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6. Méthodologie du recueil de données

6.3. Méthodologie d’évaluation du niveau réel

6.3.2. Méthodologie du corpus d’anglais oral

6.3.2.2. Critères étudiés

Pour la seconde expérimentation, les données sont tirées d’une production orale en continu et en interaction (entretien avec l’enseignant), comme expliqué précédemment. En se basant sur les recherches évoquées précédemment (dans la première partie de la thèse, sous-partie 2.2), j’ai défini plusieurs indicateurs que j’ai étudiés dans l’expression orale :

 La fluidité ;

 L’utilisation de stratégies de communication ;

 La correction.

76 Notons que tous les étudiants m’ont autorisée à conserver leur prénom (et parfois leur nom de famille) lorsqu’ils le prononçaient dans les enregistrements audio ; ceux-ci ne sont donc pas couverts d’un bip dans le CD de données joint.

6.3.2.2.1. Fluidité

Pour la fluidité, j’ai pris en compte plusieurs critères d’ordre temporel, à partir des lectures citées précédemment77. Le premier est le nombre de mots prononcés (incluant les interjections « euh », « er », « hum », « em », « pff ») au total. Puis j’ai considéré le nombre de mots prononcés (incluant les interjections) sans relance de l’interlocuteur, c'est-à-dire le premier tour de parole de l’apprenant avant qu’il ne s’arrête de lui-même. Cette partie de la production orale est donc faite en continu, afin d’évaluer si ce nombre de mots est révélateur d’une certaine autonomie de parole, alors que l’ensemble des mots prononcés concerne une interaction avec l’interlocuteur.

J’ai ensuite compté le nombre de pauses, comme suggéré par Fillmore (1979), Riggenbach (1991) et Hilton (2009). J’ai d’abord comptabilisé le nombre de pauses courtes (pauses dont la longueur n’excède pas 1 seconde, surlignées en vert dans les scripts), en y incluant les allongements de syllabes (« drawls », comme par exemple « so:… ») qui sont suivis du symbole « : ». J’ai ensuite pris en compte le nombre de pauses longues (pauses dont la longueur excède 1 seconde, en incluant les interjections, donc les « filled pauses », surlignées en jaune dans les scripts) d’après les modèles de Lennon (1990), Pawley et Hodgetts Syder (2000) et Hilton (2009). Cette durée n’a pas été déterminée préalablement à l’analyse, mais consécutivement, après avoir observé que les micropauses font aussi partie du discours natif et ne peuvent donc être considérées comme marqueurs de dysfluence d’une part, et que les pauses inférieures à une seconde sont la majorité du temps situées à la limite d’une proposition et passent inaperçues à l’oreille. C’est ce que souligne Freed (in Riggenbach, 2000) pour les pauses silencieuses :

Since silent pauses of shorter duration [of .4 seconds], frequently termed micropauses and measured in milliseconds, are characteristic of native speech and accurately measured only by computerized acoustic analysis, we chose to identify and measure only those unfilled pauses that were heard as dysfluent and that usually did not occur at a clause boundary. (Freed, 2000 : 248)

La prise en compte de micropauses aurait par ailleurs nécessité l’utilisation d’un logiciel perfectionné et technique. C’est aussi la raison pour laquelle j’ai décidé de ne pas considérer la position des pauses et hésitations. Puis j’ai calculé la fréquence des pauses (courtes et longues), ou en d’autres termes, le pourcentage de pauses courtes et longues rapporté au nombre total de mots. Je n’ai pas identifié la nature exacte des pauses, bien que ce

champ de recherche se développe et apporte des éléments intéressants aux études de corpus oraux, car il est difficile de déterminer avec précision leur(s) fonction(s), comme le souligne Hilton (2009) :

In our coding of hesitations, we have not attempted to distinguish between planning pauses, articulatory pauses, breathing pauses, pauses serving rhetorical functions, and true interruptions to the speech flow, despite the fact that such distinctions are frequently recommended (e.g., Deese, 1980). In fact, any single hesitation may fill more than one function (Rochester, 1973), and it is extremely difficult (if not impossible) to decide on a single function for every pause in the corpus simply by listening to the sound file. In fact, interpreting a speaker’s reasons for pausing requires sophisticated analysis […]. (Hilton, 2009 : 648)

Enfin, en lien avec la présence de pauses dans le discours, j’ai compté le nombre de mots par unité sémantique entre deux pauses (ou « mean length of run ») d’après les suggestions de Lennon (1990) et sur le modèle des analyses du corpus PAROLE de Hilton (2009), comme le montre l’exemple ci-dessous. Le prénom et le nom anonymisé compte chacun pour un mot, ainsi que les interjections (« er », « um ») et les mots tronqués, mais les faux départs ne sont pas comptabilisés car ils ne sont pas réellement des mots.

