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51.Premières apparitions. Adopté en 1966 par l'Assemblée générale des Nations Unies349 et entré

344 MORALES (S.) PARENT (G.), Définition de la sécurité alimentaire, bulletin de droit économique de la faculté de

droit de l'Université de Laval, 2014. V. www.droit-economique.org

345 Définition adoptée lors de la Conférence mondiale de l'alimentation, tenue à Rome et convoquée par l'Assemblée

générale des Nations Unies en 1974. A l'issue est adoptée la Déclaration Universelle pour l'élimination définitive de la faim et de la malnutrition.

346 SEN (A.), Poverty and Faminies : An essay on Entitlement and Deprivation, Presses d'Oxford, 1981.

347 STAATZ (J.-M.), D'AGOSTINO (V.-C.) SUNBERG (S.), 1990, Meausuring food security in Africa : conceptual,

empirical and policy issues, Amercian Journal of Agricultural economics, décembre 1990, p.1311-1317.

348 Définition établie lors du Sommet mondial de l'alimentation, 13-17 novembre 1996 à Rome.

en vigueur en 1976350, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels351

introduit le droit à l'alimentation dans sa forme contemporaine. Ce pacte est issu de la volonté de l'Assemblée Générale des Nations Unies en 1948 d'aller plus loin et de proposer une charte des droits de l'homme, ayant force juridique au niveau international352. Il s'agit de la première

inscription du droit à la sécurité alimentaire dans le droit positif.353 L'article 11 du PIDESC dispose

que le droit à une nourriture suffisante, ou à un aliment suffisant est le « droit fondamental qu'a toute personne d'être à l'abri de la faim ». En 1999, le Comité des Nations Unies sur les droits économiques, sociaux et culturels, adopte l'observation générale n° 12, qui fait foi quant au régime juridique de ce droit, son contenu, les obligations opposables aux États sur son fondement et son statut dans la hiérarchie des droits de l'Homme354. En 2000, la Commission des droits de l'homme

établit le mandat du rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation355. Par comparaison avec le

médicament, un droit à la santé prend ses racines lui aussi dans la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948356, véritable moment inaugural de l'épanouissement du droit international des

droits de l'homme après la seconde guerre mondiale357. En France, « la Nation garantit à tous (...) la protection de la santé »358. L'organisation mondiale de la santé, créée à la même époque,359 se

fixe pour objectif d'amener tous les peuples au niveau de santé le plus élevé possible. L'aliment partage donc avec le médicament cette caractéristique de faire l'objet d'un droit des individus. Le droit à l'alimentation, à travers le PIDESC, oblige les États, qui « adopteront, individuellement, et au moyen de la coopération internationale, les mesures nécessaires, y compris des programmes concrets : pour améliorer les méthodes de production, de conservation et de distribution des denrées alimentaires par la pleine utilisation des connaissances techniques et scientifiques, par la diffusion de principes d'éducation nutritionnelle et par le développement ou la réforme des régimes agraires, de manière à assurer au mieux la mise en valeur et l'utilisation des ressources naturelles ; Pour assurer une répartition équitable des ressources alimentaires mondiales par rapport aux 350 Le Pacte International relatif aux Droits Economiques Sociaux et Culturels est entré en vigueur le 3 janvier 1976. 351 Dit PIDESC, actuellement ratifié par 160 pays de par le Monde. La France a procédé à sa ratification en 1980. 352 DEL CORSO (F.), PATUREL (D.), Droit à l'alimentation, INRA UMR Innovation, 2013, p.3.

353 ROSENBERG (D.), le droit à la sécurité alimentaire : réponses et non réponses du droit international, In

COLLART DUTILEUL (F.). Penser une démocratie alimentaire, Volume 1, Inida, 2013, p.400.

Auparavant, ce droit n'était doté d'une portée juridique que dans des situations conjoncturelles. C'est l'exemple de la Convention de Genève relative aux prisonniers de guerre, 1949, art. 26, qui dispose que les prisonniers doivent bénéficier d'une ration quotidienne de base suffisante pour les maintenir en bonne santé.

