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L’exil et le thème de la séparation

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1.2.1. L’absurde : tragique de la condition ou pathologie ?

1.2.2.5 L’exil et le thème de la séparation

Albert Camus et Arthur Koestler font tous deux l’expérience douloureuse de l’exil. A cause de son appartenance ethnique, Koestler éprouve le sentiment d’être un éternel déraciné, « les juifs sont une race malade, leur maladie est d’être déracinés ; ils ne peuvent être guéris qu’en prenant de nouveau racine dans leur terre »465, écrit-il dans La Tour d’Ezra466. Il dit ainsi l’importance de la terre. L’exil serait une maladie héréditaire dont il aurait lui-même hérité de ses deux grands-pères. « Ainsi mes deux grands-pères avaient brisé les nœuds sacrés de la vie bourgeoise. L’un entra en scène, surgi du néant, l’autre disparut dans le néant467 ; tous deux étaient des exilés et des fugitifs. A cet égard, au moins, j’ai suivi leur trace. »468 Le personnage de Scriassine, « l’éternel émigré »469, créé par Simone de

464 « Notes et plans », Appendices du « Premier Homme » in : OC IV, p. 932.

465 Arthur Koestler, La Tour d’Ezra, traduit de l’anglais par Hélène Claireau, Paris, Calmann-Lévy, 1947, p. 340 ; Thieves in the Night, Chronicle of an experiment, Londres, Editions du Danube, 1965, p. 261 : « But Jewry is a sick race ; its disease is homelessness, and can only be cured by abolishing its homelessness ».

466 « Il s’agit de la chronique d’un kibboutz, fondé au cours des années 36-39, lors de la première guerre larvée qui a opposé juifs et arabes. Le récit commence le jour où est fondée la nouvelle colonie, selon le scénario mis au point au cours de ces années pour minimiser les risques face aux agressions arabes. Les collines caillouteuses, achetées à prix d’or par l’Agence juive, qui constituent « La Tour d’Ezra », ont été occupées dans la nuit par la Haganah. Les vingt-cinq jeunes pionniers vont, avec l’aide des membres de la colonie qui les parraine, installer en un jour d’abord la tour de guet, puis les palissades de protection, enfin seulement les baraquements d’habitation et le réfectoire. Et dès le premier soir, il leur faudra repousser dans l’obscurité une attaque de combattants arabes : la ténacité des défenseurs mettra aisément en échec l’ardeur sbrouillonne des assaillants, mais ce premier combat verra tout de même la mort d’un jeune pionnier, trop nerveux, qui deviendra le premier martyr de la colonie. », Roland Quilliot, Arthur Koestler : De la désillusion tragique au rêve d’une nouvelle synthèse, op. cit., p. 113.

467 Il s’agit de son grand-père maternel Jacob Zeiteles exilé en Amérique pour préserver l’honneur de la famille après la ruine causé par un de ses gendres.

468 Pierre Debray-Ritzen, Arthur Koestler. Un Croisé sans Croix, op. cit., p. 18. 469 Ibid., p. 163.

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Beauvoir dans Les Mandarins, lui colle à la peau et rend compte de son existence de « nomade » :

Ce visage triangulaire, aux pommettes saillantes, aux yeux vifs et durs, à la bouche mince et presque féminine, ce n’était pas un visage français ; l’URSS était pour lui un pays ennemi, il n’aimait pas l’Amérique : pas un endroit sur la terre où il se sentît chez lui470.

Simone de Beauvoir met l’accent sur son scepticisme, son pessimisme et son fervent anticommunisme. Dans The Age of Longing, Koestler s’inspire du Castor pour créer l’épouse du professeur Pontieux : une femme haïssant viscéralement l’Amérique la jugeant trop matérialiste et l’accusant de vouloir coloniser la France.

L’auteur hongrois reconnaît : « Je suis né nomade et je reste nomade. Avec un père hongrois, une mère autrichienne, un grand-père russe et l’autre tchécoslovaque, je suis issu d’une telle mosaïque de nations que cela ne pouvait faire qu’un mélange explosif »471. Toutefois, Koestler cherchera sa vie durant une terre où « s’enraciner ». La recherche d’une patrie est une des raisons de son adhésion au mouvement sioniste.

