investisseurs, des fonds pour les infrastructures de production, et en promouvant les politiques économiques libérales. « Les droits des usagers préalables n’ayant pas de titre formel à faire valoir ne sont généralement pas pris en considération (Alden Wily, 2012) et les dépossédés n’ont quasiment aucune possibilité de recours judiciaire (Golay, 2015). A cet égard, les programmes de formalisation et de marchandisation des droits sur la terre ont souvent eu des conséquences néfastes pour les pauvres (De Schutter, 2015) » (Roudart et Mazoyer 2015, [67]).

La vague d’acquisitions actuelles est finalement guidée par « la quête de terre et de travail à bas coûts, en vue de créer de grandes exploitations compétitives pouvant tirer profit de la production de denrées agricoles à bas prix, destinées à des populations ayant un pouvoir d’achat », amenant à la dépossession de la population locale (Roudart et Mazoyer 2015, [71]). Le démantèlement conjoint des barrières douanières protectrices contribue à mettre aujourd’hui en concurrence sur les mêmes marchés des agricultures aux écarts de productivité qui sont plus élevés que jamais. Par le jeu de la compétition sur les marchés, elle contribue ainsi à « l’appauvrissement et l’exclusion de populations agricoles dans d’autres régions du monde » (ibid., [71]). Elle ne repose que peu sur la violence physique

70 directe, mais amène pauvreté, exclusion et dégâts écologiques considérables, à l’opposé d’un développement global.

2.3 Fondements des « agrarian studies » et « peasant

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