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La titraille comporte une structure visuelle qui constitue son architecture. Les règles de présentation de la page de une, pour nombre de journaux constituent un élément d'identité, un style. Sous la touche artistique de l'infographiste, on rencontre tout de même des permanences qui tiennent à la fois des règles typologiques, de style et de sémantique. Le contraste entre le

surtitre et le titre est une règle d'écriture. Mais la présentation de ce contraste diffère selon les journaux et la hiérarchie de l'information.

Le surtitre peut être séparé du titre par les deux points ou par un espacement (un blanc) lorsque celui-ci est en face de lui. Dans Cameroon Tribune, seuls les cas grammaticaux d'emploi des majuscules sont observés. La cohérence que l'on observe dans la présentation des journaux n'est pas la même partout, des majuscules apparaissant en début de titre, après les deux points dans certains journaux. Le surtitre peut par contre se présenter entièrement en petites majuscules : le titre qui suit est construit comme une phrase normale mais mis en valeur par la taille d'écriture et la graisse.

DOUALA Un marabout fouetté par des démons (LP 05.12.02)

La hiérarchie la plus courante met l'information majeure sous son surtitre. L'espace accordé au titre dans ce cas dépend de la densité de l'actualité, et donc du nombre de titres que l'on trouve à la une. La séquence-titre occupe plus d'espace (à cause de la police d'écriture) que le surtitre. C'est une question de lisibilité.

Image 2 : un titre du journal Mutations

Aucune ponctuation ne sépare très souvent les deux segments, mais le contraste entre eux est manifeste par l'aspect des caractères utilisés. Le surtitre est moins mis en évidence que le titre, même s'il arrive qu'il soit souligné, en capitales ou marqué d'une couleur différente. Dans le même encadré, il est sous la domination, du point de vue de la spatialisation, du titre. La relation de la spatialisation à la cognition est complexe car quel est par exemple l'angle de lecture d'un titre ? Des formes les plus en évidence vers les formes les moins en évidence ? En suivant la progression spatio-temporelle des formes linguistiques matérialisées ? Ou alors globalement (par groupe de lettres), le cerveau rétablissant, en fonction de sa culture (de là une compétence de lecteur), le sens et la grammaticalité (Jacques André, 1993 : 36) ? Les manuels recommandent très souvent une présentation tenant compte des pauses de la lecture. Les contraintes d'espace et de temps interdisent souvent une telle rigueur. Le surtitre doit être une annonce après laquelle on doit sentir une pause pour relever l'effet de l'information de la

53 clause. Mais comme plusieurs études ont démontré que le titre est encore plus vu que lu, on s'attend davantage à ce que le surtitre joue un rôle d'adjuvent de la séquence –titre, au service de la cohérence discursive. Force est de constater qu'il est tout aussi important que la séquence-titre sur le plan de l'information parce qu'il oriente celle-ci d'une manière ou d'une autre. Son espace, les marques graphiques qui le caractérisent, sa plus grande récurrence lui donnent, dans la hiérarchie de l'information, une plus grande intrication à la séquence-titre que le sous-titre.

Accident La belle-mère de Poupoul grièvement blessé (LP 14.11.02)

La ponctuation

Entre le surtitre et la séquence-titre, la ponctuation a des fins elliptiques ou expressives. Les ponctuations fonctionnelles comme les points, les virgules, les deux points hiérarchisent les séquences. Cette hiérarchie est autrement manifestée par la disposition spatiale et la typographie des séquences. Bosredon et Tamba (1992) parlent de titres à formule bisegmentale pour les titres dont les séquences sont liées par les deux points. La règle grammaticale importe moins que l'expressivité (Martin-Lagardette, 1987 : 155), c'est pour cela qu'invariablement, on trouve l'usage de la majuscule et de la minuscule.

[a] Chantoux : le joker électoral de Poupoul (LP 13.11.03) [b] SDF : Le grand réveil

[c] Etoudi : la terreur du "came no go" (LP 16.04.98)

Les deux points en [a] jouent le rôle de substitut de la copule : Chantoux est le joker électoral de Poupoul. En [b], le surtitre est complément déterminatif de réveil : Le grand réveil du (au) SDF. Le surtitre du [c] est le locatif, les deux points signalant une ellipse verbale : La terreur du "came no go" est à Etoudi. L'autonomisation de ces segments de l'énoncé en fait des thèmes et justifie la minuscule en début de séquence-titre.