Peut-être l’idée d’un « Foyer national » me séduisait-elle avec d’autant plus de force que j’habitais depuis mon enfance des hôtels et des pensions de famille. Cosmopolite déraciné dès mes premiers ans, de culture polyglotte, déménageant continuellement, j’éprouvais peut-être le besoin inconscient de m’enraciner, le désir de créer et de construire, de bâtir des villes dans le désert et des jardins dans les marécages472.

Koestler considérait que le seul remède à la maladie du déracinement des juifs était le sionisme. Il semble nécessaire de revenir sur l’itinéraire parcouru par l’auteur hongrois au fil de son existence afin de mesurer l’importance du motif de l’exil. Né à Budapest en 1905, il n’a que quatorze ans quand sa famille décide de s’installer à Vienne. En 1926, il a déjà abandonné ses études et part en Palestine

470 Simone de Beauvoir, Les Mandarins I, Paris, Gallimard, Folio, 1954, p. 52. 471 Le Figaro, 17 décembre 1965.

472 Arthur Koestler, La Corde raide in : Arthur Koestler. Œuvres Autobiographiques, Phil Casoar (Dir.), op. cit., p. 103.

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nouveau en Palestine. Il s’installe à Paris en 1929 et finit par rejoindre, un an après, la capitale allemande. Il adhère au Parti Communiste et se rend en URSS en 1932. Il voyage à travers les terres soviétiques et retourne en Europe en 1933 sur ordre du Komintern. En 1936, il part en Espagne, est arrêté, emprisonné – l’emprisonnement est une forme d’exil ̶ et condamné à mort. Il finit néanmoins par être libéré. Il regagne l’Angleterre, et plus précisément, Londres en 1937. En 1939, il est arrêté à Paris. Jugé « étranger indésirable », il est interné au camp du Vernet. Libéré et de nouveau arrêté, il s’engage dans la Légion étrangère. De Marseille, il lui faut passer par l’Afrique du Nord et par le Portugal pour enfin pouvoir regagner l’Angleterre. En 1944, il repart un mois en Palestine. En 1946, il séjourne à Paris, et, en 1948, aux Etats-Unis et en Palestine. Il s’installe en France en 1949, la quitte en 1950 pour s’installer aux Etats-Unis, pour finalement s’installer définitivement à Londres après l’acquisition d’une maison de Montpelier Square en 1952. En 1959, il voyage en Inde et au Japon. En 1968, il visite l’Australie, l’Océanie et les Caraïbes. Il finira ses jours dans sa maison de Montpelier Square. Dans la biographie de l’auteur, Koestler. The Indispensable Intellectual, Michael Scammell résume l’éternel exil koestlérien :

[…] " perpetually in search of a country" , in Malraux’s words, […] He was a chameleon, a vagabond, and a pilgrim, constandly changing and reinventing himself, inhaling, as it were the essence of each place he stayed in, while remaining perpetually alien to his surroundings. Never fully Hungarian, not quite Austrian or German, a Jew who had turned away from Judaism, incapable of being french, definitely not an Englishman, and unwilling to accommodate himself even to the melting pot of multicultural America, he wandered the earth like a moderne Quixote in search of a spiritual homeland474.

473 Le Dr Moshe Har-Even, un psychanalyste russe de Tel-Aviv et membre du mouvement révisionniste, avait conseillé à Koestler de retourner à Vienne et de reprendre ses études. Il lui avait dit : « Si tu ne termines pas tes études, tu deviendras un vagabond. Quelque succès que tu finisses par obtenir, tu seras toujours un évadé, un fugitif sur la terre, et tous les gens respectables sentiront sur toi l’odeur du vagabond. », Arthur Koestler, La Corde raide in : Arthur Koestler. Œuvres Autobiographiques, Phil Casoar (Dir.), op. cit., p. 147.

