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INTRODUCTION GÉNÉRALE

III. Les enjeux du secteur agroalimentaire

9.Le secteur agroalimentaire, nœud de tensions. Les producteurs agricoles n'ont de cesse, depuis quelques années, de manifester avec force et avec désespoir leur exaspération par rapport à la situation économique inextricable à laquelle ils sont soumis88. Faisant face à des coûts de 84 CARBASSE (J.-M.), Les 100 dates du droit, PUF, 2011, p.30 et s/.

D'après le plan des Institutes de Justinien, tout droit suppose une personne qui en est le sujet, une chose qui en est l'objet et une action qui permet d'assurer la réalisation du droit. Les Institues, publiées en 533, sont un manuel des règles de droit romain ayant force de loi. Quatre livres le composent sur le droit des personnes, le droit des biens, le droit des obligations et le droit processuel. Les Institutes font partie des compilations de l'empereur romain Justinien 1er (527-565), qui regroupent en plus le code justinien, compilant les constitutions impériales, soit les normes de valeur comparables à la loi, le Digeste, s'assimilant à la doctrine et les Novelles, recueil des constitutions rendues par l'empereur Justinien 1er lui même.

85 SUPIOT (A.), Homo juridicus, Points, 2005, p. 151 et s/.

En droit romain, les contrats ne connaissant pas de régime juridique uniforme et les règles qui les régissent sont fonction de leur objet concret, le negocium. Ainsi pour les contrats réels, le force obligatoire venait du transfert de la chose. La stipulation puisait sa force dans les racines religieuses de Rome.

86 CARBASSE (J.-M.), Les 100 dates du droit, PUF, 2011, p.44 et s/.

Ce sont très certainement les décrétales qui ont progressivement diffusé la morale catholique dans les règles juridiques. Le pape revendiquant un pouvoir législatif similaire à celui de l'empereur romain quelques siècles avant lui, la législation pontificale connaît un essor rapide au XIIe siècle. Les papes qui se succèdent sont de plus pour la plupart juristes, tels Alexandre III, Innocent III ou Grégoire IX. Les décrétales postérieures au Décret de Gratien, nommées les extravagantes, du latin extra Decretum vagantes, sont nombreuses et purement législatives. Elles seront regroupées par le juriste Raimond de Penafort et promulguées en 1234 comme droit officiel de l'Église. Étudiées dans les universités, commentées, glosées, elles permettront aux principes issus de la morale catholique de se diffuser.

87 SUPIOT (A.), Homo juridicus, Points, 2005, p. 153.

La règle Pacta sund servanda, sous sa formulation initiale Pax servetur, pacta custodiantur, est présente dans le canon Antigonus par lequel le premier concile de Carthage se prononça en 248 sur les effets d'une convention passée entre deux évêques au sujet des frontières de leurs diocèses. En 1212, la Glossa Ordinaria du décret de Gratien attribue une force juridique à l'obligation de respecter les conventions, en lui attribuant une sanction. Cette solution s'impose en 1230 par les décrétales de Grégoire IX et se retrouvera, en 1804, à l'article 1134 du code civil ancien sous la forme : « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ».

88 AFP, Un an après, la crise agricole ne faiblit pas, Dépêche AFP du 22 juillet 2016.

production fixes, ils sont effectivement à la merci de la variation des prix des matières premières agricoles et des pressions des relations contractuelles qui les lient à leurs clients, ce qui les place dans une situation de quadrature du cercle financière. Leurs coûts de production peuvent alors être supérieurs aux prix de vente de leur production, ce qui remet en cause la pérennité de leur activité. Des actions sont menées ça et là, en France, en Europe, par des producteurs agricoles afin de sensibiliser le grand public et les pouvoirs publics au niveau trop faible de leur rémunération qui ne leur permet pas de couvrir les coûts de production et les contraint de travailler à perte89. Le secteur

agroalimentaire met en rapport des opérateurs économiques aux intérêts différents voire opposés90,

ce qui se traduit dans les rapports contractuels qu'ils établissent entre eux, et les négociations menées pour cela. Ainsi en 2014, la survie de plus de 250 entreprises de la transformation agroalimentaire est compromise, leurs marques ayant disparu des rayons des grandes surfaces91.

