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L’inscription de l’étude au sein du Programme de Recherche Technologique sur la formation des enseignants Technologique sur la formation des enseignants

Le contexte de recueil des données

1. L’inscription de l’étude au sein du Programme de Recherche Technologique sur la formation des enseignants Technologique sur la formation des enseignants

La présente étude s’inscrit dans le champ disciplinaire des sciences de l’éducation et de la formation. Néanmoins elle se distingue de bon nombre de démarches en sciences de l’éducation qui, selon Yvon & Durand, « posent au fond la question des rapports entre savoirs scientifiques et pratiques sociales dans des termes qui peuvent être qualifiés d’œcuméniques, c’est-à-dire notamment : travail scientifique exclusivement assumé par les chercheurs, définition extérieure au champ de pratique des problèmes de recherche, position en surplomb voire normative des chercheurs, validation des recherches à partir de critères exclusivement scientifiques, indifférence activement construite des chercheurs à l’impact pratique de leurs recherches ou exploitations des résultats en termes de recommandations ou préconisations a posteriori, visée rectificatrice des pratiques sociales et professionnelles régulièrement évaluées comme inefficaces, déraisonnables, voire irrationnelles » (2012, p.10). Ces démarches appartiennent en effet à une épistémologie œcuménique (consensuelle) qui prône souvent l’utilité sociale des recherches mises en œuvre ainsi que l’amélioration des pratiques des professionnels – et de façon ultime, en ce qui concerne la communauté des enseignants, l’amélioration des résultats d’élèves. Cette épistémologie sépare le travail des chercheurs de celui des professionnels (les uns produisant les savoirs scientifiques devant être injectés aux pratiques sociales des autres dans le but de les améliorer). Ce paradigme œcuménique se heurte enfin à une difficulté majeure. Malgré plus de cinquante ans de tentatives de traitements curatifs, les problèmes restent les mêmes : réussite variable des élèves, désintérêt des professionnels à l’égard des travaux scientifiques, engloutissement des budgets publics.

En prenant les distances de cette dérive œcuménique des recherches menées en sciences de l’éducation, la présente recherche n’a pas pour objectif terminal de dénigrer sans discrimination toutes les approches traditionnelles dans cette discipline. Elle s’inscrit plutôt dans un paradigme alternatif à ce paradigme œcuménique : celui de « l’entrée activité » (Barbier & Durand, 2003).

L’inscription de cette étude au sein d’une approche par l’analyse de l’activité humaine correspond à la volonté de proposer un renouvellement épistémologique dans la façon de penser le rapport entre science et pratique. Le Programme de Recherche Technologique sur la formation des enseignants (Bertone & Chaliès, 2015) auquel appartient cette recherche incarne cette volonté. Ce PRT s’appuie sur l’idée d’une « relation organique » (Durand, 2008) ou celle

d’une « codétermination » (Bertone & Chaliès, 2015) entre un programme scientifique (Lakatos, 1994) et un programme technologique (Durand, 2008). En ce qui concerne le programme scientifique, les postulats théoriques mobilisés dans le cadre de cette étude ont fait l’objet de la Partie 2 « Cadre théorique » et ont abouti à la formulation de l’hypothèse auxiliaire suivante : la transmission explicite de connaissances ordinaires entre enseignants expérimentés dans le cadre d'un dispositif de formation continue est susceptible de favoriser l'apprentissage de nouveaux systèmes de règles et le développement professionnel à partir du suivi interprété de celles-ci. Cette hypothèse auxiliaire constitue une ceinture protectrice du noyau dur de postulats théoriques (Lakatos, 1994) et c’est elle qui entre en collision avec les données empiriques9. Elle est donc au cœur du programme technologique et « (a) génère la possibilité de produire des observations et donc de construire des données et (b) est évaluée au cours des observations en question en termes de « fécondité » » (Bertone & Chaliès, 2015, p. 65).

L’hypothèse auxiliaire est pour ainsi dire « incarnée » au sein du dispositif de formation co-construit par les acteurs et le chercheur. Ce dispositif de formation correspond à un artéfact conçu afin de favoriser l’apprentissage et le développement des formés. Il est issu d’une activité de conception visant à répondre à une problématique professionnelle. Au cœur du programme technologique, la fécondité de l’hypothèse auxiliaire se mesure à l’aune de sa capacité à (a) répondre aux problèmes concrets des professionnels ou (b) prédire et/ou comprendre des faits qui n’étaient pas intelligibles et/ou prédictibles auparavant. Ainsi donc, programme scientifique et programme technologique se déterminent mutuellement. En ce sens, il est possible de suivre Durand lorsqu’il avance que « ce programme technologique ne dérive pas de recherches qui seraient situées en amont : il correspond au développement de problématiques propres et récuse une conceptualisation de l’action en termes d’application de connaissances (d’origine scientifique ou non). Cette relation organique signifie aussi que le programme technologique, outre la résolution de problèmes pratiques, a une fonction de validation et d’invalidation des énoncés issus des programmes scientifiques, de contribution à la génération d’hypothèses, et contribue de façon plus large à leur fécondation. Pour résumer nous dirons que cette articulation spécifie un rapport de co-définition ou de détermination réciproque entre

9 Au sein de l’épistémologie lakatossienne, la réfutation d’une hypothèse auxiliaire n’aboutit pas à la réfutation des postulats théoriques du noyau dur. Cette « heuristique négative » (Chalmers, 1987, p. 136) permet d’insister sur une différence majeure entre l’épistémologie poppérienne (courante dans le paradigme œcuménique) et le programme scientifique : l’épistémologie lakatossienne s’appuie non pas sur une seule mais sur une structure de théories. La falsification d’une hypothèse auxiliaire n’implique donc pas le rejet du programme scientifique. Cette exigence d’heuristique négative permet le développement du programme scientifique dans la mesure où il stabilise dans le temps une somme de postulats théoriques sur lesquels peuvent travailler une communauté de chercheurs.

Le noyau dur évolue néanmoins (heuristique positive) lorsque le programme devient dégénérescent, autrement dit

programmes scientifique et technologique, qui sont en lien de cohérence logique et fonctionnelle, et se fécondent mutuellement tout en étant dotés d’une autonomie relative » (2008, p. 98).

Cette étude propose l’incarnation de l’hypothèse auxiliaire formulée au sein de deux dispositifs de formation. Le premier Dispositif de Formation (DF1) correspond à une transformation de la formation informelle de deux enseignantes expérimentées exerçant au sein d’une même école maternelle. Le second dispositif incarne la même hypothèse auxiliaire, mais correspond à la transformation d’une formation traditionnelle conduite avec des enseignants expérimentés lors des demi-journées de formation en REP+. Dans les deux cas, le dispositif de formation a fait l’objet de concertation et de négociation entre professionnels et chercheurs de sorte à aboutir à un objet interfaciel (Saury, 2012). En conséquence bien que les deux dispositifs incarnent la même hypothèse auxiliaire, ils n’ont pas eu la même « forme ».

La section suivante présente le dispositif de formation DF1.

2. Présentation du premier dispositif de formation support à

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