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DEUXIEME PARTIE - ETUDES DE CAS

III- Pointe à Callière, musée d’Histoire et d’Archéologie de Montréal Montréal

1- L’histoire du site

Jusqu'à l'inauguration du musée, seuls les géographes connaissaient l'existence de la Pointe à Callière, ainsi nommée parce que le chevalier Louis Hector de Callière, troisième gouverneur de Montréal, y fit ériger sa résidence en 1688. Aujourd'hui, cette pointe est intégrée à la rive de l'île de Montréal. Le site et son musée sont situés dans le quartier du « Vieux Montréal », cœur historique de la métropole du même nom. Avec 1,8 millions d’habitants et près de 4 millions d’âmes153 dans son agglomération, Montréal est la deuxième ville francophone du monde après Paris et la deuxième aire urbaine du Canada par sa taille et son importance après Toronto. Montréal est donc une ville de dimension internationale susceptible de générer et de capter des flux tant au niveau culturel que touristique.

En fouillant le sous-sol de la Pointe à Callière, les archéologues ont mis au jour un site historique possédant une valeur mémorielle importante dans l’esprit des Montréalais. Grâce à leurs recherches, ils ont pu identifier les grandes périodes d'occupation du lieu situé entre la petite rivière Saint-Pierre et le fleuve Saint-Laurent, soit le cœur du lieu de fondation de Montréal. Le site présente donc différentes strates se référant chacune à une période donnée.

153 Sources issues du recensement de la population organisé par le gouvernement du Québec en 2001. http://www.stat.gouv.qc.ca/regions/recens2001_06/06_index.htm

L’époque amérindienne : vers le XIVème siècle, le site a été occupé par des Amérindiens aux abords de la petite rivière Saint-Pierre. Lieu de débarquement et d'accostage, on y pratiquait principalement la pêche. Des restes d’embarcations destinées à la pratique de la pêche ainsi que des hameçons datant de l’époque amérindienne ont été découverts sur le site. A l’époque, la population iroquoise se concentre sur le village d’Hochelaga situé dans la cuvette de l’actuel parc du Mont-Royal à proximité du lac des castors. D’ailleurs, le mot Hochelaga, d’origine iroquoise, signifie « lac des castors ». Ce village est déjà présent sur l'île quand Jacques Cartier arrive le 2 octobre 1535. Dans le récit de son voyage de 1535-36, il écrit : « [nous] trouvasmes sur le chemin l'un des principaulx seigneurs de ladite ville de Hochelaga, acompaigné de plusieurs personnes. [...] Apres que nous fumes sortiz de ladite ville fumes conduictz par plusieurs hommes et femmes sus la montaigne davant dicte qui est par nous nommée Mont Royal distant dudit lieu d'un cart de lieue. »154 Il est bien accueilli par les Iroquois et il nomme la montagne qu'il voit au centre de l'île, Mont Royal.

La période française : cette période débute avec l'arrivée des fondateurs de Montréal en 1642, à savoir Paul Chomedey de Maisonneuve155 et Jeanne Mance156 et la construction du fort Ville-Marie. Dans le sous-sol de l’édifice principal du musée, on découvre les traces du premier cimetière catholique, dont l'aménagement, en 1643, est lié à celui du fort Ville-Marie. Son emplacement exact vient d’être précisé en 2006 grâce à une campagne de fouilles qui a permis de mettre à jour des pans de mur identifiés comme étant ceux du fort Ville-Marie. Les vestiges de ce dernier, contrairement à ceux du cimetière, ne sont pas intégrés au musée et à la visite puisqu’ils ont été mis au jour très récemment. Pour ce qui est du cimetière, sa période

154 Voyage de découverte au Canada entre les années 1534 et 1542 par Jacques Cartier [sic], le sieur de Roverbal, […]. Sous la direction de la société littéraire et historique de Québec, Québec, William Cowan et fils, 1843 et Jacques Cartier, 1863, Voyage de Jacques Cartier au Canada, Imprimerie Louis Perrin, Lyon

155 Paul de Chomedey est né à en 1612 à Neuville sur Vanne, petit village aubois. Fils aîné du seigneur du lieu, il devient sieur de Maisonneuve dès 1614. Il est choisi pour aller fonder une colonie sur l'île du Mont-Royal, dans le but d’évangéliser les Amérindiens. Le 18 mai 1642, Maisonneuve fonde Montréal avec une cinquantaine de premiers " Montréalais " dont Jeanne Mance. Il sera le premier gouverneur de l'actuelle métropole canadienne. La biographie complète de Maisonneuve est disponible sur le dictionnaire biographique du Canada en ligne à l’adresse suivante http://www.biographi.ca/fr/ShowBio.asp?BioId=34251

