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Chapitre 2: La « pornographie » : une notion à contenu variable

B) Les comportements justifiant la censure juridique

1) Les contenus à caractère violent ou dégradant

L’interdiction de certains contenus s’explique par le fait que la mise en scène des comportements sexuels est violente ou présente un caractère dégradant, contraire à la dignité de la personne363, telle qu’incriminée par l’article 227-24 du C.pén. et l’article 163 du C.crim. Ces comportements constituent de la pornographie, mais ils ne sont pas tolérés par la société. C’est ainsi qu’il faut faire une distinction entre les différents contenus pornographiques364.

Le Guide relatif à la réponse du Gouvernement fédéral aux rapports sur les infractions

sexuelles à l’égard des enfants et sur la pornographie et la prostitution du Gouvernement

du Canada distingue les différents types de documents pornographiques qui « désigne une représentation visuelle d’actes sexuels, notamment les rapports sexuels vaginaux, anaux ou oraux, ou qui montre un comportement sexuel violent, la bestialité, l’inceste, la nécrophilie,

362 T.corr. Bressuire, 15 janv. 1968, Gaz.Pal. 1968.1.somm.6.

363 Cette notion sera étudiée plus longuement dans un autre développement (Infra, p. 109).

364 Il y a donc une distinction entre la pornographie violente et non violente (Voir : K. BARBE, préc., note 347, p. 4).

la masturbation ou l’éjaculation »365. Cette définition rejoint celle des « comportements sexuellement explicites » que nous avons donnée précédemment. Parmi ces documents, il y a également les documents pornographiques à scènes de violence qui montrent « l’altération – réelle ou simulée – permanente ou importante du corps ou de ses fonctions », les documents pornographiques dégradants qui montrent « la défécation, l’urologie, l’éjaculation et l’expectoration par une personne sur une autre, la lactation, la menstruation, la pénétration d’un orifice corporel avec un objet, une personne attachée, une personne qui en traite une autre comme un animal ou un objet ou se traite ainsi, ou une personne qui tente de s’avilir ou d’en avilir une autre », et enfin, les comportements sexuels violents qui signifient « toute forme d’agression sexuelle qui, dans l’intention apparente d’apporter une satisfaction ou une stimulation de nature sexuelle au spectateur, montre[nt] une personne s’infliger – ou faire semblant de s’infliger – des douleurs physiques – réellement ou en apparence – ou en infliger à une autre »366. Tous ces comportements présentent un danger à l’intégrité physique et psychique de la personne. Ils sont donc incriminés par le droit criminel canadien, comme français367. L’aspect sexuel ne vient qu’apporter un élément de plus au comportement incriminé. En effet, toute violence contre une personne, qu’elle soit sexuelle ou non, est condamnée. C’est pour cette raison que l’article 227-24 du C.pén., qui remplace l’ancien article 283 relatif à l’outrage aux bonnes mœurs, incrimine aussi bien les messages « à caractère violent ou pornographique ou de nature à porter gravement atteinte à la dignité humaine »368. Toutefois, il ne s’applique qu’aux messages susceptibles d’être vus

ou perçus par des mineurs369. Autrement dit, seulement à ceux mettant en péril les mineurs

365 GOUVERNEMENT DU CANADA, Guide relatif à la réponse du Gouvernement fédéral aux rapports sur les infractions sexuelles à l’égard des enfants et sur la pornographie et la prostitution, Ottawa, Gouvernement du Canada, 1986, p. 31; Voir : J. BERCOVITCH et G. BUSQUE, préc., note 290, p. 6. 366 Id., GOUVERNEMENT DU CANADA.

367 Dans le Code pénal français, il y a un chapitre II relatif aux « atteintes à l’intégrité physique ou psychique de la personne » dans le titre II, du Livre 2 « Des crimes et délits contre les personnes ». Dans le Code criminel canadien, il s’agit de la partie V relative aux « infractions d’ordre sexuel, actes contraires aux bonnes mœurs, inconduite » et la partie VIII sur les « infractions contre la personne et la réputation ».

368 « Le fait soit de fabriquer, de transporter, de diffuser par quelque moyen que ce soit et quel qu’en soit le support un message à caractère violent ou pornographique ou de nature à porter gravement atteinte à la dignité humaine, soit de faire commerce d’un tel message, est puni de trois ans d’emprisonnement et de 75000 euros d’amende lorsque ce message est susceptible d’être vu ou perçu par un mineur ».

369 La notion de violence ne semble pas aussi claire en droit français. En effet, la notion est considérée comme flou et incertaine, puisque « la violence ne se résume pas à une atteinte physique exercée à l’encontre d’autrui », d’après la Défenseure des enfants Madame Claire BRISSET. D’ailleurs, la Cour de cassation a estimé que les violences ou les voies de faits pouvaient être constituées si les faits litigieux étaient de nature à « provoquer une sérieuse émotion » ce qui est une définition beaucoup trop large. (Claire BRISSET, Les enfants face aux images et aux messages violents diffusés par les différents supports de communication, Défenseure des enfants, Paris, Ministère de la Justice, déc. 2002, en ligne : <http://www.ladocumentationfrancaise.fr/rapports-publics/024000633/index.shtml>, (consulté le 23 sept.

ce qui limite beaucoup le champ d’application. Tous ces actes comportent une part importante de violence et de dégradation de la personne humaine, ce qui explique la censure de ces documents. L’aspect sexuel est secondaire.

En principe, cette interdiction de messages de violence ou de dégradation de la personne humaine par le biais de scènes sexuelles, est applicable à toute la société sans distinction entre personnes majeures ou mineures. Toutefois, il en va différemment pour les autres comportements sexuellement explicites. En effet, ils ne peuvent pas être diffusés devant n’importe quel public.

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