354 ROSENBERG (D.), le droit à la sécurité alimentaire : réponses et non réponses du droit international, ibid, p.401.

Il s'agit du droit à un niveau de vie suffisant et du droit d'être à l'abri de la faim.

355 Résolution 2000/10 du 17 avril 2000. 356 DUDH, art. 25-1.

Il s'agit donc de la même source que pour le droit à l'aliment.

357 DE SCHUTTER (O.), Le protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et

culturels, Working paper du Centre de philosophie du droit de l'Université catholique de Louvain, 2005, p.1.

358 Préambule de la constitution du 27 octobre 1946, al. 11. 359 L'OMS est créée le 22 juillet 1946.

besoins, compte tenu des problèmes qui se posent tant aux pays importateurs qu'aux pays exportateurs de denrées alimentaires »360. Loin de n'être qu'une déclaration d'intention ayant la

nature de soft law, le droit à l'alimentation connaît de premières applications.

52.Premières applications. Adoptées par le Conseil de la FAO en novembre 2004361, les directives

volontaires représentent la première tentative faite par des gouvernements pour interpréter un droit économique, social et culturel et recommander les mesures à prendre pour assurer sa concrétisation362. L'adoption du Protocole facultatif en 2009363, son entrée en vigueur le 5 mai 2013,

et l'adoption d'observations générales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels créent progressivement un effet de justiciabilité des droits économiques, sociaux et culturels, parmi lesquels le droit à l'alimentation. On estime alors en effet qu'il peut y avoir violation de ces droits et qu'une réponse doit être apportée. Le protocole donne au Comité des droits économiques, sociaux et culturels une fonction nouvelle, puisqu'il peut recevoir des communications de la part de particuliers ou d'États qui mettent en avant une situation de violation d'un des droits du Pacte international. Possibilité est donnée au comité de mener une enquête, d'émettre des recommandations à destination des États ou de demander un complément d'information364.

Réciproquement, les États ont l'obligation de respecter, de protéger et de réaliser le droit à l'alimentation365, par la présentation de rapports au Comité des droits économiques, sociaux et

culturels sur les mesures adoptées et les progrès accomplis en vue d'assurer le respect des droits énoncés dans le PIDESC366 et ils sont tenus de « veiller à ce que des entreprises ou des particuliers

ne privent pas des individus de l'accès à une nourriture suffisante »367. Le juge peut être amené à

ordonner la fourniture d'un minimum de denrées alimentaires, et à contrôler l'effectivité de la mise en œuvre d'une politique publique. La Cour suprême argentine368 a ordonné aux pouvoirs publics

concernés de fournir immédiatement de l'eau potable et des aliments à des populations indigènes se trouvant dans une situation extrêmement dégradée369. La mise en place des programmes visant à

appliquer le droit à l'alimentation est également sous le contrôle du juge. En Inde par exemple, la 360 PIDESC, art. 11.

361 Adoptées à la cent vingt-septième session du Conseil de la FAO en novembre 2004.

362 Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture, les directives sur le droit à l'alimentation,

Documents d'informations et études de cas, Rome, 2006, p.181.

363 Protocole facultatif se rapportant au PIDECS, entré en vigueur le 1er février 2012 après la ratification par 10 États-

membres.

364 DEL CORSO (F.), PATUREL (D.), Droit à l'alimentation, INRA UMR Innovation, 2013, p.8. 365 DESC, obs. Gén. N° 12.

366 BUGNICOURT (J.-P.), COLLART DUTILLEUL (F.), Dictionnaire juridique de la sécurité alimentaire dans le

monde, Larcier, 2013, entrée « droit de l'alimentation ».

367 DESC, obs. Gén. n° 12.

368 Corte Suprema de Justicia de la Nacion, sentencia del 18 sept. 2007, Defensor del Pueblo de la Nacion c. Estado

nacional y otra.