474 Michael Scammel, Koestler. The Indispensable Intellectual, op. cit., p. XVIII ; « [...] "perpétuellement à la recherche d'un pays", selon les mots de Malraux, [...] C'était un caméléon, un vagabond, un pèlerin qui changeait et se réinventait constamment, inhalant l'essence de chaque lieu où il séjournait, tout en restant perpétuellement étranger à son entourage. Jamais complètement

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L’exil est par définition la situation de quelqu’un qui est expulsé ou obligé de vivre hors de sa patrie. L’exil signifie également « l’éloignement ». Albert Camus semble davantage faire référence à cette deuxième définition, notamment dans La Peste, le roman de la séparation par excellence. « La ville de La Peste est une ville d’exil »475. On y dénombre pas moins de dix-neuf occurrences du vocable « exil », trois du terme « exilés », une du substantif « exilé », trente utilisations de l’expression « séparation », quatorze emplois de l’adjectif « séparés », cinq occurrences de l’adjectif au singulier « séparé », dix-sept apparition du mot « quarantaine »476, onze usages du nom « isolement » et cinq du verbe « isoler ». A la suite d’une invasion épidémique (la peste), la ville d’Oran est coupée du monde. Le fléau impose la mise en quarantaine de la ville et de ses habitants. « Ainsi, la première chose que la peste apporta à nos concitoyens fut l’exil »477. La première forme d’exil au sein de l’œuvre se traduit par l’isolement des malades, « […] les familles devaient obligatoirement déclarer les cas diagnostiqués par le médecin et consentir à l'isolement de leurs malades dans les salles spéciales de l'hôpital »478. L’isolement prend petit à petit de l’ampleur, les proches des malades doivent à leur tour être mis en quarantaine, « Les maisons des malades devaient être fermées et désinfectées, les proches soumis à une quarantaine de sécurité […] »479. C’est à la fin du premier chapitre que sont déclarés l’état de peste et la fermeture de la ville, « Rieux regardait la dépêche officielle que le préfet lui avait tendue […] La dépêche portait : « Déclarez l'état de peste. Fermez la ville »480. On distingue alors deux types d’exil dans la ville : « l’exil chez soi »481 et l’exil des « voyageurs surpris par la peste »482, d’un côté ou de l’autre des murs de la ville, dont le représentant le plus illustre dans l’œuvre est le journaliste Raymond Rambert.

hongrois, pas tout à fait autrichien ou allemand, juif qui s'était détourné du judaïsme, incapable d'être français, certainement pas anglais, et peu disposé à s'accommoder au melting pot de l'Amérique multiculturelle, il errait sur la terre comme un moderne Quichotte à la recherche d'une patrie spirituelle ».

475 Emmanuel Mounier, « Albert Camus ou l’appel des humiliés » in Malraux, Camus, Sartre, Bernanos. L’Espoir des désespérés, Paris, Coll. Points, Ed. du Seuil, 1953, p. 77.

476 Utilisé dans le sens d’isolement. 477 La Peste in : OC II, p. 81. 478 Ibid., p. 69. 479 Ibid., p. 77. 480 Ibid. 481 Ibid., p. 83. 482 Ibid.

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préparés. Des mères et des enfants, des époux, des amants qui avaient cru procéder quelques jours auparavant à une séparation temporaire, qui s'étaient embrassés sur le quai de notre gare avec deux ou trois recommandations, certains de se revoir quelques jours ou quelques semaines plus tard483.

