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Quatrième partie :

IV.2 Loi de comportement de la peau : hypothèses

IV.2.3 Hypothèse de linéarité et tests mécaniques

La dernière hypothèse démarque radicalement ce travail de la grande majorité des autres travaux réalisés dans le domaine de la biomécanique et de la détermination de la loi de comportement des tissus. Les résultats de ces travaux montrent que ces tissus ont un comportement non linéaire, ce qui n’est absolument pas remis en cause ici. La relation entre contrainte et déformation est non linéaire au delà d’un certain niveau de déformation, qui est de l’ordre de 10 % [28], [96]. Or dans le cadre de la modélisation du contact entre une tête et un équipement de protection des voies respiratoires, la peau est principalement soumise à une compression transversale et non à des incisions puis à des efforts dans son plan, ou à de grandes déformations. L’amplitude de la compression transversale est non seulement faible mais elle doit être minimale pour que le temps de port sans sensation de douleur soit le plus long possible, maximisant ainsi les capacités opérationnelles des opérateurs ou des combattants pour un usage militaire. L’écrasement des tissus et les contraintes devant être minimaux tout en assurant l’étanchéité du dispositif, il paraît légitime de supposer que la peau a un comportement parfaitement élastique et linéaire sous la charge appliquée : ceci constitue la cinquième hypothèse réalisée pour le comportement mécanique de la peau. Cette hypothèse repose sur les observations suivantes. La Figure IV.2 est une reconstruction d’image à partir d’un fichier natif obtenu par IRM. Réalisé spécialement pour cette acquisition, le réglage des brins de l’araignée est volontairement choisi pour serrer très fortement le masque sur la tête et entraîner un port douloureux. On voit nettement la trace de la bande de contact du masque qui marque véritablement la peau du visage, la peau des joues située de part et d’autre de la bande de contact subit un gonflement important du fait de la compression des tissus écrasés par le masque. Lors d’un réglage normal des brins, les déformations sont bien plus petites et la trace de la bande de contact ne se voit pratiquement pas, ce qui va bien dans le sens d’un comportement linéaire des tissus. Cette hypothèse fera l’objet d’une validation a posteriori.

L’ensemble des hypothèses afférentes au comportement mécanique de la peau conduit à une simplification considérable des données nécessaires à la mise en place du modèle

Trace de la bande de contact

Peau des joues

comportement de la structure complexe que constitue la peau. Deux coefficients constants sont suffisants soit respectivement, le module d’élasticité qui est la pente à l’origine de la courbe "déformation-contrainte" et le coefficient de Poisson dont la valeur est supposée connue et égale à 0,45. Les informations à intégrer dans le code de simulation numérique sont alors les zones sur lesquelles l’épaisseur et la loi de comportement peuvent être supposées constantes, ainsi que la valeur de ces grandeurs par zone, ce qui limite considérablement le flot de données et leur gestion. Une étude de sensibilité par simulation numérique peut ensuite être menée pour déterminer l’influence de ces données biomécaniques sur l’interaction entre un masque et le visage sur lequel il est plaqué.

Figure IV.2 : Reconstruction par IRM d’un visage soumis à l’action d’un masque trop serré

Pour mesurer les propriétés mécaniques de la peau, ce qui se limite dans notre cas à la détermination de son module d’Young, il n’existe pas de tests normalisés comme pour caractériser des matériaux classiques (cf. paragraphe I.4.2). Les tests in vitro posent de nombreux problèmes liés à la pertinence des éprouvettes, à la localisation du prélèvement, aux conditions expérimentales qui ne reproduisent pas exactement les conditions in vivo surtout en termes de précontrainte et d’environnement biologique. Pour s’affranchir de ces difficultés, des techniques de mesure de propriétés mécaniques par ultrasons ont été développées [94]. De nombreux travaux sont en cours, en particulier au Laboratoire de Mécanique Appliquée Raymond Chaleat de Besançon, pour déterminer les paramètres du modèle numérique de la peau et les relier à ses propriétés biologiques [50], [51], [52].

Pour mesurer in vivo les propriétés mécaniques par des essais mécaniques, il existe trois types principaux de tests réalisés. Le premier test (dit "de succion ou d’extensibilité verticale") [34], [38] consiste à soulever la peau en créant une dépression et à mesurer son déplacement dans la direction orthogonale à sa surface. La peau peut également être pincée entre deux mors puis une traction dans la direction orthogonale à la peau est exercée (Figure IV.3). Le simple fait de pincer la peau introduit des déformations beaucoup plus importantes que celles induites par le port de l’équipement de protection. Cela nous amène à nous poser plusieurs questions dont celle de la modification des propriétés de la zone pincée qui, avant la mesure, a déjà subi de grandes déformations.

rectangles rigides et à les éloigner l’un de l’autre dans le plan. Le troisième test (dit "de torsion") consiste à coller un disque circulaire sur la peau et à exercer un couple de torsion dans la direction orthogonale au disque. Le problème commun à tous ces types d’essais non normalisés est la détermination des limites de l’échantillon. L’influence de l’environnement est importante sur les résultats et la détermination des propriétés de la peau. Pour accéder au module d’élasticité transversal des tissus, compte tenu du mode de sollicitation appliquée lors du placement du masque, le test d’indentation est considéré comme le plus adapté et le plus performant en termes de mise en œuvre [15], [34], [88], [89], [90].

Figure IV.3 : Test de traction in vivo par pincement