Lorsque le surtitre a des fins expressives, il peut être séparé de l'information par des points de suspension. Il s'agit généralement d'un SP détaché et antéposé pour être mis en lumière, pour souligner le rôle que le segment a dans l'information. Ce sont là des cas classiques de thèmes.

[d] En plein procès de Bakassi … Abacha confisque un Boeing de la Camair (LP 03.02.98)

[e] Après le départ de Belinga… Combat d'ombre au protocole d'État (LP.13.01.98) [f] Arrivé aux États-unis … Biya Président du Monde (LP 17.09.02)

Les trois points comme le deux points marquent une pause dans le discours, ils construisent une forme d'oralisation de l'écrit. Par cette pause, le locuteur voudrait faire effet,

avec une annonce solennelle, triomphale. Les points de suspension dont la valeur générale est la non saturation de l'énoncé subordonnent sur le plan informatif la séquence-titre au surtitre.

L'expressivité peut venir de cas de surcharge d'information au niveau du surtitre, impliquant des organisations particulières de la ponctuation et de la segmentation des propositions. Même si comme le pense Charolles (2002), les propositions intégrées sous un même cadre de discours sont toutes placées sur le même plan et qu'il n'existe aucune relation hiérarchique entre elles, plusieurs IC peuvent tout de même mettre en facteur le cadre de discours qu'ils introduisent.

[g] 200 morts…

Nsam : Samuel Minko et Nguini Effa convoqués chez le procureur (MU 23.04.98)

[h] Après l'appartement de la rue Foch, d'autres propriétés et terrains de Golf, Popaul a un nouveau château en Autriche

(C'est un cadeau de l'ami DAMASE)

Preuve que les longs-brefs séjours en Europe sont bénéfiques. (LP 20.08.93)

[i] ANNIVERSAIRE

UPC : l'âme immortelle se meurt (MU 13.04.98)

Les points de suspension en [g] sont l'expression de l'état d'âme du sujet ou tout au moins d'une atmosphère qu'il veut faire régner avec l'utilisation de chiffres, ils symbolisent le silence de l'oral, le répit après une évocation chargée émotionnellement, et donnent une certaine gravité, une importance accrue à ce qui va suivre sur le plan énonciatif. On a ainsi un thématique, 200 morts qui surdétermine l'information du titre, qui lui-même a un IC-univers pour l'introduire. On peut parler ici d'une hiérarchie des surtitres, avec le topique en position de surtitre principal et le thème en position de surtitre secondaire. La même hiérarchie se dessine pour le cas [i], avec Anniversaire en surtitre principal et UPC en thème et donc surtitre secondaire. La forme prosaïque reconstituable du surtitre est Anniversaire de

l'UPC. Les auteurs utilisent un processus de signification en entonnoir, qui va du général au

particulier. Du fait général qu'est l'anniversaire, on précise à l'alinéa la détermination. On peut aussi noter que le surtitre UPC est repris anaphoriquement (l'âme immortelle) comme sujet du verbe de la clause ce qui en principe l'exclut de la proposition. Unité topique relevant de la dimension espace ? Nous pensons qu'il faut plutôt considérer que l'anaphore, l'emphase sont des formes thématiques particulières. On parle de thématisation. Dans l'exemple [h], par contre, le surtitre énumératif manifeste l'excès dans l'accumulation. Il justifie la valeur du mot nouveau et conditionne le jugement de l'information non pas en elle-même mais en rapport

55 avec la saturation énumérative. Autrement dit, on ne juge pas l'acquisition de façon intrinsèque mais plutôt en rapport avec toutes les acquisitions antérieures.

Certains surtitres expressifs sont des interjections et ont un point d'exclamation final.

[j] Au secours ! On revend de l'essence à Nsam (MU 01.11.00) [k] Alerte ! La ville de Douala s'enlaidit (LN 27.02.98)

Ainsi lorsqu' elle est expressive, la ponctuation du surtitre permet de donner une tonalité particulière à la séquence-titre. On revend l'essence à Nsam est une information absolument neutre, le tour oral du surtitre en [j] et [k] avec les points d'exclamation a pour objectif de mobiliser, d'interpeller. Les participants à la communication se trouvent par conséquent impliqués dans un échange seulement par la ponctuation. Ponctuation et morpho-disposition assurent la cohérence de l'ensemble textuel.

1.1.2 Nature grammaticale et référence