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Encadré V.2 — Les dix territoires d’étude

3.2. Les dimensions infra-communales de la précarité sociale

Les îlots sont décrits suivant une démarche proche de celle adoptée pour caractériser les communes. Les descripteurs de la précarité sociale sont sensiblement identiques, à deux exceptions près cependant. Premièrement, la part des familles monoparentales n’a pu être considérée, cet indicateur n’étant disponible que dans l’exploitation au quart du recensement

de population68. Le faible poids démographique d’un grand nombre d’îlot interdit d’utiliser ce type de variable à cet échelon d’observation. Deuxièmement, afin de mieux cerner les différences de morphologie du tissu urbain, on a ajouté à cet échelon la part des logements dans des immeubles de dix logements (cette variable est abrégée sous la forme « LOG10 » dans les tableaux suivants).

A ce stade de l’analyse, nous n’avons pu intégrer de dimension temporelle à la caractérisation du profil des îlots. Contrairement au maillage des communes, caractérisé par sa stabilité dans le temps, le découpage en îlots varie d’un recensement à l’autre. Certains îlots définis en 1990 peuvent avoir été scindés en îlots plus fins en 1999, ou au contraire agrégés, ou encore, peuvent avoir subi des modifications de leurs tracés. Il est donc impossible de suivre la trajectoire de ces îlots entre les deux recensements. Néanmoins, on pourra observer dans le chapitre 11, l’évolution des groupes d’îlots qui entrent dans la composition des mêmes quartiers en 1990 et 1999 – en l’occurrence, des quartiers définis comme prioritaires dans le cadre de la politique de la ville.

• Les effets du changement d’échelle sur les covariations entre indicateurs

On retrouve ici la règle générale qui veut que l’hétérogénéité des unités géographiques observées augmente à mesure que l’échelon d’observation s’affine. Cet effet est encore renforcé par la multiplication du nombre des unités géographiques considérées. Ces deux éléments se combinent pour abaisser, d’une manière générale, le niveau de covariation entre les indicateurs pris deux à deux. Toutes choses égales par ailleurs quant au niveau général des relations entre variables, on cherche à apprécier dans quelle mesure les associations spatiales de variables observées à l’échelon des communes urbaines se retrouvent à l’échelon des îlots.

On est tout d’abord frappé par la constance de la covariation des trois indicateurs, respectivement la part des chômeurs, celle des non-diplômés et celle des étrangers hors UE (tableau V.3). Aussi bien à l’échelon communal qu’à celui des îlots, ils apparaissent parmi les plus structurants de la diversité géographique des contextes locaux de la précarité sociale. Les covariations entre les autres indicateurs sont, d’une part, moins fortes que celles observées entre ce noyau de trois variables et d’autre part, ne suivent pas toujours les mêmes logiques que celles notées à l’échelon des communes.

Tableau V.3 — Corrélations entre les indicateurs de précarité sociale en 1999, échelon des

îlots

CHOM CDD INT TP AID OS OQ EMP NDIP MEN6 0_24 ETHUE HLM 10LOG CHOM 0,18 0,21 0,11 0,15 0,36 0,22 0,04 0,54 0,27 0,18 0,54 0,28 0,24 CDD 0,18 0,05 0,16 0,06 0,15 0,09 0,04 0,19 0,07 0,07 0,24 0,10 0,14 INT 0,21 0,05 0,07 0,07 0,20 0,17 0,07 0,20 0,12 0,10 0,20 0,15 0,13 TP 0,11 0,16 0,07 0,11 0,07 -0,02 0,05 0,11 0,08 0,12 0,12 -0,02 -0,03 AID 0,15 0,06 0,07 0,11 0,11 0,07 0,09 0,13 0,14 0,11 0,12 0,16 0,10 OS 0,36 0,15 0,20 0,07 0,11 0,21 0,02 0,52 0,25 0,18 0,44 0,26 0,16 OQ 0,22 0,09 0,17 -0,02 0,07 0,21 0,03 0,35 0,21 0,17 0,21 0,17 0,03 EMP 0,04 0,04 0,07 0,05 0,09 0,02 0,03 0,11 0,02 0,11 0,01 0,33 0,25 NDIP 0,54 0,19 0,20 0,11 0,13 0,52 0,35 0,11 0,34 0,23 0,61 0,33 0,21 MEN6 0,27 0,07 0,12 0,08 0,14 0,25 0,21 0,02 0,34 0,56 0,38 0,26 0,09 0_24 0,18 0,07 0,10 0,12 0,11 0,18 0,17 0,11 0,23 0,56 0,25 0,36 0,18 ETHUE 0,54 0,24 0,20 0,12 0,12 0,44 0,21 0,01 0,61 0,38 0,25 0,19 0,30 HLM 0,28 0,10 0,15 -0,02 0,16 0,26 0,17 0,33 0,33 0,26 0,36 0,19 0,61 10LOG 0,24 0,14 0,13 -0,03 0,10 0,16 0,03 0,25 0,21 0,09 0,18 0,30 0,61