Seuls les télégrammes relient encore les Oranais au reste du monde, les lettres ayant été interdites pour éviter tout risque de véhiculer l’infection et les communications téléphoniques restreintes aux cas urgents. « Des êtres que liaient l'intelligence, le cœur et la chair, en furent réduits à chercher les signes de cette communion ancienne dans les majuscules d'une dépêche de dix mots »484. Cette séparation douloureuse, intimement liée à l’épidémie, ne pourrait cesser qu’avec la disparition du mal qui s’était abattu sur la ville. Des deux formes d’exil présentées, la plus éprouvante est sans doute l’exil de ceux qui ne font pas partie des habitants. « Dans l'exil général, ils étaient les plus exilés, car si le temps suscitait chez eux, comme chez tous, l'angoisse qui lui est propre, ils étaient attachés aussi à l'espace et se heurtaient sans cesse aux murs qui séparaient leur refuge empesté de leur patrie perdue »485. Et parmi ceux-ci les plus éprouvés sont encore les amants séparés, à l’instar de Rambert éloigné de celle qu’il aime. Prisonnier de la peste, il tente légalement et illégalement de regagner Paris. Toutes ses tentatives échouent, et, puis, lorsque son départ semble enfin être possible, il y renonce et annonce au docteur Rieux « je ne pars pas et je veux rester avec vous »486. Convaincu qu’ « il peut y avoir de la honte à être heureux tout seul » et qu’il s’en trouverait gêné « pour aimer celle qu’il avait laissée »487, il intègre le groupe de volontaires dans leur lutte contre la peste. A travers le personnage de Rambert, Camus développe sa conception du bonheur qui ne semble viable qu’au sein de la solidarité entre les hommes. L’auteur a lui-même vécu une expérience similaire lors de la Seconde Guerre Mondiale. Exilé en France de mars à fin novembre 1940, loin de son épouse restée à Alger, il rejoint le mouvement de la Résistance pour combattre l’ennemi. L’exil qui sous-tend le problème du déracinement préoccupe Camus et justifie sa

483 La Peste in : OC II, p. 78. 484 Ibid., p. 79. 485 Ibid., p. 83. 486 Ibid., p. 177. 487 Ibid., p. 178.

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position politique concernant la douloureuse question algérienne. Voulant éviter le déracinement de l’homme, il rêve de voir coexister deux cultures, deux peuples.

Sur cette terre sont réunis un million de Français établis depuis un siècle, des millions de Musulmans, Arabes et Berbères, installés depuis des siècles, plusieurs communautés religieuses, fortes et vivantes. Ces hommes doivent vivre ensemble, à ce carrefour de routes et de races où l’histoire les a placés. Ils le peuvent, à la seule condition de faire quelques pas les uns au-devant des autres, dans une confrontation libre488.

Dans un article de Combat, repris dans Actuelles I, Camus aborde le thème de la séparation. On est en 1944 et il écrit :

La France a vécu beaucoup de tragédies qui, aujourd’hui, ont reçu leur dénouement. Elle en vivra encore beaucoup d’autres qui n’ont pas commencé. Mais il en est une que, depuis cinq ans, les hommes et les femmes de ce pays n’ont pas cessé de souffrir, c’est celle de la séparation489.

Il évoque « les signes misérables de l’époque »490 à travers « la patrie lointaine, les amours tranchées, ces dialogues d’ombres […] ou ces monologues stériles »491. La peste c’est également l’allégorie du nazisme, la peste brune. Dans une lettre à Roland Barthes, Camus confirme « le contenu évident de la peste, c’est la lutte de la résistance européenne contre le nazisme »492. Bernard Alluin constate que le roman restitue l’atmosphère de l’occupation allemande, « couvre-feu, lignes de démarcation infranchissables, rationnement de l’essence, pénurie de denrées alimentaires, longues queues devant les boutiques, marché noir […] camps d’isolement, ghettos, fours crématoires»493. A une plus grande échelle, La Peste renvoie à toutes les luttes contre les systèmes totalitaires, de « toutes les résistances contre toutes les tyrannies »494. Marie Thérèse Blondeau constate la correspondance entre la peste et la guerre à travers deux extraits quasi-identiques, l’un provenant

488 « Pour une trêve civile en Algérie », Actuelles III in : OC IV, p. 375-376. 489 « La chair », Actuelles I in : OC II, p. 413.

490 Ibid. 491 Ibid.

492 « Lettre à Roland Barthes sur La Peste », Appendices de La Peste in : OC II, p. 286. 493 Bernard Alluin, « La Peste » in : Dictionnaire Albert Camus, op. cit., p. 665. 494 « Lettre à Roland Barthes sur La Peste », Appendices de La Peste in OC II, p. 287.

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versant positif de ce même thème et que l’on retrouve surtout dans les essais « solaires » de l’auteur. « La patrie perdue de l’exilé, son « royaume » « coïncide avec une certaine vie libre et nue » marquée par la nature et la beauté »496. La Peste est également « l’illustration concrète d’un problème métaphysique, celui du mal »497. A travers l’épidémie, Camus pose le problème du mal498 et dénonce la force destructrice d’un pouvoir absolu.