156 Jeanne Mance est née le 12 novembre 1606 à Langres (Haute-Marne, en France) et est décédée le 18 juin 1673 à Montréal. Elle a participé à la fondation et à la survie de Montréal et a fondé puis dirigé l’Hôtel-Dieu de Montréal. Elle découvre en effet sa vocation missionnaire et veut rejoindre la Nouvelle-France dont l'expansion est en alors pleine actualité. Avec le soutien d'Anne d'Autriche et des jésuites, elle accepte la donation de Mme de Bouillon et de la Société Notre-Dame de Montréal qui veulent aider à la fondation d'un poste à Mont-Réal, et plus précisément celle d'un hôpital, un Hôtel Dieu, sur le modèle de celui de Québec. Pour ce qui est de la vie de Jeanne Mance et de sa participation à la fondation de Montréal, nous consulterons les sources suivantes :

- Daigle, Sylvie, 2000, « Jeanne », Les femmes fondatrices de Montréal, Presses de l’UQAM, Montréal - - Dictionnaire biographique du Canada en ligne http://www.biographi.ca/fr/ShowBio.asp?BioId=34514

d'utilisation s'étend probablement jusqu'en 1654. Ni Maisonneuve, ni Jeanne Mance y sont enterrés, mais des Français et des Amérindiens du tout début de la colonie française y gisent.

La période d’occupation britannique : le sous-sol révèle aussi des vestiges du Régime

anglais qui débute à partir de la conquête britannique de 1760. Des bâtiments construits par le tonnelier André Papineau en 1796, ainsi qu’un entrepôt édifié par Pierre Berthelet157, en 1816 sont toujours visibles et témoignent de l’importance économique de Montréal en tant que carrefour d’échange en Amérique du Nord. Les fondations de l'imposant édifice de la Royal Insurance Company158, dont la construction date de 1861, sont également encore visibles. Ce bâtiment de style victorien a été démoli en 1951. Une aire de stationnement automobile, puis un parking aérien ont ensuite été aménagés sur ce terrain vacant avant de laisser la place au principal bâtiment de l’actuel complexe muséographique de Pointe à Callière : l’Eperon.

Autres vestiges visibles : entre 1832 et 1838, la petite rivière Saint-Pierre est canalisée en sous-sol dans un égout imposant. Cette construction, en pierre de taille, constitue le plus ancien collecteur d'eaux usées de Montréal. Il est demeuré en usage jusqu'en 1989. Il s'agissait pour l'époque d'un important ouvrage de génie civil. Le musée projette de le rendre accessible au public depuis la section mise en valeur dans le musée jusqu'à la rue McGill, quelques 800 mètres plus loin.

Dans la crypte archéologique se trouvant dans le sous-sol situé entre l’Eperon et le bâtiment de l’ancienne douane, se dressent des vestiges de divers ouvrages témoignant de l’évolution de la ville. La superposition de ces vestiges en un seul lieu fait en quelque sorte office de condensé de l’histoire de la ville. On peut ainsi y voir :

- les traces des pieux de la palissade (1684) et celles du premier corps de garde (1698), - les pierres des fortifications de la ville (XVIIIème siècle) et du bâtiment d’Étienne Rochbert,

- une rue pavée de la fin du XVIIIèmesiècle, - les murs de la maison Baby-Bagg (1767) et ceux de l’auberge Würtele (1802), - la base d’une fontaine et tout autour, les fondations du muret qui clôturait le square de la

157 André Papineau et Pierre Berthelet font partie de riches familles de marchands montrélais de la fin du 18ème siècle. On consultera à ce titre le site « Vieux Montréal » http://www.vieux.montreal.qc.ca/ qui, à partir d’une riche documentation historique, se propose de donner les clefs de compréhension historique sur l’évolution du Vieux-Montréal.

158 La Royal Canadian Insurance Company est une compagnie d’assurance créée durant la seconde moitié du 19ème siècle et qui devint un véritable succès national.

Douane vers 1860, - un socle en ciment sur lequel, dans les années 1940, prenait place un monument à la

mémoire des premiers Montréalais.

Bien entendu, l’ensemble de ces vestiges peut apparaître comme peu spectaculaire comparé aux découvertes réalisées en Europe ou dans le bassin méditerranéen. Toutefois, la portée identitaire du lieu est hautement symbolique puisqu’il s’agit du lieu de fondation de Montréal.

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