Lors des négociations commerciales de l'année 2016, les distributeurs continuent de réclamer des baisses de prix. Les demandes de déflation sont multiples et importantes92. Déjà en 2014 les

pouvoirs publics étaient intervenus en demandant un changement de comportement des distributeurs, en vain93. Le secteur agroalimentaire est par ailleurs soumis aux vicissitudes

reste dramatique mais la tendance est désormais moins à la manifestation qu'à la gestion du désespoir. Mont Saint-Michel grotte de Lascaux, port de Normandie : à la mi-juillet 2015, les images de tracteurs bloquant l'accès à des sites emblématiques ou à de grands axes routiers, surtout dans l'Ouest, sont sur tous les écrans. Initiées par le premier syndicat agricole, la FNSEA, les actions culminent début septembre avec le déferlement de 1.500 tracteurs sur Paris.

A la pointe de la contestation, les éleveurs. Acculés par l'effondrement des prix d'achat de la viande et du lait, incapables de couvrir leurs frais, encore moins de gagner leur vie décemment.

89 V. www.europeanmilkboard.org/fr/special-content/actualites/news-details/browse/3/article/eu-milk-price-dairy-

farmers-protests-in-europe.html?no_cache=1&cHash=9511ed5508099e221c14347f9bec132b

90 NGO (M.-A.), Pouvoirs privés et intérêt général dans l'agroalimentaire : un équilibre possible ?, In BALATE (E.),

DREXL (J.), MÉNÉTREY (S.), ULLRICH (H.), Le droit économique entre intérêts privés et intérêt général,

hommage à Laurence Boy, PUAM, 2016, p.249 et s/.

Le secteur agroalimentaire est particulièrement intéressant car parcouru par des logiques diverses, qui illustrent la cohabitation en son sein d'intérêts publics et d'intérêts privés. En dehors du champ de ce travail, il est possible d'évoquer le développement des biotechnologies pouvant remettre en cause la sécurité des approvisionnements et la souveraineté alimentaire dans certains pays. Le développement de la propriété intellectuelle peut conduire à la constitution de monopoles et à l'appropriation d'une partie de l'agriculture commerciale par des firmes transnationales détentrices de brevets.

Dans le champ de ce travail, il est possible d'évoquer les rapports de force contractuels déséquilibrés entre certains opérateurs économiques, à l'avantage, par principe, de certains, et au détriment des autres. Cette mécanique d'intérêt privés est complétée par la finalité, publique, de sécurité alimentaire, pouvant être mise à mal dans le cas de filières agroalimentaires fragiles et trop déséquilibrées.

91 CESE, Avis, Les circuits de distribution des produits alimentaires, 2016, p.22.

92 Association Nationale des Industries Alimentaires, Négociations commerciales : l'ANIA rappelle la nécessité de

mettre un terme à la guerre des prix dans la grande distribution, Communiqué de presse, 19 février 2016.

93 Association Nationale des Industries Alimentaires, Négociations commerciales 2015 : l'impasse, Communiqué de

presse, 11février 2015.

Les mauvaises pratiques et les abus se poursuivent, se multiplient et atteignent des niveaux jamais vus et inacceptables pour tous les fournisseurs, quel que soit leur taille, leur métier ou leur région en France : - demandes de déflation abyssales, jusqu'à -18 %

- demandes de compensation de marges rétroactives, jusqu'à 2013 - non prise en compte des évolutions des coûts

économiques et géostratégiques internationales. Ainsi la crise agricole française trouve son origine également dans un endettement mondial très élevé, dans la dégradation de la croissance de la Chine, dans la faiblesse de la croissance mondiale ou encore dans un recul significatif de la productivité des pays industrialisés, ayant pour corollaire une efficacité amoindrie des dépenses d'innovation94.