Ce mal du siècle traduit le Zeitgeist du XXe siècle et pose assurément le problème du mal. A cette époque, ̶ une époque que Camus nomme « Le temps des meurtriers », « dark times »499, selon l’expression d’Hannah Arendt ̶ le mal se manifeste par la montée des systèmes totalitaires et se définit selon la réflexion de Tzvetan Todorov comme « un terme […] recouvrant une série de violence fort variées : guerres, génocides, massacres, tortures, viols, crimes, souffrances

495 Marie Thérèse Blondeau, « La Peste, Roman de la Résistance ? » in : Albert Camus 22. Camus et l’Histoire, op. cit., p. 42 : « La guerre a éclaté. Où est la guerre ? En dehors des nouvelles qu'il faut croire et des affiches qu'il faut lire, où trouver les signes de l'absurde événement ? Elle n'est pas dans ce ciel bleu sur la mer bleue, dans ces crissements de cigales, dans les cyprès des collines. Ce n'est pas ce jeune bondissement de lumière dans les rues d'Alger. On veut y croire. On cherche son visage et elle se refuse à nous. Le monde seul est roi et ses visages magnifiques. Avoir vécu dans la haine de cette bête, l'avoir devant soi et ne pas savoir la reconnaître. Si peu de choses ont changé. Plus tard, sans doute, viendront la boue, le sang et l'immense écœurement. Mais pour aujourd'hui on éprouve que le commencement des guerres est semblable aux débuts de la paix : le monde et le cœur les ignorent.», « Cahier III » in : OC II, p. 884 ; « La peste a éclaté. Où est la peste ? En dehors des nouvelles qu'il faut croire et des affiches qu'il faut lire, où trouver les signes de l'absurde événement ? Elle n'est pas dans ce ciel bleu sur la mer bleue, dans ces crissements de cigales, dans les cyprès des collines. Ce n'est pas ce jeune bondissement de lumière dans les rues d'O. On veut y croire. On cherche son visage et elle se refuse à tous. Le monde seul est roi et ses visages magnifiques. Avoir devant soi cette bête "effrayante" et ne pas savoir la reconnaître. Si peu de choses ont changé. Plus tard, sans doute viendront les morts, l’entassement et la terreur. Mais pour aujourd’hui on éprouve que le commencement des fléaux est semblable au début du bonheur : le monde et le cœur les ignorent», cité par Marie-Thérèse Blondeau, « La Peste, Roman de la Résistance ? » in : Albert Camus 22. Camus et l’Histoire, op. cit., p. 42.

496 Eveline Caduc, « Exil » in : Dictionnaire Albert Camus, op. cit., p. 299. 497 Lettre de Camus à Mme Albert Rioux, 14 janvier 1948.

498 Le motif du mal dans la réflexion d’Albert Camus sera développé dans notre analyse selon deux aspects : historique et métaphysique.

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infligées et subies »500. Par leurs œuvres et par leurs parcours journalistiques, Albert Camus et Arthur Koestler s’engagent dans la lutte antitotalitaire.

500 Tzvetan Todorov, L’expérience totalitaire. La signature humaine 1, Paris, Ed. du Seuil, 2011, p. 284.

115 1.3.1. De L’Antitotalitarisme

« Prendre un billet au départ, dans un parti, dans une faction, et ne plus jamais regarder comment le train roule et surtout sur quoi il roule, c’est pour un homme se placer résolument dans les meilleures conditions pour se faire criminel. »501

iscéralement opposés à tout système totalitaire, Albert Camus et Arthur Koestler militent activement contre tous les régimes qui bafouent et oppriment l’existence humaine. Les deux essayistes passent au crible le Communisme, le Nazisme et le Fascisme et revendiquent, contre eux, le respect de la dignité humaine. De l’essai au roman, ils déploient toutes les ressources de l’écriture pour exprimer leurs différentes prises de position en faveur des peuples victimes de répressions. Une grande cause les unit : celle de l’Espagne, pays auquel ils vouent un amour sincère et profond.