Exemples :

 Nom et prénom :

my name is <first name of interviewee> : 4 mots

my name is < first name and last name of interviewee > : 5 mots

Interjections :

I like er… a lot of things like… skateboarding er… : 3, 5 puis 2 mots I love er… Japanese cultures : 3 puis 2 mots

 Mots tronqués

I wor= worked : 3 mots

not a not a m= not a m= maîtrise : 7 mots

 Exemple complet

yes er… my name is <first name of interviewee>... I’m 18 year olds... I’m from Vietnam and I live in er… Little Black in Jura…

(Première unité – yes er : 2 mots

Deuxième unité – my name is <first name of interviewee> : 4 mots Troisième unité – I’m 18 year olds : 5 mots

Quatrième unité – I’m from Vietnam and I live in er : 9 mots Cinquième unité – Little Black in Jura :4 mots

Soit une série 2-4-5-9-4 pour cet exemple)

J’exclus par ailleurs de ces critères en lien avec la fluidité la vitesse (critère c. de Skehan, 2009) car le nombre de mots ou de syllabes prononcés à la minute varie grandement d’un locuteur à l’autre, et ce quelle que soit la langue de production. Par exemple, l’étudiant ET018 a une élocution très lente par rapport aux autres apprenants, mais cela n’est pas seulement un fait pour l’anglais qui est sa langue seconde, car dans sa langue maternelle (le français), il s’exprime aussi de manière très lente dans un souci de précision, comme il le remarque lui-même :

Je suis quelqu'un qui cherche beaucoup mes mots en français car je veux utiliser le mot adéquat pour la situation.

6.3.2.2.2. Stratégies de communication

Concernant les stratégies de communication, j’ai basé leur analyse majoritairement sur les travaux de Gaonac’h (1991)78, et j’ai déterminé trois stratégies mentionnées ci-dessous, que j’ai ensuite comptabilisées pour chaque apprenant.

La sollicitation (de l’interlocuteur).

Exemple : Enquêté : I er… I write /v/ er… novel er…

Enquêteur you write novels

Enquêté : yes novels is not er… novel nouvelle non OK OK

 L’auto-correction.

Exemples : I broke my er… uncle my ank= my ankle (phonologie) I was playing music, f I w= played music (grammaire)

 La reprise (d’une correction apportée par l’interlocuteur).

Exemple 1 : Enquêté : not a not a m= not a m= maîtrise

Enquêteur : ah a Master’s degree or a Bachelor’s degree

Enquêté : a Bachelor’s degree in er… in innovation

Exemple 2 : Enquêté : my portable computer… Enquêteur : your laptop

Enquêté : laptop

Notons que le recours au français, que j’ai considéré comme une erreur la plupart du temps (si l’apprenant l’utilise dans sa prise de parole comme s’il s’agissait d’un mot anglais – ex. « [Tiramisu with] café ») peut parfois être vu comme une stratégie de communication (souvent associée à la sollicitation – ex. « how do you say in English « cuisson » ? ») selon l’usage qui en est fait.

6.3.2.2.3. Correction

Enfin, pour la correction, trois critères sont pris en considération, d’après les lectures de Housen, Kuiken & Vedder (2009)79 :

 le nombre d’erreurs. J’inclus le recours au français ainsi que les erreurs syntaxiques, lexicales, morphologiques ou référentielles/discursives (sans distinction du type d’erreur)

Exemples : for my… er… [PAUSE LONGUE1’’5 icluant er] études

I fro= I from er… in er… Dameray er… in er… Saône-et-Loire I… like er… listen /lisent/ er… music /mysic/

 le nombre d’erreurs de prononciation Exemple : architecture /‘ɑːtʃɪˌtɛktʃur/

 le taux d’erreurs, ou en d’autres termes, le pourcentage d’erreurs rapportées au nombre total de mots.

Je n’ai pas distingué la nature des erreurs car je m’intéresse à la correction de la langue dans son ensemble et non à une typologie d’erreurs. Dans les scripts de la tâche d’expression orale des étudiants, les erreurs phonologiques sont surlignées en violet et les autres types d’erreurs en rouge. L’ensemble des erreurs a été comptabilisé pour chaque étudiant pour calculer un taux d’erreurs. Avec Gaonac’h (1991), je considérerai qu’un lien existe entre compétence linguistique (ou correction) et compétence de communication (elle-même liée à l’utilisation de stratégies de communication).