L'embargo russe sur les produits alimentaires européens95, précisément la viande bovine, la viande

de porc, la viande et les abats comestibles de volaille, les poissons, crustacés et mollusques, le lait et les produits laitiers, les fruits, les légumes et les saucisses, a fermé le débouché important du marché russe aux exportations françaises96, créant alors un contexte de surproduction dans un

marché intérieur européen vers lequel se sont ré orientées les exportations de pays fortement dépendants de la Russie tels que la Pologne, les pays Baltes ou l'Allemagne. Cet engorgement du marché européen crée un surplus d'offre, qui engendre un mouvement de baisse des prix. La perte du débouché russe, par exemple pour le porc, crée une surproduction sur le marché français. Les autres pays européens bénéficient en parallèle d'une meilleure compétitivité prix de leurs produits, ce qui leur permet de venir concurrencer les productions françaises sur ces débouchés97. L'embargo

russe a également pour conséquence de créer un effet d'aubaine important pour d'autres pays du monde. L'Argentine, en proie à des difficultés financières, peut profiter de la situation pour relancer son économie en exportant davantage de fruits, de produits laitiers ou de viande vers la Russie. D'autres pays peuvent suivre la même voie, comme le Brésil, le Chili, l'Équateur, la Turquie ou encore le Maroc98. Cet embargo, prolongé à plusieurs reprises99, a déstabilisé les marchés,

notamment dans la filière porcine, où les volumes français exportés en 2013, avant l'embargo, étaient de 70 000 tonnes environ pour un chiffre d'affaires de 100 millions d'Euros par an, et la fermeture de ce marché entraîne un excédent d'offre disponible sur le marché européen. En conséquence, le prix d'équilibre du porc vivant a baissé de 20 centimes par kilogramme, ce qui a

- non-respect de la confidentialité des accords par des demandes orales d'agrément - non-respect des salariés des fournisseurs.

94 Chambre d'agriculture, L'agriculture en crise: causes et perspectives, POUCH (T.), Intervention du 11 mars 2016. 95 Chambre d'agriculture, Embargo russe : Impacts directs et indirects pour l'agriculture française, POUCH (T.),

Revue des Chambres d'agriculture n°1036, 2014, p.12.

Le 7 août 2014, la Russie a décidé d'interdire l'entrée de son marché à certains produits agricoles et denrées alimentaires en provenance de l'UE, à la suite des sanctions décidées par l'UE et les États-unis dans le cadre de la crise ukrainienne. Cet embargo est fixé pour une durée d'un an et concerne également les États-Unis, l'Australie, la Norvège et le Canada. Il s'inscrit dans la continuité des restrictions aux importations de viandes -porcine et bovine- décidées par la Russie pour des motifs sanitaires.

96 Chambre d'agriculture, embargo russe : Impacts directs et indirects pour l'agriculture française, POUCH (T.),

Revue des Chambres d'agriculture n°1036, 2014, p.13.

L'excédent commercial agroalimentaire obtenu par l'économie française vis-à-vis de la Russie est en 2013 de plus de 500 millions d'Euros.

97 Ministère de l'agriculture, Rapport du médiateur des relations commerciales agricoles, Rapport d'étape du

médiateur sur les filières bovine et porcine, 22 juillet 2015, p.5.

98 Chambre d'agriculture, embargo russe : Impacts directs et indirects pour l'agriculture française, POUCH (T.),

Revue des Chambres d'agriculture n°1036, 2014, p.14.

engendré une perte sèche de 40 millions d'Euros par an pour la filière. En d'autres termes, l'embargo russe a amplifié par une puissance 10 la crise agricole déjà existante100.

10.Les crises agricoles, prémisse aux crises économiques, sanitaires, alimentaires et politiques. Il convient de procéder à la distinction entre crises conjoncturelles et crises structurelles, le point de distinction entre les deux étant leur durée101. Une crise s'étalant sur un pas de temps inférieur ou

égal à une année est conjoncturelle. Ainsi un déphasage temporaire de l'offre et de la demande d'un produit considéré peut entraîner une variation du prix. Réciproquement, une crise dépassant l'année est structurelle, avec par exemple une baisse des prix qui s'étale sur plus d'un an, comme cela a été le cas lors de la grande crise agricole de la fin du XIXe siècle en France. Lors de cet épisode, les prix agricoles vont connaître une baisse très importante durant environ vingt années, de 1880 à 1900, s'inscrivant au sein d'un mouvement Kondratief102. Les causes panachent un retard technique