Cour suprême370 a exigé la mise en œuvre effective des programmes en place concernant la

distribution des quotas de céréales disponibles conformément à la législation et au delà, la Cour suprême a défini précisément les catégories de personnes bénéficiaires de l'aide alimentaire en ajoutant notamment les populations tribales371. Le caractère raisonnable des mesures prises par les

pouvoirs politiques pour donner un effet tangible aux droits économiques, sociaux et culturels est également contrôlé372. L'aliment fait donc l'objet d'une législation internationale plus fournie, c'est

un objet juridique protégé. De très nombreuses lois garantissent l'accès de la population à l'alimentation, la distribution des ressources, notamment la terre et l'eau, le droit de les utiliser, d'en devenir propriétaire373. Ces dispositions sont d'autant d'importance dans un contexte où se

développent la spéculation sur les denrées alimentaires374 et la pratique de l'accaparement de terres,

qui consiste en l'orientation d'une part croissante des investissements internationaux vers la prise de contrôle direct sous des modalités diverses, comme des concessions, des achats ou des baux, de vastes étendues de terres là où elles sont réputées disponibles, bon marché et productives, en vue de produire directement des denrées alimentaires exportables375. Il s'agit donc de l'achat ou la location

à long terme de grandes superficies de terres par les investisseurs376. Le phénomène est d'une

intensité très forte, puisque plus de 60 % des investissements étrangers dans des terres agricoles réalisés entre 2000 et 2010377 ont eu lieu dans des pays présentant des lacunes en termes de sécurité

alimentaire, et ce alors que les deux tiers de ces investisseurs prévoient d'exporter tout ce qu'ils produiront sur ces terre378. La sécurité alimentaire des pays concernés commanderait pourtant que

les terres soient toutes mises au service des populations présentes sur le territoire de l'État379. Le 370 Supreme Court, People's Union for Civil Liberties v. Union of India & Ors, Writ Petition (Civil) n° 196/2001. 371 NIVARD (C.), « Section 3. Le droit à l'alimentation », op cit, p.253.

372 Constitutional Court of South Africa, The Government of the Republic of South Agrica ans Others v. Irene

Grootboom and Others, 2000 (11), BCLR 1169 (CC), Judgement decided on 4 October 2000.

373 GOLAY (C.), OZDEN (M.), Le droit à l'alimentation, un droit humain fondamental stipulé par l'ONU et reconnu

par des traité régionaux et de nombreuses constitutions nationales, Collection du programme Droits humains du

Centre Europe Tiers Monde, 2006, p.18.

374 GOLAY (C.), Droit à l'alimentation et accès à la justice, Bruylant, 2011, p.52 et s/.

Une des causes des crises alimentaires est la dépendance de certains pays aux importations provenant de pays exportateurs. La diminution des exportations fait diminuer l'offre, ce qui, par reflet avec une demande stable et proportionnelle à la population, pousse les prix à la hausse, permettant la spéculation sur les denrées alimentaires par certaines grandes entreprises transnationales et certains grands établissement financiers.

375 V. BUGNICOURT (J.-P.), COLLART DUTILLEUL (F.), Dictionnaire juridique de la sécurité alimentaire dans le

monde, Larcier, 2013, entrée : « accaparement de terres ».

376 DE SCHUTTER (O.), Comment aborder différemment le sujet de l'accaparement des terres, 2011, p.1.

V. www.ohchr.org

377 Notre terre, notre vie, Rapport d'OXFAM, 2012.

V. www.oxfam.org/fr/policy/ notre-terre-notre-vie

378 PAYET (J.-P.), L'appétit pour les terre agricoles menace-t-il la sécurité alimentaire mondiale ?, Publication du

groupe Momagri, 2013. V. www.momagri.org

379 COLLART DUTILLEUL (F.), Quel regard sur le phénomène d'accaparement de terres ? , Éditorial du programme

de recherche Lascaux, 2011. V. www.droit-aliment-terre.eu

droit des contrats apparaît en cause puisque l'accaparement de terres est réalisé par des contrats qui laissent aux accapareurs une grande liberté d'investissement, de production et de gestion de l'exploitation. S'ils sont pratiquement toujours conclus de manière opaque, c'est d'ailleurs en partie parce que ces contrats ne comportent pas d'engagements lourds en contrepartie pour les investisseurs. Si les crises alimentaires ont entraîné le développement d'un droit à l'alimentation, les crises sanitaires ont poussé à la cristallisation d'un droit alimentaire.

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