Cf. encadré V.1 pour le dictionnaire des variables

Sources : INSEE, RP 1999

Les relations entre les indicateurs relatifs à l’emploi apparaissent plus complexes à l’échelon infra-communal qu’à celui des communes. Les parts relatives des deux catégories d’ouvriers, fortement associées à l’échelon communal, le sont nettement moins à celui des îlots (tableau V.3). Leur répartition à l’intérieur des espaces résidentiels communaux n’est donc pas systématiquement associée. Comme à l’échelon communal cette fois, l’association entre la distribution des ouvriers spécialisés et celle des autres indicateurs de précarité est plus forte que celle observée pour les ouvriers qualifiés. Deuxième différence avec les relations qui valent à l’échelon communal, la représentation des salariés en intérim se confond ici nettement moins avec celle des ouvriers. Enfin, à l’échelon infra-communal, la répartition des employés dans l’espace résidentiel se singularise fortement de celle des autres indicateurs, à l’exception notable de ceux relevant de la structure des logements. On observe ainsi une covariation assez forte entre la distribution des employés et celle des ménages logés en HLM et/ou de la part des logements en immeubles collectifs.

On retrouve la relation structurelle entre la part des ménages de grande taille et celle des moins de 25 ans. Ceci étant, les distributions de ces deux indicateurs ne se confondent qu’en partie. Comme à l’échelon communal, la répartition des ménages de grande taille se rapproche davantage de celles des indicateurs de précarité de l’emploi, que ne le fait la répartition des moins de 25 ans.

Enfin, fait notable, le changement d’échelle nuance de façon significative la relation entre la répartition spatiale de la part des ménages résidants en HLM, et celle de la part des étrangers hors UE. La relation n’est pas inexistante à l’échelon de l’îlot, mais elle est

nettement moins systématique. Ainsi, la représentation des étrangers hors UE dans les îlots est davantage liée avec la part des logements collectifs, qu’avec celle du logement social.

• Principales composantes des différenciations inter-îlots

La prise en compte simultanée de l’ensemble de ces covariations permet d’identifier trois composantes sociales majeures de la structure des contextes infra-communaux de la précarité sociale, communes à l’ensemble des dix territoires observés.

¾ Première composante : une échelle infra-communale de la précarité

On retrouve à l’échelon des îlots la force des logiques cumulatives dans la répartition spatiale des indicateurs de précarité sociale. La première composante, résumant plus du quart des différenciations entre les 6409 îlots considérés, prend bien la forme d’une échelle de concentration des situations de précarité, dans la composition de laquelle entre en premier lieu, la part des non-diplômés, celle des étrangers hors UE et celle des chômeurs et, dans une moindre mesure, la part des ouvriers spécialisés, celle des ménages logés en HLM et celle des familles de grande taille.

¾ Deuxième composante : sur ou sous-représentation des employés et des logements

collectifs et sociaux

La deuxième composante a une capacité explicative plus faible (un peu plus de 10% de la variance). Néanmoins les associations de variables qu’elle décrit permettent de distinguer deux modèles d’îlots, toute choses égales part ailleurs quant à leur position sur « l’échelle infra-communale de la précarité ». Le premier se caractérise par la présence des employés et des logements collectifs et sociaux, le second, par la sous-représentation de ces catégories.

¾ Troisième composante : la structure démographique des îlots

Les îlots peuvent ensuite être classés selon la part des moins de 25 ans et des familles de grande taille. Indépendante des deux composantes précédentes, cette dimension de la division sociale spatiale infra-communale rend compte d’environ 8% du total des différenciations observées entre l’ensemble des îlots.

Les composantes suivantes, sont déterminées par les formes d’emploi précaire, en particulier la part du temps partiel (axe 4) et celle des intérimaires et celle des emplois aidés qui entrent dans la composition des axes 5 et 6, qui n’ont que faiblement contribué à la

définition des dimensions précédentes. La spécificité de ces facteurs souligne la complexité des logiques suivant lesquelles les indicateurs de la précarité de l’emploi différencient l’espace infra-communal ici considéré.

Comme on pouvait s’y attendre, la structure des différenciations spatiales introduites par la répartition des indicateurs de précarité sociale est moins ferme à l’échelon des quelques 6400 îlots qu’à celui des 626 communes urbaines. Les composantes les plus structurantes ont ainsi une capacité explicative moindre, même si la première composante – « l’échelle infra- communale de précarité » – revêt un intérêt synthétique indéniable. Dans ce cas, il est préférable de s’appuyer sur les indicateurs de base, plutôt que sur les composantes principales, pour effectuer une typologie des îlots.