de l'agriculture française avec un développement des moyens de transport dans le monde, ce qui met en concurrence les produits agricoles de pays plus avancés techniquement, qui sont donc plus compétitifs, avec les produits agricoles hexagonaux. Les États-Unis ont connu une crise agricole conséquente à compter de 1929 et durant les années 1930. Durant la première guerre mondiale, le pays s'est doté de moyens de production agricole que l'agriculture européenne, extrêmement malmenée alors, ne pouvait plus produire. Lorsque celle-ci a retrouvé son niveau normal de production, ce débouché s'est refermé, ce qui a entraîné une crise de surproduction et consécutivement une chute des prix agricoles103. L'aliment est porteur de crises d'ordre sanitaire, les

aliments d'origine animale étant à l'origine de maladies transmissibles à l'être humain, comme la maladie du cochon ladre ou comme la peste bovine, qui a décimé 200 millions de bœufs entre 1740 et 1760. La découverte par le docteur Villemin en 1865 de la similarité entre la tuberculose humaine et la tuberculose animale interpelle les pouvoirs publics. La sensibilité du secteur agroalimentaire aux crises sanitaires les incite à se doter d'un arsenal réglementaire pour lutter contre les maladies transmissibles à l'être humain104. Bien évidemment, la mondialisation des échanges est génératrice 100 AN, Proposition de résolution n°3585 invitant le Gouvernement à ne pas renouveler les mesures restrictives et les

sanctions économiques imposées par l'Union européenne à la Fédération de Russie, 17 mars 2016.

101 Ministère de l'agriculture, Rapport, Étude sur les mesures contre les déséquilibres de marché : quelles perspectives

pour l'après quotas dans le secteur laitier européen ?, 2014, p.5.

102 LHOMME (J.), La crise agricole à la fin du XXe siècle, en France, essai d’interprétation économique et sociale, op

cit, p.522-532.

La crise agricole de 1880-1900 se place dans le cadre d'un mouvement Kondratief descendant, un des moins discutables que l'on connaisse, et qui se situe entre 1873 et 1896, soit vingt-trois ans. La phase ascendante du mouvement avait commencé vers 1847, et avait donc duré vingt-six ans.

Ce double mouvement Kondratief, ascendant et descendant, s'inscrit lui même sans un ensemble encore plus vaste, un trend séculaire des prix, qui est en baisse et couvre la presque totalité du XIXe siècle, de 1810 ou 1815 à 1896.

103 MAGIMEL (J.), Histoire de l'agriculture, quelques dates repères, Paysans n°327, mai-juin 2011.

104 CGAAER, Rapport n°13083, Controverse documentée à propos de quelques idées reçues sur l'agriculture,

d'angoisses et de risques accrus. De nombreuses crises dans des temps plus récents, comme la crise de la vache folle, la crise du poulet aux hormones ou encore de la dioxine inquiètent les consommateurs des pays développés, la crainte de mourir empoisonné dépassant ici la crainte de mourir de faim. Ce phénomène est accentué par un allongement des filières alimentaires, avec plus d'intermédiaires, plus de distance entre le producteur initial et le consommateur final et une industrialisation croissante105. Les crises portées par le secteur agroalimentaire sont également

d'ordre alimentaire, lorsque les prix des produits alimentaires augmentent drastiquement, symétriquement aux crises agricoles. La France a connu une importante élévation du prix de plusieurs produits alimentaires au milieu du XIXe siècle106, à la suite de l’occurrence concomitante

du développement de parasites et de mauvaises récoltes, ayant énormément diminué le volume annuel de la production107. Les crises alimentaires portent les germes de troubles sociaux et

politiques, ce qui incite les pouvoirs publics à accorder une grande importance à l'approvisionnement en produits alimentaires de la population en quantité suffisante108. Les prix

alimentaires ont ainsi un impact, panachés à l'évolution des idées politiques, sur la révolution française de 1789109. Beaucoup plus récemment, la hausse généralisée des prix des céréales sur les

marchés mondiaux de plus de 80 % entre mai 2007 et mai 2008 a engendré des émeutes, dites de la faim, dans plus de 35 pays dans le monde, suivies de phénomènes migratoires de petits producteurs devenus incapables de nourrir leurs familles110. La crise agricole que connaît la France plonge les

producteurs agricoles dans une situation sociale difficile111, ce qui fragilise d'autant plus les filières 105 CAHUZAC (E.), HASSAN (D.), MONIER-DILHAN (S.), Sécurité sanitaire des aliments : fausse alerte et vraie

crise, Économie et prévision n°177, 2007, p.55.

