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Décentralisation et concentration spatiale des activités

4 Udaipur, un territoire intermédiaire soumis aux dynamiques de l’Inde contemporaine

4.4 Udaipur aujourd’hui, espace aux franges d’un processus de métropolisation

4.4.1 Décentralisation et concentration spatiale des activités

Avant de présenter la dynamique des régions métropolitaines entre lesquelles se trouve Udaipur, il est important d’effectuer quelques précisions concernant l’organisation des territoires indiens, laquelle explique certaines tendances actuelles dans le pays.

Au Gouvernement Central de New Delhi s’ajoute ceux des États de l’Union, dont les compétences confèrent une certaine autonomie, si bien qu’ils ont le pouvoir d’induire des dynamiques propres, sous le regard et le contrôle du Centre.

La Constitution de l’Union indienne, mise en place entre 1947 et 1950, fournit les lignes directrices de la structure des gouvernements locaux, mais confie déjà aux Etats de travailler sur les modalités de l’exercice local du pouvoir. Elle fait la différence entre les gouvernements locaux et urbains. Alors que le Panchayat est l’organe du pouvoir local en milieu rural, les Municipalités207 gèrent les espaces urbains. Ces gouvernements locaux

205 Face aux nombreux problèmes liés à une urbanisation souvent non contrôlée et à un manque certains d’action en

matière de gestion urbaine, le Gouvernement du Rajasthan a identifié ce domaine comme prioritaire dans le Budget 2003- 2004. Pour plus de détails, se référer aux données disponibles sur le site de la Confederation of Indian Industry, et consulter les sources suivantes : Confederation of Indian Industry Northern Region, (2003). Rajasthan State Budget 2003-04. Pre-budget Memorandum,

http://www.ciinr.org.

Les nombreuses difficultés des espaces urbains nécessitent d’y consacrer une étude spécifique. Ce travail en abordera quelques aspects, mis en évidence par l’étude du tourisme à Udaipur. Certains auteurs se sont intéressés de manière plus centrale à cette question : voir notamment les travaux d’Isabelle Milbert, dont les références figurent en bibliographie.

206 Ces données, le plus souvent produites en 2001, ne tiennent pas compte d’évolutions très récentes dans la situation de

certains districts, notamment induites par les nombreuses aides reçues par les plus en difficulté.

207 Les Municipalités sont classées en trois groupes : les Municipal Corporations, qui correspondent à des aires urbaines

étendues. Ensuite, les Municipal Councils, et les Nagar Panchayat, pour les aires suburbaines ou les espaces en transition entre urbain et rural. Udaipur est une Municipal Corporation.

sont ensuite classés en plusieurs groupes selon le niveau de panchayat (…), et le niveau d’urbanisation des municipalités.

- Le 11ème amendement de la Constitution liste les secteurs qui sont sous la

responsabilité des panchayat : agriculture, amélioration du territoire industries de petite taille (small scale industry), habitat rural (rural housing), eau potable, réduction de la pauvreté, éducation, marchés et festivals, développement des femmes et des enfants, et maintenance des intérêts de la communauté.

- Le 12ème amendement spécifie les compétences des Municipalités. Ils les secteurs qui

sont sous leur responsabilité: la petite industrie (small scale industry), marchés et festivals, développement, autant de charges qui incombent au panchayat, tout en ayant la responsabilité et l’autorité de planifier de mettre en place des programmes de développement économique et de justice sociale.

- Le 13ème amendement de la Constitution de 1992 décrète la décentralisation du

Centre vers les Gouvernements des Etats. Lui succède l’attribution de nouvelles compétences aux territoires locaux par les Etats.

Ces différentes mesures font apparaître un manque de clarté dans la répartition des compétences, qui se traduit par des rôles flous et des actions souvent peu coordonnées au sein même de la sphère publique.

Les réformes économiques engagées depuis 1992 se sont accompagnées d’une décentralisation qui a redéfini le rôle de l’État Central et celui des États de l’Union. Le pouvoir fédéral, qui soutenait jusqu’alors le développement industriel, contrôlait la localisation des activités, et avait - depuis l’Indépendance - pour objectif premier un développement équilibré du territoire, ne peut plus dans le contexte actuel d’ouverture faire face lui-seul aux actions nécessaires en matière d’aménagement et de rééquilibrage territoriaux.

Le pouvoir de New Delhi se désengage ainsi de plus en plus, depuis la fin des années 1980, de son activité planificatrice pour adopter une nouvelle posture. Il apparaît ainsi aujourd'hui comme un décideur - sans être maître d'œuvre - dans un jeu complexe d’acteurs. En ce qui concerne les infrastructures, n'ayant plus aujourd'hui les moyens d’assurer la totalité des dépenses d’entretien et de construction de nouveaux réseaux, il fait appel à de nombreux organismes, se réservant un rôle d'incitateur et de régulateur. Une étude récemment effectuée par l’Economic Times (Misra P., Economic Times 13 fevrier 2002) indique que ces organismes, qu’ils soient publics ou privés, ont attribué de plus grandes allocations pour des campagnes de publicité et de communication en vue d’être eux-mêmes et/ou les territoires qu’ils concernent, visibles et compétitifs dans l’économie nationale mondialisée. L’industrie de la publicité par exemple, a été l’une de celle ayant connu les plus fortes hausses.