106 CHARBIT (Y.), Mise en perspective historique: la crise de 1846-1850, Working Paper du Centre Population et

Développement n°21, UMR 196 CEPED, Université Paris Descartes, INED, IRD, Paris, février 2012, p.3.

107 Le volume de la récolte de pommes de terre en 1845 revient alors au niveau atteint en 1832.

108 CHALMIN (P.), L'instabilité agricole : problématiques, mise en perspective historique et pistes de réflexion In

JACQUET (P.) LORENZI (J.-H.), Les nouveaux équilibres agroalimentaires mondiaux, Les cahiers, Le Cercle des économistes, PUF, 2011, p.37.

La formule latine panem et circenses, « du pain et des jeux pour la plèbe » illustre très bien cette préoccupation des pouvoirs publics durant l'antiquité romaine, que l'on peut retrouver sous une forme différente, « le boulanger, la boulangère et le petit mitron », quelques siècles plus tard pour le peuple parisien.

109 CHALMIN (P.), L'instabilité agricole : problématiques, mise en perspective historique et pistes de réflexion, op cit,

p.37.

L'automne 1787 est très voire trop pluvieux, alors que le printemps et l'été de l'année 1788 sont marqués par la sécheresse et par la grêle et diverses intempéries. Par conséquent, la récolte de l'année 1788 est mauvaise et faible en volume, ce qui tend à augmenter très significativement les prix alimentaires, et donc ensuite à jeter dans la rue le petit peuple urbain et les paysans.

110 PASTRÉ (O.), La crise alimentaire mondiale n'est pas une fatalité In JACQUET (P.) LORENZI (J.-H.), Les

nouveaux équilibres agroalimentaires mondiaux, Les cahiers, Le Cercle des économistes, PUF, 2011, p.27.

Nous percevons ici toute l'importance stratégique des produits alimentaires.

111 AFP, Un an après, la crise agricole ne faiblit pas, Dépêche AFP du 22 juillet 2016.

Le travail des cellules départementales chargées de mettre en œuvre le plan d'urgence du gouvernement consiste parfois plutôt à « permettre aux gens de quitter dignement le métier » lorsque la situation est trop critique (...). Certains, proches de la retraite et locataires de leur ferme, préfèrent travaille en intérim. Des quadragénaires laissent tout tomber après avoir remboursé leurs emprunts.

agroalimentaires, qui perdent elles aussi des emplois112. En raison de ce contexte très risqué113, les

pouvoirs publics affirment leur présence dans le secteur agroalimentaire par un niveau élevé d'intervention, dont le contrat est une modalité innovante. Les spécificités du secteur agroalimentaire et les tensions qui y règnent invitent à plaider pour un niveau d'intervention publique élevé.

IV. Intervention et présence importantes des pouvoirs publics dans le secteur agro aliment aire

11.Constitution progressive de l'administration agricole. Depuis l'Antiquité, les activités économiques de production agricole et alimentaire sont le théâtre de l'opposition entre la liberté du commerce et le contrôle administratif114. La prise en considération d'une certaine particularité des

produits agricoles par les économistes et par les pouvoirs publics a animé les débats, au XVIIIe siècle, entre physiocrates et mercantilistes au sujet de la nature économique des aliments. Si pour les physiocrates, emmenés par le docteur Quesnay, les aliments sont un bien économique comme les autres et peuvent par conséquent être soumis au libre échange115, les mercantilistes, tel que Necker,

considèrent au contraire l'aliment comme étant un bien spécifique qui relève de la nourriture des êtres humains et à ce titre de l'action des pouvoirs publics116. L'intervention des pouvoirs publics

peut se manifester notamment à travers la codification117. Les activités économiques et

commerciales ont fait l'objet d'une première codification par une ordonnance royale en 1673118.

les prix du lait trop bas pour rentabiliser leur investissement.

112 Association Nationale des Industries Alimentaires, Crise agricole et agroalimentaire : finissons en immédiatement

avec cette guerre des prix irresponsable et mortifère !, Communiqué de presse, 13 février 2016.

L'agroalimentaire français, composé de 15 789 entreprises dont 98 % de PME, souffre également. Un mal insidieux paralyse notre secteur en France. En 10 ans, l'agroalimentaire, premier employeur industriel de France, a perdu plus

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