Dans ce contexte nouveau, l’implantation d’entreprises, largement conditionnée par la présence d’infrastructures et d’équipements nécessaires à leur fonctionnement, a tendance à se concentrer dans les lieux les plus dynamiques, si bien que l’on assiste à un renforcement des régions les plus attractives du pays. Celles-ci s’étendent essentiellement autour des principales métropoles - Mumbai, Kolkata, Delhi et Chennai - et dans une moindre mesure autour d’autres grandes villes comme Ahmedabad, qui réaffirment aujourd’hui leur rôle historique de piliers du développement économique indien.

Ces régions concentrent, en leur sein ou dans leurs périphéries de plus en plus étendues208, la quasi-totalité des investissements privés, principaux déterminants de la croissance. Ce phénomène de « polarisation géographique croissante des activités économiques. » (Ferrier, J-P., 1999 : 36) recouvre de multiples processus qui sont de l’ordre de l’économique, du social et de l’urbain. Les effets d’entraînement du dynamisme économique de ces métropoles sur le territoire d’Udaipur sont difficiles à calculer, faute de données disponibles.

Certains travaux ont néanmoins mis en évidence un mouvement de migration de travail masculine (souvent des castes marchandes) de plusieurs petites villes du Rajasthan en direction des métropoles d’Ahmedabad et de Mumbai (Cadène Ph., 1993). En dépit de leur installation dans ces grandes villes, les liens qu’entretiennent ces migrants avec leur lieu d’origine restent très forts: En plus de faire transiter de l’argent vers les banques des lieux d’origine en vue de capitaliser, ils investissent de l’argent dans des activités locales, soit directement, soit par l’intermédiaire de prêts ou d’avances à des membres de leurs familles. Ce phénomène, qui prend la forme d’un modèle migratoire complexe mis en évidence par Philippe Cadène pour le cas d’une petite ville du Rajasthan située à 56 kilomètres au nord d’Udaipur, n’est pas nouveau. Il semble tout particulièrement observé à partir de l’Indépendance et se traduit notamment « par un fort sentiment de proximité des (castes marchandes) Jaïn de Rajsamand avec ces villes distantes de plusieurs centaines de kilomètres, situées dans des aires culturelles et linguistiques différentes » (Cadène Ph., 1993 : 445). Il concerne une part importante des jeunes hommes de caste marchande. Si ces phénomènes ne peuvent en aucun cas être les témoins de l’existence d’une réelle influence économique de Mumbai sur les villes du Sud-Rajasthan et particulièrement sur Udaipur, il semble néanmoins que certains marchands, hommes d’affaires et industriels locaux tout particulièrement dynamiques209, entretiennent des liens privilégiés avec des banquiers de Mumbai.

Les cartes du document 23, qui présentent les sièges d’entreprises contrôlées par les métropoles Delih et Mumbai en 1991, font apparaître cette tendance, dont il reste à analyser les évolutions à venir.

208 La région métropolitaine de Mumbai est considérée comme s’étendant sur plus de 50 kilomètres le long de la côte est

du pays.

209 C’est notamment le cas de deux bijoutiers Jaïn et de trois autres entrepreneurs appartenant à la communauté Bohra,

N É PAL B I R M A N I E PAKIS TAN AFG H ANIST AN C H IN E G o l f e d u B e n g a l e O C É A N I N D I E N BHO UTAN SRI LAN KA 0 200 km

Nombre de lieux de production

37 12 1

Mumbai

% des lieux de production de la ville contrôlés par un siège social situé à Mumbai sur la totalité des lieux de production situés dans la ville. 100 99 75 50 25 5 0 © P. C A D E N E - Insti tut fr an çai s de P on diche rry , 19 9 9 . N É PAL B I R M A N I E PAKIS TAN AFG H ANIST AN C H IN E G o l f e d u B e n g a l e O C É A N I N D I E N BHO UTAN SRI LAN KA Source : C.M.I.E. 1992 0 200 km 0 200 km

Nombre de lieux de production

37 12 1

Delhi

% des lieux de production de la ville contrôlés par un siège social situé à Delhi sur la totalité des lieux de production situés dans la ville. 100 99 75 50 25 5 0 © P. C A D E N E - Insti tut fr an çai s de P on diche rry , 19 9 9 . MUMBAI

DELHI Source : C.M.I.E. 1992

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